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Fascisme et Moyen-âge

Publié le par Régis Vétillard

En cette période trouble de ces années trente, Lancelot est tiraillé entre l'objet de la Quête qui l’habite et qui est porté par le mythe arthurien, et ce que l'on nomme un '' Médiévalisme '' fasciste ( note : l'historien italien Tommaso di Carpegna Falconieri le décrit comme la « projection dans le présent d’un ou plusieurs Moyen Âge idéalisés »), qui serait la référence d'une vision du monde, un temps où se fonde un mythe politique ...

N'oublions pas que : - nous sortons d'une guerre effroyable, moderne et technique... - Nous entrons dans une crise économique, et nous nous interrogeons si le capitalisme, si le parlementarisme ne sont pas au bout de leurs possibilités... - Nous sentons le danger à nos portes; et s'il vient de l'étranger, il est peut-être aussi à l'intérieur... ! - Nous imaginons un monde plus unitaire, plus ordonné... Pour certains l'unité viendrait d'un homme providentiel, et l'ordre, d'un régime totalitaire.

Puisque les partis, les élections ne garantissent pas que nous ayons de bons politiciens ; que pouvons nous imaginer, comme nouvelle manière de faire de la politique ? Nous sommes à l'âge idéologique...

L'idéologie semble le bon véhicule pour éduquer les masses, l'idéologie est cet ensemble d'idées et de croyances, qui donne au peuple une ligne de conduite.

Une idéologie politique peut prendre un caractère religieux, jusqu'à prendre la place de la religion. Ce totalitarisme imagine ainsi pouvoir contrôler les consciences...

Daniel Halévy, lors de sa visite à Rome, en 1933, à l'exposition fasciste, remarque le vocabulaire utilisé par le fascisme, emprunté à l’Église ; ainsi cette formule de la « mystique fasciste » enseignée aux enfants : ''Credere, obbedire, combattere '' (croire, obéir, combattre) ( Note : Daniel Halévy, Le Courrier d’Europe, Paris, Grasset, 1933, p. 282. )

« Qu’est-ce que le christianisme aujourd’hui pour nous ? Le national-socialisme est une religion. Il ne lui manque que le génie religieux qui fasse exploser les antiques formules ayant fait leur temps. Il nous manque le rite. / Il faut que le national-socialisme devienne un jour la religion d’État des Allemands. Mon Parti est mon Église, et je crois servir le Seigneur au mieux quand j’accomplis la volonté et que je libère mon peuple opprimé des chaînes de l’esclavage. / Tel est mon Évangile. Et là où je rencontre de la résistance, peu importe quand et où, j’essaie de la briser. / J’y vois maintenant parfaitement clair […]. » (Joseph Goebbels, Journal, 1923-1933, Paris, Tallandier, 2009, p. 291, 16 octobre 1928)

Revenons à cette nostalgie médiévale ; au temps du Saint Empire Romain Germanique. On note le caractère sacré de l'Empire (« il rappelait ensuite qu’il était l’héritier de l’Empire romain et que Rome était sa capitale ; et, enfin, il soulignait le rôle éminent tenu par les Germains dans l’institution » Jacques Le Goff). L'Empire, de plus englobe les nationalismes, il unifie en une communauté de destins, et théoriquement sans les détruire : L'Empire, comme une Europe fédéraliste sous contrôle...

L'armée allemande avait repris la croix noire des chevaliers teutoniques, ces chevaliers qui après avoir été un ordre hospitalier, devinrent une armée au service d'une idéologie chrétienne, une croisade pour conquérir la Pologne, la Lituanie, la Russie... De la suite de leur déclin, il en restera le berceau de l'état prussien : et les nazis utilisent à présent leur image de « conquérant des peuples slaves ».

 

Nous avons déjà évoqué, ces derniers chevaliers errants que sont les aviateurs. Beaucoup, jeunes et moins jeunes ont lu '' Le Chevalier de l'air '' la Vie héroïque de Guynemer par Henry Bordeaux , célébré aussi d'ailleurs par Benito Mussolini... !

Le biographe célèbre en Guynemer : « Le nouveau Roland, le chevalier téméraire et prodigieux » qui s'est fait remarqué au cours de cette « Période héroïque et resplendissante, où nos aviateurs surgissaient dans le ciel, semant la panique et l'effroi, pareils aux chevaliers errants de la Légende des siècles ». Henri Bordeaux, fait référence à un texte médiéval, et à une figure dans Gaydon ( le chevalier au geai) appelé Guinemer, « et qui raconte le triste retour de Charlemagne à Aix-la-Chapelle après le drame de (...) » ; et aussi à un traité de Guérande (11 avril 1365), qui termine la guerre de succession de Bretagne et donne le duché à Jean de Montfort, mais sous la suzeraineté du roi de France, porte la signature de trente chevaliers bretons, parmi lesquels un Geoffroy Guynemer.

Le chevalier représente cette figure héroïque qui engage sa vie pour sa terre et sa foi... Il prêche la croisade pour sauver notre civilisation... En effet le temps présent est un temps de crise ; et nous éprouvons le besoin de nous relier à une chaîne traditionnelle, qui comprend des initiés cathares, des templiers, des sorcier(e)s, des alchimistes, … etc. Ce patrimoine traditionnel pourrait nous donner accès à une vérité, à retrouver notre identité, et à la sacralité de puissances perdues comme celle du pouvoir ...

 

En Allemagne, le succès d'une gravure de Dûrer, ''Le Chevalier, la Mort et le Diable '' symbolise ce que l'on appelle le ''völkisch'' et qui renvoie aux racines rurales, le sang et la terre (''Blut und Bode''). Ce mouvement a imprégné toute la droite allemande. Le chevalier, se présente comme un surhomme selon un certain détournement de la pensée de Nietzsche. La pensée völkisch est violemment antisémite, le juif y est désigné comme l'ennemi intérieur.

Beaucoup de jeunes bourgeois se passionnent pour les rites germaniques. Les Wandervögel renforcent la camaraderie virile, ils rêvent d'action et de changement de société. Des ligues s'organisent et seront ensuite récupérées par les nazis.

Le Thulé Bund est en 1918, une société férue d''histoire et de traditions allemandes, et « traite de pangermanisme, d’anti-matérialisme, de pensée médiévale et alchimique.. » dès 1918. Thulé évoque le lieu mythique d'où proviendrait la race aryenne, et elle adopte la croix gammée pour symbole.

En septembre 1919, Adolf Hitler participe à une réunion du Deutsche Arbeiterpartei (DAP). Ce Parti des travailleurs allemands émane de la société Thulé, et vient d'être fondé à Munich par Anton Drexler, membre de la Thule-Gesellschaft . Le 8 août 1920, le DAP est rebaptisé Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP).

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La Grande Guerre, Myrrha Borodine et le Graal. -1-

Publié le par Régis Vétillard

Le père Degoué, simple abbé de Mayenne, représente ces amateurs anonymes qui après 1900, collectent par voie orale, littéraire ou souvent par les archives paroissiales, des témoignages sur les légendes locales... On les nomme ''folkloristes''; ils font partie de sociétés savantes et sont amenés à élargir leur recherche en empiétant sur l'Histoire...

Parallèlement et sans contact avec les précédents, l’université a développé avec prestige une discipline comme l'Histoire : discipline chargée d'un discours unificateur et moral sur le passé national ; lourde responsabilité en ces temps de conflit...

 

1914 : les historiens s'engagent à faire connaître les actuels ''crimes allemands'' en Belgique et dans le nord de la France... Ils se chargent d'expliquer comment les allemands se sont exclus de la civilisation et sont retournés à l'état de barbarie morale... Nous sommes dans la lignée d’Ernest Lavisse et d’Émile Durkheim...

Les historiens ''médiévistes'' ont dans le sein de la faculté une place d'excellence ; « ils apparaissent comme les détenteurs d’un savoir sur les origines de la nation qu’il faut désormais exhumer, approfondir et transmettre » ( Agnès Graceffa - Université de Lille  )..

 

La mobilisation, bien sûr, touche de façon importante les jeunes étudiants et chercheurs médiévistes.. En 1915, aucune thèse n’est soutenue à l’École des Chartes. Alors que le nombre moyen, avant-guerre, atteint presque la vingtaine, deux seules le sont en 1916. Les femmes sont devenues majoritaires, parmi les diplômés... Ferdinand Lot continue ses cours, même s'il est contraint parfois de les annuler faute d'auditeurs...

Ferdinand Lot (1866–1952) est un médiéviste de renommée internationale, chartiste, professeur à l’Ecole pratique des hautes études (EPHE) et en Sorbonne (1909), membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres (1924).

F. Lot est qualifié de non-conformiste... Il partage avec les étudiants les résultats de son travail, et réalise avec eux un authentique enseignement de recherches. Ouvert d'esprit, le maître ne craint pas de s'engager... A côté de ses recherches historiques, il publie dans les annales de Bretagne et consacre des études approfondies à la littérature arthurienne et à la question du Graal.

Pendant ces années, il travaille en collaboration avec son épouse à un ouvrage important sur le Lancelot-Graal, qui paraîtra en 1918...

En 1909, Ferdinand Lot a épousé une jeune fille née à Saint-Pétersbourg 27 ans plus tôt : Myrrha Borodine. Venue en France pour préparer une thèse sous la direction de Joseph Bédier, elle devient une spécialiste de la littérature courtoise du Moyen Age.

Le couple va beaucoup recevoir en leur domicile - 53 rue Boucicaut, à Fontenay-aux-Roses - en particulier bien-sûr des membres de la communauté russe ; mais aussi des étudiants, des amis... Et en cette fin d'année 1914, Ferdinand Lot et sa femme vont participer à la création d'une institution créée en janvier 1915 pour accueillir les réfugiés du nord de la France et de Belgique. Situé à quelques mètres de son domicile, le Refuge Franco-Belge fonctionnera jusqu'en 1919.

Des réfugiés belges à Paris en 1914

 

En effet, fuyant l'avance allemande, 1/5 de la population belge (entre 1.300.000 et 1.500.000 personnes) va trouver refuge à l’étranger.

Anne-Laure est au courant de l'engagement de son amie Edith Wharton, l'écrivaine met à profit sa fortune pour aider les réfugiés à Paris...

Est-ce par le biais du refuge franco-belge directement, ou par l'intermédiaire d'une prise de contact du père Degoué, avec F. Lot sur le ''Lancelot''... ? Anne-Laure de Sallembier va recevoir à Fléchigné plusieurs familles belges, qui permettront d'ailleurs de continuer les travaux de la ferme, malgré l'absence des mobilisés...

Également, la région ouvre plusieurs hôpitaux de réserve, et beaucoup de femmes viendront y donner un coup de main, jour et nuit...

 

Savoir qu'un professeur d'université, un érudit, comme M. Ferdinand Lot s'intéresse à la Légende arthurienne, permet d'expliquer que la question n'est pas seulement d'ordre folklorique... D'ailleurs c'est naturellement que l'importance du Graal va être comprise et étudiée sur le niveau spirituel par la femme du professeur F. Lot, Myrrha, de confession orthodoxe.

En 1909, année de son mariage, elle suit les cours de Joseph Bédier et travaille une thèse sur La femme dans l’œuvre de Chrétien de Troyes. Pendant la guerre, elle collabore aux Etudes sur le Lancelot en prose, qui sera publié par F. Lot en 1918...

La rencontre de l'abbé Degoué avec Myrrha Lot-Borodine (1882-1954), va être décisive pour la suite de notre Quête...

 

Myrrha Borodine, née à Saint-Pétersbourg est issue d'une famille russe intellectuelle. Elle s'intéresse à la littérature courtoise du Moyen-âge. Avec son mari, elle entre dans le ''Cycle Arthurien'', puis dans la « haute aventure » du Graal, et se voue à ce type d'études.

Avec Etienne Gilson, elle approfondit la mystique cistercienne et l'apport de Saint Bernard.

Gilson reprend la spiritualité de Bernard, et parle de l'Amour du Bien qui subsiste en nous malgré le ''péché'' ; bien sûr l'amour est d'abord imparfait, en particulier avant de connaître Dieu – Bernard de Clairvaux (1090–1153) identifie, « aimer » Dieu, à « penser » Dieu ... Cet apprentissage à connaître Dieu, conduit Myrrha à décrire un processus de restauration, qui prend en compte que l'homme est fait à « l'image et ressemblance » de Dieu ; l'humain est appelé à une « divinisation »...

Myrrha retrouve symboliquement cette quête du Divin, dans le ''service d'amour '' courtois de la Dame... La Quête revient à chercher le secret de l'Amour ; et au Moyen-âge – et c'est très important - le signe ou symbole est réalité substantielle...

La table d'argent sur laquelle est posée le Saint Graal, est le symbole de la liturgie eucharistique

 

- Myrrha, comment en êtes-vous arrivée à La Quête... ?

- Il y eut pour moi le Moyen-âge énorme et magnifique: le roman courtois qui passionna ma jeunesse. Ensuite à l'âge de la maturité, l 'épopée mystique du Graal, quête des suprêmes valeurs par l'âme médiévales. Puis les études sur la spiritualité gréco-orientale s’imposèrent à moi durant de longues années. 

- Vous êtiez croyante... ?

- J'avais abandonné longtemps avant mon mariage toute pratique religieuse dans mon Eglise-mère

Mais, la Quête, m'amène à chercher et préciser les éléments fondateurs de la foi chrétienne.

- Quel élément, par exemple, vous permet de joindre le Graal à la foi chrétienne ?

- et bien … La Theosis chez les Pères grecs... C'est à dire cet appel de l'homme à rechercher le divin : on peut le nommer divinisation ou déification...

Recherche signifie aussi erreurs... Les leçons d'Etienne Gilson ou de Paul Alphandéry (1875-1932, historien et spécialiste du christianisme médiéval ) m'ont questionnée sur les dérives, les erreurs qui peuvent facilement se propager dans une religion

( sources : Ma mère, Myrrha Lot-Borodine. De Marianne Mahn-Lot )

 

Myrrha Borodine, sans rejeter l'apport celtique, fait du Graal un élément chrétien. Pour elle, les valeurs propres des deux civilisation sont foncièrement dissemblables ; et c'est le fond de l'argumentation de ses critiques folkloristes...

Il s'agit donc pour Myrrha de découvrir le sens d'une œuvre portant l'empreinte du génie médiéval fécondé par l'Église...

Pour cela, il faut tenter de comprendre la nature particulière du symbolisme au moyen âge, qu'elle rapproche à quelque chose que l'on connaît aujourd’hui : la spiritualité liée à patristique de l'Orient chrétien...

Le ''signe qui s'offre aux sens '' est une réalité substantielle exprimant l'essence même de la chose représentée. Le signe opère ce qu'il est, ou, le signe réalise ce qu'il symbolise... La réalité spirituelle se substitue au signe ; c'est ce qui s'exprime dans la transsubstantiation...

 

Un tel symbolisme, ne peut pas s'imposer, il nécessite de la part de celui ou celle qui veut en faire l’expérience, une libre création et nécessite « l'approfondissement des plans successifs sur lesquels il se projette tour à tour déclenchant le mouvement des « similitudes et senefiances », si chères aux auteurs des diverses versions de la Légende du Graal... » Aussi, faut-il admettre un symbolisme à plusieurs dimensions, qui monte de l'image au conceptuel et finit par embrasser la totalité des phénomènes s'offrant à un œil intérieur.

Toutes ces ''figures'' qui nuancent les vérités, tissent la Légende du Graal...

Légende, qui fait revivre le Mythe chrétien « par une méthode d'introspection intuitive (Einfühlung) adhérant au sujet en pleine et compréhensive sympathie. » Par exemple, nous pouvons dire que ce paysage est triste, au lieu de dire qu'il nous rend triste... ''Einfühlung'', introduit en philosophie en 1873, vient des romantiques allemands ( Robert Vischer (1847-1933), Theodor Lipps ); on le retrouve également dans l'empathie....

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'' La Belle dame sans merci '', œuvre d'Alain Chartier (1424)

Publié le par Perceval

''Merci'', vient du latin ' merces 'avec le sens de '' salaire, récompense '', mais aussi avec la signification de '' grâce, pitié '', peut-être parce que la grâce peut parfois être considérée comme une forme de récompense (je te gracie parce que tu t'es bien battu). C'est d'ailleurs ce dernier sens qu'a ''merci'' lorsqu'il apparaît en français avec cette orthographe au XIe siècle.

En 1427 Alain Chartier est envoyé en Écosse pour y négocier le mariage du jeune dauphin (plus tard Louis XI), alors âgé de cinq ans, avec Marguerite d'Écosse. Ici, ce tableau illustre : The story of the famous kiss bestowed by Margaret of Scotland on « la précieuse bouche de laquelle sont issus et sortis tant de bons mots et vertueuses paroles »

 

 

' La Belle dame sans merci. ' (1424) est l'oeuvre la plus connue de Alain Chartier ; poète français et orateur en langue latine (Bayeux vers 1385-vers 1435). Secrétaire du Dauphin, le futur Charles VII, il est considéré comme un des créateurs de la prose oratoire française (le Quadrilogue invectif, 1422).

 

La Belle Dame sans mercy, rédigée par Alain Chartier dix ans après la défaite d’Azincourt (1415), fait scandale dans les milieux de la cour. Le sujet est généralement considéré comme un défi aux valeurs de l’amour courtois. Ce poème emprunte une forme courante au XVe siècle, le huitain à trois rimes enlacées, ababbcbc .

L’intrigue met en scène trois personnages : un amant plaintif qui déclare son amour, une dame impitoyable repoussant ses avances et un poète malheureux qui écoute leur conversation en cachette.

La combinaison de « l’amant-martyr » et de « la dame-sans-merci » n’est pas rare dans la littérature médiévale . On retrouve également une situation analogue du poète dans le Débat de deux amans de Christine de Pizan. Pourtant, une opposition aussi constante de la Dame à l’Amant est remarquable parmi les textes de poésie lyrique où est mise en scène la « dame-sans-merci ».

Dans l’œuvre d’Alain Chartier, « tous les arguments de l’amoureux sont immédiatement réfutés » par la Dame. Du début jusqu’à la fin, la Dame se défie des paroles de l’Amant, sans jamais changer d’attitude.

La notion de défiance en moyen français (defiance, deffiance et desfiance) désigne à la fois le « défi » et la « défiance ». Le premier sens, « défi », implique l’« action de défier, de provoquer quelqu’un au combat, de déclarer la guerre à quelqu’un ». Le second sens est : « sentiment de celui qui n’a pas de confiance, manque de confiance, défiance »

Dans La Belle Dame sans mercy, l’Amant, à travers le terme deffiance, insiste sur le fait que les yeux de la Dame le provoquent à la guerre en lui envoyant un héraut représenté par le 'doux regard'. Ici, la deffiance prend le sens de « défi » (au combat) en ancien français

Au début du débat, les « belles paroles » sont l’objet de la défiance de la Dame. Le choix de l’adjectif beau pour qualifier les paroles de l’Amant suggère la futilité des paroles des amoureux

Dans la suite du poème, l’Amant remplace le beau parleur auquel la Dame faisait allusion par le jangleur, celui qui se plaint par calcul...

L’Amant souligne le contraste qui existe entre un tel jangleur – qui ne sait guère dissimuler sa faintise (faux-semblant) – et un homme réellement triste. Aussi justifie-t-il l’authenticité de ses propres paroles. La Dame renchérit sur ce motif, employant l’expression « cruel losengeur »

La faintise atténue la divergence entre deux adjectifs, « villain » et « courtoise », à savoir qu’elle dissimule un cœur vil par des paroles courtoises.

La faintise de la parole est donc un fondement de la défiance de la Dame envers les paroles de l’Amant.

La Dame déprise la souffrance d’amour dont l’Amant se plaint, en l’attribuant à une « plaisant folie »...

Enluminure du Roman de la Rose

Si la Dame adoucit son attitude, l’Amant la contredit en se comparant à des animaux de chasse apprivoisés.

En se défendant de la double accusation de faintise et de change, l’Amant synthétise ici l’objet de la défiance de la Dame.

Le refus de l’Amant de croire les propos de la Dame fait un parallélisme avec la défiance de la Dame. Une valeur de l’amour courtois, à savoir la « loyauté », fait l’objet de la foi de l’Amant. ( …)

La Dame reproche à l’Amant de ne pas s’en rapporter à elle...

De son côté, l’Amant n’accepte pas le conseil de la Dame de trouver ailleurs une dame « plus belle et jente », et n’ajoute pas non plus foi aux paroles de sa bien-aimée...

L’Amant prétend que la démonstration de sa loyauté peut dissiper le soupçon de la Dame. (…) En vain l’Amant essaie-t-il de convaincre la Dame...

La guerre verbale entre l’amoureux et son « amoureuse annemie » prend fin avec l’ultimatum de la Dame : « Une fois pour toutes croyez / Que vous demourrez escondit. » . Nous pouvons interpréter le terme croire comme signifiant « être persuadé » . Le verbe escondire signifie « refuser, repousser », en contexte amoureux.

Ici se déroule une guerre verbale, sous forme de débat entre deux combattants qui ne se font pas confiance et refusent jusqu’à la fin de reculer. Dans cette guerre verbale, bien différente de la bataille conforme au code chevaleresque, le fait de se rendre en demandant « merci » n’est pas accepté. Les requêtes formulées par l’Amant, aussi bien celles destinées à obtenir la « pitié » que la « grâce », sont repoussées par la dureté de la Dame... !

D’une part, la défiance de la dame sans merci porte entièrement sur la fausseté de la parole, faintise, énoncée par l’amoureux, ainsi que sur l’inconstance du cœur de ce dernier, le change.

Voir aussi: LE MYTHE DE LA '' LA BELLE DAME SANS MERCI ''

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Le Mythe de la '' La Belle dame sans merci ''

Publié le par Perceval

La belle dame sans merci de Dicksee

La belle dame sans merci de Dicksee

La Belle Dame Sans Merci est devenue un mythe depuis le Moyen Âge, en particulier depuis le poème d'Alain Chartier écrit en 1424, qui a été notamment repris par le poète John Keats. Les peintres, en particulier les Préraphaélites, se sont emparés de ce sujet avec délice, puisque les figures féminines fortes sont les sujets de presque toutes leurs oeuvres.

La Belle Dame Sans Merci ,Thomas Rhymer

« I saw pale kings and princes too,
Pale warriors, death-pale were they all;
They cried—‘La Belle Dame sans Merci
Thee hat
h in thrall » de John Keats

(Les rois, les princes, les guerriers, tous pâles comme la mort lui crient : la belle dame sans merci te tient en esclavage.)

La Belle Dame Sans Merci, by John William Waterhouse

Ici la Belle Dame est située dans le contexte de l'amour courtois médiéval... Dans l'idéal, l'amour courtois fait l'apologie d'un amour chaste que le chevalier doit gagner auprès de la dame de son cœur. Pour cela, il est prêt à affronter maintes épreuves, jusqu'à ce que la belle... cède.

La Belle Dame Sans Merci by Walter Crane

On retrouve évidemment ce thème dans la légende arthurienne, et les romans de chevalerie qui mette l'accent sur la conquête de la Dame, d'autres s'orientant plutôt vers un certain mysticisme (la quête du Graal et de la pureté). D'autres textes sont plus emprunts de folklorisme (les fées, lutins etc), ou de magie (fée Morgane, Merlin); au fur et à mesure la Belle Dame, celle pour qui se meurent d'amour les chevaliers, se transforme en une sorte de fée, qui vient toujours à la rencontre du cavalier errant, comme le ferait une Viviane ou Morgane.

Ainsi, cet homme plein de bravoure, découvre cette étrange femme dans des endroits toujours inappropriés - dans les bois, près de ruines, dans un château - et toujours au début ou à la fin d'une aventure...

Arthur Hugues (1901)

Le chevalier rencontre toujours la fée dans les bois, passage d'ombre et des désirs refoulés par excellence.

Robert Anning Bell (1855)

 

Mais cette fée est "sans merci", repoussant sans cesse les avances du prétendant. On peut donc comprendre, au sens figuré, que lorsqu'il arrive dans les bois, atteignant alors presque son but, la Dame le repousse une dernière fois, l'assassinant par le même coup.

 

L'amour peut être meurtrier, et l'espoir, une fois vaincu, vient à bout de tous les héros. Il s'agit d'un retournement total de la matière courtoise. L'homme ne triomphe plus, il courbe l'échine devant le pouvoir féminin. 

Il s'agit d'un grand fantasme masculin. Les Salomé, Judith, Lilith et autres femmes castratrices ont toujours été à la fois attirantes et monstrueuses pour nombres d'artistes.

 

La Belle Dame Sans Merci by Frank Cadogan Cowper

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Quel rapport entre Lanzelet et Lancelot...?

Publié le par Perceval

Lanzelet devient chevalier de la Table Ronde

Dans le récit des aventures de Lanzelet, il n'est nullement question d'amour entre lui et la reine Ginovere... Alors, même que la reine ne réussit pas l'épreuve du manteau féerique.. ! Lanzelet éprouve pour elle des sentiments d'admiration et d'attachement particuliers. C'est que la reine est ménagée par rapport aux autres femmes: elle n'aurait eu que des pensées contraires à son devoir...

Peut-être, un conteur postérieur, a t-il voulu donner à l'épouse d'Arthur un amant digne d'elle et montrer dans leur liaison, le type même de l'amour courtois; ainsi a t-il eu l'idée de choisir Lancelot du Lac pour ce rôle.

Chrétien de Troyes, lui, connaissait l'histoire de ses amours avec Lancelot, racontée en partie dans le Chevalier à la Charrette.

Lanzelet apparaît comme un ''Lancelot'' primitif, celtique qui n'entretient aucune liaison coupable avec Guenièvre, et tente plusieurs " mariages à l'essai ". Après avoir réunifié son pays, il va vivre finalement très heureux auprès de la belle Iblis...

Le roi de Nenoïc, Ban, père de Lancelot, s'apparente au roi de Genewis, Pant... On retrouve, la fuite de la famille et l'enlèvement de l'enfant par une fée des eaux... Identique, l'ignorance du héros de son nom... On retrouve les messagères, et d'autres personnages; mais ensuite tout diffère...

Le ''Lancelot en prose'' plus tardif (XIIIe s) de plusieurs auteurs, va étoffer le récit et la biographie du personnage...

Donc, l’absence d’aventure de Lancelot avec Guenièvre, sa libération par le magicien Malduc, le mariage final du héros avec Iblis, dont il a tué le père, le fier baiser au dragon transformé en princesse ou même le court manteau magique testant la vertu de la dame, qui sont des éléments clefs de la narration d’Ulrich, éloignent beaucoup Lanzelet de ce que nous connaitrons avec Lancelot ...

Ulrich von Zatzikhoven avec des lunettes (manuscrit de Heidelberg Lanzelet, c. 1420)

Ulrich von Zatzikhoven, l'auteur allemand, affirme s'appuyer sur un « livre français », qui était sans doute antérieur au Chevalier de la Charrette, composé entre 1177 et 1181. Ce livre français, ou normand, serait arrivé en Allemagne dans les bagages du seigneur anglo-normand Hugues de Morville ( famille originaire de Valognes, dans le Cotentin), un des otages échangés contre Richard cœur de lion. Le roi d'Angleterre resta prisonnier de l'empereur Henri VI du 21 décembre 1192 au 4 février 1194. Ulrich aurait pu prendre connaissance du texte à cette époque...

Blondel - Gustave Doré 1877

Parmi ces otages, on trouve des anglo-normands comme : Gautier de Coutances, archevêque de Rouen, le chancelier Guillaume Longchamps, évêque d’Ely, l’évêque Savary de Bath, Baudouin Wacke, et peut-être Robert de Thorneham ; et, dit-on, sans les nommer, des « fils des comtes et de ses barons»...

 

Le roman contient – parait-il - de nombreux mots français empruntés au dialecte anglo-normand : buhurt, turnei, pavilun, garzun ...

De plus des spécialistes localisent le texte d'Ulrich, grâce aux toponymes qu’il mentionne, dans le pays des Morville-Limors, lieu de la première aventure de Lancelot, est le nom d’un bois du Cotentin, situé au sud de leurs terres. Il a été cédé à l’abbaye de Blanchelande par les beaux-parents du puissant Richard du Hommet (†1179), connétable de Normandie. Ce haut personnage, seigneur du Hommet et de Varenguebec-en-Limors, détient de nombreux domaines dans cette région. De plus, en Angleterre, il reçoit d’Henri II, Dudingston (Northampton) et plusieurs fiefs dans le Bedfordshire, alors que, dans le roman d’Ulrich, Arthur accorde à Lancelot  Dodone et  Behforest: cette homonymie ressemble à un hommage à peine voilé envers un puissant. Richard du Hommet aurait pu être un modèle pour le Lanzelet d'Ulrich... ( nous en reparlerons...)

ANNA GOULD... (1875-1961

Je mets en avant ce personnage: Richard du Hommet (†1179), connétable de Normandie; parce qu'il sera rappelé à Anne-Laure de Sallembier, par une personne qu'elle va être amené à rencontrer: Hélie de Talleyrand-Périgord (1859-1937), marié à 50 ans à Anna Gould (1875-1961) ( Ils habitaient en plus de leur hôtel particulier: le Palais Rose, le château du Marais... Anna Gould, avait d'abord épousé l'excentrique Boni de Castellane...

Hélie de Talleyrand, très intéressé par la période médiévale, soutient qu'il bénéficie de la survivance du titre, et qu'il descend de ce Richard du Hommet, qui aurait été le modèle historique de Lanzelet, c'est à dire de Lancelot...

 

Depuis qu'Anne-Laure avait pris connaissance et surtout conscience du ''trésor'', que lui avait légué directement, et avant sa mort, Charles-Louis de Chateauneuf; elle se rendait compte que la légende arthurienne allait devenir pour elle, autre chose et bien plus qu'une belle histoire...!

Lancelot aux armes de Flechigné

Je pense que sa décision, d'accepter le mariage avec le vieux Comte de Sallembier, entre dans son projet de vie de tout faire pour continuer la Quête...

La belle Anna Laure naviguera entre Paris, le château de Fléchigné, et les loisirs de la vie mondaine parisienne qui prend villégiature à Deauville, en bord de mer ...

Anne-Laure de Sallembier, même veuve, est une femme gaie, active; qui aime recevoir, fréquenter les salons, jouer au croquet en bord de mer, ou en campagne, où la pelouse permet d'engager la partie ...

 

Le Croquet est-il un jeu bien convenable...?... A suivre ...

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L'Histoire de Lanzelet -3-

Publié le par Perceval

L'épreuve du manteau de fidélité...

Alors, arrive à la cour d'Arthur une messagère porteuse d'un ''manteau magique'', qui ne sied qu'à une personne tout à fait fidèle : toutes les dames, la reine en tête, l'essaient, mais à leur honte ; Iblis seule sort victorieuse de l'épreuve. C'était la Reine des fées marines qui a envoyé ce manteau pour mettre en lumière la vertu de la femme de Lanzelet. Sa messagère révèle aux chevaliers de la Table Ronde le sort de leur compagnon et les engage à aller le délivrer. Quatre d'entre eux - Walwein, Karjet, Erec et Tristant - se mettent en route et arrivent bientôt devant Pluris : Lanzelet, qui les voit des créneaux, les reconnaît pour des chevaliers d'Arthur, obtient de la reine la permission d'aller à leur rencontre, soi-disant pour les combattre, et, une fois sorti, se joint à eux pour ne plus revenir auprès d'elle.

 

Dans une autre histoire, Marie-Laure se souvient de ce même passage dans une autre histoire, dans laquelle la reine Guenièvre, joue la femme bafouée par ce défi et refuse de se conformer à cette demande ; sauf si le roi lui-même montrait l'exemple en s'en revêtant … Ce qu'il préfère ne pas faire … ! Et, on en reste là … !

 

Dans un autre conte ( le ''conte du mantel'' est populaire ; des lais anciens en parlent .....), c'est l'amie du chevalier Carados (ou Caradoc) qui se tire avec honneur de cette épreuve...

Revenons à cette histoire avec Lanzelet... Qui, je le rappelle a été transcrite en moyen allemand par Ulrich von Zatzikhoven vers l'an 1200...

A son retour à la cour du roi Arthur, Lanzelet apprend que la reine Ginovere a été enlevée, pendant une chasse par Valerin qui l'a emmenée dans son château, entouré par une ceinture impénétrable de monstres, de serpents, etc

Pour tenter de délivrer la reine, la cour du roi Arthur fait appel aux services du magicien Malduc qui exige qu'en contrepartie lui soient livrés Erec et Walwein ( ils auraient tué son père et son frère...), ce que le roi accepte à contre-cœur.

Le château de Valerin est pris, Valerin est tué et la reine – endormie d'un sommeil magique – est délivrée.

Erec et Walwein sont torturés par Malduc. Lanzelet lance une expédition pour les délivrer, avec l'aide du jeune géant Esealt. Malduc est tué, mais sa fille est laissée sauve car elle a empêché que les chevaliers soient tués par le magicien.

Il s'ensuit une fête à la cour d'Arthur.

Iblis raconte un jour à Lancelet l'étrange aventure de Roidurant, qui, dans une forêt, a rencontré un terrible serpent qui l'a supplié de lui donner un baiser. Roidurant s'y est refusé... Plusieurs des chevaliers d'Arthur sont allés ensuite trouver le serpent; mais tous se sont enfuis à sa vue.

Lanzelet se rend dans la forêt, et, quand le monstre apparaît, il n'hésite pas, sur sa prière, à le baiser sur la bouche. Le serpent devient alors une femme d'une merveilleuse beauté : c'était Elidia, fille du roi de l'île de Thilé (= Thulé) ; elle avait été condamnée, pour avoir manqué aux lois du fin amour, à être serpent jusqu'à ce que le meilleur chevalier du monde lui donnât un baiser.

Elidia est admise à la cour d'Arthur, où l'expérience qu'elle a acquise à ses dépens lui fait donner les fonctions de juge en dernier ressort dans toutes les questions d'amour et de courtoisie.

Lanzelet est devenu le chevalier le plus courtois de la cour.

Lanzelet retourne enfin dans le royaume de Genewis, celui de son père et dont il pourrait être le souverain... Il le trouve paisiblement gouverné par son parent Aspiol; il y retrouve sa mère, qui n'espérait plus revoir...

Ensuite, laissant ce royaume à Aspiol, il choisit le royaume de sa femme, celui d'Iweret, pour y devenir seigneur; et avec Iblis, ils vont se faire couronner à Dodone ; on donne à cette occasion des fêtes splendides, auxquelles Arthur prend part.

Lanzelet et Iblis règnent en paix ; ils ont une fille et trois fils, et l'histoire dit que, parvenus à une vieillesse aussi avancée qu'heureuse, ils moururent tous deux le même jour.

 

Quel rapport entre Lanzelet et Lancelot...?

La prochaine fois ...? A suivre, donc ...

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L'Histoire de Lanzelet -2-

Publié le par Perceval

Lanzelet est un roman du cycle arthurien en moyen haut-allemand écrit vers 1200 par l'auteur de langue allemande Ulrich von Zatzikhoven. Il est une adaptation d’un « livre français » aujourd’hui perdu ...


 

Suite....

Lanzelet n'a aucune expérience, Il rencontre sur son chemin un nain qui l'humilie et le fouette. Heureusement il rencontre un chevalier, Johfrit de Liez, qui s'intéresse à lui , et lui apprend les premiers rudiments de chevalerie

Lanzelet rencontre les chevaliers Kuraus et Orphilet avec lesquels il entre dans la maison du forestier Galagandreiz. Pendant la nuit qui suit, Lanzelet répond aux avances de la fille de Galagandreiz. Ce dernier découvrant sa fille dans le lit de Lanzelet est pris de rage. Il s'ensuit un combat où Galagandreiz trouve la mort. Lanzelet épouse la fille du forestier, qui trouve que son père ne peut avoir un meilleur successeur... Après un temps de bonheur conjugal, Lanzelet retrouve l'aventure...

Il arrive dans la ville de Limors, où règne une coutume inflexible: aucun étranger ne doit traverser la ville en armes. Lanzelet, qui l'ignore, y entre armé. Aussitôt les habitants se jettent sur lui et l'emprisonnent. Grâce à l'amour qu'il inspire à la belle Ade, nièce de Linier, seigneur de Limors, il est sauvé de la mort qui l'attendait et délivré de prison; mais il doit répondre au défi du seigneur... Lanzelet se lance dans l'aventure en le défiant. Il doit combattre un géant, puis deux lions, et enfin, le seigneur Linier de Limors lui-même, qu'il tue. Ade lui abandonne sans rancune son cœur et ses terres.

Lanzelet apprend que le roi Arthur donne un grand tournoi, il s'y rend avec sa nouvelle amie, et il triomphe dans la joute avec tous les chevaliers fameux qui se mesurent avec lui... Il ne lève pas la visière de son heaume, et reste le chevalier inconnu; puis, il part comme il était venu.

Sur le chemin du retour vers ses terres, Lanzelet se rend à Schatel-le-Mort, le château de Mabuz, le fils de la Reine des Fées. Mais, il subit un terrible enchantement: - Pour préserver son fils des atteintes de son ennemi Iweret, la fée a fait en sorte que tout chevalier qui en franchit la porte devient aussitôt le plus couard des hommes, fût-il le plus preux de tous. Lanzelet subit le charme...! Alors Ade, qui est restée en dehors, voit son ami se laisser saisir, insulter, désarmer et mener en prison sans opposer la moindre résistance...! Désolée, et ne pouvant rien faire; elle s'en va, et renonce à un ami si peu digne d'elle...!

Cependant Mabuz, est attaqué par son dangereux voisin Iweret, qui fait le siège de son château ( sans y entrer ...!)... Mabuz a l'idée de se servir de la prouesse de son prisonnier. Lanzelet refuse absolument tout combat ; il faut l'armer de force et le traîner hors de la porte; et à peine est-il à cheval qu'il redevient lui-même, il va provoquer Iweret, le tue, et, encore une fois, gagne l'amour de sa fille. Lanzelet avec la main d'Iblis, reçoit le riche patrimoine de son père.

Apparaît alors, une messagère de la reine des fées qui révèle à Lanzelet ses origines ( l'héritier du royaume de Genewis...) et son nom. Lanzelet apprend aussi qu'il est le neveu du Roi Arthur, qu'il veut rencontrer ….

Lanzelet apprend que le roi Valerin est venu à la cour d'Arthur revendiquer la possession de Ginover ( la femme du roi ), qui - prétend-il- lui était promise avant d'épouser Arthur. L'affaire doit se décider par un combat singulier que personne n'ose soutenir, tant Valerin passe pour redoutable. Lanzelet arrive à Caradigan, livre le combat... Il est vainqueur, et il se fait connaître comme neveu d'Arthur... Lanzelet est alors admis parmi les chevaliers de la Table Ronde; Iblis est reçue à la cour avec grand honneur ; et les chevaliers d'Arthur fêtent cet heureux dénouement.

Lanzelet se souvient de l'affront subi, en la personne du nain au fouet, devant la forteresse de Pluris, il s'y dépêche pour se venger.... Il apprend qu'on ne peux épouser la reine de Pluris que si on défait les cent chevaliers qui l'entourent... Personne n'a réussi, et on ne tente plus cette épreuve impossible ! Lanzelet ne peut résister au désir de l'affronter, bien qu'il n'ait pas le dessein de profiter de sa victoire....

Il combat et vainc les cent chevaliers. Mais la reine, s'éprend de lui et ne le laisse pas sortir de son château....

A la cour d'Arthur, sa disparition étonne, puis inquiète, surtout Iblis.

A suivre...

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L'Histoire de Lanzelet -1-

Publié le par Perceval

En cette fin du XIXe siècle, Anna Laure a su rénover et moderniser le château de Fléchigné, propriété de sa mère, et où elle a passé son enfance…..

Le Blason de Fléchigné : d'argent, à la bande de gueules, et deux trèfles de sinople...

Ce château se situe dans le ' Passais ' ( le passage, la marche...) à la croisée de trois règions historiques, au sud du duché de Normandie, contre la Bretagne et le Maine. Non loin de la place forte de Domfront et de Lassay les Châteaux ... Nous trouvons, non loin également, Barenton, le site de la Fosse Arthour, Sept-Forges, Saint-Fraimbault...

 

Alors qu'Anne-Laure est jolie, et riche...; elle repousse tous les prétendants qui se pressent...

Enfin; à la grande surprise de ses proches, elle accepte l'hyménée avec un vieil homme: le comte de Sallembier.

Anne-Laure, unique héritière d'une riche famille de négociants qui a fait fortune dans le commerce des tissus au long du XIXe siècle, épouse donc le Comte de Sallembier, aristocrate – de trente ans de plus qu'elle - qui après une vie de célibataire longue et épicurienne, a su (?) monnayer son titre … Le 10 janvier 1900, elle met au monde un fils, qu'elle appelle Lancelot... Quelques années après son mariage, Georges de Sallembier, meurt subitement d’une fièvre typhoïde, à Paris...

Lorsque Anne-Laure et ses parents résidaient à Paris, elle eut la chance de vivre de nombreux moments privilégiés avec son grand-père Charles-Louis... C'était comme s'il vivait déjà dans un autre monde, et qu'il le lui faisait découvrir en le parcourant au moyen d'histoires... Ces histoires ne ressemblaient pas à celles que l'on raconte aux enfants pour les endormir... Non, celles-ci provenaient d'un temps parallèle au nôtre, qui avait eu son existence et la continuait... Il avait laissé des traces, des signes au-travers d'objets que l'on pouvait encore découvrir ci-ou-là dans des maisons, des églises, des châteaux, des musées ...etc ... Ces histoires réveillaient l'esprit, l'envie de connaître ; elles enchantaient l'âme en lui faisant découvrir son véritable lieu d'épanouissement …

Quand Charles-Louis parlait de l'Autre Monde, Anne-Laure entendait le Vrai-monde ; celui d'où elle venait, et où elle allait …

Son grand-père lui contait d'étranges histoires où se côtoyaient des fées, et des humains ; des gobelins et des paysans, des diables, des sorcières, des prêtres, des seigneurs .... L'histoire devenait bien plus qu'un conte ou une légende. Le ton, le réalisme déployé, en faisaient un enseignement de plus en plus sérieux, avec l'aide d'ouvrages, de gravures pour finalement – toujours - aborder le sujet essentiel de la Quête ; celle qu'animait secrètement les plus exemplaires de ses personnages... Cela commençait toujours au plus près de sa vie, en '' Passais'' ; ou souvent en Limousin – quand il était enfant – le relief était plus tourmenté, les routes carrossables inexistantes, des ''chemins creux'' entre forêts et tourbières, des villages isolés surmontés d'un château …

Une chapelle abandonnée gardait un secret. Seule une croix gravée rappelait qu'ici s'établissait une commanderie... Alors, le grand-père Charles, sortait l'anneau , ou une croix de fer... qui prouvaient que ceci n'était pas qu'une histoire ….

En grandissant, la petite Anne-Laure fut initiée à la légende arthurienne... Légende, signifiait qu'il ne servait à rien de consulter certaines personnes à son sujet ; il s'agissait d'une Histoire pour ''initiés''... cela se passait souvent en Bretagne ( la grande...) ou de l'autre côté du Rhin, en province allemande. Il n'était pas question alors de petite Bretagne, et encore moins de Brocéliande ( ou si peu …)

 

Ainsi, Anne-Laure se souvient d''un nom qui avait frappé son esprit, '' Lanzelet '' … Son grand-père Charles, feuilletait des livres aux lettres gothiques, avec des gravures médiévales... Ce personnage aurait pu lui sembler bien lointain, dans le temps, mais aussi géographiquement … Or Charles-Louis situait son histoire dans des lieux connus d'Anne-Laure....

 

Et si, je vous racontais, maintenant, l'histoire de '' Lanzelet '' …?

La Fée marine enlevant Lanzelet

Le roi Pant, le père de Lanzelet, règne en despote sur Genewis, le royaume de Gaunes... De plus, il traite les grands de son royaume sur le même pied que les petites gens, ce que ses vassaux n'acceptent pas; alors ils se soulèvent, dévastent le royaume... Le roi, est mortellement blessé, il expire auprès de sa femme Clarine... Elle a laissé de côté son enfant... Le roi meurt et les rebelles qui les poursuivaient arrivent et l'emmènent prisonnière. Un instant auparavant, la reine des fées marines, s'élevant comme une vapeur, a enlevé l'enfant et l'a emmené dans son merveilleux pays, invisible, situé au milieu de la mer. La fée n'a pas pris l'enfant sans motif : elle sait qu'il sera un chevalier sans pareil, et elle le destine à délivrer son fils Mabuz de son puissant ennemi et voisin, le géant Iweret de Dodone.

Lanzelet, élevè en pays de féérie, apprend aussi bien le maniement des armes que la musique ou le chant. Lui vient l'envie de connaître son nom mais la Fée ne le lui révélera que lorsqu'il aura vaincu son pire ennemi : Iweret. A l'âge de quinze ans, la fée lui apprend que le moment est venu pour lui de revenir dans le monde des mortels...

A suivre ...

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Romantisme allemand et Moyen-âge... Les Nibelungen

Publié le par Perceval

Nous sommes au milieu du XIXe siècle... L'Allemagne n'existe pas... L'idée romantique des nations, renvoient les états allemands à '' l'Europe '' du Moyen-âge...

''L'Europe'' au XIIIe s

« Le Saint-Empire qui s'était étendu de l'Oder à la Meuse, de la Baltique à la Méditerranée, est demeuré dans l'esprit allemand à l'état de permanente hantise, de chimère endormie, comme cet empereur Frédéric Barberousse qui l'avait porté au plus haut éclat » (1)

Des romantiques allemands, comme Novalis (1772-1801), nourrissent une immense nostalgie de ce temps médiéval, interprété comme le moment privilégié de l'unité de la chrétienté. Henri d’Ofterdingen (1799-1801) est un roman initiatique dont le héros est un ménestrel légendaire qui participe à une joute poétique dont l’enjeu est la vie

L'Allemagne des Hohenstaufen ( famille qui a donné plusieurs empereurs germaniques) voit l'éclosion d'une première littérature allemande, aristocratique, courtoise et chevaleresque... Nous avons en mémoire les Minnesänger, ces trouvères germaniques rassemblés lors de festivités de la Wartburg...

« La poésie est le réel absolu.Tel est le noyau de ma philosophie. Plus il y a de poésie, plus il y a de vérité ; » « La philosophie n’est que la théorie de la poésie, elle nous montre ce que doit être cette dernière, c'est-à-dire l’un et le tout » Novalis

La Chanson des Nibelungen ( XIIIe s.), est alors la plus célèbre des épopées …

Les Nibelungen, dont le nom signifie « Ceux de la brume » ou « Ceux du monde d'en bas », sont les nains des légendes germaniques. Ils possédaient de grandes richesses qu'ils tiraient de leurs mines en dessous des montagnes, là où ils habitaient. (wiki)

Je rappelle le thème de cette légende : Le héros en est le valeureux chevalier Siegfried, fils du roi de Néerlande, tueur de dragons, libérateur de princesses captives, et détenteur du fabuleux trésor des Nibelungen...

Il aide le roi burgonde Gunther à conquérir la main de Brunehilde ( une guerrière et walkyrie de la mythologie nordique) ; puis Siegfried épouse la soeur de Gunther, Kriemhild, réputée pour sa beauté au-delà de son pays natal...

Suite à des malentendus d'adultère … Siegfried est assassiné par Hagen, vassal de Gunther, qui va dérober et dissimuler le trésor... Kriemhild élabore une longue vengeance, dont l'issue est le massacre des Burgondes sur les rives du Danube. Kriemhild va épouser Attila, qu'elle n'aime pas. ; et invite alors à sa cour le meurtrier de Siegfried et le fait périr avec tous ceux des Burgondes qui ont pris sa défense, c'est-à-dire ses propres frères et bon nombre de guerriers. Après cette scène de carnage, elle reçoit le châtiment de sa démesure.

Kriemhild est hanté par son remords, 1805 de Henry Fuseli

Siegfried va prendre l'image de la force et de la volonté. Il est une image solaire ; mais va devenir aussi la figure du ''surhomme'', et une figure (wagnérienne) dot on va se méfier ( germes du fascisme...)

A cette écriture d'épopée, je rajoute le long et touffu poème du chevalier bavarois Wolfram von Eschenbach : Parzival où apparaissent les thèmes connus de l'occasion manquée et des épreuves accompagnant la quête de la relique du Graal.

La figure de Parsifal, est plus poétique et liée à la métaphysique... Elle sera reprise pour illustrer la crise de la spiritualité européenne, la désertion du sacré... jusqu'à la déclaration de la mort de Dieu...

La tradition de la mystique allemande du Moyen Âge se retrouve dans la philosophie idéaliste allemande... Maître Eckhart mène à Fichte, Schelling et Hegel.

« La renaissance du mysticisme allemand du haut Moyen Âge de Maître Eckhart, la théosophie de Jacob Boehme, la spéculation visionnaire de Swedenborg, les traces de la tradition cabbalistique chez Friedrich Christoph Oetinger, la découverte de la mystique indienne, sont présentés comme autant d’inspirations qui se manifesteront dans la philosophie de l’histoire et de la nature de Hegel et Schelling. » Ernst Benz : 'Les sources mystiques de la philosophie romantique allemande'.

 

Malheureusement, comme nous l'avons suggéré, le mythe va devenir une matière trouble avec le pangermanisme nationaliste et guerrier … et bien sûr le nazisme ; au risque de rejeter en bloc toute cette intuition métaphysique ( et géniale) du Romantisme ...

A suivre …

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La Quête, et l'Amour courtois au XIXe siècle

Publié le par Perceval

La Quête, et l'Amour courtois au XIXe siècle

Après une métaphore pour dire la Quête du Graal, et ''le secret'' à travers l'image de l'amour adultère... En voici une autre, avec la 'fin amor' ( la fine , la subtile …) et référence au Moyen-âge redécouvert en ce XIXe siècle … Au cœur toujours de la Quête : l'analogie à la relation ''homme-femme''...

 

Il n'est pas anodin, de relever le retour au Moyen Age ( du XIXe s.) , à travers les romans de chevalerie et la fin’amor et qui témoigne finalement du sens du mot ''Romantique '' défini par Madame de Staël dans De L’Allemagne :

« Le nom de romantique a été introduit nouvellement en Allemagne pour désigner la poésie dont les chants des troubadours ont été l’origine, celle qui est née de la chevalerie et du Christianisme. »

Ensuite, il faut bien remarquer avec Balzac que :

« Le système de lois et de moeurs qui régit aujourd’hui les femmes et le mariage en France est le fruit d’anciennes croyances et de traditions qui ne sont plus en rapport avec les principes éternels de raison et de justice développés par l’immortelle révolution de 1789. » - Honoré de Balzac : Physiologie du mariage ou méditations de philosophie éclectique, sur le bonheur et le malheur conjugal...

 

La ''Fin'amor'' s'oppose au contrat de mariage, un mariage arrangé, de raison ( convenance) et sans amour … Et où la femme a pour rôle de faire des enfants, tout en restant fidèle, bien sûr...

« Les Lenoncourt avaient perdu leurs immenses biens. Par le nom, monsieur de Mortsauf était un parti sortable pour leur fille. Loin de s’opposer à son mariage avec un homme âgé de trente cinq ans, maladif et vieilli, mademoiselle de Lenconcourt en parut heureuse. » Honoré de Balzac : Le Lys dans la vallée.

Sir William Quiller Orchardson, Mariage de Convenance, 1883

« Nos femmes légitimes nous doivent des enfants et de la vertu, mais elles ne nous doivent pas l’amour. » Honoré de Balzac : Le Contrat de mariage dans La Comédie humaine,

 

Bref ! Les enjeux sociaux qui cadrent le mariage de raison au XIXe siècle n’ont pas beaucoup changé depuis le Moyen Age... ! Laissons là, le mari....

Félix, Henriette et le comte de Mortsauf dans le salon de Clochegourde

Félix baisant la main d'Henriette de Mortsauf

L’amant, lui, se transforme en effet en un chevalier dont l’amour et la passion sont les seules devises. Il est au service d’une dame qu’il courtise et vénère. Cette image est clairement et volontairement mise en avant par Balzac dans Le Lys dans la vallée à travers l’exemple du Chevalier de la triste figure auquel Félix se compare et se réfère pour décrire sa passion et son attachement à sa propre Dulcinée...

 

Ce qui fait en outre de l’amour de Félix et d’Henriette un amour courtois, c’est que les deux protagonistes se sont promis de s’aimer d’un amour platonique, sincère, pur et qui refuse de se rabaisser pour exiger une quelconque récompense. C’est l’amour qu’Henriette exige en tout cas de Félix.

Oui, l’amour conjugal est radicalement exclu de l’amour courtois... André Le Chapelain s’appuie sur l’autorité de la comtesse de Champagne (Lettre de la comtesse de Champagne, Traité de l’amour courtois) : « Nous affirmons comme pleinement établi que l’amour ne peut étendre ses droits entre deux époux ». Les amants, en effet, s’accordent mutuellement toute chose gratuitement, sans qu’aucune obligation les pousse. Les époux, au contraire, sont tenus par devoir d’obéir réciproquement à leurs volontés et ne peuvent en aucune façon se refuser l’un à l’autre ». Une autre raison avancée par la comtesse, est que l’amour conjugal ne connaît pas la véritable jalousie. » Introduction de Charles Buridant au Traité de l'amour courtois d'André le Chapelain.

 

Une autre attitude moins ''chevaleresque '' dans Le Rouge et le noir ; déçu par les sentiments confus de Mademoiselle de La Mole à son égard, peu de temps après leur entrevue nocturne, Julien, désespéré, tente de tuer Mathilde avec une vieille épée du Moyen Âge qui était conservée à la bibliothèque :

« - J’ai horreur de m’être livrée au premier venu, dit Mathilde en pleurant de rage contre elle-même.

- Au premier venu ! s’écria Julien, et il s’élança sur une vielle épée du moyen âge qui était conservée dans la bibliothèque comme une curiosité… »

Il hésite, il se ravise … (...)

« Mlle de La Mole le regardait étonnée. J'ai donc été sur le point d'être tuée par mon amant ! se disait-elle.

Cette idée la transportait dans les plus beaux temps du siècle de Charles IX et de Henri III. »

Stendhal, Le Rouge et le noir.

 

On a dit que ''L'Amour courtois'', a été découvert ''découvert'' par Gaston Paris (1839-1903) ... Il relève l'idée de l'exaltation : ce plaisir venu de l’attente et de la non satisfaction du désir qui excite et agite l’imagination. Il note aussi que la gente féminine alliée au pouvoir est - dans ce cadre - souvent de condition supérieure à celui qui la convoite... L'homme cherche à devenir, à tout prix, le favori de la dame,  au risque de se perdre dans ce jeu littéraire d’un désir à jamais inassouvi, ou même de se faire chasser de la cour par le seigneur en cas de dépassement des bornes...

 

Dans la chevalerie initiatique, l'image du chevalier et de sa dame, est couramment utilisée pour signifier le rapport entre moi ( armuré de mes certitudes...) et de mon âme...

La fin a-mor, est aussi une confrontation à la mort... Dans le désir d'amour, tout à la volonté de la Dame, le moi s'abandonne.

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