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1938 - 1939 ...

Publié le par Régis Vétillard

1938 - 1939 ...
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Avec une année d'avance pour 1940.... Espoirs....

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Accords de Munich - 30 Sept 1938 - Presse

Publié le par Régis Vétillard

''L'Action_Française'' Dim 25 sept 1938

''L'Action_Française'' Dim 25 sept 1938

'' Le_Populaire ( SFIO)  25 sept 1938

'' Le_Populaire ( SFIO) 25 sept 1938

Le_Petit_Parisien  Dim 25 sept 1938

Le_Petit_Parisien Dim 25 sept 1938

Le_Petit_Parisien - Lundi 26 septembre 1938

Le_Petit_Parisien - Lundi 26 septembre 1938

Le_Populaire ( SFIO) - 27 sept 1938

Le_Populaire ( SFIO) - 27 sept 1938

La Une - L'Action Française - mardi 27 septembre 1938

La Une - L'Action Française - mardi 27 septembre 1938

L'Action_française - 28 sept 1938

L'Action_française - 28 sept 1938

Le_Petit_Parisien - 28 sept 1938

Le_Petit_Parisien - 28 sept 1938

L'Action_Française - 29 sept 1938

L'Action_Française - 29 sept 1938

Le_Populaire - Jeudi 29 sept 1938

Le_Populaire - Jeudi 29 sept 1938

La Une - Le Petit Parisien - Vendredi 30 septembre 1938

La Une - Le Petit Parisien - Vendredi 30 septembre 1938

La Une - Le Petit Parisien - Samedi 1er Octobre 1938

La Une - Le Petit Parisien - Samedi 1er Octobre 1938

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Septembre 1938 – Accords de Munich

Publié le par Régis Vétillard

Jean Luchaire, qui fréquente toujours les bureaux ministériels, lors des ministères Chautemps, sous des visites cordiales, s'ouvre à l'un ou l'autre dont Lancelot sur ses critiques du Front Populaire et en particulier envers la politique sociale démagogique communiste. Il veut soutenir les politiques d'apaisement, dit-il de Chautemps, Bonnet et Paul-Boncour.

Le directeur de Notre Temps, sent la guerre se rapprocher, mais - dit-il - on peut l'éviter si on s'arrange avec l'Allemagne et si la France prend de l'assurance ( forte de son Empire) : la France doit reprendre le travail !

Daladier et Georges Bonnet au quai d'Orsay, lui redonnent confiance... Leur voyage à Londres et la volonté britannique de ne pas garantir l'indépendance de la république tchèque conforte Luchaire.

 

Nos services de renseignement, s'accordent avec Bonnet, pour demander à Luchaire de rester en contact avec Abetz ( qui a épousé la secrétaire de Luchaire en 1932) , afin de connaître l'état d'esprit de Ribbentrop et d'Hitler...

« Dans les huit jours qui précédèrent la conférence du même nom [Munich], Abetz vint à Paris et reprit avec moi les contacts interrompus depuis si longtemps. A ses yeux, comme aux miens, il fallait éviter le conflit menaçant ; je fis de mon mieux pour ma part auprès de mes amis politiques, notamment auprès de Georges Bonnet, Ministre des Affaires étrangères, Eugène Frot, Gaston Bergery, Anatole de Monzie et Pierre-Etienne Flandin. Ces efforts ne furent pas vains, comme on put le constater la semaine suivante ( Interrogatoire Luchaire, Nice, 02/07/1945, p.16.). »

Jean Luchaire

 

Luchaire pense que huit français sur dix, refusent la guerre, par ''mauvaise conscience'' envers l'Allemagne, victime de Versailles ; nous ne pouvons plus tenir cette politique internationale tendue depuis vingt ans.

 

Les opinions politiques britanniques se satisfaisaient que la France empêtrée dans un socialisme ( finalement moins dangereux qu'elles craignaient...) ne pouvait plus espérer dominer l'Europe ( même du haut de ses colonies..) ; mais elle reste belliciste, aussi pensent-ils, pourquoi ne pas laisser les Français, ou encore mieux les Russes, livrer bataille en Europe...

Les français pensent que la Grande-Bretagne - à l'abri derrière la Manche - nous laisse le risque de la sécurité en Europe; cependant elle reste notre principal allié, et il n'est pas judicieux de s'en détacher. Quant à l'Urss, si elle n'est pas avec nous, elle sera contre nous, mais Daladier craint d'alarmer l’Allemagne, face à ce qu'elle appellerait une tentative d'encerclement...

 

Chamberlain rejette l'idée de ''grande alliance de Churchill '' et la proposition soviétique d'une conférence internationale. Chamberlain semble disposer à négocier avec Hitler, mais refuse une alliance avec Staline.

 

Après l'annexion de l'Autriche, Hilter s'est tournée du côté de la Tchécoslovaquie avec le rattachement des sudètes au Reich. Or la France a signé en octobre 1925 à Locarno un pacte d'assistance avec la Tchécoslovaquie et la Pologne contre une éventuelle agression allemande. L’Angleterre décide de négocier, mais Hitler élève ses exigences ( encore plus, et plus vite … !)

Le 24, la France décide une mobilisation partielle.

Sur la ligne Maginot, les troupes françaises sont en état d'alerte.

André Weil, comme diplômé de l'École normale, est versé dans le cadre des officiers de réserve. En septembre 1938, il voit se préciser des risques de guerre... Il n'est pas prêt à mourir pour un conflit absurde, selon lui. Il écrit « ...je me sens aussi loin des pacifistes inconditionnels que des patriotes intransigeants, s'il en reste, ou bien des gauchistes fanatiques ».

Il part en pays neutre, la Suisse, puis envisage d'émigrer aux États-Unis. Il invoque un prétexte quelconque ; il y restera deux jours...

 

La Guerre est là ! La France doit répondre à ses engagements

Mussolini propose une conférence...

** 29 - 30 septembre 1938: accords de Munich. ( sans la Tchécoslovaquie, sans l'Urss …)

Daladier acclamé - 30sept 1938 - Retour de Munich

Les quatre puissances décident de la cession immédiate des Sudètes à l'Allemagne. La Tchécoslovaquie n'a pas participé aux négociations. Hitler proclame la fin de ses revendications européennes...

Daladier et Chamberlain sont, chacun, accueillis triomphalement. La Paix est saluée : Léon Blum, dans Le Populaire du 1er octobre : « Il n'y a pas un homme et pas une femme en France pour refuser à Chamberlain et à Daladier leur juste tribut de gratitude. La guerre est écartée. Le fléau s'éloigne. On peut reprendre son travail et retrouver son sommeil. On peut jouir de la beauté d'un soleil d'automne. Comment ne comprendrais-je pas ce sentiment de délivrance puisque je l'éprouve ? »

La chambre des députés ratifie l'accord : ont voté contre les 73 députés communistes, un socialiste Jean Bouhey, et un député de droite Henri de Kérilis.

Emmanuel Berl affiche sa satisfaction que l'on ait évité la guerre de justesse. Quelques-uns de des amis de la NRF, le condamnent. Au nom de l'ant-fascisme, la polémique s'écrit entre ''Les Pavés de Paris'' ( de Berl) et, Julien Benda et Schlumberger de la NRF.

Gide et Benda, congrès des écrivains, 1935

Berl veut vaincre Hitler par la paix, et non par la guerre,

Berl ajoute que sa revue (les ''Pavés de Paris'') a été fondée pour démasquer et pour déjouer le complot ourdi contre la paix par les agents directs, ou indirects, ou avoués, ou secrets du Komintern.

 

Daladier entretient une confusion volontaire entre ''réfugié'' ( tchèques, allemands, autrichiens ou espagnols) et agents communistes. Loi du 12 novembre 1938 pour « le contrôle absolu à l'accès sur notre territoire » prévoit un internement administratif des « indésirables étrangers »/

Berl soutient cette politique, que les réfugiés soient juifs ou non.

Au moment de Munich, après une hésitation due à ses convictions pacifistes qui le rangent d'abord du côté munichois, Mounier ne tarde pas à rejoindre le camp des anti-munichois. Fabrègues, en revanche, reste hostile à tout conflit menaçant la civilisation occidentale et se montre délibérément favorable à Munich.

Emmanuel Mounier réagit et parle de « la félonie Daladier-Chamberlain ».

Fabrègues qui avait préparé sa valise en cas de mobilisation est rassuré, au contraire : «  s’il n’y a pas de trop gros incidents guerriers en Tchéco-Slovaquie et si le parti juif de la guerre qui se démène en France ne parvient pas à nous affoler, si. (comme il est actuellement certain) l’Angleterre est décidée à maintenir la paix et la France décidée à modeler son attitude sur celle de l’Angleterre, il ne doit pas y avoir de guerre européenne. » Et cela, même s'il considère avec Maulnier que l'empire français, l’empire britannique, et un jour ou l'autre la puissance industrielle des Etats-Unis, font que nous avons « dix fois plus d’atouts que l’adversaire encore aujourd’hui ». Mais la guerre moderne serait trop destructrice, et mettrait en péril la civilisation..

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1938 – Fabrègues – Mounier - Berdiaeff

Publié le par Régis Vétillard

En ces années les intellectuels excellent à se retrouver autour de revues, ainsi Jean de Fabrègues participent à six ou sept revues, qu'il anime également. Les équipes peuvent varier et constituent ce que l'on appelait la '' Jeune Droite '', et qui s'est écartée de l'Action Française.

'' Combat '' se voulait antiparlementariste, voire antidémocratique, mais pas fasciste...

'' Civilisation '' se veut présenter une exigence intellectuelle et spirituelle ; s'y expriment l'existentialiste Karl Jaspers, le philosophe-paysan Gustave Thibon, Etienne Gilson (qui fut le professeur de philosophie thomiste de Fabrègues en Sorbonne)

 

La question de l'antisémitisme divise les catholiques; elle se situe plus au niveau politique que racial, avec la peur d'une ''mainmise juive'' sur le pays... Le caractère raciste de Céline choque Lancelot et beaucoup de catholiques... ''Combat'' également prend ses distances ; Brasillach, quitte Combat pour ''Je suis partout'' où il rejoint Lucien Rebatet auquel s'opposent Fabrègues et René Vincent.

Fabrègues et Gabriel Marcel décide de créer ''Civilisation'' pour hausser le débat à un niveau philosophique ; en opposition à '' L'insurgé '' de Thierry Maulnier qui a un discours favorable aux mouvements fascisants...

« Anarchie et désordre de notre pauvre France usée de libéralisme et d'individualisme. Utilitarisme anglo-saxon et américanisme. Totalitarisme de la classe [communisme] et de la race [hitlérisme] ou de l'Etat [fascisme]. De tous côtés un flot de barbarie déferle aujourd'hui sur le monde et menace d'engloutir notre civilisation. » Jean Daujat, qui tient une chronique dans Civilisation.

''Combat'' et ''Civilisation'' paraissent jusqu'à l'été 1939.

 

Fabrègues multiplie les conférences, les réunions privées pour concilier profession, vie sociale et réflexion sur la civilisation; par exemple, le 11 janvier 1938 sur '' le sens moral et social de la civilisation française '', ou sur le '' rôle social de l'ingénieur, et du scientifique '' …

Lancelot qui a beaucoup fréquenté ces personnes, reste - avec l'influence d'Elaine, peut-être aussi - proche de Maritain et de ses positions sur l'invasion de l'Ethiopie en 1935 ou la guerre d'Espagne en 1936... Lancelot apprécie de plus en plus la ligne d'Esprit d'Emmanuel Mounier, il l'a soutenu quand il a condamné l'évolution de la IIIe Force d'Izard, puis la rupture avec l'Ordre Nouveau ( la revue disparaît en 1938) ; même si on gardait le contact avec Denis de Rougemont.

Maritain défend les positions d'Esprit et l'action de Mounier face à l’archevêché et au Vatican ( 1937)... Mounier, avec Maritain, insistent sur le fait que la référence d'Esprit à l'idée de "révolution spirituelle" n'implique pas « une sympathie systématique pour tout ce qui est révolutionnaire », ajoutant : « La révolution n'est pas pour nous la valeur première (...) Nous sommes du parti de l'esprit avant d'être du parti de la révolution ».

 

Lancelot, balance ainsi, entre Fabrègues et Mounier ; l'un prenant systématiquement le contre-pied de l'autre, le premier adoptant les positions des partis de droite, le second des partis de gauche.

 

Myrrha Borodine-Lot, née juive par sa mère, s’intéresse à toutes les religions, et en particulier le lien entre judaïsme et christianisme, et n'en ''pratique'' aucune. Elle reçoit chez elle Nicolas Berdiaeff et Vladimir Lossky ; fréquente le cercle Maritain. Elle et son mari, Ferdinand Lot, forment un couple franco-russe de médiévistes. Ils ont trois filles Irène, Marianne et Eveline.

Irène Lot, épouse de Boris Vilde

Marianne (1913) s'est faite baptiser à vingt ans, elle épouse en 1936 Jean-Berthold Mahn historien comme elle. Eveline (1918) étudie à  l'École des Langues Orientales et se passionne pour les langues orientales et russes.

Irène, s'est mariée en 1934, avec Boris Vildé russe et nationalisé français, linguiste et ethnologue au Musée de l'Homme. Boris Vildé, comme ethnologue, en 1938 part en Finlande, en mission, pour le Musée de l'homme, à Helsinki ; puis en Estonie retour janvier 1939.

Irène a traduit du russe, en particulier un ouvrage qui a beaucoup frappé Elaine : "Nicolas Berdiaeff. Cinq méditations sur l'existence" (1936). Ce livre fut le prétexte de leur amitié, et au fur et à mesure de l'évolution de la maladie d'Elaine, Irène la visite et l'accompagne dans sa réflexion religieuse.

 

Banni d'URSS, Nicolas Berdiaeff (1874-1948) est le maître à penser de beaucoup, personnaliste humaniste, il promeut la personne contre la tyrannie du collectif, et contre l'égoïsme de l'individu.

Je note ci-dessous les thèmes qu'elles ont approfondi à partir de la pensée de Berdiaeff :

La solitude est de l'ordre de la nostalgie de communion ; c'est aussi un phénomène social : la solitude en société, c'est la solitude par excellence.

Le chemin à travers la solitude nous permet de découvrir que le monde objectif est insuffisant. Notre ''étant'' est projeté dans la socialisation, l'économique, le technique ; nous expérimentons les fausses promesses du paradis ou de l'enfer, de l'ordre ou du désordre ... Berdiaeff nous dit que ce chemin nous projette dans le non-moi : dans le monde des objets, dans le monde objectivé.

Sortir de soi pour rencontrer le non-moi, le monde objectif, ne permet pas de dépasser la solitude... Le monde objectivé ment : il n'est qu'un royaume qui n'offre que des chimères qui font croire qu'elles sont le tout du bonheur et de la vie.

La solitude est un stade nécessaire de la découverte de l’insuffisance du monde objectif.

Nicolas Berdiaeff

 

Berdiaeff utilise ces deux notions de Subjectif et Objectif. Il nous présente deux forces qui entrent en opposition, une force de nécessité qui rend objet, et une force de libération qui part du sujet.

La subjectivité comme intériorité comme unité capable de pensée et d’action à laquelle est attribuée un rapport à soi spécifique.

L’objectivation est le processus par lequel l’expression subjective libre devient objet, et par lequel aussi les actes les plus révolutionnaires sont récupérés par le monde extérieur et sont transformés en “faits” - objets du regard et du temps, de l’histoire.

L’objectivation est du côté de ce qui est mort, de ce qui est figé, par opposition à la spontanéité personnelle. Or il faut bien voir que l’objectivation n’est pas tant un état de fait achevé qu’un processus tendant à figer les êtres, c’est une force de nécessité, presque une force d’inertie, qui nivelle les excès et les percées de la spontanéité créatrice.

 

La connaissance, peut être personnelle ou objective ; connaître une personne est bien au-delà de ses particularités physiques ou biographiques... On ne connaît pas à l'aide de concepts : tout ce qui est rationnel, logique est étranger à une connaissance personnelle, subjective.

Et, précisément, c'est alors que le ''moi'' ( égocentrique, égoïste) devient une personne, c'est en communiant avec l'autre.

L'activité du ''moi'' doit se transcender elle-même, par l'intuition du ''toi'' et trouver la communion ; ça ne peut pas être dans le cadre des institutions sociales...

Sortir du temps, qui n'est qu'un produit de l'objectivation, pour trouver l'éternité. La mort n'est qu'un moment de ce destin, qui met fin à notre objectivité..

 

Le philosophe se résigne à mener une existence tragique ; il ne peut être qu'en conflit avec les formes socialisées de l'être, qu'elles soient sociétés religieuses ou scientifiques, parce qu'elles objectivent.

Il faut en revenir au sujet lui-même, dans son existence concrète, là où il atteint l'être et l'existence.

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1938 - Noël - La SFIO

Publié le par Régis Vétillard

fabrication de Bûches de Noël 1938

fabrication de Bûches de Noël 1938

24-25 décembre : congrès national extraordinaire du Parti socialiste SFIO à Montrouge sur la question de la Paix et de la guerre

 

Après avoir été pacifistes, et suite à la crise de Munich, à l’automne 1938. Les socialistes se divisent en deux grands courants:

L’un, le courant « pacifiste » proprement dit, rassemble sous la conduite du secrétaire général Paul Faure et du secrétaire adjoint Jean-Baptiste Séverac les militants désireux d’explorer jusqu’au bout toutes les possibilités de paix. L’autre regroupe, derrière Léon Blum, directeur du Populaire et président du Groupe parlementaire, les partisans d’une politique de « fermeté » ou de « résistance ». Les deux courants s’affrontent au Congrès national extraordinaire de Montrouge, en décembre 1938. Blum l’emporte et impose l’adoption d’une ligne de fermeté.

Vincent Auriol, Léon Blum, Paul Faure et Jean-Baptiste Séverac en 1936.
En 1938 sur une publicité des Galeries Lafayette, sponsor de la Minute du Père Noël, sur Radio-Cité

 

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1938 – Bourbaki - Weil et Cavaillès

Publié le par Régis Vétillard

Septembre 1938. Malgré sa fatigue, Elaine accepte de suivre Lancelot sur les routes de France pour rejoindre une localité de deux mille habitants - Dieulefit - qui se dit '' terre protestante, et bastion républicain''. Et, c'est pour visiter Simone Weil qui a accompagné son frère André à un congrès de la ''société secrète '' Bourbaki... Même si... Ils sont prévenus ! « les femmes et les visiteurs, sont susceptibles d'être parqués avec les animaux de la ferme comme figurants... », dixit André !

Bourbaki en sept. 1938, à Dieulefit.

 

Je rappelle, que le 10 décembre 1934 ( combien de ''10 décembre'' mémorables! ...), à Paris, au Café Capoulade, six jeunes mathématiciens – insatisfaits des manuels scolaires - ont voulu refonder la mathématique ( dans son unité et sa cohérence). Ils décident de rédiger en commun un traité d'analyse - intitulé '' les Éléments de mathématique'' - aussi moderne que possible, destiné à apporter une perspective nouvelle dans l'enseignement de cette branche. Leur approche ne se contente en effet pas de bâtir sur les acquis mais propose plutôt de tout revoir depuis le début. Le traité prend la mathématique à leur début et donne des démonstrations complètes, rigoureuses, indiscutables... .

La société est ''secrète'' parce que chaque membre est coopté, et doit sacrifier avec abnégation son individualité à un pseudo : ''Nicolas Bourbaki'' ; décrit par André, aux curieux, comme un auteur reclus passant ses jours à jouer aux cartes dans la banlieue parisienne de Clichy...

Lancelot pour oser visiter cette assemblée, a la chance de pouvoir se référer à des personnages respectés comme Painlevé, même si la ''théorie des fonctions de papa'' semble bien désuète ; ou s'associer à quelques commentaires au sujet de Emmy Noether, qu'avec Elaine ils avaient rencontré à Göttingen en 1931, et connue de plusieurs personnes ici.

Lancelot et Elaine, ont ainsi la chance de rencontrer de grands mathématiciens comme André Weil, Henri Cartan, Jean Delsarte, Jean Dieudonné ...

Intéressant, également, de savoir que nous sommes dans les locaux de l’école de Beauvallon créée par Marguerite Soubeyran dieulefitoise, en 1929.

Passée par une école d’infirmière à Paris, puis par l’institut Jean-Jacques-Rousseau de Genève, cette communiste, liée aux intellectuels et au milieu médical, fait venir à elle toutes les bonnes volontés ; pour créer la première ''école nouvelle'' ( pédagogie active) et mixte en France. L'anecdote dit : « Quand Marguerite rencontre sur un quai de gare Simone Monnier, en 1936, qui sera le troisième pilier de l’école de Beauvallon, celle-ci, dont le père est pasteur, lui avoue son amour des lettres : « eh bien, vous ferez une excellente prof de maths », lui répond Marguerite.

Des républicains espagnols - une vingtaine de femmes et leurs enfants - sont accueillis à Dieulefit par la municipalité.

Le climat favorable de la région semble redonner à Elaine quelques forces ; elle prend beaucoup de plaisir à découvrir les villages environnants comme Le Poët-Laval, ou l'église Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Comps, isolée sur un promontoire, cet ancien prieuré est édifié selon un plan en croix grecque. Certains disaient même le plan rapporté d'Orient... Lancelot a beaucoup aimé cet endroit ; et ils ont longuement évoqué la vie du chevalier limousin Roger de Laron...

Si pendant la journée, Bourbaki fait des mathématiques, pendant les repas, Simone Weil, Elaine et Lancelot maintiennent le niveau en parlant philosophie.

Bien-sûr le lien est fait par les mathématiques, et par Jean Cavaillès, absent mais dont la pensée est explicitée par Simone. Pensée difficile qui – en toute humilité – ne peut être que survolée.

Jean Cavaillès

Cavaillès est spinoziste en particulier attaché à l'idée de ''nécessité'', et ''nécessaires'' sont aussi les enchaînements mathématiques. On peut prendre ''la'' mathématique comme le modèle par excellence de l'activité de la raison.

André Weil fait alors un laïus sur les activités mathématiques développées à Göttingen, notamment par Hilbert, et Emmy Noether qui ouvrent sur un nouveau monde, et rencontrent aussi les réflexions de Husserl ( la phénoménologie).

Précisément, Simone continue sur la notion de structure qui préside à l'organisation du savoir.

Cavaillès, dit-elle, fait l'hypothèse que la science est un objet sui generis, originale dans son essence. Les mathématiques sont un moyen pour savoir ce que veut dire penser, connaître.

Comme en science, philosopher serait plus une affaire de concepts, qu'un épanchement des états d’âme de l’intellect.

La nécessité caractérise la science. La démonstration est une nécessité produite, et au cœur de cet acte produit ( la démonstration) il y a la conscience.

Cette nécessité, remarque Simone Weil, elle la reconnaît dans le travail manuel. Plus généralement, « Dieu a confié tous les phénomènes sans exception aux mécanismes du monde ». On pourrait dire encore que le monde est régi par deux forces qui s’opposent : la pesanteur et la grâce.

Un dualisme, encore signifié par la force et le malheur : la force cause le malheur, mais sans force, comment sortir du malheur ? Ou, la nécessité intérieure opposée à la nécessité extérieure (force).

Lancelot ose rebondir pour exprimer ce qu'il en comprend : - Quand je comprends vraiment... il y a du divin.

André Weil ajoute : Parce qu'en Dieu tout est rigueur et nécessité.

Simone Weil continue : On en revient à Spinoza : « chacun fait ce qui suit de la nécessité de sa nature » (Éthique, IV, 37). Ma liberté - ce n'est pas de nier la nécessité - mais de la comprendre !

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1938 – Anschluss – S Weil - Thibon

Publié le par Régis Vétillard

** L’Anschluss ( Annexion de l'Autriche) : À l'aube du samedi 12 mars 1938, l'armée allemande franchit les postes frontières autrichiens.

« M. Hitler a choisi l’heure favorable pour passer à l’action. Les perplexités où se débat la politique de l’Angleterre, qui va pouvoir se demander si, en fait, M. Eden n’avait pas raison ; une crise ministérielle stupide dans une France affaiblie par les conflits sociaux et de partis, ont fourni au Führer toutes les opportunités désirables d’agir impunément [...]. Un national-socialiste allemand, définissant dans un livre assez récent les ressorts de la politique hitlérienne, explique qu’elle a sans cesse tablé, avec quelque appréhension d’abord, puis hardiment après les premiers succès, sur l'indifférence ou l’irrésolution de l’Angleterre et sur le manque de réaction et le laisser-faire qui ont caractérisé la politique française depuis que s’est close l’ère Poincaré. » Le quotidien de la droite catholique La Croix du 13 mars 1938

 

Que faire contre Hitler ? Lancelot résume une discussion qu'il vient d'avoir avec un journaliste ( S. H.), qui craint que notre démocratie nous pousse dans les griffes du nazisme. Et, s'insurge que l'on fasse l'amalgame entre le fascisme ( avec l'exemple italien) et le national-socialisme.

L'Italie illustre pour lui cette tradition romaine, c'est à dire occidentale et chrétienne, et européenne. Notre civilisation est fondée sur l'amour grec de la raison, l'amour romain de la loi, et le christianisme. L'Allemagne reste barbare et ouverte vers l'Orient. Le nazisme est anti-chrétien, et le bolchevisme athée.

« Le fascisme italien s'applique à faire revivre une conception plus noble de l'Etat dans un pays qui tombait en décomposition; le nazisme tente d'exciter des instincts rapaces qui ont longtemps dominé l'âme allemande. Le fascisme organisa l'Italie corporativement; le nazisme brisa le syndicalisme et remplaça l'adhésion par l'adoration. L'une des premières réalisations du fascisme, ce fut la réconciliation de l'Eglise et de l'Etat; l'un des buts du nazisme est la déchristianisation de l'Allemagne. Le fascisme construit un Etat, entité précise; le nazisme déifie la race, entité indéterminée. Or, toutes ces différences sont essentielles, tandis que les ressemblances entre fascisme et nazisme ne sont qu'accidentelles et superficielles. »

S. H. prévoit que la Russie et l'Allemagne s'allieront contre nous, parce qu'ils ont la même idéologie !

 

Gustave Thibon (1903-2001), le ''philosophe-paysan'', converti au catholicisme et monarchiste remarque que chez les gens de droite, le mot «démocratie» est devenu synonyme de corruption et d'illusion en matière sociale.

C'est un lieu commun, dit-il, que « la démocratie a produit des résultats diamétralement opposés à « l'esprit » de la démocratie. L'idéal révolutionnaire a donné le jour à la soif de richesses matérielles du XIXe siècle et à l'appétit de jouissances immédiates du XXe. La fraternité a tourné à une séparation entre les classes et une atomisation des individus encore inédites dans l'histoire. »

Peut-être finalement la Démocratie ne serait qu'une parodie du christianisme ?

- En effet, les similitudes entre l'idéal chrétien et l'idéal démocratique s'avèrent frappantes. ?

- Précisément, c'est une partie du problème. La démocratie imagine un ''paradis'' uniquement terrestre « fait à la mesure de l'homme charnel et tombé, et où cet homme jouirait d'une plénitude divine sans aide extérieure ni purification intérieure, sans fouler aux pieds ses propres entrailles ni tendre ses mains vers un Dieu sauveur. »

En politique, parler de l'''homme nouveau'', ou du ''monde à venir'' c'est utiliser une force religieuse pour un ordre humain. On cherche le salut par la refonte du statut de la cité.

La Renaissance a découvert la religion de l'homme, et le paradis c'était la libération de la raison, et des sens … La révolution de 1789, laisse l'individu et décrit le paradis dans des cadres sociaux, c'est la religion de la Cité. « La société serait la cause première du mal, et du bien . Le salut, c'est être heureux ; et les hommes seront bons, parce qu'ils seront heureux.

Le problème, c'est qu'avec Dieu : il faut mettre du sien, il faut pâtir, se purifier, etc. Aide-toi, le ciel t'aidera..: Celui qui nous a créés sans nous, ne nous sauvera pas sans nous, disait saint Augustin.

Et voici : il existerait un moyen pour s'en tirer de l'extérieur ? - Ce moyen existe, et c'est la réforme de la société... La facile refonte des lois dispense de l'impossible refonte des hommes. »

 

Simone Weil, assailli par une extrême fatigue, et de violents maux de tête, demande à son ministère un congé. Elle lit l'ancien et le nouveau Testament, les auteurs anciens et s'intéresse au Moyen-âge.

En avril 38, elle fait un séjour à l'abbaye de Solesmes : elle décrit à Lancelot la beauté des chants grégoriens en cette semaine sainte et son expérience de la « réalité du surnaturel ».

- Avec les offices de la passion, la pensée de la passion du Christ est entrée en moi pour toujours..

- Le malheur... Toujours la souffrance, le malheur.... ?

- Non... ! Au-delà du monde, des rapports de force qui nous gouvernent, au-delà du malheur, il y a le Bien.

- Le Bien ? Le Bien des philosophes ?

- Non plus … J'ai senti, -je ne me préparais pas à cela - , « une présence plus personnelle, plus certaine, plus réelle que celle d’un être humain, inaccessible et aux sens et à l’imagination, analogue à l’amour »

 

Simone Weil revient sur son expérience de l'usine, et aussi en Espagne... L'esclavage, l'encasernement ; c'est le malheur.

Simone Weil s'est aperçue que l'individu – dans un collectif structuré – peut perdre sa personnalité, jusqu'à se déshonorer par son suivisme. Il y a de l’idolâtrie dans le fascisme, et le communisme.

Elle va même jusqu'à envisager que le loi interdise à « un groupement d’exprimer une opinion ». La Démocratie peut devenir une idole, si elle est dirigée par des passions ; or «  un parti politique est une machine à fabriquer de la passion collective » !

Pour Platon, rappelle t-elle, la conscience n'est que personnelle. Un parti ne pense pas, il ne pense qu'à enrôler...

- Ce que vous dites du parti, vous pourriez le dire d'une Eglise... ?

- Exactement : dans les deux cas, la personne individuelle adhère à une pensée, ou à une croyance, sans en connaître tous les attendus, elle se range à des affirmations établies d’avance, et que parfois elle ne connaît pas.

- Vous allez un peu loin.. ! La personne a besoin de s'enraciner dans un groupe, une tradition...

- En effet, après avoir dit cela du collectif, je dois ensuite reconnaître que je valoriserai donc un groupe enraciné dans le passé, dans une culture... Je défendrais aussi des groupes de conviction, même religieux ; à condition qu'ils ne participent pas à la vie publique.

- Les élus de la nation appartiennent à des partis.. ?

- Ne pourraient-ils pas rester isolés ; en relation avec leurs électeurs uniquement ?

- Le syndicat assure la défense des travailleurs.

- Je préfère les corporations anciennes. Nos syndicats sont inféodés à l'URSS.

Simone Weil pense que la politique est une technique, non pas une vision du monde. L'essentiel est d'entretenir la liberté de la conscience personnelle. La conscience doit se soumettre aux lois, pour le bien commun ; ou se révolter.

 

Elaine qui participent à des cours privés de philosophie donnés par Louis Lavelle ( professeur au lycée Henri IV), est enthousiaste.

Ce professeur, est impressionnant, non seulement parce qu'il est très grand, et toujours concentré en lui-même, mais, parce qu'il fait cours sans aucun papier... Il communique ses pensées. Sa philosophie, est fondée sur cette vie quotidienne qui nous interpelle. Avec le langage courant, il aborde des questions métaphysiques. Il éveille – avec intelligence - à la profondeur.

Bien sûr, il cite Augustin et Pascal ; mais surtout Platon, Leibniz, Spinoza, Malebranche, Kant, Bergson et, beaucoup, Descartes.

Une réflexion du philosophe sur l'existence de Dieu est pour elle, une révélation : '' Dieu n'a pas d'existence, il a ( ou ''est'') une Présence. Dieu n'existe pas comme une créature, un être, un idéal ; mais plutôt comme une source, une fin ; enfin... pour nous ; parce que Dieu, c'est l'éternité..''

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1937-1938 – La guerre envisageable

Publié le par Régis Vétillard

De 1936 à 1940, Lancelot rend compte du Renseignement militaire directement à Daladier ou à son secrétariat général ( Robert Jacomet) ou encore à Roger Génébrier,... Le ministère est alors mobilisé à la préparation de la guerre ( pour l'éviter à tout prix...) : elle serait une guerre longue, d'usure. Est lancée, la mobilisation industrielle : les usines doivent travailler à la sécurité du pays.

Pierre Laval, sénateur, tente de convaincre Daladier, qu'il serait judicieux de se rapprocher de Mussolini, contre Hitler ; à l'image de ce qu'il a fait, lui, avec Staline en 1935...

 

Pour ce qui est de l'Allemagne, nos services surveillent les permanents allemands, qui frayent dans les lieux mondains ( des micros sont installés au ''122'' - maison close de luxe), diplomates, journalistes ou industriels, tel Julius Westrick, nazi depuis le début et installé à Paris depuis 1925, il suit les réfugiés politiques allemands et prépare le voyage et le séjour de personnalités françaises à Berlin ; ou tel l'intellectuel allemand Friedrich Sieburg, auteur du fameux Dieu est-il français, qui fréquente les salons aristocratiques comme celui de la comtesse de Ganay, ou celui de la comtesse Jean de Castellane, ou encore celui des Melchior de Polignac ; et que pouvait croiser Anne-Laure de Sallembier.

Le 6 novembre 1937, nos services ont fait passer un rapport complet sur les projets d'Hitler. Les responsables français - Daladier, Pétain, Cot, Gamelin, Campinchi... - qui se passent le compte-rendu ont estimé ces informations '' incroyables''. Elles ne seront pas exploitées.

Nos services de renseignement en Allemagne, ont l'opportunité d'utiliser des informations militaires confidentielles grâce à Hans-Thilo Schmidt qui travaille, au bureau du chiffre du ministère de la Reichswehr, puis au ministère de l'air. Ainsi, dès novembre 1937, nous savons qu'au cours d'une réunion, Hitler a clairement exposé son calendrier d'invasion de l'Europe (Autriche et Tchécoslovaquie en 1938, Pologne en 1939, France et Benelux en 1940). Il annonce l'Anschluss 15 jours avant sa réalisation, l'invasion des Sudètes dès août 1938 (soit 6 semaines avant les Accords de Munich), puis les plans de l'invasion de la Tchécoslovaquie.

 

En 1938, la maison Eher autorise finalement la publication d’une compilation d’extraits intitulée Ma doctrine  qui reprend le contenu de Mein Kampf expurgé de nombreux passages antifrançais. Ce texte revendique nettement un ''espace vital '' pour les allemands en éliminant les juifs et les slaves... Maurice-Henri Gauché, du 2e bureau a déjà alerté dans ses rapports sur ce qu'implique le nazisme... Un programme mis en oeuvre dès 1938. Les lois de Nuremberg en 1935, ont déjà établi le racisme comme doctrine absolue du nazisme.

 

Thierry Maulnier

Le 19 janvier 1938, à la Salle des Sociétés Savantes à Paris, lors d'une réunion autour de Thierry Maulnier, et de Jean de Fabrègues, à l'occasion de la sortie du livre de Maulnier “Au-delà du nationalisme”, Lancelot y voit Drieu, et Ramon Fernandez.

Beaucoup de monde s'étonne du titre : pourquoi ''au-delà'' .. ?

Fernandez regrette le thème général du livre, parce « qu'on nuit toujours plus à la doctrine « au-delà » de laquelle on s'aventure qu'à toutes les doctrines contraires. ».

Maulnier se défend ; il considère que le fascisme récapitule les aspirations sociales et communautaires ; qu'il offre un nationalisme débarrassé du libéralisme, et du caractère prolétarien pour ne s'intéresser qu'à la nation... Fabrègues, lui, souhaite y apporter une coloration spirituelle : « L’action révolutionnaire ne se marque pas pour nous au nombre des bombes, à l’action dans la rue. Elle consiste à exiger d’un ensemble social qu’il substitue une nouvelle optique de la vie à celle qui existe. » Jean de Fabrègues, '' Libérer le prolétariat '', Combat, mai 1938.

Drieu rappelle à Maulnier qu'il lui reprochait « de ne savoir prendre parti » ; alors qu'il est lié « dès la première heure au Parti Populaire Français et à Jacques Doriot. ». Alors, comment se fait-il que - «  en ces journées tragiques où se décide le sort du pays » - il semble refuser toute profession de foi particulière ; en effet « il lie le procès du capitalisme et celui du marxisme, les éclaire l'un par l'autre, les confond dans un réquisitoire merveilleusement exhaustif, mais il ne va pas au delà.. »

Drieu se demande comment face à la licence capitaliste et la pagaille démocratique, on peut échapper à la solution totalitaire... ? Il reproche à Maulnier de se replier dans un jugement philosophique.

Lancelot relève que , comme le dit Maulnier, l'idée de ''nationalisme '' est généralement insuffisamment nourrie par les idées ; et surtout, s'étonne que le nazisme n'inspire pas plus de crainte.

Brasillach se dit admirateur des nationalistes, qui même enfermés dans une dictature, parlent au cœur de tous ceux qui « parfois émus, parfois rageurs, songent au passé et au présent de leur pays, et se disent : pourquoi pas nous ? » (R. Brasillach, Notre avant-guerre, p. 236) ; et Drieu de renchérir : le fascisme permettra de rénover un nationalisme et de relancer la patrie « dans le grand battement de la civilisation européenne ». ( Drieu la Rochelle : Notes pour comprendre le siècle, p. 172)

Jean de Fabrègue

 

Pour Fabrègues, l'opposition ''fascisme-antifascisme'' est un mythe créé par le communisme, et qui ne repose que sur le danger nazi. Il vante auprès de Lancelot, les contributeurs de sa nouvelle revue ''Civilisation'', comme Gustave Thibon ( vu chez Maritain), Etienne Gilson. Il a l'appui du philosophe Gabriel Marcel.

 

Lancelot s'imaginait que les socialistes et les radicaux pourraient s'entendre et s'unir pour proposer une troisième voie en décrochage d'une '' collectivisation des moyens de production'' et d'un totalitarisme communiste...

Mais les adhérents du parti radical, représentant une classe moyenne effrayé par le collectivisme, poussent leur parti et Daladier à rompre avec le Front Populaire trop proche des thèses marxistes ; c'est fait en 1938, avec un gouvernement radical et centre droit.

Depuis le mariage d'Emmanuel Berl avec Mlle Mireille (26/10/1397) ; leur appartement au 36 rue de Montpensier reçoit politiques, journalistes et artistes. Un appartement coupé en deux, avec un feux rouge pour être accepté chez Mireille.

Emmanuel Berl et son épouse

Berl comme Lancelot, est un amateur de la ''conversation'' ; sa voix est onctueuse, cultivée, très parisienne. Sa direction de ''Marianne'' lui a donné de la notoriété ; et plusieurs de ses essais, comme '' Mort de la pensée bourgeoise '', ou dix ans plus tard le dernier ''Frère bourgeois mourez-vous? Ding ! Ding! Dong! '' (fev 1938) ont fait réagir...

Chez Berl, Lancelot va y croiser, par exemple, Paul Reynaud, Georges Mandel, Henry Torrès, Georges Bonnet, Paul Morand et Jean Sablon, Maurice Chevalier, Jean Nohain et Sacha Guitry ( les deux témoins du mariage).

Berl reste pacifiste, de grande culture avec une mémoire prodigieuse.

Les deux amis, Berl et Drieu, se sont fâchés, suite à la critique ironique et personnelle de Berl sur ''Rêveuse bourgeoisie'' paru l'année précédente..

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1937 - La Cagoule -

Publié le par Régis Vétillard

Marx Dormoy_1937

Tous les jeudis, à l’hôtel Matignon - à la demande de Marx Dormoy - se tient à présent une réunion entre les ministères de l'intérieur, des affaires étrangères et de la Défense, avec les militaires de l'état-major; en cause les menaces à nos frontières ( Espagne, Italie, Allemagne) et les menaces d’attentat sur le sol français... Aucun procès-verbal ne sera rédigé, les débats devront être secrets.

On soupçonnait que la fusillade qui avait fait sept morts et trois cents blessés dont quatre-vingts policiers ; lors des graves incidents de Clichy du 16 mars 1937, étaient - par des provocateurs - manipulés de l'étranger... Les arrestations d’espions allemands se multiplient.

Lancelot entend parler officiellement de '' la Cagoule'' ; ce qui n'était peut-être qu'un fantasme est attesté par des témoignages et des noms... Cependant le 2e bureau préfère l’infiltrer et laisser faire, pour s'en servir contre les communistes.

La Cagoule est entrée en contact avec le 2e bureau ; et plus précisément Gabriel Jeantet et le docteur Martin ont fourni une documentation jugée « utile et appréciée » concernant les communistes.

 

Les associations d’anciens combattants, facilitent - le lien entre la société civile et le monde militaire, et - la politisation de l’armée. Des officiers en uniforme pénètrent les cortèges politiques.

La Cagoule - T1 BD Brugeas, Herzet, Damour

On situe la création de la Cagoule après l'unification des ligues en 1934. Elle se constitue par strasse , avec quelques parties visibles, comme le ''Front national'' de Charles Trochu ; ou l'UCAD ( Union des comités d'action défensive) de l'ex-général Duseigneur et Pozzo di Borgo ; le CRAS ( Comité de rassemblement antisoviétique ) avec Robert Jurquet de la Salle...etc. Une organisation qui se fait appeler le CSAR ( Comité secret d'action révolutionnaire) piloterait cette mouvance définie comme synarchique, puisque elle considère que si le pouvoir, pouvait être donné à Philippe Pétain, il serait placé sous l'autorité réelle de l'organisation secrète.

 

Sont reconnus à la tête de l'organisation : Eugène et Henri Deloncle, Jean Filliol, suivis par des dissidents de l'Action Française ; Henri Martin, le général Dusseigneur, Raphaël Alibert, proche et conseiller du maréchal Pétain, le commandant Loustaunau-Lacau, qui appartient à l’état-major particulier de Pétain ; Jacques Corrèze, Aristide Corre, Gabriel Jeantet...

 

Les bailleurs de fonds sont importants et se recrutent dans l'industrie et la banque. On y accole aussi une revue : Thierry Maulnier participe à la création de ''L'Insurgé'' hebdomadaire financé par Jacques Lemaigre-Dubreuil (industriel) qui soutient l'organisation.

Certains s'en inquiètent : Maurras se désolidarise de l'action violente. Le colonel de La Rocque craint une infiltration de ce mouvement par des fascistes agissant pour le compte de l’étranger.

La Cagoule-T2 Brugeas, Herzet, Damour

 

Des femmes prêtent leurs charmes, pour surveiller, comme Navachine, bientôt assassiné par la Cagoule. D'autres informent, nouent des liens avec des personnages très hauts placés, au sein de l’armée en particulier...

La cagoule est organisée en cellule, unité, bataillon, brigade, à l'image de l'armée française.

Une cellule, '' les Chevaliers du glaive'', dirigés à Nice par Joseph Darnant et François Durand de Grossouvre, adoptent un rituel et un costume. On dit ainsi que ce sont les monarchistes ( Maurice Pujo) qui ont désigné la nébuleuse du sobriquet de '' la Cagoule ''.

Nos services ont pour l'instant imputées au CSAR, ces actions :

23-24 janvier 1937 : Meurtre de Dimitri Navachine ( l'homme des soviétiques): Jean Filliol le tue à coups de baïonnette .

16 mars 1937 : Provocations lors de la manifestation de Clichy (6 morts et 200 blessés ). Objectifs: radicaliser les membres du PSF, les pousser vers le PPF de Doriot.

18 mars 1937 : vol de quatre mitrailleuses et de trois fusils-mitrailleurs à la caserne Théremin d'Hame à Laon. Achat d'armes en Allemagne; dons d'Italie, contre services...

17 mai 1937 : Laetitia Toureaux - proche des fascistes italiens - est assassinée par les cagoulards...

9 juin 1937 : Assassinat des frères Rosselli, anti-fascistes commandité par les services secrets italiens.

29-30 juillet 1937 : Destruction d’avions militaires américains destinés à l’Espagne républicaine sur l’aéroport de Toussus-le-Noble près de Paris. Un avion détruit, 2 autres endommagés.

11-12 septembre 1937 : Des bombes sont placées aux sièges de la CGPF et de l’UIMM, ( patronat ) : 2 policiers tués ; et la droite accuse aussitôt les rouges...

 

Le 16 septembre, la police procède à une perquisition chez Aristide Corre, archiviste du mouvement chargé notamment du codage des noms et des adresses; elle y trouve la liste des adhérents du mouvement terroriste.

D'autres éléments comme les rendez-vous nocturnes du général Weygand de de M. Jean Chiappe dans le souterrain d'un hôtel particulier de la rue Lepic ; et surtout les rumeurs maladroitement lancées dans le sein de l'armée sur un putsch communiste prévu.. poussent nos services à entrer en action dans le cadre d’enquêtes sur le trafic d’armes ; alors qu'est projetée une véritable tentative de putsch dans la nuit du 15 au 16 novembre 1937, avec occupation de l'Elysée, des ministères et intervention de l'armée...

Finalement, Deloncle hésite et n'envoie pas les ordres ; alors que la police découvre les caches-d'armes : dans un garage du Boulevard de Picpus ; elle trouve 832 grenades, 6 mitrailleuses, 42 fusils-mitrailleurs allemands, 49 fusils semi-automatiques italiens, 80 fusils de guerre, 45 fusils de chasse, des munitions.

Au lendemain le complot est mis à jour, des perquisitions permettent de découvrir des caches-d'arme sur tout le territoire, des listes d'adhérents...

Le 26 novembre l’arrestation de Eugène Deloncle, est annoncée, ainsi que celle d’autres membres ; le 27 celle du duc Pozzo di Borgo, collaborateur du colonel de la Rocque.

Fin novembre 1937, tous les chefs cagoulards sont mis hors d'état de nuire : Deloncle, Corrèze, Méténier, Duseigneur et Jeantet sont arrêtés; Filliol, Martin et Corre réussissent à prendre la fuite.

 

Daladier préfère étouffer l'affaire ; trop de cadres dans l'armée sont impliqués.

Marx Dormoy, responsable du démantèlement de la Cagoule, sera assassiné en représailles le 26 juillet 1941.

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La Question de la ''Quête du Graal'' – S. Weil.

Publié le par Régis Vétillard

Lorsque Lancelot lui parle de son intérêt pour la littérature et la spiritualité médiévale ; Simone Weil montre alors un enthousiasme rare chez les intellectuels du moment : elle parle même du « génie de la civilisation d'Oc », qui a su mêler « la chevalerie venue du Nord et les idées arabes, et qui ressemble à une petite réplique de la Grèce Antique »

Pour Simone Weil, le Christianisme a redonné vie à l'héritage grec ( contre Rome). Ensuite, la renaissance carolingienne s'ouvrait à une civilisation de liberté spirituelle, la seule tradition chrétienne vivante et libre... Puis, l'Europe a fait le choix de la force, contre l’esprit, de « l’alliance du trône et de l’autel ». Alliance impossible, puisque ce n'est pas la même logique !

Le catharisme s'opposait à cela, en pays d'Oc « Les richesses spirituelles affluaient de toutes parts sans obstacle. La marque nordique est assez visible dans une société avant tout chevaleresque ; l’influence arabe pénétrait facilement dans des pays étroitement liés à l’Aragon ; un prodige incompréhensible fit que le génie de la Perse prit racine dans cette terre et y fleurit, au temps même où il semble avoir pénétré jusqu’en Chine. »

La « civilisation chevaleresque » de l’Occitanie médiévale s'opposait à la centralisation ; elle estimait que, ce que les seigneurs « désignaient par patrie ; ils l’appelaient langage » : un langage commun.

Le roman et les gothique représentent deux options religieuses antithétiques au sein du monde chrétien.

L'art roman, comme l'amour courtois est inspiré par l'amour surnaturel, qui est attente et nécessite le consentement. Les troubadours appelaient cet amour : Merci.

L'art roman, n’a aucun souci de la puissance ni de la force, mais uniquement de l’équilibre ».

A l'inverse, « Le Moyen Âge gothique, qui apparut après la destruction de la patrie occitanienne, fut un essai de spiritualité totalitaire » 

Lancelot, aborde le conte du Graal ''Perceval '' de Chrétien de Troyes. Simone Weil semble mieux connaître le Parsifal de Wagner. Il parle de La Coupe, et elle voit plutôt une Pierre.

Je rappelle qu'au château du Graal, Munsalvaesche, le roi du Graal, Anfortas, souffre d’une blessure faite par une lance empoisonnée, et dépérit. Parzival observe dans le château maintes choses merveilleuses, avec le Graal ( pas défini), qui pourvoit toute la compagnie abondamment de mets et de boissons. Parzival se garde de poser quelque question que ce soit... Le lendemain matin, le château est vide.

Au livre XV, Parzival retourne au château du Graal et par la question salvatrice : « Mon oncle, quel est ton tourment ? », délivre Anfortas de son supplice. 

 

Pour Simone Weil, le sujet de cette histoire c'est la découverte de l'attention à l'autre, la charité.

« La plénitude de l’amour du prochain, c’est simplement d’être capable de lui demander « Quel est ton tourment ? ». C’est savoir que le malheureux existe, non pas comme unité dans une collection, non pas comme un exemplaire de la catégorie sociale étiquetée « malheureux », mais en tant qu’homme, exactement semblable à nous, qui a été un jour frappé et marqué d’une marque inimitable par le malheur. Pour cela il est suffisant, mais indispensable, de savoir poser sur lui un certain regard. »

Anfortas

 

Le Conte du Graal, met en question une énigme à deux niveaux... Il ne s'agit pas seulement, de trouver une réponse à une question... Il s'agit d'abord de trouver la Question. Et la question n'est pas forcément la même pour chacun...

Pour Simone Weil, sans-doute, sa question concerne le mal, le malheur précisément.

Pour Perceval, j'y vois une question en lien avec la culpabilité ( la mort de sa mère) ; et la réponse en lien avec la Grâce...

Lancelot, cherchait encore sa question : elle commence à résonner ( raisonner) en lui : '' Qu'est-ce que l'homme '' ( l'homme que je suis...) ?

Il faut préciser que '' La Question '' n'est pas Le Graal.

 

Simone Weil, prévient Lancelot :«  La quête du Graal, peut être un détournement, ou un dévoiement, de l’attention. Vouloir trouver le Graal, c’est privilégier la volonté au détriment de l’attention. » ( M.Zinc) L'exemple type, dans le conte, en est Gauvain.

Au début de la Quête, « Perceval ne sait pas que les êtres existent... », insiste Simone Weil.

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