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Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 2/-

Publié le par Perceval

Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 2/-

En l'honneur du mariage entre Jean-Léonard de la Bermondie, et Jeanne de Villoutreys... Nous découvrons la poésie du moment, qui préfigure ''le romantisme ''… Ces poètes sont des militaires comme Jean-Léonard, des aristocrates attentifs aux ''Lumières''...

Évariste de Parny

Évariste Désiré de Forges (1753-1814), connu comme vicomte de Parny est issu d'une famille originaire du Berry, installée en 1698 à l'île Bourbon (La Réunion), où il naît... Il quitte son île natale à l'âge de neuf ans pour venir en France métropolitaine avec ses deux frères... Il envisage une carrière ecclésiastique , entre au séminaire de Saint-Firmin …

Son frère Jean-Baptiste, écuyer du comte d'Artois, l'introduit à la cour de Versailles où il fait la connaissance de deux autres militaires qui, comme lui, se feront un nom dans la poésie : Antoine Bertin, originaire comme lui de l'île Bourbon, et de Nicolas-Germain Léonard, qui était, lui, originaire de la Guadeloupe. En 1772, il est capitaine d'une compagnie de gendarmes du Roi.

Il s’installe en 1786 dans la maison qu’il possède dans le vallon de Feuillancourt, entre Saint-Germain-en-Laye et Marly-le-Roi. Avec Bertin et Léonard, il forme la "société de la caserne", qui a coutume de s’y réunir.

William Hogarth , 1730

Depuis 1770, cette Société se fixe pour but d'honorer l'amour et l'amitié dans un cadre naturel.

Sa poésie célèbre un amoureux désir pour une femme apparaissant sous le nom d’Eléonore, une femme de l’île Bourbon, que son père a refusé qu’il épouse et qui s’est finalement marié avec un autre.

Poésies érotiques - Évariste de Parny

- ill: Cabane ( L.A.)

 

Pour Parny « le plaisir est toujours légitime » (Poésies érotiques, livre I, Fragments d’Alcée) ; et la liberté d’aimer ne se confond pas, dans son esprit, avec une licence impétueuse. Il sait, en authentique épicurien, que la bride lâchée au désir en réduit les heureux effets et que la sagesse de ce que les Anciens ( et Horace) nommaient ''l’aurea mediocritas'' ( la ''médiocrité d'or'', quelque chose entre l'insouciance du lendemain et le juste milieu, prônée par JJ Rouseau ...) constitue le meilleur gage du bonheur charnel :

by William Hogarth vers 1760

« Sachons pourtant, près de celle que j’aime

Donner un frein aux transports du désir ;

Sa folle ardeur abrège le plaisir

Et trop d’amour peut nuire à l’amour même »

(Poésies érotiques, livre III, Réflexion amoureuse, p. 79).


 

 

« La scène des plaisirs va changer à mes yeux.

Moins avide aujourd’hui, mais plus voluptueux,

Disciple du sage Épicure,

Je veux que la raison préside à tous mes jeux.

De rien avec excès, de tout avec mesure ;

Voilà le secret d’être heureux . »

Poésies érotiques, livre III, Le Songe

 

Antoine de Bertin (1752-1790)

Les détails du rituel initiatique des chevaliers et chevalières sont connus grâce à des vers d'Antoine Bertin (1752-1790) , qui consacra d'ailleurs toute son énergie amoureuse à célébrer une " chevalière " : Marie Catherine Sentuary, mariée à un négociant bordelais ( Testart) mais venant souvent seule à Paris chez ses sœurs ( en particulier Michelle de Bonneuil, muse d'un autre poète : André Chénier. ) (et qui posa, en 1773, dans l'atelier de Mme Vigée-Lebrun). La jeune femme est décrite dans Les Amours sous le nom d'Eucharis. 

 

« Un air de négligence, un air de volupté,

Un sourire ingénu, la pudeur rougissante,

Les diamants, les fleurs, l’hermine éblouissante,

Et la pourpre et l'azur, tout sied à sa beauté... »

 

« C'est vous que je nomme Eucharis

Ô vous, des beautés de Paris

La plus belle et la mieux aimée.

Sous ce voile mystérieux

Cachons nos voluptés secrètes.

Dérobons-nous à tous les yeux :

Vous me ferez trop d'envieux

Si l'on sait jamais qui vous êtes.

C'est vous que, sous des noms divers,

Mes premiers chants ont célébrée. »

("À Eucharis", livre 1) »

 

Et, à présent, entrons dans ces salons que l'on désigne un peu vite de ''libertins''...

A suivre ...

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Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 1/-

Publié le par Perceval

M. B. Ollivier - 1777 - Le Thé à l'anglaise servi dans le salon des Quatre-Glaces au palais du Temple à Paris en 1764

M. B. Ollivier - 1777 - Le Thé à l'anglaise servi dans le salon des Quatre-Glaces au palais du Temple à Paris en 1764

Jusqu'à la naissance de Catherine-Jeanne, Jean-Léonard et sa femme Jeanne, vivront en majorité à Paris, avec de fréquents retours de Jean-Léonard sur ses terres limousines...

Jean-Léonard entraîne Jeanne, à sa suite lors d'expériences étonnantes que leur offre ce siècle... Cette deuxième partie du XVIIIème siècle, semble bien pour ceux qui – par privilège – peuvent le vivre, s'ouvrir à des temps nouveaux...

Une nouvelle aristocratie, inspirée des ''Lumières '' se propose de vivre en toute égalité sexuelle, le partage des plaisirs et de culture, et de devenir aux côtés d'une monarchie à réformer, un pouvoir « intermédiaire », garant d’ordre et de progrès.

La noblesse ancienne d’origine chevaleresque dont la réputation repose sur le nom, la fortune terrienne, les charges et les grades dans l’armée, et que Jean-Léonard de la Bermondie représente ; accepte en ces temps nouveaux de ''fraterniser'' avec une noblesse de robe constituée de bourgeois anoblis qui, en récompense de services rendus à l’état, reçoivent la permission d’acheter un titre, afin tous d'accéder au charme, au raffinement et l’idéal chevaleresque ; ce lieu de fraternité est alors incarné par la Franc-maçonnerie ...

Dans cette société chevaleresque et courtoise, (idéalisée et fantasmée).. ; la femme a toute sa place, à l'image du mythe arthurien avec Guenièvre, la reine adultère, avec Viviane, la fée initiatrice qui transmet l'épée, avec Morgane, l'amante avide de pouvoir, avec Blanchefleur, et Yseult, et Enide, et beaucoup d'autres ….

M. B. Ollivier - 1777 - Le Thé à l'anglaise ... - Détail

Quand il n’est pas à la guerre ou à la chasse, l’aristocrate est dans un salon à faire sa cour aux femmes, à les amuser et à s’en faire aimer. Les jeux amoureux, après les cours d'amour du XIIe siècle, sont à nouveau codifiés comme jeux de société par les “Précieuses” dès le XVIIe siècle … Les femmes tiennent les salons, elles en font ''le temple des galanteries délicates et des gracieuses frivolités''. « L’esprit, la naissance, le bon goût, les talents, s’y donnaient rendez-vous. Jamais, à ce qu’il paraîtrait, société ne fut ni mieux choisie, ni plus variée ; le savoir s’y montrait sans pédantisme, et la liberté qu’autorisaient les mœurs y paraissait tempérée par les bienséances. » du rédacteur du Journal des débats Jean-François Barrière

On y parle philosophie et l'on y débat des idées les plus hardies sur les questions religieuses ou politiques... Émilie-Sophie de Montullé (1756-1816), marquise de Turpin de Crissé, et artiste peintre anime un salon où se trouvent Favart, Voisenon et Boufflers, elle fonde la « société de la Table ronde », et produit un petit recueil intitulé ''la Journée de l’amour''... ! ( cf Note (1) )

M. B. Ollivier - 1777 - Souper du prince Louis François de Conti, palais du Temple, 1766

 

Note : (1) « La ''Journée de l'Amour '' ou les Heures de Cythère (1776), est un ouvrage dont les exemplaires n'ont pas été livrés au commerce et qui sont excessivement rares... Voici l'origine de ce livre : La comtesse Turpin de Crissé, fille du célèbre maréchal de Lowendhal, qui joignait aux charmes de la figure toutes les qualités de l'esprit, avait fondé chez elle une espèce de petite académie littéraire, sous le titre de ''Société de la Table Ronde''. Là, régnait la plus parfaite égalité; l'esprit et la gaieté se donnaient carrière et se trouvaient encouragés par la bienveillante approbation et la douce tolérance de la jolie présidente. Autour d'une table ronde (pour qu'il n'y eût pas de place d'honneur), dont un écritoire formait le plat du milieu, s’asseyaient le gai et brillant Boufflers, le jeune et spirituel Guillard, à peine âgé de vingt-quatre ans ; le petit abbé de Voisenon, n’avait de l'église que l'habit, et son ami Favart, qui l'associa dans presque toutes ses productions. Les membres de cette heureuse association qui devrait servir de modèle à beaucoup de graves et pédantesques académies de province, écrivirent et publièrent en commun la Journée de l'Amour, dédiée aux femmes, et ornée de quatre jolies gravures et de huit culs-de-lampe dus au crayon de Tannay et aux burins de C. Macret, O. Michel et N. Bruneau, tous artistes en vogue dans les boudoirs du siècle dernier. (…) C’était le fruit d'une longue paix, et l'effet du règne plus que galant de Louis XV, qui avait plongé toutes les populations dans une mollesse pastorale et des goûts affadis et champêtres, qui ne se dissipèrent que trop brusquement à l'approche de la tempête révolutionnaire. » d'après le bulletin du Bibliophile ( Ch Nodier) 1842

Lecture Salon de Madame Geoffrin - Gabriel Lemonnier (1743-1824)

La rencontre entre hommes et femmes développent les vertus de générosité, de courage et de délicatesse, un idéal d’héroïsme et de noblesse retransmis de la chevalerie. Le XVIIIe siècle, y ajoute le désir et la volupté... ( Marivaux, Boucher, Fragonard..)


 

Du fait des conditions matérielles qu'impose le mariage comme contrat, l'idée de fidélité conjugale au 18e s. a bien évoluée …. !

Ainsi, cette recommandation d’un mari à sa femme: dans Les contes de Marmontel (1723-1799)

« Madame, l’objet du mariage est de se rendre heureux. Nous ne le sommes pas ensemble. Or il est inutile de nous piquer d’une constance qui nous gène… Vivez chez vous, je vivrai chez moi… »

« Les nœuds de l’hymen étaient une chaîne. Aujourd’hui voyez la complaisance, la liberté. La paix règne au sein des familles. Si les époux s’aiment, à la bonne heure, ils vivent ensemble, ils sont heureux. S’ils cessent de s’aimer, ils se le disent en honnêtes gens et se rendent l’un à l’autre la parole d’être fidèles. Ils cessent d’être amants, ils sont amis. C’est ce que j’appelle des mœurs sociales, des mœurs douces. »

Vignette pour les contes moraux de Marmontel

Les contes moraux de Marmontel eurent un succès relativement durable … Il s'agit en fait d'exalter une vertu au moyen d'un court récit … Morale ''bien pensante'' cependant, que la Sorbonne va condamner en 1768 pour intolérance religieuse...

Ainsi ce qu'écrit le duc Lauzun dans ses “Mémoires”. Il raconte le malheur de la comtesse de Stanville qui, comme beaucoup de jeunes femmes nobles de l’époque, vivait à Paris pendant que son mari était en province comme commandant d’un régiment à Nancy en Lorraine. C’était une jeune femme très à la mode qui fréquentait la haute société et les habitués de la cour de Louis XV. Le mari avait accepté qu’elle soit la maîtresse du duc de Lauzun, et qu’elle ait refusé les avances du ministre Choiseul. Mais il ne toléra pas qu’elle lui impose d’être supplanté par un roturier. En tombant amoureuse d’un acteur, la jeune femme avait commis un crime de lèse-majesté, elle devait être punie. La punition fut exécutée avec éclat. Muni d’une lettre de cachet facilement obtenue par Choiseul, l’époux vint chercher sa femme à trois heures dans la nuit du 20 janvier 1769, à la sortie d’un bal dont elle avait été la reine. Il la fit monter dans une chaise de poste et la conduisit directement au "couvent des filles de Sainte Marie" à Nancy ou elle demeura enfermée pour le restant de ses jours.

Ces ''lettres de cachet'' sont, pour J.L. de la Bermondie, les signes aberrants d'une monarchie absolue à réformer ( mais non à renverser...). En effet, J.L. restera toujours fidèle à la monarchie ...


 

Entre 1770 et 1790, Jean-Léonard de la Bermondie, va fréquenter à Paris ; des gens comme : * le vicomte de Parny, capitaine d'une compagnie de gendarmes du Roi, maçon, de la Loge "Les neuf sœurs" et poète... Il sera le guide vers des salons libertins …

* Jean de Sinclair, dont on a déjà parlé, est officier dans la ''Garde Ecossaise''... D'un séjour à Londres, où il a rencontré Cagliostro ; il présente à J.L. * Le chevalier d'Oisemont qui descend d'une famille de seigneurs templiers, qui possédaient une importante commanderie. Ce chevalier s'est pris d'une passion pour la belle Lorenza, épouse du Comte de Cagliostro... ! Il se dit disciple du mage, et va involontairement dévoilé quelques astuces de ce faux magicien Merlin…

Voilà le programme des prochains articles … !!!

A suivre ...

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Jean-Léonard de la Bermondie, et Jeanne de Villoutreys.

Publié le par Perceval

Je vais évoquer à présent une période de la vie de Jean-Léonard de la Bermondie, qu'il partage avec son épouse Jeanne de Villoutreys ; pendant une vingtaine d'années avant la révolution et l'émigration de Jean.

Les faits historiquement établis, que je connais, sont ténus...

Jean-Léonard de la Bermondie, à 30 ans, va épouser – le 10 juin 1769 - au château de Brignac (Royères, 87): Jeanne de Villoutreys, née le 4 mai 1740 au château de Lajudie (St Martin-le-Vieux, 87). Elle décédera le 24 juin 1800 (5 messidor an XIII) au château de Saint-Julien-le-Petit (87)...

Ils se marient relativement tard, et auront deux filles: Catherine-Jeanne de La Bermondie, née vers 1780 ; elle-même se mariera en février 1804 avec Melchior de LA POMÉLIE ( né en 1770); et Marie-Catherine, femme de M. Joseph de Châteauneuf.

Villoutreys de Brignac (de)

* Jeanne de Villoutreys de Brignac,est la fille de Jean François de Villoutreys de Brignac (1717-1784), Seigneur de Brignac et La Judie, et de Catherine du SOULIER (1713-1782).

Jeanne est la soeur de l’aîné des frères: Jean-François de VILLOUTREYS de BRIGNAC (1738-1820), baron de Brignac, et marié le 10 juin 1776, St-Évroult, Angers (49), avec Rosalie de VILLOUTREYS, Dame du Bas-Plessis (1752-1805). Jean-François, a été page de la Petite Ecurie du roi. écuyer de Madame Victoire de France en 1776.

Le château de Brignac ( Royères) se situe en Haute-Vienne près de St-Léonard de Noblat.

Jeanne de Villoutreys donnera naissance à sa fille Marie-Catherine, assez tard, puisqu'elle a alors 40ans (en 1780) ... D'autre par Jeanne et Jean-Léonard vont divorcer, durant la Révolution, pour conserver les biens de Jean qui avait émigré, puis "négligèrent de se remarier civilement" après son retour...

Ces faits sont relatés dans des documents administratifs.


 

Pour le reste, voilà ce que je peux en dire...

Généralement, à cette époque surtout dans la noblesse, ce ne sont pas les fiancés qui se choisissent. Les familles prévoient les unions dans l'intérêt des deux familles... Dans notre cas, les parents de Jeanne espéraient un mariage plus avantageux pour leur fille. Jean-Léonard a des titres ( on n'hésite pas à ressortir le titre de ''vicomte d'Auberoche''...) mais peu de fortune. La famille de Villoutreys est beaucoup mieux pourvue ...

C'est par l'intermédiaire du frère de Jeanne, Jean-François de Villoutreys de Brignac, que les deux jeunes gens vont se rencontrer et se plaire. Jean-Léonard a le prestige militaire, il a été page comme Jean-François ; et comme lui ils ont goûté à la cour de Versailles et surtout à la vie parisienne... Ils ont croisé des gens de grand prestige, de belles dames influentes...

Les deux jeunes gens ont du attendre... Avoir 30 ans pour Jean-Léonard, et se marier sans le consentement familial ( 25 ans pour les femmes).

Ensuite, le couple va s'établir à Paris. Officier des Gardes Françaises, Jean Léonard de La Bermondie a le grand avantage de pouvoir résider à Paris. Les seules troupes qui stationnent en permanence dans Paris sont des unités de la Maison du roi : le régiment des Gardes françaises (3 800 hommes), et les gardes suisses...

Certains de ces officiers possèdent une bonne fortune, et d'autres sont pauvres ... Beaucoup ont de bonnes caves, des bibliothèques garnies de livres, dont le choix est plus personnel que conventionnel, et apparaissent comme des dilettantes, et des esprits curieux. Quelques-uns mènent de front opérations financières et carrière militaire..

Les Gardes Françaises fêtées par le peuple

On connait l'attitude des Gardes françaises en juillet 1789, qui sont '' passés à la révolution''. Ce ne fut pas le cas de Jean-Léonard, ses fréquentations étant trop attachées à la vie aristocratique, comme nous allons le voir ...

La condition militaire rencontre la faveur des hommes de lettres et les militaires écrivains sont nombreux. L'éthique militaire s'associe à la morale et à la sensibilité des Lumières. La philosophie triomphe dans l'armée.

Les clivages sociaux se marquent dans les loisirs et fréquentations des militaires. Jean-Léonard, lui, est plus introduit dans les salons que dans les milieux littéraires et artistiques.. Beaucoup d'officiers ont leur place réservée dans les théâtres.

Nous avons vu que la Franc- Maçonnerie se répand parmi les officiers. Il ne fait pas de doute, que l'entourage du duc d'Orléans ( dit Philippe Égalité après 1792 ) n'ait exercé son influence sur bien des officiers parisiens.

Mais, nous aurons l'occasion plus tard de décrire cette période pré-révolutionnaire ...

Pour Jean-Léonard et Jeanne, en 1770, à Paris, nous sommes loin de cette actualité politique. Comme nous allons le voir, l'ambiance ( des salons) est beaucoup plus frivole ...

William Hogarth, Le Mariage à la mode, 1745 ( Bnf)William Hogarth, Le Mariage à la mode, 1745 ( Bnf)
William Hogarth, Le Mariage à la mode, 1745 ( Bnf)William Hogarth, Le Mariage à la mode, 1745 ( Bnf)
William Hogarth, Le Mariage à la mode, 1745 ( Bnf)William Hogarth, Le Mariage à la mode, 1745 ( Bnf)

William Hogarth, Le Mariage à la mode, 1745 ( Bnf)

Paris, pont Neuf au XVIIIe siècle

Paris, pont Neuf au XVIIIe siècle

Ensuite, le couple va s'établir à Paris. Officier des Gardes Françaises, Jean Léonard de La Bermondie a le grand avantage de pouvoir résider à Paris. Les seules troupes qui stationnent en permanence dans Paris sont des unités de la Maison du roi : le régiment des Gardes françaises (3 800 hommes), et les gardes suisses...

Certains de ces officiers possèdent une bonne fortune, et d'autres sont pauvres ... Beaucoup ont de bonnes caves, des bibliothèques garnies de livres, dont le choix est plus personnel que conventionnel, et apparaissent comme des dilettantes, et des esprits curieux. Quelques-uns mènent de front opérations financières et carrière militaire..

On connait l'attitude des Gardes françaises en juillet 1789, qui sont '' passés à la révolution''. Ce ne fut pas le cas de Jean-Léonard, ses fréquentations étant trop attachées à la vie aristocratique, comme nous allons le voir ...

La condition militaire rencontre la faveur des hommes de lettres et les militaires écrivains sont nombreux. L'éthique militaire s'associe à la morale et à la sensibilité des Lumières. La philosophie triomphe dans l'armée.

Un après-dîner au XVIIIe (Couder Louis Charles Auguste)

Les clivages sociaux se marquent dans les loisirs et fréquentations des militaires. Jean-Léonard, lui, est plus introduit dans les salons que dans les milieux littéraires et artistiques.. Beaucoup d'officiers ont leur place réservée dans les théâtres.

Nous avons vu que la Franc-Maçonnerie se répand parmi les officiers. Il ne fait pas de doute, que l'entourage du duc d'Orléans ( dit Philippe Égalité après 1792 ) n'ait exercé son influence sur bien des officiers parisiens.

Mais, nous aurons l'occasion plus tard de décrire cette période pré-révolutionnaire ...

Pour Jean-Léonard et Jeanne, en 1770, à Paris, nous sommes loin de cette actualité politique. Comme nous allons le voir, l'ambiance ( des salons) est beaucoup plus frivole ...

Nicolas-Jean-Baptiste Raguenet, Une vue de Paris depuis le Pont Neuf

Nicolas-Jean-Baptiste Raguenet, Une vue de Paris depuis le Pont Neuf

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Au XVIIIe siècle, le mythe celtique refait surface : Les poèmes d'Ossian. -2/2-

Publié le par Perceval

Finn, Ossian et Niamh

Finn, Ossian et Niamh

Un matin, les Fianna sont à la chasse au cerf sur les rives du Lough Lein, dans le comté de Kerry, quand ils voient venir vers eux, un beau cheval blanc ; sur le cheval, est assise la femme la plus belle qu’ils n’ont jamais vue. Elle porte une longue robe bleue comme le ciel d’été, et parsemée d’étoiles d’argent. Ses longs cheveux d’or tombent jusqu’à sa taille.

« Quel est ton nom et de quelle terre viens-tu ? » demande Fingal ( Finn), le chef des Fianna. « Je suis Niamh aux cheveux d’Or. Mon père est le roi de Tir-Na-Nog, répondit-elle. J’ai entendu parler d’un guerrier nommé Ossian. On m’a fait part de son courage et de sa poésie. Je suis venue afin de le trouver et le ramener avec moi à Tir-Na-Nog. »

« Dis-moi, quelle sorte de terre est Tir-Na-Nog ? » demande Ossian.

« Tir-Na-Nog est la terre des jeunes« , répond Niamh. C’est un lieu heureux, sans douleur ou tristesse. Tout ce que l’on y souhaite se réalise et personne n’y vieillit. Si tu viens avec moi, tu verras que tout cela est vrai. » Alors, Ossian monte sur le cheval blanc ; il dit au revoir à son père et à ses amis. Il promet de revenir bientôt.

Le cheval galope sur l’eau, se déplaçant plus vite qu’une ombre. Les Fianna sont tristes de voir leur héros s’en aller, mais Finn leur rappelle la promesse d’Ossian qui a assuré qu’il reviendrait vite.

Tir Na Nog - Niamh Of The Golden Hair by RalphHorsley on deviantART

Le roi et la reine de Tir-Na-Nog accueillent Ossian et organisèrent une grande fête en son honneur. Tir-Na-Nog est en effet une terre merveilleuse, tout comme l’a dit Niamh. Le jeune homme chasse puis festoie. Le soir, il raconte des histoires de Fingal, son père, et des Fianna ainsi que leur vie en Irlande. Ossian ne s’est jamais senti aussi heureux, et peu de temps après, Niamh et lui se marient.

Le temps passe vite et bien qu’il soit très heureux, Ossian commence à vouloir rentrer chez lui pour rendre une visite aux siens. Niamh n’a pas envie qu’il parte, mais elle finit par lui dire : « Prends mon cheval blanc. Il te transportera en toute sécurité jusqu’en Irlande et te ramènera. Quoi qu’il arrive, tu ne dois pas descendre de ce cheval et toucher le sol de l’Irlande. Sinon, tu ne reviendras jamais jusqu’à moi ou à Tir-Na-Nog. »

Ce qu'elle ne lui dit pas, c'est que bien qu’il pense n'avoir été absent seulement quelques années, il était – en fait - à Tir-Na-Nog depuis trois cents ans !

par Jim Fitzpatrick - le retour en terre des Fianna

Quand il arrive, l’Irlande parait très étrange à Ossian. Il semble n’y avoir aucune trace de son père, Fingal, ou du reste des Fianna. Les gens qu’il voie lui semblent petits et faibles. Tandis qu’ il passe à travers Gleann-na-Smol, il aperçoit des hommes qui tentent de déplacer une grosse pierre. « Je vais vous aider « , déclara Ossian. Les hommes ont peur de ce géant sur son cheval blanc. Penché sur sa selle, Ossian lève la pierre d'une main et la lance. Mais la sangle de la selle éclate et Ossian est projeté au sol. Immédiatement, le cheval blanc disparaît et les hommes voient devant eux un très vieil homme. Ils l’amènent alors à un Saint homme – on dit aujourd'hui qu'il s'agit de saint Patrick , qui vit à proximité.

« Où sont mon père et les Fianna ? » demande Ossian. Quand il apprend qu’ils sont morts depuis longtemps, il a le cœur brisé. Il parle beaucoup des actes de Fingal ( Finn) et de leurs aventures ensemble. Il parle du temps qu’il a passé à Tir-Na-Nog et de sa belle épouse, Niamh, qu’il ne verra plus.

Ossian voit les fantômes de ses ancêtres au clair de lune , Nicolaï Abildgaard , 1778


 

Partick, qui a recueilli Ossian ( ou Oisin), lui demande de raconter ce qui lui est arrivé au moment où il a quitté Finn et le Fianna et s'en est allé avec Niamh.

Là est l’origine des chants, des poèmes d'Ossian:

Ossian invoque les esprits sur les bords de la Lora, François Pascal Simon, baron Gérard (1770-1837)

 

Madame Royale, fille de Louis XVI

Nous revenons au XVIIIe siècle, avec Madame Royale, la fille de Louis XVI, qui après la mort de son père ;

pour le poète ( M. D’ALBINS -  Les chagrins de Marie-Thérèse-Charlotte en sortant du Temple) prend alors les traits de Selma, personnage issu des chants d’Ossian, chantant la mort de son père Fingal, la lune comme seul témoin...

Sous ces couleurs appréciées à l’époque, ces poèmes mettent en valeur la piété filiale. La « Jeune Infortunée » chante son désespoir mais elle chante surtout la mort de son père, première à rendre un culte à ses cendres.

Le rêve d'Ossian , Jean Auguste Dominique Ingres , 1813

Le rêve d'Ossian , Jean Auguste Dominique Ingres , 1813

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Au XVIIIe siècle, le mythe celtique refait surface : Les poèmes d'Ossian. -1/2-

Publié le par Perceval

Une nouvelle fois, mais au XVIIIe siècle, le Mythe va rencontrer la littérature, pour nous permettre de revenir vers de nouvelles sources antiques …

Cela commence comme une supercherie, si du moins on pense que le mythe rapporté par le poète n'est qu'une invention...

 

James Mac Pherson

James Mac Pherson (1736-1796) est un poète écossais: il est le découvreur d'un cycle dits '' poèmes d'Ossian '' un barde écossais du IIIème siècle...

James Macpherson est hanté par des récits gaéliques originaires des Highlands et des îles... En 1760, il s'immerge dans l'ouest du comté d'Inverness, les îles de Skye, North Uist, South Uist et Benbecula. Il est à la recherche de manuscrits... Il monte une expédition vers l'île de Mull, Argyll...

En 1761, il écrit ( ou ''re-écrit'') une épopée sur le thème de Fingal écrite par Ossian (basé sur le fils de Fionn, Oisín), et, en décembre, il publie Fingal ( qui signifie : l'étranger blanc) , un Ancien Poème épique en six livres, ainsi que plusieurs autres poèmes composés par Ossian, le fils de Fingal, ''traduit'' dit-il de la langue gaélique...

 

Ce travail est devenu un best-seller international. Les aventures d'Ossian et celles de son père Fingal, le roi de Morven, rencontrèrent un succès qui valut la gloire à Macpherson...

Des savants, faute de pouvoir se référer à des sources manuscrites – lancent une controverse …

Le chant du cygne d'Ossian par Nicolai Abildgaard, 1782

Pourtant, grâce à la publication des chants épiques attribués à Ossian commence un vaste mouvement de découverte d’un patrimoine culturel, hérité des ancêtres « barbares » des Européens, les Celtes, Germains et Vikings... alors que le classicisme de l'époque ne se référait qu'à des sources culturelles gréco-latines …

Le barde aveugle Ossian s’accompagne d’une harpe celtique comme un Homère nordique.

Werther, le héros du roman de Goethe, déclare qu’ « Ossian a remplacé Homère dans son cœur »

Comme beaucoup, Napoléon Bonaparte devient ''ossianophile'' . Il commande plusieurs tableaux sur les thèmes des épopées à Gérard, Girodet et Ingres pour décorer ses appartements ou ceux de Joséphine.

 

Ossian reçoit les Héros français morts pour la patrie par Anne-Louis Girodet de Roucy, 1805

Le plus étonnant de ces tableaux est celui qui fait entrer directement Bonaparte et ses officiers dans l’épopée. Il s’intitule Ossian recevant les héros français. Girodet, qui a réalisé cette peinture pour la salle à manger de la Malmaison, lui a donné un long commentaire explicatif. On y apprend que l’aigle s’enfuit devant le coq qui symbolise « le Génie de la France » et qu’Ossian embrasse Desaix tandis que Kléber tend une main à Fingal, le guerrier fils d’Ossian, en signe d’alliance. Les généraux Dampierre, Dugommier, Championnet, Joubert, Desaix, etc., sans oublier le Premier consul, figurent sur le tableau…


 

Le cycle d'Ossian, ou des Fianna, se situe à égal avec le cycle d'Ulster. Les récits de ce cycle concernent la vie de chasseurs nomades au coeur de forêts primitives en Irlande. Ils sont contés par Ossian, le fils de Finn.

Les Fianna constituaient une sorte de chevalerie, chargée de maintenir l'ordre en Irlande et de protéger l'île contre toute invasion. Au IIIe siècle, dit-on, l'ordre des Fianna comptait deux cent cinquante officiers et quatre mille cinquante hommes.

Le héros, Fingal, ou Fionn ou Finn mac Cumhail est pourfendeur de monstres et magicien à la fois. Il est aussi poète et mène grande vie. Il a pour ennemi le fier Goll et son vantard de frère, Conan, tous deux fils de Môrna et chefs de ce clan redoutable …

 

 

Finn rencontra sa femme, Sadbh, alors qu'il chasse. Elle a été transformée en cerf par un druide, Fer Doirich. Les chiens de chasse de Finn, Bran et Sceolang, qui ont eux aussi été des hommes auparavant, sentent qu'elle est humaine, et s'interposent pour que Finn l'épargne. Elle se retransforme en une sublime femme. Après leur mariage, elle tombe rapidement enceinte. Toutefois, Fer Doirich refait surface, la transformant à nouveau en cerf, et Sadbh disparait.

Sept années passent avant que Finn retrouve son fils, Ossian (Oisín), qui devient l'un des plus puissants des Fianna.

Malgré son âge Finn prend pour épouse Graïnné ( fille de Cormac) qui l'abandonne pour le jeune et séduisant guerrier Diarmaid (Dermat).

A suivre ...

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De L’Annwn, au pays des fées...

Publié le par Perceval

Isle of Man

Isle of Man

Il est question de l’Annwn dans le premier des quatre contes des Mabinogion : Pwyll, prince de Dyved. Après une dispute de chasse, Arawn, roi de l’Autre Monde et Pwyll échangent leurs situations pour une durée de un an, c’est le mythe fondateur de la dynastie des princes de Dyved. Dans le Livre de Taliesin, un poème gallois du IXe s. ( Preideu Annwn) évoque qu’ Arthur et ses hommes partent pour l’Annwn afin d’en rapporter un chaudron magique. Seuls, sept hommes – dont le barde Taliesin qui raconte l’aventure – reviendront de cette quête qui préfigure celle d’autres objets talismaniques dans les récits arthuriens. Cet Autre Monde est aussi présent dans le conte Kulhwch et Olwen.

Shaun-William-Kerr

L' "Autre-Monde" est très présent dans les contes arthuriens ; et localisé au-delà d’une limite naturelle : rivière, forêt, arbre, mégalithe…etc. C’est un pays qui peut surgir partout mais ne se trouve nulle part … On peut le rapprocher du château du Graal… Et de l’île d’Avalon…

 

 

La littérature arthurienne – en se christianisant – va se construire en opposition à cette notion capitale d’Autre-Monde. L’Annwn est à distinguer clairement des représentations chrétiennes de l’au-delà.

 

By Charles Vess, né le 10 juin 1951 à Lynchburg (Virginie)

 

Aujourd’hui, on peut rapprocher l’Annwn, du pays des fées..

 

Le pays des fées est fondamentalement d’essence matriarcale. En témoignent ces nombreuses fées et Dames du Lac (qui donna l’Épée au roi Arthur), le plus souvent non mariées (supposées et dites « vierges » comme Diane-Artémis), qui séduisent et collectionnent les mortels valeureux. Malheur à qui osera rejeter les avances de ces dames.

Les plus chanceux se verront expédiés dans « l’autre monde », lors d’une chasse, poursuivant un gibier magique, un animal blanc surnaturel (biche, cerf, sanglier… un animal totémique, héraldique, sacré), qui les attirera au travers d’une porte invisible du Sidh, afin qu’ils y réapprennent les bonnes manières amoureuses envers les femmes.

En pénétrant dans l’Autre Monde de nos légendes, on entre au propre comme au figuré dans le pays des rêves : on pourra y trouver le repos ou le tourment, y voir réaliser ses souhaits les plus chers ou bien y rencontrer d’incompréhensibles mystères, et passer en quelques battements de cœur du plus merveilleux des songes au plus terrible des cauchemars… Il n’est alors guère surprenant de voir les terres d’abondance et de jouvence se confondre avec le monde des trépassés, le terme « Autre Monde » pouvant aussi bien désigner le pays des fées que le séjour des morts.

 

Cet Autre Monde est toujours séparé du nôtre par une frontière qu’il convient de franchir, une limite devant être outrepassée, symbolisée le plus souvent par une barrière naturelle (l’orée d’un bois, l’entrée d’une caverne, la surface d’un lac, les flots de l’océan, une nappe de brume ou tout simplement l’horizon…) mais dont l’emplacement peut aussi être marqué par un cercle de pierres levées ou, dans les récits médiévaux, par le portail d’un château…

The-Knight-And-The-Nymph by Edward-Okun (1872-1945)

De manière plus abstraite, cette limite peut aussi être celle qui sépare la veille et le sommeil, la conscience et l’état de transe, la sagesse et l’imprudence, ou encore le respect des interdits et leur transgression.

Dans tous les cas, le passage dans l’Autre Monde correspond à une incursion dans l’inconnu. Ainsi, le chasseur impétueux qui s’écarte de son chemin ou s’éloigne de ses compagnons pour poursuivre un gibier surnaturel (blanc cerf, sanglier géant etc) passera sans s’en apercevoir d’un monde à l’autre : l’animal fabuleux l’y a certes attiré, mais c’est le chasseur lui-même qui a transgressé un interdit symbolique en quittant le sentier ou en abandonnant le groupe.

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Les Mabinogion

Publié le par Perceval

Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion
Les Mabinogion

Certaines parties ont été traduites en français par Théodore Hersart de la Villemarqué, mais c’est Joseph Loth qui va établir la première édition française intégrale.

Ce texte provient d’ histoires, initialement trouvées dans deux manuscrits, le Livre blanc de Rhydderch (1300-1325) (maintenant à la Bibliothèque nationale galloise) et le Livre rouge de Hergest (1375-1425) (aujourd’hui conservé à l’Université d’Oxford) , mais certaines de ces histoires sont considérées comme ayant été écrites dès le 11ème siècle.

Les Mabinogion sont constitués de 4 branches, intitulées Pwyll, prince de Dyfed, Le Mabinogi de Branwen, Manawydan fils de Llyr et Math fils de Mathonwy..

Ces récits, sans être véritablement articulées, mettent en scène des personnages communs et font appel à une mythologie originale sans rapport exact avec les mythes gréco-latins ou germaniques. « Ce sont [quatre] nobles et francs [héros] agissant dans toute leur spontanéité. Chaque homme apparaît comme une sorte de demi-dieu caractérisé par un don surnaturel ; ce don est presque toujours attaché à un objet merveilleux, qui est en quelque sorte le sceau personnel de celui qui le possède », explique Ernest Renan

Alan Lee - The-Mabinogion - the-dream-of-rhonabwy

En dehors de ces quatre branches, il y a encore quatre récits qui se rattachent au cycle arthurien, dont le célèbre Culhwch and Olwen (vers 1100) ; enfin trois « nouvelles », que l’on considère aujourd’hui comme des adaptations « receltisées » des romans de Chrétien de Troyes.

Alan-Lee - The-Mabinogion

En effet, si on a considéré comme allant de soi que ces textes étaient anciens et qu’ils étaient une mise en écrit d’une très antique tradition orale. On en a déduit que le Mabinogi de Peredur ab Evrawc pouvait être la source du Conte du Graal de Chrétien de Troyes.

Joseph Loth, linguiste et historien français qui s’est particulièrement intéressé aux langues celtiques, abonde dans ce sens et dira ainsi, dans sa traduction de ces textes: «Les Bretons insulaires, avant l’apparition des romans français, avaient mis sur pied des romans d’aussi longue haleine et aussi bien composés pour le moins que les romans français. Il est même remarquable que dans l’ensemble, Owen et Lunet, Peredur, Gereint et Enid sont supérieurs aux romans français correspondants (Yvain, Perceval, Erec et Enide). Au point de vue artistique, la supériorité des écrivains gallois est également incontestable. Aucun écrivain français du temps de Chrétien, ni en France ni en Angleterre, ne saurait lutter contre les Gallois comme conteurs. Chez les Français, l’histoire se déroule lentement, terne, incolore, embarrassée de maladroites répétitions, de digressions oiseuses. Chez les Gallois, la narration est vivante, colorée, mettant en relief avec un sûr instinct artistique, les traits de nature à produire un effet pittoresque et romantique. »

Alan-Lee - illustration-from-Peredur-son-of-Efrawg - The-Mabinogion

Cependant, bien que certains passages des Mabinogion soient très anciens, on croit aujourd’hui que certains contes se sont plutôt inspirés des textes français. Anne Berthelot, médiéviste, ira même plus loin en disant que non seulement ils s’en sont inspirés mais qu’en plus, ils n’en ont pas toujours compris le sens.

Les Mabinogion gardent encore aujourd’hui une partie de leurs secrets…

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La littérature arthurienne au XIXe et XXe s. -3/3-

Publié le par Perceval

 
En France, on semble manifester encore de la méfiance envers une tradition littéraire très imprégnée de merveilleux….

Dès la fin du XIXe s. commencent à paraître des versions pour enfants : celle de Sir James Knowles, intitulée The story of King Arthur, publiée en 1862 est probablement la première ; elle dispute ce titre à la version américaine de Sidney Lanier, The Boys’ King Arthur, parue à New York en 1880.

The-Legends-of-King-Arthur-and-His-Knights - J-Knowles  Illustrated by Lancelot-SpeedThe-Legends-of-King-Arthur-and-His-Knights - J-Knowles  Illustrated by Lancelot-Speed
The-Legends-of-King-Arthur-and-His-Knights - J-Knowles  Illustrated by Lancelot-SpeedThe-Legends-of-King-Arthur-and-His-Knights - J-Knowles  Illustrated by Lancelot-Speed

The-Legends-of-King-Arthur-and-His-Knights - J-Knowles Illustrated by Lancelot-Speed

Le-Roi-Arthur  Livre-Rose pour-la-jeunesse Larousse

Le-Roi-Arthur Livre-Rose pour-la-jeunesse Larousse

King-Arthur His-Knights 1923

 

A signaler enfin, la réécriture burlesque de l’auteur-illustrateur américain Howard Pyle, King Arthur and his Noble Knights, une version en quatre volumes commencée en 1903. Les jeunes Anglo-saxons sont donc baignés très tôt dans un imaginaire arthurien qui semble exciter l’imagination d’écrivains talentueux.

En conséquence, les chevaliers arthuriens que nous rencontrons au XXe s. dans la littérature pour la jeunesse en France nous sont bien souvent parvenus via l’Angleterre et les États-Unis.

La première trace d’un roman arthurien pour enfants date approximativement de 1911, où l’on trouve un Roi Arthur dans la collection « Les livres roses pour la jeunesse » des éditions Larousse.

Après la seconde guerre guerre mondiale, quelques versions de romans arthuriens se rattachent encore à l’austère tradition universitaire. C’est le cas, par exemple, du volume signé Jacques Boulenger en 1922, qui sera longtemps réédité dans des collections enfantines, parfois avec des illustrations pleines de fraîcheur, comme c’est le cas en 1948, chez Mame, avec des images d’Albert Uriet, et qui ne brille ni par la fantaisie ni par la légèreté du style

Les-Chevaliers-de-la-Table-ronde - Albert-Uriet

 

LA-JEUNESSE-DE-LANCELOT-DU-LAC 1946


 

Puis, paraissent des versions très allégées, illustrées, remaniées.

Certaines sont de « pures » productions françaises, comme La Grande nuit de Merlin de Samivel publié en 1943 ;

La Jeunesse de Lancelot du Lac, de Noël Dufourt, daté de 1946 ;

Contes et légendes du roi Artus : L’enfance de Merlin de Claude Sylvain parue en 1947 chez Gautier Languereau ;

La Légende de Merlin l’enchanteur, texte du prolifique Jean Sabran publié par les éditions G.P.

En 1951 ; Les Contes de la Table Ronde d’Andrée Deflassieux-Fitreman en 1955 ; Les Chevaliers de la Table Ronde de Clément Borgal en 1961 ; ou encore un Lancelot du Lac adapté par Jacqueline Le Page en 1962.

Mais l’apport décisif à cette renaissance arthurienne dans le livre pour enfants vient du monde anglo-saxon.

 

La littérature arthurienne au XIXe et XXe s. -3/3-

L’album Les Chevaliers de la Table Ronde paru en France en 1957, est une transposition du film de Richard Thorpe, premier film en cinémascope de la MGM ( inspiré lui-même du texte de Malory, popularisé par la version de Steinbeck de 1952) qui connaît un succès international. Cette version évacue tout le merveilleux de la geste arthurienne pour ne retenir qu’un pragmatique question de succession et de pouvoir.

La littérature arthurienne au XIXe et XXe s. -3/3-

A lire, ..!

Le classique arthurien chez l’Atalante: Le Roman du roi Arthur et de ses Chevaliers de la Table Ronde

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La littérature arthurienne au XIXe et XXe s. -2/3-

Publié le par Perceval

Amiens - La galerie des Rois «restaurée» par Viollet-le-Duc entre 1849 et 1861

Amiens - La galerie des Rois «restaurée» par Viollet-le-Duc entre 1849 et 1861

Edition de 1927 de Tristan et Iseult par Joseph Bedier

Joseph Bédier, à travers une édition du Roman de Tristan et Iseut destinée au grand public en 1900, fait timidement entrer l’héritage arthurien au sein de la littérature française… Ce fut le début d’un grand moment bédiériste de la traduction de l’ancien français… Aussi, sont proposés au grand public : la Légende de Guillaume d’Orange, et les Lais de Marie de France, transposés par aul Tuffrau.

Une nouvelle rédaction des Romans de la Table Ronde, par Jacques Boulenger qui a su conserver toute la saveur d’autrefois, avec des paragraphes plus courts, des phrases plus nerveuses, une allure plus vivante …

 

Albert Béguin propose une traduction de la Queste del Saint Graal, admirable de pudeur et de justesse, complétée dans le même esprit vingt ans plus tard par Yves Bonnefoy.

De très nombreux auteurs, de Péguy à Cocteau en passant par Aragon, Benoit ou Barrès ( Un jardin de l’Oronte) ont placé leurs écrits sous le signe du Moyen Âge, que ce soit d’un point de vue esthétique ou politique, marquant ainsi une nette rupture avec la méfiance, voire l’hostilité, qui caractérisait souvent les relations avec cette période depuis les Lumières ...

En 1918 paraissait: ''Très plaisante et recreative hystoire de Perceval le Galloys jadis chevallier de la Table Ronde lequel acheva les adventures de Sainct Graal, au temps du noble Roy Arthus '' publié par Guillaume Apollinaire (1880-1918). Tiré de la ''Tres plaisante et recreative hystoire de Perceval le Galloys (éd. De 1530) ''

La couverture reprend la gravure de Perceval à cheval de Galliot du Pré.

Signé par Guillaume Apollinaire, ce remaniement est en réalité du à Blaise Cendrars. C’est un habile montage des aventures de Perceval, à l’exclusion de tout ce qui concerne Gauvain, Caradoc et les autres personnages secondaires du texte original.

Élodie Bouédec - pour L'Enchanteur de Barjavel

René Barjavel a donné sa propre version romancée des amours de Viviane et Merlin dans son roman L’Enchanteur en 1984.

On y retrouve de nombreux personnages tels que le roi Arthur et son épouse Guenièvre, Lancelot du Lac, Galaad et Perceval…

 

Cocteau-chevaliers-

Livre Édition Gallimard – 1941

Jean Marais, en chevalier

Notre époque ne craint pas de faire subir au mythe du Graal une sorte d’ « inversion maligne », pour reprendre un terme cher à Michel Tournier. Ainsi, dans la pièce de Cocteau Les Chevaliers de la Table ronde, le Graal devient maléfique, c’est lui qui rend « gaste » le pays. Julien Gracq lui aussi inverse le sens du mythe, faisant couler dans le vase sacré le sang impur d’Amfortas. On pourrait citer aussi le cas d’Italo Calvino qui, dans Le Château des destins croisés, se sert des tarots comme d’une simple « machine narrative combinatoire » pour engendrer une fiction littéraire et où le mythe du Graal est utilisé pour ruiner l’ésotérisme de la légende.

Les chevaliers de la Table Ronde ( 1953 ) de Richard Thorpe 
La littérature arthurienne au XIXe et XXe s. -2/3-

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La littérature arthurienne au XIXe et XXe s. -1/3-

Publié le par Perceval

Quittons le XVIIIe siècle, pour retrouver la Légende Arthurienne ....
 
Walter Scott ( 1771-1832)

 

Ivanhoe - Sir-Walter-Scott et Arthur-Sullivan - Opera

Ce retour littéraire commence au XIXe s. avec George Ellis qui publie des versions modernes des romans de Merlin et la Morte d’Arthur (1811) . Au même moment, Walter Scott (1771-1832) , célèbre pour ses romans historiques, obtient un réel succès avec Ivanhoé paru en décembre 1819.

Lord Alfred Tennyson (1809-1892)

Alfred Tennyson ressuscite les légendes arthuriennes, après plusieurs siècles d’abandon littéraire, et remémore le personnage d’Arthur à l’imaginaire de l’époque victorienne.

Ce grand projet se réalise en 1832 avec La Dame de Shalott. D’autres poèmes suivent : Sir Lancelot et la reine Guenièvre, sa propre Morte d’Arthur , et Sir Galahad, première apparition en version imprimée en 1842. Enfin, son travail s’achève avec Idylles du roi, commencé en 1855, et publié en 1859. La reine Victoria, elle-même, est enthousiaste. On dit souvent que Tennyson s’est inspiré, pour sa vision d’Arthur, d’une image idéalisée du Prince consort Albert… En 1847, il a été décidé que la Queen Victoria’s Robing Room de Westminster serait décorée de fresques arthuriennes par William Dyce.

Royal_Robing_Room, Palace_of_Westminster

Suivant l’exemple de Tennyson, de nombreuses autres oeuvres inspirées par la légende arthurienne suivent.

Entre 1837 et 1849, Lady Charlotte Guest traduit et produit en sept éditions une traduction du Mabinogion de l’ancien gallois.

Lady Charlotte-Guest

1910

Le Mabinogion comprend quatre récits médiévaux, écrits en moyen gallois (gallois du XIIe siècle au XVIe siècle), qui font référence à la mythologie celtique de l'Antiquité.

Dans le Mabinogion,  au premier conte, Pwyll aperçoit sur la colline de sa résidence royale de Narberth, une cavalière inconnue....

 

Rhiannon: avatar d’une divinité celtique féminine

Lord Lytton compose une histoire presque burlesque d’Arthur et de ses chevaliers, explorateurs en Suisse, puis dans l’Arctique, appelé simplement Roi Arthur (en 1848).

William Morris écrit un poème romantique La défense de Guenièvre , et Algernon Charles Swinburne compose un poème Tristram de Lyonesse .

Matthew Arnold publie en 1852 :Tristram et Iseult.

Quand le 19ème siècle a pris fin, les légendes arthuriennes étaient partout, et elles avaient touché – de par son passé – le cœur de la nation anglaise…

Au cours de la première guerre mondiale, le poète anglais Wilfred Owen voit les chevaliers d’Arthur tomber autour de lui sur les champs de bataille du front occidental.

John William Waterhouse, The Lady of Shalott 1888

Les peintres préraphaélites, notamment Dante Gabriel Rossetti, Edward Burne-Jones, William Holman Hunt, John Everett Millais ou William Morris, réalisent à la fin du XIXe siècle des œuvres dont l’intensité, l’émotion et la grâce accompagnent admirablement les scènes intimes et épiques des romans de Chrétien de Troyes et de ses successeurs .

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