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qumran

1955 - Les Manuscrits de Qumran

Publié le par Régis Vétillard

Edmund Wilson passe abruptement à son sujet d'intérêt, sans en avoir averti le cardinal Tisserant..

- Depuis 1947, époque où on découvrit un fabuleux trésor de manuscrits de l'époque du Christ, n'est-ce pas le silence du Vatican qui fait le plus de bruit...?

- Ah! J'avais oublié que vous étiez aussi journaliste au New Yorker! !

- Rien n'est caché. Le travail autour de ces confettis de parchemin nécessite de la minutie et du temps...

Qumran et les grottes sont sur le territoire jordanien, et les chercheurs juifs ne sont pas autorisés. C'est le père Roland de Vaux, dominicain, qui a constitué l'équipe et a toute autorité sur les recherches, et l'édition...

Entre 1947 et 1955, parmi la centaine de grottes visitées, onze révèlent leurs secrets, mettant au jour quelque 900 manuscrits…

Eleazar Sukenik, en 1951

Cependant, Eleazar Sukenik de l’Université hébraïque de Jérusalem, est parvenu à acquérir des fragments importants de rouleaux dont celui d'Isaïe.

 

Tisserant dit que, à sa connaissance, aucun texte du Nouveau Testament n'est présent dans les jarres de Qumran et que rien n'y parle de Jésus de Nazareth.

 

Wilson répond que l’épigraphiste français André Dupont-Sommer, dès 1950, compare Jésus avec ce fameux “Maître de justice” dont parlent les textes sans jamais le nommer.

Jésus de Nazareth ne pourrait-il pas être passé par Qumran ?

 

Tisserant s'en tient à ce qu'en disent plusieurs spécialiste, à savoir que Qumran devait être le lieu de vie d'une secte juive monastique, les esséniens qui y rédigèrent les manuscrits. Cette idée a été avancée très tôt par le père de Vaux.

 

- Oui, mais faut-il faire alors de Jésus un essénien et du christianisme "un essénisme qui a largement réussi" selon la formule de Renan ?

C'est ce que le professeur John Marco Allegro (1923-1988), philologue, docteur d’Oxford, vient de soutenir lors d'entretiens radiophoniques qu’il a donnés à la BBC.

Le père Józef Tadeusz Milik remet des fragments à John Allegro

 

Tisserant, note que le Times, en effet, a relevé cette polémique... Et que Dupont-Sommer, lui-même, qui avait jusque-là considéré Allegro comme un excellent collègue, n’avait eu, consterné, qu’un jugement bref : « Allegro est devenu fou ! »

Allegro est le seul agnostique de l’équipe internationale, il est renommé pour son anticonformisme.

 

- Vous soulignez, qu'Allegro est non-croyant, cela a donc son importance ?

 

- Oui, répond le cardinal. C'est important, parce que cela concerne les Ecritures. L'encyclique donnée à Rome le 30 septembre 1943, par le Saint-Père, Divino afflante Spiritu, réaffirme  l'inspiration divine des Écritures, il cite saint Augustin pour faire valoir que la méthode historico-critique peut être acceptable lorsqu'elle est nourrie par une grande foi en l'Esprit Saint. Le Saint-Père, souligne aussi que les Ecriture sont une Parole vivante, et rappelle la méthode des quatre sens de l'Écriture ( des Pères de l'Eglise) est recommandée pour mieux saisir le sens littéral et le sens spirituel de l'Écriture.

Le Père de Vaux assume cette responsabilité, quand il s'agit de questions aux implications importantes pour l'Église; certaines hypothèses formulées à partir des données de Qumran sont précisément jugées susceptibles de le faire.

Le travail de tout bibliste doit être guidé et déterminé par la doctrine de l'Église...

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Les découvertes des manuscrits de Qumran

Publié le par Régis Vétillard

La Cité du Vatican est un espace propice aux rencontres les plus diverses dans le cadre religieux. En 1955, Lancelot est harponné par un américain, et intimidé au premier abord par le physique et les propos du personnage. L'homme, de tradition presbytérienne mais qui se dit agnostique, recherche un allié pour rencontrer quelques dignitaires de l’Église catholique et les interroger sur les découvertes récentes de Manuscrits dans la région de la Mer Morte.

Edmund Wilson en 1952

 

Lancelot va expérimenter les longues discussions autour des nombreux verres d'alcool consommées par cette personnalité que Lancelot découvre, mais qui est célèbre et reconnue aux Etats-Unis. Son nom : Edmund Wilson (1895-1972), romancier, critique littéraire et curieux de tout, et donc, dit-il pour résumer: journaliste. Son modèle : un français, Sainte-Beuve. Sa culture émerveille Lancelot.

Il parle le français, l’italien, l’allemand, le russe cyrillique, il lit le latin et le grec. Il commence l'étude de l'hébreu.

Lancelot apprendra aussi, que Wilson est celui qui a découvert Hemingway, mais aussi Joyce, Eliot et Gertrude Stein; qu'il a présenté Valéry et Proust à l'Amérique; puis soutenu la réputation de Scott Fitzgerald dans les années 1940 et lancé la carrière de Vladimir Nabokov en Amérique.

 

Le 23 mars 1954, Wilson atterrit à Haïfa. Il est - à l'aéroport - impressionné par l'accueil enthousiaste réservé aux nouveaux immigrants.

Son objectif est de rencontrer des érudits et des archéologues, des religieux et des sceptiques au sujet des révélations induites par la lecture des ''manuscrits de la Mer Morte''. Entre conversations et interviews, il se rend à Jérusalem, il est rebuté par le triste état de l'Église du Saint-Sépulcre.

La rue Ben-Yehuda à Jérusalem en 1950

Il raconte sa traversée du quartier haredi de Méa Shearim, l'un des premiers quartier juif de Jérusalem construit autour de 1870. Repris par Israël, en 1948, aujourd'hui n'y vivent majoritairement que des juifs orthodoxes, des haredim. La vieille ville est aux mains des arabes ( sous contrôle jordanien), les juifs chassés et les synagogues détruites.

Il voyage en Transjordanie, à Tibériade et visite les Samaritains presque disparus.

Proche-Orient après 1949

Notes : 1949- Le Royaume de Jordanie, est le nouveau nom de la Transjordanie, Jérusalem est le centre religieux du royaume, et Amman la capitale. L'annexion ne provoque pas de réaction de la part des arabes déplacés et réfugiés, suite à la création de l'état d'Israël en 1948. (La «Nakba» ou la «catastrophe» fait référence à l'exode forcé de ces Palestiniens en 1948 - mais en ces années 50, on n'utilisait pas le mot de palestiniens, mais ceux d'arabes ''réfugiés'' ou de ''déplacés''). Pas de réaction non plus des pays arabes ou de l'ONU. Gaza est occupé par les Égyptiens. 

L'émoi qu'a suscité la publication de ses articles dans The New Yorker, l'amène à la rédaction d'un livre, pour lequel il ne lui manque plus que les réactions de la hiérarchie catholique, étrangement silencieuse jusqu'à présent...

 

C'est en 1947, que les premiers manuscrits de Qumran ( aujourd'hui en Cisjordanie) apparurent sur le marché. Ils s'étaient conservés pendant des siècles, en cuir, en papyrus, un seul sur feuille de cuivre, enveloppés de lin et scellés dans de hautes jarres, dans des grottes du désert de Judée à l’ouest de la mer Morte. Dans les années 50, Qumran est en territoire jordanien.

Du négociant au supérieur du couvent Saint-Marc à Jérusalem, les premiers fragments de parchemins vont être achetés par le professeur Éléazar Sukenik de l’Université hébraïque de Jérusalem ; après avoir été examinés par des chercheurs américains ( Brownlee et Trever) qui décelèrent l'importance de la découverte.

Les revues spécialisées répandent la nouvelle : '' dans la région de la mer Morte, des manuscrits bibliques d'avant, ou près de la naissance du Christ ont été découverts.'' !

 

A la fin du mandat britannique, la création de l’État d'Israël ( 14 mai 1948) entraînait la guerre en Palestine. Début 1949, elle prit fin officiellement. La Cisjordanie et Jérusalem-Est ont été annexées par le royaume de Jordanie.

Roland de Vaux - Qumrân en 1956

Roland de Vaux (1903-1971), dominicain, alors directeur de l'École biblique et archéologique française de Jérusalem, est chargé des fouilles du site ainsi que des grottes voisines, et de la publication des rouleaux et des fragments découverts.

Entre 1947 et 1955, parmi la centaine de grottes visitées, onze révèlent leurs secrets : 800 manuscrits, qu'il sera nécessaire de reconstituer à la façon de mosaïques, un travail de patience infinie.

 

Janvier 1951, le professeur Libby de l'institut d'études nucléaires de Chicago, détermine, au moyen du test du carbone 14, l'âge des manuscrits qui dateraient de la période située de 167 avant à 233 après J.C..

La thèse la plus courante est de dire que ces manuscrits ont été rédigés par les esséniens, une secte juive qui vivait à Qumran.

Des spécialistes pensent qu'ils ont été écrits dans une localité voisine dont les ruines sont nommées Qumrân. D'autres avancent qu'ils pourraient venir de Jérusalem, puis cachés à Qumrân pour la protéger des Romains quand ils attaquèrent la ville, et finirent par la détruire en l'an 70 de l'ère chrétienne.

Les questions que nous nous posons actuellement (1955) est la signification de ces textes, et leur implication dans nos connaissances historiques dans une période fondamentale aussi bien pour le judaïsme, que pour le christianisme naissant.

En hébreu, nous n'avons pas de manuscrits de cette époque.

Les journaux, les magazines, titrent sur ces questions : « Jésus était-il un essénien ? », « le christianisme est-il réfuté ? ». Les sources nouvelles confirment-elles la Tradition de l'Eglise, en particulier ses dogmes ?

 

Le silence officiel concernant ces découvertes, renforce le sentiment d'un complot organisé par le Vatican, qui tiendrait à occulter certains textes...!

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