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1956 – Elections

Publié le par Régis Vétillard

Lancelot se dit déçu, le 5 février 1955, de cette continuelle instabilité ministérielle. Le gouvernement de Pierre Mendès France aura tenu deux cent trente jours. Il faut attendre le 23 février pour qu'Edgar Faure soit investit. Nous sentons à présent qu'une crise est latente ; elle se nourrit de la ''question algérienne'' et de l'instabilité politique.

Déjà lors de cette Toussaint sanglante de 1954, une série d'attentats sont perpétrés sur le territoire de la République, en Algérie, par des fellagas et dit-on par des éléments étrangers tunisiens ou égyptiens … Mauriac dira dans son ''Bloc-Notes'' « la guerre d'Algérie commence. ». Le peuple algérien en appelle à des réformes de structure.

Et pour la politique : « Nous avons vu de nos yeux les horreurs du fascisme et nous redoutons le carcan concentrationnaire; mais la démocratie telle que nous la pratiquons, à quoi bon se boucher les yeux? C'est la décomposition ininterrompue, c'est la mort lente » ( Mauriac, Bloc-Notes)

Pierre Mendès France a fait la paix en Indochine et en Tunisie en 1954, Edgar Faure a réussi à ramener le calme au Maroc en 1955. En 1956, réussirons-nous à ramener la paix républicaine française en Algérie ?

 

En décembre 1955, la crise politique qui couvait, produit la dissolution de l'Assemblée Nationale, deux jours après que le gouvernement Edgar Faure ait été renversé par un vote de l'assemblée .

Le conseil des ministres dissout l'assemblée nationale, contre l'avis du Président René Coty.

 

Lancelot assiste à de nombreuses fractures aussi bien dans le parti radical que dans le paysage politique français.

Quinze gouvernements vont se succéder de 1950 à 1958 ( dont six entre juin 1957 et juin 1958 !)

De plus, le ''régime des partis'' pousse le travail de l'administration à ses limites. Le manque de solidarité ministérielle, les fuites, sont exacerbés par l'emprise de la presse toujours à l’affût de nouvelles péripéties. Chacun se plaint du sens perdu de l'Etat, et de la difficile continuité du service.

Il reste également, en sourdine, le ressentiment d'une très légère épuration, à la fin de la guerre, parmi la haute administration ; de nombreux directeurs ont servi, jusqu'au bout, Vichy.

Par contre, depuis le statut de 1946, le fonctionnaire titulaire de son grade, ne dépend plus du pouvoir politique.

De nombreux jeunes administrateurs investissent les ministères et vont modifier les méthodes, et améliorer les conditions de travail. Les bureaux étaient surpeuplés, un seul appareil téléphonique pour trois ou quatre personnes, juché sur un bras mobile métallique qui tourne ; pas de ligne directe, cela oblige à passer d'un standard à un autre standard... Un pool dactylographique ne délivre une sténodactylo que pour une vingtaine de minutes, pour n'obtenir la note qu'une demi-journée plus tard...

Tintin souhaite une Bonne année 1956

 

La dissolution de l'Assemblée nationale a été très critiquée par les ''mendésistes'', qui représentent l'aile gauche du parti radical. Pour ces élections législatives du 2 janvier 56, ils vont s'allier avec la SFIO, des gaullistes (républicains sociaux) et l'UDSR ( Mitterrand) , et se regrouper pour former un Front Républicain, constitué à l’initiative de Pierre Mendès France. Ce ''Front'' s'oppose au centre droit d'Edgar Faure et d'Antoine Pinay, au PCF et au tout nouveau mouvement poujadiste.

 

Pierre Poujade, est libraire-papetier à Saint-Céré dans le Lot, il a créé en 53, un mouvement de défense des commerçants, qui rapidement après s'en être pris aux '' contrôles fiscaux'' reprend des thèmes comme l'antiparlementarisme, le nationalisme et l'Algérie aux français, et même l'antisémitisme, pour se présenter aux élections.

 

Edgar Faure est exclu du Parti radical le 1er décembre 1955 : « J’ai été en l’espace de 24 heures renversé, dissout et exclu ». Il se présente sous une nouvelle étiquette (RGR).

Jean-Jacques Servan-Schreiber, dans son éditorial de l'Express du 30 décembre 1955 ( créé en 1953, il a accueilli François Mauriac et son 'Bloc-Notes', puis en 1955-56, Albert Camus ) appelle au retour de Mendès.

Pierre Poujade, au centre

À Alger, les ultras de l'Algérie française se mobilisent violemment aux cris de « À bas Mendès ! »

 

Aux élections du 2 janvier 1956, les listes sous l'étiquette "Front républicain" obtiennent près de 28% des voix et 172 sur 594 sièges à l'Assemblée. La droite parlementaire regroupée obtient plus de 30% et 214 députés. Le Parti communiste, 26% et 150 élus. La surprise vient avec le mouvement de Poujade, et ses 13%, il conquiert 52 sièges. Parmi les députés poujadistes, Jean-Marie Le Pen, le plus jeune député de France.

On s'attend à ce que Mendès forme un nouveau gouvernement et prenne des initiatives sur la question algérienne. Le président René Coty, par excès de prudence et afin de continuer la construction européenne, choisit de confier la présidence du Conseil au dirigeant socialiste Guy Mollet.

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1950 - Henri-Irénée Marrou (1904-1977)

Publié le par Régis Vétillard

Lancelot passe beaucoup plus de temps dans les couloirs et les bureaux des ministères à Paris, qu'au Vatican. L'année 1956 est assez particulière, en ce que la fébrilité qui s'empare des politiques amène Lancelot à répondre à de multiples sollicitations.

Henri-I Marrou avec Danielou

La présence intellectuelle d'Henri Marrou va beaucoup l'aider. J'ai déjà fait état de la rencontre de Lancelot avec Henri-Irénée Marrou (1904-1977), à Lyon en 1942, proche de Mounier et de ''Témoignage Chrétien''. J'ai cité l'une d'entre nombreuses discussions sur l'histoire et le christianisme dans l'antiquité tardive... En 1955, Lancelot et Henri Marrou se croisent dans le cadre de la revue ''Esprit'', et Lancelot sollicite souvent son avis sur l'actualité.

 

Henri Marrou occupe la chaire d'histoire du christianisme à la Sorbonne depuis 1945. Emmanuel Mounier lui a proposé de le rejoindre aux ''Murs blancs'' dans la banlieue sud de Paris. Il s'agit de deux maisons bourgeoises divisées en appartements à Chatenay-Malabry, dans un grand parc, où vont se côtoyer les familles Mounier, Marrou, Baboulène ; les Domenach, les Fraisse et les Ricoeur ( le derniers en 1957). Chacun est indépendant, mais participe à une vie communautaire.

Simone Fraisse est agrégée de lettres et spécialiste des œuvres de Simone Weil ; Jean-­Marie Domenach, est un intellectuel et journaliste engagé, et sa femme, Nicole, professeure à l’école d’arts appliqués Estienne ; Jean Baboulène est à ''Esprit'' comme tous, et secrétaire général de la Jec, directeur de Témoignage chrétien jusqu’en 1949.

 

Lancelot apprécie beaucoup de passer aux 'Murs Blancs ', en particulier pour y rencontrer Henri Marrou, sa femme Jeanne, et parce qu'il est très intéressé par sa réflexion sur l'Histoire; elle est une constante question, il la nomme « l'histoire-questions » ; et l'Histoire est une rencontre, elle est dit-il « une rencontre d'autrui » et, même « un mixte indissoluble du sujet et de l'objet ».

Lumière du Graal - Cahiers du Sud -1950

 

Pour Marrou, le sujet du Graal est « l'un des plus beaux que présente le moyen âge occidental. ». Il le rapproche volontiers d'une réflexion sur l'histoire des religions, en commençant par l'exploration des vieilles croyances celtiques, jusqu'à l'eucharistie chrétienne. Nous sommes confronté également, dit-il, à la transmission de la légende : par quels moyens est-elle parvenue à la connaissance des auteurs médiévaux ? Comment a travaillé Chrétien de Troyes, sur quels documents ? Cette '' Matière de Bretagne'' est bien originale, dans sa '' Merveille '' qui n'est ni grecque, ni romaine, ni slave...

- Ne trouve t-elle pas ses origines « dans le sol même de la Bretagne, de la vieille Bretagne celtique. » ?

- Oui, sans-doute ; mais il faudrait faire le ménage de beaucoup d'hypothèses fantaisistes... et je pense à celle du catharisme.

Un livre récent de Jean Marx, sur ce thème, est assez éclairant. Bien sûr, il privilégie l'arrière-plan celtique pour expliquer l'ossature de la légende.

Si Lancelot ne nie pas l'origine celtique de la Légende, il estime fondamental de ne pas occulter la transcription catholique de la légende et sa perpétuation à partir d'un environnement médiéval. Car enfin, pour nous, le Graal prend corps à cette période de notre histoire !

S'amusant un peu ; de l'identification de Lancelot à la quête de son personnage emblématique ; Henri Marrou pointe dans la recherche historique une fonction libératrice, aussi bien pour la société que pour l'individu.

- Vous ne croyez-donc pas à la l'objectivité et l’exhaustivité des historiens ?

- Non... L'historien n’appréhende pas le passé directement, mais à travers lui-même et son propre présent.

- On ne peut pas parler de ''vérité historique'' ?

- Cette vérité se cherche et se construit, avec à mon sens, d'autant plus de justesse que nous connaissons ce qui fait la spécificité d'une époque et « ce principe de la différence des temps », pour éviter l'anachronisme.

Pour se faire comprendre du plus grand nombre, l'historien ne craint pas d'utiliser ce que Augustin Thierry nommait au XIXe s. « la puissance de l'analogie », avec ses limites... Attention à l'anachronisme !

Carte Lancelot - 1950

 

Lancelot ne manque pas d'évoquer son arrière grand-père Charles-Louis de Chateauneuf qui connaissait bien Augustin Thierry (1795-1856), et il notait combien cet historien s'était nourri des romans de Walter Scott. Dans son travail, il faisait la place aux légendes, à l'imaginaire...

Bien sûr, Thierry revenait aux sources, aux textes originaux et aussi aux poésies populaires ; il aimait retrouvait le vieux langage français. Il disait s'intéresser plus aux vaincus qu'aux vainqueurs, à la différence du XVIIIe s. pendant lequel l'historien était au service du ''Prince''. Il pensait qu'il revenait à l'historien de faire revivre par son style les individus et les peuples disparus : « II faut pénétrer jusqu'aux hommes, à travers la distance des siècles, il faut se les représenter vivants et agissants sur le pays où la poussière de leurs os ne se retrouverait pas même aujourd'hui... (…) Que l'imagination du lecteur s'y attache ; qu'elle repeuple la vieille Angleterre de ses envahisseurs et de ses vaincus du XIe siècle ; qu'elle se figure leurs situations, leurs intérêts, leur langage divers, la joie et l'insolence des uns, la misère et la terreur des autres, tout le mouvement qui accompagne la guerre à mort de deux grandes masses d'hommes. »

 

Henri-Marrou ( ancien ''tala'' de l'Ecole Normale) se définit comme catholique, spécialiste de Saint-Augustin, lecteur de Cassien ( IVe s.) et du frère carme Laurent de la Résurrection ( XVIIe s.) ; et passionné par l’œuvre de Teilhard de Chardin, qu'il avait rencontré étudiant, lors de réunions du groupe « tala » de la rue de Grenelle.

Marrou dit qu'il prie, depuis, avec une vision christocentrique du monde : « Aidez-moi Seigneur à me dégager par ascèse de la gangue inerte de mon cœur et que je puisse travailler avec vous, Christ, à réconcilier toutes choses avec le Père » (...). « sentir avec l’Église, mais aussi sentir avec le monde. »

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1955 - Les Manuscrits de Qumran

Publié le par Régis Vétillard

Edmund Wilson passe abruptement à son sujet d'intérêt, sans en avoir averti le cardinal Tisserant..

- Depuis 1947, époque où on découvrit un fabuleux trésor de manuscrits de l'époque du Christ, n'est-ce pas le silence du Vatican qui fait le plus de bruit...?

- Ah! J'avais oublié que vous étiez aussi journaliste au New Yorker! !

- Rien n'est caché. Le travail autour de ces confettis de parchemin nécessite de la minutie et du temps...

Qumran et les grottes sont sur le territoire jordanien, et les chercheurs juifs ne sont pas autorisés. C'est le père Roland de Vaux, dominicain, qui a constitué l'équipe et a toute autorité sur les recherches, et l'édition...

Entre 1947 et 1955, parmi la centaine de grottes visitées, onze révèlent leurs secrets, mettant au jour quelque 900 manuscrits…

Eleazar Sukenik, en 1951

Cependant, Eleazar Sukenik de l’Université hébraïque de Jérusalem, est parvenu à acquérir des fragments importants de rouleaux dont celui d'Isaïe.

 

Tisserant dit que, à sa connaissance, aucun texte du Nouveau Testament n'est présent dans les jarres de Qumran et que rien n'y parle de Jésus de Nazareth.

 

Wilson répond que l’épigraphiste français André Dupont-Sommer, dès 1950, compare Jésus avec ce fameux “Maître de justice” dont parlent les textes sans jamais le nommer.

Jésus de Nazareth ne pourrait-il pas être passé par Qumran ?

 

Tisserant s'en tient à ce qu'en disent plusieurs spécialiste, à savoir que Qumran devait être le lieu de vie d'une secte juive monastique, les esséniens qui y rédigèrent les manuscrits. Cette idée a été avancée très tôt par le père de Vaux.

 

- Oui, mais faut-il faire alors de Jésus un essénien et du christianisme "un essénisme qui a largement réussi" selon la formule de Renan ?

C'est ce que le professeur John Marco Allegro (1923-1988), philologue, docteur d’Oxford, vient de soutenir lors d'entretiens radiophoniques qu’il a donnés à la BBC.

Le père Józef Tadeusz Milik remet des fragments à John Allegro

 

Tisserant, note que le Times, en effet, a relevé cette polémique... Et que Dupont-Sommer, lui-même, qui avait jusque-là considéré Allegro comme un excellent collègue, n’avait eu, consterné, qu’un jugement bref : « Allegro est devenu fou ! »

Allegro est le seul agnostique de l’équipe internationale, il est renommé pour son anticonformisme.

 

- Vous soulignez, qu'Allegro est non-croyant, cela a donc son importance ?

 

- Oui, répond le cardinal. C'est important, parce que cela concerne les Ecritures. L'encyclique donnée à Rome le 30 septembre 1943, par le Saint-Père, Divino afflante Spiritu, réaffirme  l'inspiration divine des Écritures, il cite saint Augustin pour faire valoir que la méthode historico-critique peut être acceptable lorsqu'elle est nourrie par une grande foi en l'Esprit Saint. Le Saint-Père, souligne aussi que les Ecriture sont une Parole vivante, et rappelle la méthode des quatre sens de l'Écriture ( des Pères de l'Eglise) est recommandée pour mieux saisir le sens littéral et le sens spirituel de l'Écriture.

Le Père de Vaux assume cette responsabilité, quand il s'agit de questions aux implications importantes pour l'Église; certaines hypothèses formulées à partir des données de Qumran sont précisément jugées susceptibles de le faire.

Le travail de tout bibliste doit être guidé et déterminé par la doctrine de l'Église...

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1955 La Terre Sainte, l'Etat d'Israël et la Palestine.

Publié le par Régis Vétillard

Lancelot réussit à obtenir, pour Edmund Wilson qu'il va accompagner, un entretien avec le cardinal Tisserant. Officiellement, il s'agit d'entretenir le Préfet de la Congrégation pour les Eglises d’Orient, sur la situation des catholiques en Israël.

Le cardinal tient - sitôt les présentations, avec les questions du cardinal sur la carrière de Wilson – à présenter la situation de ce qu'il appelle la ''Terre Sainte'', et non Israël.

Cardinal Tisserant

Il rappelle la fondation du royaume de Jérusalem, le jour de Noël 1100, suite aux croisades. Saladin qui prend Jérusalem en 1187. En 1229, l’empereur du Saint Empire romain germanique, Frederick II, réussit à négocier le retour de Jérusalem, Nazareth et Bethléem dans le royaume latin. Finalement, en 1244, les Ayyoubides rétablissent définitivement la souveraineté musulmane sur Jérusalem.

Cependant depuis 1535, lorsque François 1er signe les premières capitulations ( possessions en Terre Sainte) avec le Sultan Soliman le Magnifique ; la France possède un patrimoine religieux et la religion catholique est protégée.

Après la première guerre mondiale, l'empire britannique évince l'empire ottoman qui a duré plus de six siècles. La Terre sainte n'est pas restituée à la Turquie, et la SDN attribue au Royaume-Uni un mandat sur la Palestine.

Wilson se demande si ce n'est pas là que vont commencer les ennuis.

Vous connaissez sans-doute l'histoire tragique de Thomas Edward Lawrence (1888-1935), plus connu sous le nom de « Lawrence d'Arabie » qui disait vouloir donner l'indépendance aux arabes et créer un Empire allant de l’Egypte à la Mésopotamie. Dans cet objectif, il s’assure de la participation à la guerre de Hussein Ibn Ali, le chérif de la Mecque et roi du Hedjaz, et de son fils Fayçal afin de les inciter à la révolte contre les Ottomans...

Lors de la Conférence de la paix ( à Paris en 1919) la délégation arabe n’obtient rien, la France et la Grande-Bretagne deviennent puissances mandataires, la première en Syrie et au Liban, la seconde en Palestine, Transjordanie et Irak.

Fayçal, craint s'être fait manipuler par l'agent secret britannique Lawrence... - Je pense, dit Wilson, que les Britanniques n'ont pas honorer leurs promesses.

- Peut-être, répond Tisserant, d’autant que les puissances victorieuses ont décidé le démembrement de l’Empire ottoman ; et lors de la déclaration Balfour ( Nov 1917) ont promis aux Sionistes de soutenir la création d’un foyer national juif en Palestine.

Ensuite, le cardinal Tisserant rappelle la position du Saint-Siège, en 1921-22 (cf la lettre du cardinal Gasparri du 15 mai 1922) : les juifs en Palestine doivent avoir des droits civils égaux à ceux dont jouissent les autres nationalités et confessions, ils ne peuvent disposer d’une position privilégiée et dominante . En ce qui concerne les Lieux saints, le Vatican propose leur internationalisation.

- Voulez-vous dire que le Saint-Siège est alors opposé à un foyer national juif ?

- Exactement ; d'ailleurs n'oubliez pas que les chrétiens palestiniens étaient bien représentés dans le mouvement national arabe, et soutenus par le Saint-Siège...

En 1947, le Vatican est plus prudent, il reste hostile au projet d’Etat juif mais aussi à un vaste Etat unitaire arabe au Proche-Orient ; et surtout rappelle les droits de l’Église Catholique en Terre Sainte.

Pie XII, a dénoncé l'épuration ethnique consistant à chasser de nombreux arabes de leur terre et leur maison et repris le terme de ''Nakba'' ( terme arabe signifiant « catastrophe »).

Lancelot reconnaît que la légitimité politique et théologique du nouvel état d'Israël pose en France beaucoup de questions. Emmanuel Mounier, et Mauriac ont exprimé leur sympathie sioniste ; mais Louis Massignon parle d'imposture de l'Histoire. La France a attendu un an, et a reconnu Israël après avoir eu l'assurance de la protection des Lieux saints et des établissements français.

 

Le cardinal rappelle aussi que si l’État israélien a rejoint l’ONU en mai 1949. En revanche, la Palestine n'a toujours pas pu le faire... Jusqu'à quand ?

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Les découvertes des manuscrits de Qumran

Publié le par Régis Vétillard

La Cité du Vatican est un espace propice aux rencontres les plus diverses dans le cadre religieux. En 1955, Lancelot est harponné par un américain, et intimidé au premier abord par le physique et les propos du personnage. L'homme, de tradition presbytérienne mais qui se dit agnostique, recherche un allié pour rencontrer quelques dignitaires de l’Église catholique et les interroger sur les découvertes récentes de Manuscrits dans la région de la Mer Morte.

Edmund Wilson en 1952

 

Lancelot va expérimenter les longues discussions autour des nombreux verres d'alcool consommées par cette personnalité que Lancelot découvre, mais qui est célèbre et reconnue aux Etats-Unis. Son nom : Edmund Wilson (1895-1972), romancier, critique littéraire et curieux de tout, et donc, dit-il pour résumer: journaliste. Son modèle : un français, Sainte-Beuve. Sa culture émerveille Lancelot.

Il parle le français, l’italien, l’allemand, le russe cyrillique, il lit le latin et le grec. Il commence l'étude de l'hébreu.

Lancelot apprendra aussi, que Wilson est celui qui a découvert Hemingway, mais aussi Joyce, Eliot et Gertrude Stein; qu'il a présenté Valéry et Proust à l'Amérique; puis soutenu la réputation de Scott Fitzgerald dans les années 1940 et lancé la carrière de Vladimir Nabokov en Amérique.

 

Le 23 mars 1954, Wilson atterrit à Haïfa. Il est - à l'aéroport - impressionné par l'accueil enthousiaste réservé aux nouveaux immigrants.

Son objectif est de rencontrer des érudits et des archéologues, des religieux et des sceptiques au sujet des révélations induites par la lecture des ''manuscrits de la Mer Morte''. Entre conversations et interviews, il se rend à Jérusalem, il est rebuté par le triste état de l'Église du Saint-Sépulcre.

La rue Ben-Yehuda à Jérusalem en 1950

Il raconte sa traversée du quartier haredi de Méa Shearim, l'un des premiers quartier juif de Jérusalem construit autour de 1870. Repris par Israël, en 1948, aujourd'hui n'y vivent majoritairement que des juifs orthodoxes, des haredim. La vieille ville est aux mains des arabes ( sous contrôle jordanien), les juifs chassés et les synagogues détruites.

Il voyage en Transjordanie, à Tibériade et visite les Samaritains presque disparus.

Proche-Orient après 1949

Notes : 1949- Le Royaume de Jordanie, est le nouveau nom de la Transjordanie, Jérusalem est le centre religieux du royaume, et Amman la capitale. L'annexion ne provoque pas de réaction de la part des arabes déplacés et réfugiés, suite à la création de l'état d'Israël en 1948. (La «Nakba» ou la «catastrophe» fait référence à l'exode forcé de ces Palestiniens en 1948 - mais en ces années 50, on n'utilisait pas le mot de palestiniens, mais ceux d'arabes ''réfugiés'' ou de ''déplacés''). Pas de réaction non plus des pays arabes ou de l'ONU. Gaza est occupé par les Égyptiens. 

L'émoi qu'a suscité la publication de ses articles dans The New Yorker, l'amène à la rédaction d'un livre, pour lequel il ne lui manque plus que les réactions de la hiérarchie catholique, étrangement silencieuse jusqu'à présent...

 

C'est en 1947, que les premiers manuscrits de Qumran ( aujourd'hui en Cisjordanie) apparurent sur le marché. Ils s'étaient conservés pendant des siècles, en cuir, en papyrus, un seul sur feuille de cuivre, enveloppés de lin et scellés dans de hautes jarres, dans des grottes du désert de Judée à l’ouest de la mer Morte. Dans les années 50, Qumran est en territoire jordanien.

Du négociant au supérieur du couvent Saint-Marc à Jérusalem, les premiers fragments de parchemins vont être achetés par le professeur Éléazar Sukenik de l’Université hébraïque de Jérusalem ; après avoir été examinés par des chercheurs américains ( Brownlee et Trever) qui décelèrent l'importance de la découverte.

Les revues spécialisées répandent la nouvelle : '' dans la région de la mer Morte, des manuscrits bibliques d'avant, ou près de la naissance du Christ ont été découverts.'' !

 

A la fin du mandat britannique, la création de l’État d'Israël ( 14 mai 1948) entraînait la guerre en Palestine. Début 1949, elle prit fin officiellement. La Cisjordanie et Jérusalem-Est ont été annexées par le royaume de Jordanie.

Roland de Vaux - Qumrân en 1956

Roland de Vaux (1903-1971), dominicain, alors directeur de l'École biblique et archéologique française de Jérusalem, est chargé des fouilles du site ainsi que des grottes voisines, et de la publication des rouleaux et des fragments découverts.

Entre 1947 et 1955, parmi la centaine de grottes visitées, onze révèlent leurs secrets : 800 manuscrits, qu'il sera nécessaire de reconstituer à la façon de mosaïques, un travail de patience infinie.

 

Janvier 1951, le professeur Libby de l'institut d'études nucléaires de Chicago, détermine, au moyen du test du carbone 14, l'âge des manuscrits qui dateraient de la période située de 167 avant à 233 après J.C..

La thèse la plus courante est de dire que ces manuscrits ont été rédigés par les esséniens, une secte juive qui vivait à Qumran.

Des spécialistes pensent qu'ils ont été écrits dans une localité voisine dont les ruines sont nommées Qumrân. D'autres avancent qu'ils pourraient venir de Jérusalem, puis cachés à Qumrân pour la protéger des Romains quand ils attaquèrent la ville, et finirent par la détruire en l'an 70 de l'ère chrétienne.

Les questions que nous nous posons actuellement (1955) est la signification de ces textes, et leur implication dans nos connaissances historiques dans une période fondamentale aussi bien pour le judaïsme, que pour le christianisme naissant.

En hébreu, nous n'avons pas de manuscrits de cette époque.

Les journaux, les magazines, titrent sur ces questions : « Jésus était-il un essénien ? », « le christianisme est-il réfuté ? ». Les sources nouvelles confirment-elles la Tradition de l'Eglise, en particulier ses dogmes ?

 

Le silence officiel concernant ces découvertes, renforce le sentiment d'un complot organisé par le Vatican, qui tiendrait à occulter certains textes...!

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1954 - Les prêtres ouvriers

Publié le par Régis Vétillard

Le gouvernement français s'inquiète, de ce que le Vatican considère comme les ''problèmes de l'Eglise de France'' ; en particulier celui des prêtres-ouvriers.

Cette expérience de la ''Mission de France'' afin de rechristianiser les milieux ouvriers et ruraux en France, concerne une centaine de prêtres qui ont laissé la soutane pour le bleu des ouvriers, et se confrontent à ce qu'ils nomment, ''l'exploitation capitaliste''. Le roman de Gilbert Cesbron, Les saints vont en enfer (1952) est un très bon livre qui reconstitue la vie d'un coin de banlieue industrielle, dans lequel un prêtre ouvrier doit trouver sa place.

En 1953 Le nouveau nonce apostolique à Paris, Paolo Marelle, qui succède à Giuseppe Roncalli ( le futur Jean XXIII), reçoit pour mission de mettre un terme à l'expérience des ''prêtres-ouvriers'', pour son imprégnation marxiste.

La Mission de France et son séminaire établi à Limoges, sont également tenus pour suspects.

Lancelot, étudie les répercussions sur les milieux intellectuels et les politiques, qui s'intéressent à ces questions, alors qu'elle ne pourraient sembler qu'ecclésiastiques. Edmont Michelet ( RPF) s'inquiète des répercussions sur le prestige de la France ; des députés socialistes protestent contre « la convocation, par un nonce, des cardinaux français... ». Des catholiques français dénoncent l'ingérence dans l'Eglise de France : « Il s’agit de savoir si les évêques sont les successeurs des apôtres ou de simples préfets... » ( J. Lacroix, dans Esprit, décembre 1953).

Mauriac s'interroge: « peut-être... Il faudrait que des hommes mariés, s’ils sont ouvriers et saints, puissent être prêtres et distribuer le pardon et le corps du Seigneur à leurs camarades. » ?

Le 8 février 1954, sous la pression de Rome, une « purge » ( mot du père Congar) frappe les dominicains de France, soupçonnés, entre autres choses, d’inciter les prêtres-ouvriers à la résistance. Les trois supérieurs provinciaux sont « invités » à remettre leur charge, les pères Congar, Chenu, Boisselot et Féret écartés.

Pretres-ouvriers-1953

 

Dans le Figaro du 16 février 1954, François Mauriac plaide « pour un nouveau concordat » qui protégerait l’Église de France contre les interventions désastreuses des congrégations romaines. Il plaide pour une reconquête spirituelle dans des milieux où l’Église est discréditée. Il juge que le prêtre de Gilbert Cesbron ( Les Saints vont en enfer) est plus accordé au monde tel qu’il est ; que celui de Bernanos.

« S’il faut choisir entre l’efficacité apostolique et l’intégrité sacerdotale, je choisis l’intégrité sacerdotale. » répond Pie XII

 

Tout au long de cette crise, Lancelot est chargé d'organiser des rencontres ( secrètes) entre le gouvernement français et le Saint-Siège. Robert Lecourt ( 1908-2004, député MRP), Alfred Michelin et Mgr Jean Villot (1905-1979) sont chargés de négocier, en tenant compte de la question de l'enseignement privé. Georges Bidault souhaiterait même un ''Concordat''.

En décembre 1953, un texte, un memorandum est prêt : il concerne entre autres, la nomination des évêques, l'Ecole avec un régime souple mais complexe, de coopération substitué à la loi Barangé. la représentation du Saint-Siège en France, ..etc.

Le document est remis par notre ambassadeur à Mgr Tardini le 8 janvier 1954.

Le 1er mars 1954, prend fin officiellement, l'expérience des ''prêtres-ouvriers''.

 

Un problème de santé du pape, la ''rébellion des prêtres-ouvriers'', une campagne de presse ( l' article de François Mauriac), l'arrivée au pouvoir de Mendès France en juin, empêchent la négociation autour d'un ''concordat''  de se poursuivre ; elle devra attendre 1956, pour que le Président du Conseil Robert Lecour et Lancelot organisent des séances de travail, dans lesquelles s'investit Guy Mollet.

En mars 1957, Lecourt et Michelin rencontrent Mgr Tardini, pour qui le texte soulève trop de questions, « trop de principes qui ont valeur générale pour l’ensemble de la catholicité ». Après la chute de Guy Mollet, le 22 mai 1957, les présidents suivants se désintéresseront de la majorité des autres questions religieuses, pour s'attacher à la question scolaire.

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Années 50, toujours le '' modernisme '' et L'Eglise.

Publié le par Régis Vétillard

Depuis l'encyclique Humani Generis d'août 1950, le CCIF se sent menacé, le Saint-Office dénonce un « goût très prononcé pour la liberté ». la crise des prêtres-ouvriers présage de nouvelles tensions. En 1953, on s'interroge, avec Jean Lacroix, personnaliste, sur la compatibilité entre le christianisme et le monde moderne, et « sur le sens et la valeur de l’athéisme » ; ne contribue t-il pas, par exemple, à purifier notre foi ? Ce choix de sujet, a choqué quelques-uns.

1953

L'année suivante, la Semaine des intellectuels catholiques propose des conférences-débats centrées sur l'homme. L'homme Jésus, la sexualité, la mort etc... On pouvait y rencontrer : Henri Bartoli, René Rémond, Georges Suffert et le père Thomas ; Jean Guitton, Pierre-Henri Simon et le père Carré ; Gabriel Marcel et Robert Garric, Étienne Borne et le père Hans Urs von Balthasar.

La Semaine 1955, s’interroger sur la valeur des civilisations, et constitue un véritable plaidoyer pour une Église ouverte et moderne : L’Église n’est pas cléricale, l’Église conteste et comprend le communisme, (…) l’Église parle toutes les langues humaines, l’Église ne redoute pas une civilisation de la science et la technique et l’Église croit à l’avenir du monde »; participent le Père Danielou, François Mauriac, René Rémond... On s'interroge sur une institution qui serait trop attachée à un pouvoir politique et sur le concept de la laïcité. Henri-Irénée Marrou montre les ambiguïtés de la civilisation médiévale.

La Semaine 1956, avec le sujet « Monde moderne et sens du péché », doit se préparer sous la responsabilité de l'épiscopat. Son programme et surtout ses intervenants sont revus. François Mauriac et l’abbé Oraison ne sont pas sollicités, Albert Béguin et Julien Green se désistent, et on fait appel à Daniel-Rops, André Frossard et Gustave Thibon.

 

Le désarroi des lendemains de guerre, cède la place à une certaine confiance dans l'avenir et le progrès. La société est en mutation autour de l'attrait des villes, et l'exode rural, avec le progrès des moyens de communication, de transport. Les structures traditionnelles sont remises en question, et l'american way of life nous inspire. Face au matérialisme marxiste athée, s'oppose un matérialisme occidental, à propos duquel on pourrait se demander si le Vatican, ne le néglige pas.

La Descente des Modernistes 1922.

Depuis le XIXè siècle, l'Eglise bute sur une controverse : le ''modernisme'' . Que signifie t-il ?

Lancelot répondrait : une émancipation de la conduite et de la pensée par rapport à la foi religieuse, ce mot pourrait s'opposer au médiévalisme quand la ''loi chrétienne'' régnait sur les individus et les sociétés... Le modernisme commencerait alors au XVè siècle, et signifierait déviation , erreur... Le protestantisme était qualifié de ''modernisme'' . Le modernisme pourrait encore remonter aux encyclopédistes et à Rousseau. Pour Loisy, il est beaucoup plus récent et provient des adversaires orthodoxes. Pie X, l'aurait repris des pères jésuites de Rome - à l'origine un sobriquet méprisant - en ce début du XXème siècle.

Le pape Pie X a condamné le ''modernisme'' parce qu'il soumet l'interprétation du message chrétien aux méthodes de la critique historique et philosophique. Il est vrai que cette approche historique de l'écriture de la Bible, interroge ensuite la nature du dogme, et le mode de connaissance de Dieu.

Finalement : s'agit-il de moderniser le christianisme, ou de christianiser la modernité ; sans pour autant, tomber dans certaines dérives ? Charles Journet, lui-même, s'en inquiète : «Un jour le monde risque de se réveiller complètement privé de Dieu transcendant, ou, si l’on peut dire, de se réveiller dialectico-matérialiste-chrétien»

 

Ernest Renan (1823-1892) aurait dit – à juste titre – « Ce sont les idées qui mènent le monde », après Friedrich Hegel (1770-1831) « l’idée est en vérité ce qui mène les peuples et le monde, et c’est l’Esprit, sa volonté raisonnable et nécessaire, qui a guidé et continue de guider les événements du monde » ( La Raison dans l'Histoire) et avant Antonio Gramsci (1891-1937) qui préconisait avant toute prise de pouvoir de privilégier la culture, les valeurs, l'idéologie...

 

Le marxisme, comme idéologie, donne un sens à la réalité comme organisation d'une société, et du sens à l'action politique. Il y a la critique du capitalisme, et la promesse d'une libération des ''exploités'', et des exclus... Ce thème de la libération n'est-il pas commun au christianisme et au marxisme. La revue ''Esprit'' milite à démontrer que la religion n'est pas une aliénation, une résignation, un opium... Mauriac aurait même dit : « seuls les esprits religieux comprennent à fond les communistes » Paul Ricoeur n'est pas insensible à cette attraction marxiste, mais il prévient qu'il ne s'agit pas de collaborer dans la confusion : pour les chrétiens les enjeux sont spirituels.

 

Le marxisme peut-il se séparer de son athéisme ?

Si l'on nie Dieu, la morale peut-elle encore exister ? « Une fois supprimé le respect dû à Dieu législateur et juge, le droit et sa violation sont des mots vides de sens, la loi morale est réduite à néant » (Pie X II, exhortation Conflictatio bonorum aux évêques du monde entier, 11 février 1949, AAS, 41 (1949) 60).

Le père Dubarle admet qu'une morale individuelle a besoin d'un horizon de réalité supérieure à cette réalité ; et qu'il peut exister une morale athée ( Pour un dialogue avec le marxisme, p 97). Ses contradicteurs, ajoutent, que oui, de fait, un athée peut avoir le sens moral, mais n'est ce pas qu’un conformisme sociologique ou un choix gratuit personnel ?

 

Cependant :

Les valeurs de l'Evangile engagent le chrétien à rechercher la justice, donc à s'engager et rejeter un certain apolitisme religieux, et affirmer '' le primat de la conscience sur l’obéissance ''.

Pourtant :

Le pape Pie X -1903

La revue des dominicains, ''La Quinzaine'', est condamnée en 1955 par le Saint-Office, et cesse de paraître, sa devise était ''Le journal de ceux qui se veulent « des chrétiens dans le temps présent » '' . Dans l'éditorial du dernier numéro, on pouvait lire : « Depuis plusieurs années des coups répétés frappent les efforts entrepris pour assurer la présence de l'Église dans les milieux déchristianisés. Condamnations et mises en garde interrompent successivement toutes les recherches d'ordre doctrinal et, ainsi, c'est le cas pour " la Quinzaine ", toute appréciation de la situation présente et tout comportement qui s'écartent des habitudes de penser et d'agir de la civilisation " chrétienne ".

«  Dans la crainte de voir les laïcs et les prêtres entièrement absorbés par le milieu dans lequel ils travaillent et ils luttent, l'Église se replie sur elle-même. Certains semblent vouloir utiliser l'Église comme puissance d'ordre et la lancer dans une croisade contre les forces du mal. » 

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1953 – Mauriac

Publié le par Régis Vétillard

Mauriac, dans son éditorial du 13 janvier 1953 dans Le Figaro, dénonce la situation au Maroc. Il accepte la présidence de ''France-Maghreb'', et se montre de plus en plus déçu des politiques français. Son espoir c'est Pierre Mendès-France.

Lancelot se rend au Pèlerinage de Chartres de mai 1953, organisé par les étudiants avec de nombreux marocains musulmans, où il retrouve le père Daniélou et François Mauriac, qui est acclamé pour ses prises de position sur le Maroc. En juillet, il présidera le meeting catholique pour le révision du procès Rosenberg, à la Mutualité.

François Mauriac et Danielou au Pèlerinage de Chartres de 1953

 

Lancelot assiste (irrégulièrement en général), ici à Chartres, au sacrifice de la Messe, non qu'il estime l'efficacité de ce sacrement , mais parce que la ferveur dans certaines occasions produit un charme qu'il ne s'explique que peu... Ce serait moins efficace, sans-doute, si le décor n'était pas celui d'une église ancienne, et si la ferveur du célébrant et de la foule, n'était pas au rendez-vous.

Il apprécie que la liturgie puisse lui permettre d'atteindre, en communauté, un état de silence intérieur, en maintenant une atmosphère imperméable au vacarme extérieur.

Enfin, il estime que ce fragment de pain azyme, après le rituel, permet de garder en soi, habitée, cette zone profonde de l'être atteinte par le silence et les lectures.

 

Lancelot, alors qu'il venait de lire '' La Pierre d'achoppement '' put partager avec l'écrivain, quelques réflexions :

Mauriac prévient, il n'a pas les certitudes d'un Bloy, ou d'un Bernanos... Il n'est pas théologien ; il est un ''affectif'' : « nul moins que moi n'incline à mêler la raison, du moins le raisonnement, aux choses de la Foi. »

- Avec Kierkegaard, je dirais « que Dieu n'est pas quelqu'un de qui on parle, mais quelqu'un à qui l'on parle. ». « Dès qu'on prétend m'apporter des preuves, je perds pied. Dès qu'on me rend sensible un contact spirituel, j'y adhère sans aucun effort. »

- Aussi les dogmes ?

- « Ce ne sont pas les dogmes du catholicisme qui blessent la raison : ils déconcertent, ils ouvrent devant elle des gouffres, mais ils ne la blessent pas. »

François MAURIAC et un prêtre

- Lancelot répond : « Si je suis en accord avec vous sur ce point ; je pense ne pas partager cette curieuse formule '' le mensonge à l'intérieur de la vérité qui ne serait plus le mensonge... ! - Je vous cite entièrement : « Le clercs qui administrent l’Église, qui vivent dans la familiarité des signes sensibles de la Grâce, de la matière des sacrements, savent d'une expérience quotidienne que l’Église est faite pour les hommes, et non les hommes pour l’Église »... Oui, d'accord... Vous continuez : « Tout ce qui les soutient et les aide sur le chemin du ciel, toutes les béquilles de la fausse dévotion, ils ferment les yeux pour ne pas les voir : ils savent que le mensonge à l'intérieur de la vérité , n'est plus le mensonge, - d'autant qu'ils savent aussi d'une science sûre que depuis des siècles s'accumule un trésor de sainteté catholique dont le poids l'emporte infiniment sur les déviations, sur le complaisances. »

Je crains, ajoute Lancelot, que des petites compromissions, permettent d'excuser des choses beaucoup plus graves... Un mensonge à l'intérieur de la vérité : ne serait-ce pas le ver dans le fruit.... ?

 

Lancelot explique à Mauriac, sa difficulté à – non pas comprendre – mais vivre ''la présence réelle de Jésus dans l’Eucharistie.'' Il répond : - Le corps, mon ami... le corps ! Vous ne croyez pas assez au corps ! Pensez '' l'Incarnation ''...

L'Eucharistie, c'est un acte de grande matérialité que Mauriac lie à la résurrection des corps... Il dit aussi : Devenez ce que vous recevez, pour ajouter à ce que disait Saint Augustin « Soyez ce que vous voyez, et recevez ce que vous êtes»,

Enfin … Et si cela n'est qu'illusion ? se demandent Lancelot avec François Mauriac : - « Alors quel mystère serait ainsi révélé que l'humain puisse susciter une présence mythique dans un morceau de pain, et entretenu depuis dix-neuf siècles ... ! »

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1953 – Le Maroc. Le CCIF

Publié le par Régis Vétillard

Lancelot a plaisir à garder un lien constant avec le CCIF ( fondé en 1941 ), avec qui il avait initié un compagnonnage lors de la discussion qui s'était déroulée le 21 janvier 1947, organisée par l'équipe '' Science et conscience '' du CCIF, entre le P. Teilhard de Chardin et Gabriel Marcel. Il y retrouve - lors de grandes conférences mais aussi dans des ateliers plus restreints - des ''réformateurs'' formés par Maritain, des personnalistes, des collaborateurs de Sept, Témoignage chrétien, Esprit, de nombreux écrivains et des scientifique. Etienne Borne va devenir l'homme de référence du CCIF, il est professeur de philosophie en Khâgne à Henri IV et a été l'un des fondateurs du MRP.

Le Centre catholique des intellectuels français (CCIF) est un centre de réflexions d'intellectuels catholiques, fondé en 1941 et dissout en 1977

 

Le prêtre, Emile Berrar, est le ''permanent'' du CCIF, directeur de la Maison des étudiants, il fournit l’infrastructure et les locaux. Il va devoir gérer de nombreuses difficultés ''avec Rome'' jusqu'à son départ en 1957. Il est l'expert du milieu ecclésial et de l'orthodoxie théologique, et la caution auprès de l'archevêque de Paris. D'autres prêtres, en particuliers jésuites ou dominicains, participent aux débats : les pères Maydieu, Chenu, Congar, Daniélou, Dubarle, Russo, René d'Ouince ( confident de Teilhard), Fessard, Calvez, Chatillon, Brien...etc

 

Le 26 janvier 1953, Lancelot se rend avec près de cinq cents personnes à une réunion organisée par le CCIF, en présence de François Mauriac, sur l'Afrique du Nord. Le prix Nobel rappelle sa position (avec Maritain et Bernanos) sur Guernica et l'Ethiopie. Les animateurs à la tribune relatent «  les choses horribles qui se passent au Maroc. » «  des événements sanglants... sanglants, mais surtout pour les arabes... ». Robert Barrat - journaliste, secrétaire général du CCIF - parle de plusieurs centaines de morts marocains, et dénonce le silence des autorités françaises. François Mitterrand, ancien ministre, monte à la tribune pour dénoncer la politique française en outre-mer depuis 1945. Ils demandent une commission d'enquête pour officialiser ce qui s'est passé en décembre 1952 à Casablanca, le nombre exact de victimes... Des articles du Monde, de La Croix, de Témoignage Chrétien, en font largement écho.

Pourtant, Jean de Fabrègues, ami de Lancelot et directeur du journal '' La France catholique'' appelle au nom de la France au retrait des intellectuels catholiques afin de ne pas alimenter le trouble des consciences.

En métropole, les français peu au courant, ils hésitent entre la fermeté et un silence gêné quand on parle de l'honneur de la France...

 

Alors, qu'en est-il ?

Lancelot se renseigne auprès de « sa famille au Maroc » comme il dit. Les nouvelles parvenues le renseignent sur le devenir professionnel de Georges Vétillard au sein d'abord de l’entreprise Gagneraud, puis de Giesper où il gagne en responsabilité. Il est responsable des travaux de la piste aéroport pour avion à réaction, de l'Aéroport Rabat-Salé ; puis de l'exploitation d'une carrière de ballast, pour l'empierrement de la cour du Palais du Sultan.

Micheline ( Haquet) qu'a connue Félix ; a donné naissance le 10 décembre 1951 à Régis, de qui elle envoie une photo de classe en maternelle. Ils sont logés par l'entreprise dans une villa du quartier de l'Agdal, à Rabat, où vivent la plupart des Français expatriés.

Elle raconte les événements de décembre 1952, qui ont commencé après la connaissance de la mort d'un leader tunisien, tué le matin du 5 décembre 1952 par les autorités françaises. Il militait pour pour la création d'une Union syndicale nord-africaine regroupant les syndicats en naissance au Maroc, en Algérie et en Libye. Dès l'annonce de sa mort, des émeutes sanglantes ont été déclenchées à Casablanca faisant plusieurs morts et blessés, avant de faire tâche d'huile et s'étendre ainsi à travers tout le Royaume.

 

Je rappelle à présent l'Histoire :

- Le sultan du Maroc réclame en vain, depuis la fin de la guerre, la révision du protectorat français au Maroc. (Le Protectorat est un gouvernement ''colonial'', avec des institutions marocaines sous le contrôle de la métropole.)

En janvier 1943, le sultan Sidi Mohammed Ben Youssef est fait prisonnier par l'administration de Pétain. Le Parti de l'Istiqlal fondé pour obtenir l'indépendance et réhabiliter la monarchie, devient clandestin et son projet est soutenu par les américains.

Après la guerre, Sidi Mohammed soutenu par les mouvements nationalistes, s'oppose au gouvernement français. Le général Augustin Guillaume manœuvre avec d’autres élites marocaines, notamment le Glaoui, pacha de Marrakech, l’ouléma de Fès et les tribus berbères. Après les émeutes de 1952, Sidi Mohammed est déposé le 20 août 1953, et déporté en Corse puis à Madagascar.

 

Qu'en penser ?

Paul Ricoeur, propose de faire un peu de philosophie de l’histoire, pour savoir dans quel sens est en train de se dérouler l’Histoire, pour savoir si c’est dans le sens de l’Istiqlal ou dans celui d'El Glaoui ?

- Ne faut-il pas, nous demande t-il, interpréter les mouvements d’ensemble des peuples de couleur et par conséquent interpréter l’ensemble d’une telle situation ; ce qui sera, sinon une philosophie de l’histoire, en tous cas une interprétation critique d’un morceau d’histoire sur une certaine durée ?

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1954 – Fin de la vie d'Anne-Laure de Sallembier

Publié le par Régis Vétillard

De façon très inhabituelle, Anne-Laure de Sallembier s'est couchée avant le repas du soir ; elle avait simplement demandé à Madeleine de faire manger Elaine, et de la coucher. Elle se sentait fatiguée, et avait besoin de récupérer. Le lendemain, Madeleine appelait Lancelot à Paris, pour lui faire part de son inquiétude sur la santé de sa mère. La comtesse de Sallembier n'a plus quitté son lit ; et Lancelot vécut les semaines les plus intenses et douloureuses de sa vie.

 

à Fléchigné

Après la visite du médecin, et quelques analyses effectuées dans une clinique aux alentours de Paris. La mère de Lancelot exprime son impérieux souhait de revenir à Fléchigné, et de mourir nulle part ailleurs !

Pourquoi Fléchigné ? Parce que une part de soi est ici, parce que cette maison a toujours été un refuge, ce dont elle a besoin à présent. « Ici, je continue à vivre, dit-elle, ailleurs je commencerai à mourir. »

« Si je meurs, dans mon logis, ma présence continuera à vous accompagner ».

 

Lancelot fit déménager la plupart des meubles de sa chambre dans un petit salon du rez-de-chaussée. Ainsi, pendant la journée, Anne-Laure restait proche de chacun ; et pour la nuit il a été aménagé un coin nuit dans le grand salon pour la personne qui la veillait.

Une infirmière a secondé Madeleine pour les soins, le médecin venait régulièrement, et n'hésitait pas à proposer de la morphine pour atténuer les douleurs.

 

Lancelot est resté présent, le plus possible proche, frappé par l'abandon progressif de sa mère pour les soucis matériels, et la confiance qu'elle faisait à Madeleine en lui abandonnant tout.

Anne-Laure ne fut jamais irritée envers quiconque, elle semblait plutôt désolée du souci qu'elle donnait à chacun.

C'est à Elaine ( dix ans), qu'elle semblait vouloir raconter encore beaucoup de souvenirs ; la dernière semaine, elle n'en avait plus la force et priait Lancelot de continuer sur l'idée qui lui venait.

Alors, elle fermait les yeux et écoutait Lancelot évoquer certains personnages qu'elle avait connus, sa main acquiesçait ou s’agitait pour réfuter...

 

Lancelot savait que sa mère était rassurée de partir, entourée de ses proches, en particulier de son fils et de sa petite fille.

Tarot - le Mat et la Mort

« Vous serez mes passeurs » leur avait-elle dit, alors qu'elle feuilletait, comme souvent, les cartes du Tarot. Elle avait devant les yeux l'arcane XIII.

« Il ne faut pas craindre cette image, disait-elle, elle peut apparaître comme la ''lavandière du gué'' annonciatrice d'un malheur, alors qu'elle n'est que l'annonce d'un passage, donc l'instructrice d'une connaissance. Dans notre tradition du Graal, la carte représente aussi la Jérusalem céleste. Elle est le but ultime du pèlerin, le terme de la croisade du templier.

Durant l'existence de nos ancêtres, le Graal avait quitté la Terre sainte pour l'Occident ; pour que la société arthurienne puisse donner à notre monde la dimension sacrée et spirituelle à laquelle nous aspirons. Aujourd'hui, ce Graal que nous cherchons, nous reconduit, par la Foi et la Raison, jusqu'à Jérusalem. »

 

Elle rappelait souvent, à la petite Elaine, que son grand-père Charles-Louis lui racontait des histoires de l'Autre Monde, tous deux savaient que nous utilisons les images de ce monde, pour évoquer le Vrai Monde ; celui où elle se rendait...

« Si nous parlons en légendes, c'est qu'elles sont bien plus que ce que la plupart des gens se représentent. »

Elle confiait à sa petite fille comment Lancelot, fut le plus beau cadeau que la vie lui avait fait, et comment sa bonne fortune lui a permis de vivre intensément la fin d'une époque aristocratique mais réservée, il est vrai, à une petite partie de la population.

Anne-Laure avait raconté comment elle avait découvert ce monde avec Elisabeth de Gramont en particulier. Elaine se souvenait comment cette jolie demoiselle avait choisi un beau jeune homme, Philibert de Clermont-Tonnerre (1871-1940) comme époux. Elle s'installe alors en Bourgogne, a une petite fille Béatrix ; et elle s'ennuie, revient à Paris avenue Kléber... Anne-Laure et Elisabeth courent les salons, celui de madame Strauss, de Madeleine Lemaire où on pouvait voir Proust, de Robert de Montesquiou ; mais, Philibert est jaloux, violent, elle perd sous ses coups son deuxième bébé !

Anne-Laure a déjà raconté la comtesse Greffulhe, magnifiée par Proust, mais qu'elle ne reçut que vers 1904, quand sa fille épousa Armand de Gramont, ami de Proust. Sa fille, c'est Elaine Greffulhe.

Lancelot rappelle aussi qu'il y avait Anna de Noailles..

 

Anne-Laure a rencontré la théosophie, a fait tourner les tables. Elle s'est passionnée pour l'étude de la nature, elle fréquentait Camille Flammarion: elle se persuadait que l'idée de Nature, englobe le divin, l'humanité et l'univers... Tout le visible est le miroir de l'invisible ; et l'invisible devient simplement ''naturel''.

D'autres expériences vont enrichir sa représentation du réel, son passage au Figaro, puis au 'Mercure de France'.

Jean-Baptiste de Vassy ( J.B) disciple du mathématicien Henri Poincaré, et admirateur d'Henri Bergson, était passionné d’aviation. Il fut le compagnon de sa mère et une figure paternelle pour Lancelot, il a accompagné Anne-Laure jusqu'à sa disparition au début de la grande guerre ; avec lui elle a rencontré Bertrand Russell, et indirectement Bernanos.

 

L'esprit, chez les officiers comme J.B, est à la communion dans des valeurs traditionnelles, ils se considèrent comme les lointains héritiers de la chevalerie ; ce que J.B. n'avait pas manqué de développer avec Lancelot ...

Anne-Laure a beaucoup voyagé, en Allemagne, en Italie, en Angleterre et en Ecosse; sur son chemin... le Graal. Sur le chemin, également, une rencontre essentielle, celle du couple Maritain et de tous ceux qu'ils fréquentaient.

L'Italie, c'était avec Edith Wharton, en 1908.. Mais surtout, beaucoup l'Allemagne, et la passion des auteurs allemands.

On a parlé de Vanessa Bell, et du groupe de Bloomsbury, de son ami Paul Painlevé. Puis il y eut la Guerre et ses interventions auprès des allemands, jusqu'au retour à Fléchigné; l'accueil de réfugiés. La visite de Félix, était attendue, et ''ses fruits'', inattendus... !

 

A sa naissance Lancelot reçoit, par sa mère, une mission : le Graal. La légende arthurienne fournit dans sa version chrétienne, un ensemble d'images qui balisent une voie, en correspondance avec le message du Christ, qui traverse les siècles. L'origine de ces images s'inscrit dans la symbolique médiévale et se confronte, parfois avec difficulté, à la modernité. Pourtant, au XXIè siècle, le Graal reste toujours le chemin et l'objectif.

Avant toute chose, avant même le Graal ; Lancelot a reçu de sa mère et de ceux qui l'entouraient, une Tradition.

Et c'est cet héritage, d'abord reçu, puis fructifié, qu'Anne-Laure espère avoir laissé à son fils.

Effectivement, pour Lancelot, ce qui caractérise le chemin emprunté par sa mère, c'est son attachement à la Tradition.

La comtesse de Sallembier avait en horreur l’idée de Révolution ; elle impose la destruction d'une structure, d'un squelette élaboré au cours des siècles, à partir de la vie des gens.

La question du vrai et du bien, ne peut être résolu par un seul personnage qui ferait table rase du passé.

Pour Anne-Laure :

La Tradition est une somme de ''références'' vécues.

Une Tradition se transmet, se reçoit. C'est une caractéristique de notre humanité.

Une Tradition se vit, au présent. Elle est communautaire, et ne se comprend qu'en ''disputatio''.

Une Tradition ne dépend pas forcément du même référentiel que la connaissance du moment. Il y a malentendu quand elle se confronte à elle, sans ce discernement, comme par exemple lors du procès de Galilée. La raison seule, ne suffit pas à vivre la Tradition.

La Tradition n'est pas une opinion ; elle les nourrit mais ne la fige pas.

On pourrait se demander, s'il y a des traditions erronées ? - Il y aurait plutôt des pratiques erronées.

 

La dernière semaine, Lancelot est revenu avec Geneviève. Il a fait une surprise à sa mère, en apportant à Fléchigné un combiné radio-tourne-disques ; une boite en bois plaqué acajou, et la façade en plastique et tissu. Le son est impeccable sur toutes les gammes, et a remplacé avantageusement le vieux poste. Quelques disques 33 tours-minutes de musique classique l'accompagnent.

Anne-Laure souhaite écouter des chants grégoriens de l’abbaye de Solesmes.

Un soir, ils écoutent le Miserere mei Deus (Psaume 50), ils pleurent ensemble ; ils se regardent et rient. Anne-Laure dit qu'elle n'a jamais été plus heureuse.

Ces deux derniers jours, Anne-Laure n'était déjà plus là ; pourtant cette dernière nuit, elle et Lancelot ont partagé comme ils ne l'avaient plus fait depuis longtemps. Au matin, Lancelot qui la veillait, s'est réveillé, elle le regardait. Il s'est approché, elle a fermé les yeux et nous a quitté.

Elle lui avait dit : « Et si la mort, était un accomplissement.. ? » et «  De quoi, de qui pourrais-je avoir peur ? »

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