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1900

1900 - Les salons artistes et mondains -1-

Publié le par Perceval

Anne-Laure de Sallembier a nécessairement croisé Marcel Proust (1871-1922) lors d'une réception ( comme nous le verrons plus loin, le 4 juin 1908 à un Dîner de la princesse Polignac), ou à Cabourg en ces mêmes années...

Elle s'est peut-être reconnue dans une partie du portrait que Proust publiera dans sa Recherche, et qui concerne Madame de Cambremer, même si - sur plusieurs aspects – il n'est guère favorable ….

« « Ne parlez pas à tort et à travers de Mme de Cambremer « , dit Swann, dans le fond très flatté. « Mais je ne fais que répéter ce qu’on m’a dit. D’ailleurs il paraît qu’elle est très intelligente, je ne la connais pas... »

« M. de Cambremer », me dit-il. « Ah ! C’est vrai, mais c’est d’une ancienne connaissance que je te parle. (…) Je lui répondis que je le connaissais en effet et sa femme aussi, que je ne les appréciais qu’à demi. Mais j’étais tellement habitué, depuis que je les avais vus pour la première fois, à considérer la femme comme une personne malgré tout remarquable, connaissant à fond Schopenhauer et ayant accès, en somme, dans un milieu intellectuel qui était fermé à son grossier époux, que je fus d’abord étonné d’entendre Saint-Loup répondre : « Sa femme est idiote, je te l’abandonne. Mais lui est un excellent homme qui était doué et qui est resté fort agréable. » Par l’« idiotie » de la femme, Saint-Loup entendait sans doute le désir éperdu de celle-ci de fréquenter le grand monde, ce que le grand monde juge le plus sévèrement. »

Les Cambremer, font partie de la petite aristocratie de province; et la jeune Madame de Cambremer est une jeune femme intelligente et ambitieuse qui rêve d’être admise dans le milieu des Guermantes. Elle est très jolie et rend jalouse beaucoup de femmes. Elle a été amoureuse de Swann et a eu une liaison avec lui dans sa jeunesse.

 

Anne-Laure de Sallembier a souhaité, en effet, fréquenter le Monde et ses salons; mais, c'était pour satisfaire avant tout sa Quête...

Anne-Laure, mariée, s'était ennuyée à suivre, soumise, le rythme de son vieux mari, qui découvre sur ses terres le plaisir de la chasse, et le soir, le jeu de cartes ; puis, sa grossesse l'a contrainte à l'ennui total coincée dans sa propriété de Fléchigné, alors qu'elle rêvait de la vie mondaine parisienne...

 

A Paris, et avec son mari, elle a fréquenté les salons ''orléanistes''. Sallembier est proche du duc de Broglie (1821-1901), et de son fils Victor de Broglie (1846-1906). A Paris, ils retrouvent Albert de Mun... Par son entremise, ils seront reçus chez José-Maria de Heredia...

Albert de Mun, a pour cousine, Élisabeth de Gramont, duchesse de Clermont-Tonnerre. De plus, le frère d'Albert : Robert de Mun, a épousé le tante de la duchesse, Jeanne de Gramont. Anne-Laure va se lier avec Élisabeth de Gramont (1875-1954)...

 

Veuve, son intelligence, et sa beauté ; lui ouvrent bien des portes... Et, sa grande curiosité va lui permettre de dépasser les couleurs politiques, et même sociales des nombreux salons qui agitent les soirées parisiennes sous la troisième République.

 

Les ''gens de lettres'', les artistes, sont les principaux faire-valoir d'une soirée... Anne-Laure recherchent particulièrement les philosophes et les scientifiques...

Ainsi, dans les années précédant ce nouveau siècle, le salon de Lydie Aubernon, est resté célèbre pour ses conversations qu'elle dirigeait à la baguette... On pouvait rencontrer le philosophe mondain Elme Caro, vulgarisateur de Schopenhauer, Ferdinand Brunetière, directeur de la Revue des Deux Mondes, et le médiéviste Gaston Pâris, ou Renan, ou Alexandre Dumas …

 

Aujourd'hui ( ces premières années 1900...), les salons sont plus restreints, certains sont établis autour des rédactions de revues comme celui de La Plume ou du Mercure de France, qu'Anne-Laure va être invitée à fréquenter ; mais seulement, après avoir commencé dans des salons plus mondains, où quelques proches l'ont introduite...

Une femme de la bourgeoisie, aussi modeste soit-elle, se doit de consacrer un jour par semaine pour recevoir des visites... Les autres jours, pour les faire...

Le salon, est la pièce d'apparat du bourgeois où trône le piano, au milieu du mobilier ''Louis-Philippard'', ou mieux Henri III, ou encore mieux signés ou imités de Boulle.. Des portraits de famille couvrent les murs, un fond de peluche ou de velours rouge, éclairé par des becs Auer au gaz. Les bibelots encombrent les meubles... La Princesse de Polignac remplace les "portraits de famille" par des Monet...

 

Des personnalités reçoivent comme José Maria de Heredia (1842-1905) au 11bis rue Balzac:

Henri de Régnier, se souvient : la première fois, chez Heredia :

« Je me rappelle que la pièce où l’on nous introduisit était pleine de soleil et de fumée. Il y avait là des gens, mais je ne sais plus qui. Heredia était debout quand nous entrâmes. Je me souviens du brun et affable visage, de l’accueil chaleureux, de la main tendue cordialement. J’entendis la voix sonore et parfois hésitante et je me sentis soudain rassuré et à l’aise dès les premières paroles amicalement louangeuses du poète.

(…) Il venait beaucoup de monde, le samedi, chez Heredia. C’était un défilé incessant. Mais il y avait aussi les habitués, ceux qui venaient là, non pas en visite, mais qui y passaient la journée ou une partie de la journée. Je devins assez vite de ceux-là. (…) On se sentait moins dans un salon que dans une espèce de cercle. Aussi dépassait-on facilement les limites de la visite ordinaire. (…) L’obligation de manquer à cette habitude hebdomadaire était un contretemps fâcheux. Le samedi était à Heredia, comme le mardi soir à Mallarmé.

(…) que de visages j’y vis passer ! Certains y revenaient assez régulièrement, d’autres à intervalles variables. J’y ai vu Prévost et Barrès – lui rarement. J’y ai vu Maupassant, Jules Breton, Callias, Pouvillon, Pomairols, Tiercelin, le marquis de Gourjault, qui avait été l’ami de Théophile Gautier, le musicien Benedictus, qui était celui de Judith Gautier, le baron de Pontalba, Chenevière, Nolhac, Cazalis, qui encore ? »

Marguerite de Saint-Marceaux (1850-1930)

Tous les vendredis, les Saint-Marceaux : le sculpteur René de Saint-Marceaux 1845-1915) et sa femme, née Marguerite Callou, en couple uni, reçoivent dans leur appartement du 100 boulevard Malesherbes. Salon d'artiste, on doit venir en tenue de travail, présenter ses œuvres … On y rencontre Jean-Louis Vaudoyer, Chausson, Lalo, Vincent d'Indy, Paul Dukas, Sargent, Claude Monet, André Messager, Henri Gauthier-Villars (Willy) et sa femme (Colette), Ravel, Pierre Louÿs, Debussy, Fauré.

Marcel Proust  s'est inspiré de '' Meg '' pour le personnage de Madame Verdurin...

Elle critique le snobisme et les positions dreyfusardes, de la Comtesse Greffulhe... Et, c'est vrai que la simplicité de Marguerite de Saint-Marceaux, attire de nombreux artistes, même ceux qui n'apprécient pas '' le monde '', comme Debussy...

« Une fine chienne bassette, Waldine, écoutait, une ouistitite délicieuse venait manger des miettes de gâteau, un peu de banane, s’essuyait les doigts à un mouchoir avec délicatesse, attachait aux nôtres ses yeux d’or, actifs et illisibles. De telles licences, discrètes, quasi-familiales, nous plaisaient fort. Pourtant nous nous sentions gouvernés par une hôtesse d’esprit et de parler prompts, intolérante au fond, le nez en bec, l’oeil agile, qui bataillait pour la musique et s’en grisait. Là, je vis entrer un soir la partition de Pelléas et Mélisande. Elle arriva dans les bras de Messager, et serrée sur son cœur, comme s’il l’avait volée. Il commença à la lire au piano, de la chanter passionnément, d’une voix en zinc rouillé.

Souvent, côte à côte sur la banquette d’un des pianos, Fauré et lui improvisaient à quatre mains, en rivalisant de modulations brusquées, d’évasions hors du ton. Ils aimaient tous deux ce jeu, pendant lequel ils échangeaient des apostrophes de duellistes : “Pare celle-là !... Et celle-là, tu l’attendais ?... Va toujours, je te repincerai...”

Fauré, émir bistré, hochait sa huppe d’argent, souriait aux embûches et les redoublait...

Un quadrille parodique, à quatre mains, où se donnaient rendez-vous les leitmotive de la Tétralogie, sonnait souvent le couvre-feu… » Colette Willy

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1900 – L'occultisme et la théosophie

Publié le par Perceval

Helena_Blavatsky

Revenons à la Théosophie, à ne pas lier forcément à la Société théosophique, fondée elle, en 1875, lors de la fondation en Amérique de la Société théosophique par Helena Petrovna Blavatsky et le colonel Olcott. Nous y reviendrons....

 

Le principe de la Théosophie chrétienne, pourrait remonter à Jacob Boehme ( allemand, XVIIe siècle)...

Mais ce que, Anne-Laure de Sallembier, en ces années 1900, retient : c'est l'enseignement d'une expérience de Dieu, intuitive, analogique ( le jeu des correspondances ) et symbolique. La théosophie aide à répondre aux questions existentielles ( pourquoi le monde, le mal, la mort … ?). L'idée de Nature, englobe le divin, l'humanité et l'univers... Tout le visible est le miroir de l'invisible, il peut être compris et vécu comme une expérience mystique...

L'aspect mythique de la révélation chrétienne est privilégié ; et les aspects dogmatique et clérical de la religion sont rejetés... L'aller-retour entre la raison, et l'expérience personnelle est privilégié. La science est valorisée, mais reste insuffisante pour modéliser la réalité...

Annie Besant

 

Pour ce qui est de la Société théosophique, la successeure de Mme Blavatski, Annie Besant (1847-1933), est une authentique militante socialiste féministe. Elle va tenter de promouvoir, dans l’esprit prophétique du début du siècle, un nouveau Messie instructeur de l’humanité... Ce rôle fut confié à un jeune Indien Jiddu Krishnamurti (1896-1986) qui rejeta finalement cette lourde charge comme l’avait fait Claire Bazard choisie par les saint-simoniens comme Femme-Messie en 1832.

 

En Allemagne, Franz Hartmann (1838-1912),un médecin allemand, franc-maçon, théosophe, martiniste, occultiste, géomancien, astrologue et auteur d'ouvrages ésotériques ; fonde une société théosophique allemande, et en 1906, est membre fondateur, de l'Ordo Templi Orientis (O.T.O.).

Rudolf Steiner-Berlin-1900

En France, c'est Lady Caithness (1830-1895), amie de H.P. Blavatski ( qui était plutôt ouverte aux spiritualités orientales), qui prend la tête d’une théosophie chrétienne, et donc scissionnaire, en profitant du passage par son salon de la quasi-totalité du monde occultiste parisien. La question du christianisme provoquera également la rupture de Rudolph Steiner (1861-1925) dans le monde germanophone à la veille de la guerre, soucieux d’intégrer l’acquis traditionnel occidental dans sa démarche d’acculturation de l’ésotérisme au monde moderne.

Même problématique :

Joséphin Péladan (1858-1918) affirme rester catholique, et s'oppose à Stanislas de Guaita (1861-1897 à 36ans) chrétien, mais à l'esprit éclectique ( christianisme, bouddhisme, spiritisme …) Tous deux avaient fondé l’Ordre kabbalistique de la Rose-Croix, dont fit aussitôt partie Papus ( passé pat la Théosophie) … Tous les jeudis soirs, les ''gnostiques'' se réunissent avenue Trudaine chez Stanislas de Guaïta. En collaboration avec son secrétaire et ami Oswald Wirth, Stanislas de Guaita réalise un Tarot...

René Guénon - le premier, au second rang en partant de la gauche, portant un sautoir maçonnique, à sa gauche, Amélie Gédalge (1865-1931) de la Maçonnerie mixte du « Droit humain » et à la gauche de celle-ci, Marie Martin (1848-1914), l’épouse du Dr Georges Martin, le fondateur du « Droit Humain. » À l’autre extrémité du second rang, en noir, Victor Blanchard (1877-1953). Au premier rang, en partant de la gauche : Albert Jounet (1863-1923), Theodor Reuss (Peregrinus) (1879-1923), Dr Gérard Encausse (Papus ; 1865-1916) et Charles Détré (Téder) (1855-1918). Debout, l’orateur est Georges Descormier (Phaneg) (1866-1945) et à sa gauche se trouve le Dr Fernand Rozier (1839-1922). (Le Monde illustré, juin 1908)

Gérard Encausse, dit Papus, (1866-1916) est l'un des grands animateurs de la vie occultiste parisienne pendant la Belle Epoque. Papus avait fait des études de médecine et comptait nombre de médecins dans ses proches amis et disciples. il décédera en 1916, ''victime d'un envoûtement''... ou d'une tuberculose … Les amis de Papus se réunissaient au siège de la Librairie du Merveilleux, 29 rue de Trévise.

En 1909, la '' Librairie du Merveilleux'' est au 76, rue de Rennes, à Paris, et elle est tenue par Pierre Dujols (1862-1926) et sa conjointe Mademoiselle Charton ( bretonne, née en 1868) , devenue son épouse en 1887... Elle aime à faire sa prière le soir en regardant le coucher du soleil. Elle est décrite par Mme Dubois comme ayant des dons de clairvoyance, faisant des rêves prémonitoires, lisant les lignes de la main et dans les cartes.

Ici, Anne-Laure de Sallembier, a pu croiser: Joris-Karl Huysmans, l'abbé Mugnier, l'artisan de la conversion de J. K. Huysmans, la cantatrice Emma Calvé, Paul Sédir, Paul Adam, Victor-Emile Michelet, Stanislas de Guaïta, Josephin Péladan, Charles Maurras, Villiers de l'Isle-Adam, Maurice Barrès, Catulle Mendès ( l'ex-mari de Judith Gautier) , Augusta Holmès ( maîtresse et compagne de Catulle M.), Victorien Sardou, et même le sceptique Anatole France... Et aussi, anecdotiquement, Mademoiselle Sarah Bernhardt...

Beaucoup de ces personnes, peuvent aussi se retrouver à ''La librairie de l'Art indépendant'', d'Edouard Bailly... Haut lieu de l'ésotérisme parisien...

Même si, Huysmans et Jules Bois vont s’opposer fermement à Papus et à Guaïta.

Emma Calvé

Judith Gautier, regrette et s'écarte des excès de Péladan, Guaïta, Papus, Paul Adam, Léon Bloy, Jules Bois, Huysmans, l'abbé Boullanet quelques autres, luttant à grand renfort d'anathèmes, de maléfices fluidiques, envoûtements, exorcismes, jusqu'au duel à l'épée ou au pistolet … !

Parmi les femmes plus rares dans ce monde d'hommes ; on remarque :

Emma Calvé, cantatrice, maîtresse de Jules Bois qui fut le grand ami de Maurice Leblanc. Emma Calvé était la meilleure amie de Georgette Leblanc...

''On'' dit, comme la légende ..., qu'elle aurait été en relation avec le fameux abbé Saunière, curé de Rennes-le-Château qui dépensa une fortune, d'origine inconnue...

 

G Leblanc et Maurice MAETERLINCK 1909
Augusta Holmès

 

 

 

 

 

Augusta Holmès (1847-1903), égérie et véritable compagne de Catulle Mendès, est compositrice.

Vers 1869 elle devient la compagne de Catulle Mendès (1841-1919), écrivain prolifique très en vogue, directeur de journaux littéraires, actif dans le mouvement poétique dit du «Parnasse». Catule Mendès est marié avec Judith Gautier (la fille du poète Théophile Gautier) depuis 1866... Raphaël, le premier enfant d'Augusta Holmès et de Catulle Mendès naît en mai 1870.

Augusta Holmès dans son salon, 52 rue de Rome.

Elle gagne les milieux parisiens vers 1870, se distingue par la ferveur qu'elle porte à la musique de Wagner, fait une forte impression et devient rapidement une célébrité. Pougin la décrit comme une jeune femme d'une beauté rayonnante, à l'opulente chevelure blonde, au regard clair, perçant et assuré, à l'allure fière et décidée. Elle fera l'admiration de Liszt, Wagner, Gounod et de Saint-Saëns dont elle repousse une demande en mariage tout en liant avec lui une amitié durable.

En 1899, elle prend le parti réactionnaire de Déroulèdes et prend cause pour les «anti-dreyfusards».

Son salon est témoin d'étonnantes expériences occultes: racontées dans ''L'au-delà et les forces inconnues'' de Jules Bois... Enfin, elle se convertit au catholicisme et prend pour prénom Patricia.

Sources : de Agnès de Noblet : ''UN UNIVERS D'ARTISTES Autour de Théophile et de Judith Gautier'' - dictionnaire – L'Harmattan 2003

Laure de Sallembier, par l’influence de Rudolf Steiner , s'est démarquée de « l'occultisme non scientifique » ; et garde du mot ''occulte'' un synonyme à ''initiatique''. Pour elle l'anthroposophie est une connaissance spirituelle de l’Évolution, qui relie l'être humain aux autres êtres vivants...

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1900 – L'occultisme - Lady Caithness (3)

Publié le par Perceval

Anne-Laure de Sallembier, n'a pas pu rencontrer Lady Caithness ; mais elle en a entendu beaucoup parler; et en particulier par Judith Gautier et par Camille Flammarion...

Son grand-père, Charles-Louis avait rencontré chez Balzac, la toute jeune épouse du Comte de Medina Pomar ; elle évoquait déjà certaines expériences occultes …

Son hôtel particulier, au 124 rue de Wagram

C'est ICI 

http://perceval.over-blog.net/2019/05/balzac-et-catherine-de-medicis.html

 

Bien plus tard, à Paris, Lady Caithness reçoit chez elle - tous les mercredis du printemps à l'automne - et invite des intervenants sous forme de conférences, comme le médecin Charles Richet (1850-1935), élève de Charcot et analyste des phénomènes parapsychologiques ( futur lauréat du prix Nobel) , l'astronome Camille Flammarion (1842-1925), le spirite Léon Denis (1846-1927) ou Annie Besant (1847-1933), future présidente de la Société théosophique.

Lady Caithness, duchesse de Pomar.

«Réunion des plus élégantes hier, chez la duchesse de Pomar, pour entendre la conférence de Léon Denis sur la doctrine spirite. D'une éloquence très littéraire, l'orateur a su charmer son nombreux auditoire en lui parlant de la destinée de l'âme qui peut, dit-il, se réincarner ici-bas jusqu'à épuration parfaite.(...) » 7 juin 1893 - Article de Journal...

Voici un programme, joint avec une carte de visite...

18 Avril 1894 - M. Camille Flammarion : Les étoiles et l'infini. 
26 Avril - M. le Professeur Bonnet-Maury : Le Congrès des religions à Chicago. 
2 Mai - Mme Hardinge Britten : Le spiritualisme moderne (en anglais). 
9 Mai - M. le Professeur Ch. Richet : La Paix internationale. 
18 Mai - M. Victor du Bled : La femme au XVIII° siècle. 
23 Mai - M. Léon Denis : Le Problème de la vie et de la destinée. 
30 Mai - M. l'abbé Petit : L'Esprit nouveau. 

Camille Flammarion

Le Journal parisien l’Événement, du 21 mars 1895 : «Orateur littéraire, armé d'une ardente conviction, Léon Denis a su vite conquérir l'auditoire mondain qui se pressait dans la salle des fêtes de l'hôtel de Pomar, et c'était un plaisir de voir cet essaim de belles dames de l'aristocratie parisienne, amusées au début par quelques pensées frivoles, modifiant peu à peu l'expression de leurs regards pour devenir graves et montrer une attentive fixité »

Lady Caithness soutient financièrement la branche française de la Society for Psychical Research Society chargée d'étudier les phénomènes paranormaux... Elle compte parmi ses membres des personnalités aussi diverses qu'Arthur Conan Doyle, Henri Bergson, Camille Flammarion, le chimiste William Crookes et le naturaliste Alfred Russel Wallace.

Voici le témoignage de la jeune Alexandra David-Néel :

«Elle habitait un très vaste et somptueux hôtel, remarquable par un escalier monumental en marbre rose. La maîtresse du logis recevait dans une chambre à coucher dont le plafond peint représentait le Cercle de l'étoile, c'est à dire plusieurs centaines de figures de bienheureux et d'anges disposés en rangées concentriques autour d'une étoile d'or.(...) Le jour de la maîtresse de maison l'on discutait dans cette chambre de théories occultes et de recettes d'alchimie mais, surtout de l'évocation des Esprits. La duchesse et ceux qu'elle recevait étaient tous des adeptes du spiritisme.» 

Le salon de Camille Flammarion lors d’une séance de spiritisme, à Paris en 1898.

Lors de ces séances, l'exploratrice croise Camille Flammarion, attablé avec une douzaine d'autres personnes dans la chapelle faiblement éclairée. « Les Esprits qui se manifestent dans des séances des spirites sont des élémentaires, des âmes désincarnées plus ou moins longtemps conscientes. Elles sont plus ou moins intelligentes, souvent hébétées aussi, par l'état inconfortable que leur créent leur manque d'enveloppe matérielle et l'impossibilité où elles se trouvent, faute d'organes sensoriels, de participer encore à l'activité du monde auquel elles ont appartenu. Ces élémentaires cherchent activement les occasions de se réincarner et de nouer avec les vivants des relations propres à leur faciliter cette réincarnation. Or, à défaut de celle-ci, ces entités tendent à occuper temporairement les individus incapables de s'opposer à leur emprise ou ceux qui la subissent volontairement. De là, les phénomènes de possession et de médiumnité...»

James Sinclair, 14ème comte de Caithness

 

L’intérêt d'Anne-Laure s'est portée, également, sur la période où elle vécut en Ecosse... Elle a épousé James Sinclair, le 14ème comte de Caithness, le 6 mars 1872.

Une nuit, alors qu'elle dormait dans un château de Caithness (le château de Thurso) , elle eut un songe qui lui enjoignait de se rendre immédiatement à la chapelle du château royal de Holyrood... Ce qu'elle fit... Elle vécut cette nuit là, une expérience médiumnique avec Mary Stuart... Expériences qui se reproduiront...

 

Holyrood Abbey, a été envisagée en 1906, comme chapelle pour les Chevaliers du Chardon -

Un 24 juin 1314, à Bannockburn, Robert Bruce roi d'Ecosse battait Edouard II roi d'Angleterre, gendre de Philippe IV le Bel. En ce jour de victoire il institua l'Ordre de Saint-André du Chardon d'Ecosse, en l'honneur du saint patron de l'Ecosse, en y insérant les Templiers écossais qui avaient participé à la bataille et qui n'avaient plus de nom depuis la destruction de leur Ordre. Il cessa d'exister après la mort de Marie Stuart: tombé dans le silence, le secret, cet Ordre fut réveillé par Jacques VI d'Ecosse, fils de la reine Marie Stuart et de son époux et cousin Henri Stuart de Lennox, seigneur de Darnley. De nouveau tombé dans l'oubli, le secret et le silence, il fut réveillé une troisième fois (1687) à Saint-Germain-en-Laye par son petit-fils Jacques VII d'Ecosse, roi d'Angleterre ( sous le nom de Jacques II), d'Ecosse et d'Irlande... La reine Anne le reconstitua en 1703, et, vingt ans plus tard, le roi Georges 1er le confirma solennellement et en modifia les statuts.

Ordre du Chardon

Cet ordre se compose aujourd'hui d'une seule classe de membres, portant tous le titre de chevaliers. Il est destiné à récompenser le mérite et les services de la noblesse d'Ecosse.

“Qui s’y frotte, s’y pique''...

Une superstition populaire voyait en lui un don du Diable. Néanmoins, le chardon évoque aussi l'amour et le labeur qui résistent aux épreuves et aux souffrances. Il est associé aux amours terrestres d'Aphrodite ainsi qu'à l'amour miséricordieux de la Vierge Marie. On lui a également attribué des vertus curatives, de purification et de longévité. En Écosse, dont il est l'emblème national, le chardon est célébré dans une légende du Xe siècle : espérant attaquer furtivement le château de Staines, les envahisseurs vikings ôtèrent leurs bottes ; les Écossais avaient rempli les douves asséchés de chardons et furent avertis par les cris de douleur de l'ennemi (Heilmeyer). Faisant jaillir une belle fleur hors d'une tige rêche, les racines du chardon auraient la propriété de dissiper la mélancolie."

 

Le peintre ''allemand'' Albrecht Dürer, peintre, mais aussi féru de mathématiques, représente dans ses tableaux de nombreux symboles : compas, la pierre taillée, le sablier, l’échelle, le triangle lumineux. Dans un célèbre autoportrait, Dürer se représente tenant à la main un chardon, selon les uns il représente la fidélité : le chardon gage de son amour pour sa femme ( que l'on dira ensuite très revêche...!) et pour d'autres ce serait le symbole de l’initiation. Le chardon est la fleur du soleil, c’est l’image de la vertu cachée protégée par ses piquants....

 

Selon les légendes qui courent ici, il y aurait un lien entre l'abbaye de Holyrood et la chapelle de Rosslyn... Nous sommes alors en 1545-46, la régente d'Ecosse et Sir William Sinclair de Roslin (petit-fils du fondateur de la chapelle Rosslyn), signent un accord dans lequel il est écrit : « et le secret confié à nous, nous le garderons... ». Cela concernerait un ''trésor'', celui de Holyrood, caché par les Sinclair sous les voûtes souterraines de la célèbre chapelle Rosslyn...

Holyrood abbey inside

Ce trésor contenait sans doute des reliques : '' le fragment de la Vraie Croix, dans son reliquaire en argent, en or et en bijoux; le Crucifix sacré ou noir de l'Écosse, qui a été maintenu pendant cinq siècles comme le symbole sacré le plus précieux de la nation par le premier saint-clair-écossais, l'échanson de la reine Marguerite et de la famille St. Clair. "

 

La chapelle de Rosslyn nécessita quarante années de travaux, et fut achevée en 1486, soit 6 ans après le décès de son créateur William Sinclair (11th baron), qui y fut enterré.

Son père, Sir Oliver St Clair, douzième baron de Rosslyn, avait poursuivi les travaux de construction de la chapelle Rosslyn et avait quatre enfants, dont deux évêques - Henry et John -, qui officièrent lors du mariage entre Marie, reine d'Écosse, et Henry Stuart, lord Darnley, dans l'église de Holyrood le 29 juillet 1565. Il convient également de noter que le XIVe baron de Rosslyn, également appelé William, fut nommé président de la Cour suprême d'Écosse par la reine Marie en 1559.

Plusieurs Sinclair ont été enterrés dans l'abbaye …

A Lire : sur la chapelle de Rosslyn : ICI :

http://perceval.over-blog.net/2018/03/comment-j.l.de-la-bermondie-retrouve-les-templiers-au-xviiie-siecle.7.html

 

Lady Caithness a décrit son expérience avec Mary Stuart dans une brochure intitulée A midnight visit to Holyrood (1884) .. A la suite de quoi Lady Caithness a décidé de vouer sa vie à la spiritualité, comme il le lui avait été demandé : « (…) tu as été choisie (…) parce que tu as une nature complète et bien équilibrée qui te permet de voir et de comprendre tous les côtés de la vérité. » .

Lady Caithness décède à Paris le 2 novembre 1895. Elle sera inhumée à Holyrood..

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1900 – L'occultisme - Lady Caithness (2)

Publié le par Perceval

Le Jardin des Hespérides, décor de Ker-Xavier Roussel (1867-1944)

Le Jardin des Hespérides, décor de Ker-Xavier Roussel (1867-1944)

Examinons ''L'Ouverture des Sceaux (1893)''. Il s'agit de l'un des derniers ouvrages de Lady Caithness, qui mourra seulement deux ans après sa publication. Le noyau du livre consiste en un travail d'exégèse des trois premiers chapitres de la Genèse. Pour Lady Caithness, la Bible est un « ''livre scientifique '', dont les mystères peuvent être aussi facilement compris qu'une proposition en mathématique, en mécanique ou en chimie »... ( Ce livre semble s'apparenter à une série de communications avec des entités spirituelles... )

Dans un chapitre, il est question de la chute d'Adam et de sa punition, à savoir la sortie du jardin d'Eden : l'auteure commence à considérer la description du jardin et des quatre fleuves qui sont censés l'arroser, il ne s'agit pas d' un lieu géographique ; mais d'un lieu ''physiologique''. Selon Lady Caithness, le jardin d'Eden est en effet le corps humain même, et plus particulièrement le corps de la femme. Pour elle le corps humain est « le temple de Dieu », « la merveille, la couronne des œuvres magnifiques de Dieu; il est son image a Lui, et lorsqu'il sera devenu parfait ce sera le lieu ou Il habitera ». Et, il est intéressant de noter que, dans ce jardin qu'est le corps, une attention spéciale est attribuée aux organes de la reproduction. En effet Lady Caithness regrette que le corps soit aujourd'hui « considéré comme une chose honteuse, et ses parties les plus indispensables [soient] estimées les plus vulgaires, et méprisables ». Mais en réalité, « aux yeux du Créateur, la génération dans l'homme est ( ... ) une fonction supérieure et divine. Le système créateur est un sanctuaire dans lequel s'accomplissent ses intentions les plus élevées »

Si les organes sexuels ne représentent rien d'impur, c'est « l'usage pervers que l'homme en a fait» qui les a rabaissés.

Hilda Elisabeth Keyser (1851–1898)- L’expulsion du jardin d'Eden

Le chapitre se poursuit avec une exégèse originale, identifiant les quatre fleuves du jardin d'Eden aux quatre fonctions corporelles, liées à la circulation des fluides :

• Le premier fleuve, Pischon, est celui de la nutrition du corps par le biais du sang, qui circule dans tout le système. Ensuite il y a Guihon, le fleuve qui représente les excréments qui courent par la voie des intestins. Le troisième fleuve est Heddekel, qui « débarrasse le système d'une autre classe d’impuretés par le moyen des reins ». Il s'agit évidemment de l' urine. Finalement, le quatrième et dernier fleuve, l'Euphrate, est celui « qui rend fertile, qui coule a travers le système reproducteur ». Puisqu'il est question ici particulièrement du corps de la femme, il doit s' agir des eaux du ventre de la femme enceinte, mais aussi du sang de ses règles.

Mystère - Lucien Lévy-Dhurmer

 

Ensuite, les propos de Lady Caithness, restent obscurs : elle évoque un « baume en Galaad », et une « source d'eau vive » qui serait capable de régénérer les corps humain …

« Qui donc empêchera ceux qui savent ces choses de les proclamer? [ ... ]Qui dira aux vieillards [ ... ) qu'il y a un baume en Galaad capable de leur rendre la jeunesse et la force, et de les sauver de la mort en les introduisant dans le royaume des fils de Dieu? A la race malade et maudite, qu'il y a une source d' eau vive qui peut la guérir, si seulement elle veut en boire, qui apaisera l'enfer ardent dont elle souffre; qu'il y a un pays ou coule le lait et le miel, un arbre et une rivière de vie pour satisfaire tous les besoins humains? Qui osera dire cela? Et cependant ce sont justement ces choses que chaque âme vivante peut obtenir, car Dieu les a mises a sa portée. Le royaume des cieux est en tous, et il n'y a qu'à le chercher pour le trouver et en jouir. »

The lovers by Fidus (1868-1948)

Certains lecteurs font références à ces passages, pour parler de '' magie sexuelle''

« [ ... ] le mystère de Dieu qui est cache en Christ et scellé dans la Bible[ ... ) est le chemin par lequel les forces créatrices dans l'homme et dans la femme, forces qui furet perverties à l’époque de la Chute, doivent être utilisées et devenir l’élixir de la vie, au lieu d’être ce qu'elles sont maintenant, la malédiction de la mort. »

Ces « forces créatrices dans l'homme et dans la femme » pourraient être les forces de la sexualité?

 

Lady Caithness semble croire que le moment n' est pas encore venu pour révéler ouvertement au monde ce ''mystère''. Pour elle il semblerait que le sexe tel qu'il est pratiqué n'ait pas grand chose à voir avec celui-ci. La sexualité vécue alors est effectivement une souillure du corps, et, pour l'instant, il est nécessaire de souligner l'importance de « relations pures ». Malheureusement, Lady Caithness n' explique pas ce qu' elle entend par cette expression...

Fidus. Peintre allemand. Époque Art Nouveau.

Elle ajoute qu'il ne faut pas craindre que cette nouvelle sexualité puisse être moins satisfaisante, même sur le plan strictement sensuel, que l'autre. A ce propos, elle aborde aussi explicitement, dans des termes seulement un peu voilés, mais évidemment courants a son époque, la question de l'orgasme:

« Nous n'avons pas l'intention de dire que la relation entre les sexes, telle qu' elle doit exister, priverait l'un ou l'autre du bonheur qui peut-être senti par le cœur dans l'union a travers les sens. Non! au contraire ce bonheur sera augmenté au delà de tout ce que l'on peut imaginer. » •

Puis, elle ajoute une remarque adressé plus particulièrement aux hommes, qui n'imaginent pas quelle sera la qualité des orgasmes après la venue du Jour Nouveau:

« Oh! si les hommes pouvaient comprendre cela, et voir que, même au point de vue matériel et égoïste, ils auraient tout intérêt a aspirer à la nouvelle naissance. »

 

Ce discours sur la sexualité, est d'autant plus étonnant, qu'il est porté – à cette époque – par une femme … Discours original, même dans la mouvance théosophique.

Une autre exception intéressante, de ce point de vue, est le point de vue d'Ida Craddock, contemporaine de Lady Caithness, qui développe une extraordinaire doctrine de sexualité mystique sur la base de communications qui lui auraient été faites par une entité angélique. Dans ces enseignements, peut-être influencés par les écrits de P.B. Randolph, Ida Craddock donne une grande importance a la question de la jouissance féminine comme clé du bonheur conjugal.

 

A noter, peut-être, que le fait d'envisager une source que l'on prétend autre que soi - ici des ''entités'' permet un discours sur la sexualité plus radical et qui transgresse des normes sociales...

 

Enfin, cette nouvelle vision du corps qui prend forme au sein de la mouvance occultiste, pourrait être rapprochée du courant allemand de la Lebensreform : un mouvement de réforme en Allemagne et en Suisse à la fin du XIXᵉ siècle et début du XXe.. principalement critique de l'urbanisation et de l'industrialisation avec son slogan du « retour à la nature ».

Sources : EXEGESE ET SEXUALITE: L'OCCULTISME OUBLIE DE LADY CAITHNESS par Marco PASI ( agrégé d'histoire de la philosophie hermétique et des courants associés à l'Université d'Amsterdam )

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1900 – L'occultisme -

Publié le par Perceval

Anne-Laure de Sallembier, comme dans la plupart des assemblées intimes bourgeoises, a fait ''tourner les tables''... Ces pratiques occultes semblaient faire le lien entre l'Esprit et la matière, entre la religion et la science...

 

Jusqu'à la Grande Guerre, de nombreux scientifiques ont accueillis les expériences occultes, et ont tenté d'ouvrir des territoires nouveaux de connaissance . Camille Flammarion, les Curie, Paul Langevin, Charles Richet, Édouard Branly ont touché à l’occulte... Papus ( Gérard d’Encausse, médecin). Arago de l'Académie des sciences, par exemple nomme une commission pour étudier les faits qui entourent '' la fille électrique '' Angélique Cottin ( déplacements de corps …). Camille Flammarion, s’engage dans l’étude du spiritisme dans le but précis de réconcilier la science et le spiritualisme.

Liane de Pougy par Nadar

Après le ''magnétisme'' ( au XVIIIe s. comme nous l'avons vu, ici même : ) , le ''spiritisme'' apparaît comme la nouvelle doctrine. La grande figure spirite en France est Allan Kardec (1804-1869) : Le livre des esprits 1862: sa tombe – il s'appelait réellement Hyppolite Léon Rivail - est un lieu de pèlerinage toujours fleuri (elle l’est encore de nos jours)... Depuis les ''salons'', des cérémonies mystérieuses pour parler aux morts ou profiter des visions d’un extralucide, fleurissent dans le tout Paris mondain.

Par exemple, Liane de Pougy, dans son appartement du Faubourg du Roule, reçoit nombre d’amis et de voyantes célèbres... On y fait régulièrement « tourner les tables » …

Nous sommes en 1908, et la France se remet à peine de l’affaire Dreyfus ; elle s'est officiellement séparée de l’Eglise catholique, apostolique et romaine. Des congrégations entières comme les Chartreux ont été chassés de leurs couvents entre deux gendarmes. Les relations avec la papauté sont au bord de la rupture. Les lieux de cultes sont propriété d’état et lors de leurs inventaires calotins et bouffeurs de curés font le coup de poing. Il y aura même des morts.

Le spiritisme veut renouveler le christianisme, et ses nouveaux ''médiums'' sont souvent des femmes... Dans ce cadre elles prennent la parole, sont écoutées, et sont publiées... Elles promeuvent une solidarité nouvelle ( crèches, bibliothèques, maisons de retraite...). La Revue spirite met ainsi en question l’indissolubilité du mariage. Ces femmes spirites relativisent la filiation : un bébé n’est que le fruit de l’association d’un esprit qui vient d’ailleurs incarné dans un corps de chair au moment précis de la naissance. La Revue milite pour une réforme du Code civil afin que la femme trouve sa pleine et entière « personnalité morale et juridique. »

En juin 1908 se tient à Paris un Congrès spiritualiste assorti d'un Convent maçonnique des rites spiritualistes. L’événement est important pour les occultistes et pour le grand public, le dossier de presse en témoigne. On y remarque le jeune René Guénon, (le premier, au second rang en partant de la gauche, portant un sautoir maçonnique) ; à sa gauche, Amélie Gédalge (1865-1931) de la Maçonnerie mixte du « Droit humain » et à la gauche de celle-ci, Marie Martin (1848-1914), l’épouse du Dr Georges Martin...

 

Rufina Noeggerath (1821-1908) ( française et dite '' Bonne-Maman''), s’intéresse aux preuves de survie après la mort. Médium douée, elle crée alors son propre groupe spirite. Ses communications sont fortement marquées par la tolérance et l’anticléricalisme. Elle y défend tous les persécutés, les Juifs en particulier. Son livre La survie, sa réalité, sa manifestation, sa philosophie, est publié en 1897.

Claire Galichon, médium et écrivain, publie un certain nombre d’ouvrages où elle défend un « féminisme spiritualiste » et pour l'époque révolutionnaire … Figurez-vous qu'elle ose réclamer: une éducation et une instruction égales pour les deux sexes, un salaire égal lorsque le travail est égal, l’accès des femmes à toutes les carrières... ! Nous sommes en 1909...

Elle dénonce l’assujettissement de l’épouse et la violence du mari qui commence bien souvent lors de la nuit de noce. « Certaines nuits de noce sont des nuits de bataille. (…) Ce qui importe en face du désir d’amour, c’est qu’il soit réciproque. Quand il est partagé, il perd tout caractère répugnant. » 

Dans un contexte culturel largement anti-sémite (!) de cette époque, des théosophes comme St-Yves d’Alveydre (1842-1909); valorisent la « Mission des Juifs », tout autant que l'action civilisatrice des égyptiens, des hindous, des celtes ...etc.

Pour lui, la Fraternité du Temple, est l'héritière en Occident de la tradition ésotérique. Les occultistes du XIXe s. cherchent des liens entre les Templiers et l’Alchimie... On va même tenter de trouver des explications ( loin du diable) symboliques à la figure du Baphomet ( voir Eliphas Levi).

Les templiers purent recevoir des juifs : les secrets de la magie; et des arabes, les secrets de l'Alchimie …

 

N'oublions pas qu'au XIXème siècle, le mot ''occultisme'' est utilisé comme un synonyme d’ésotérisme...

L'ésotérisme désignait un espace de liberté pour la spéculation spirituelle hors du carcan des dogmes et des règles établies de l’exégèse religieuse...

J'ai déjà évoqué ici, qu'en cette fin de siècle, cette nouvelle spiritualité ne s'oppose pas aux idées nouvelles que sont le socialisme, ou le féminisme...

Annie Besant- Théosophes au Comité de grève

Au contraire :

Victor Hennequin, avocat, fouriériste, député de l’Assemblée législative en 1850, est à l'écoute de « l’esprit de l’âme de la Terre »... Jean Reynaud, publie également, '' Philosophie religieuse. Terre et ciel. (1854)'' Il souhaite un renouvellement des études théologiques et pour ce faire met en rapport sciences physiques, sciences morales, astronomie et théologie. Il a pour ambition de démontrer la vie dans l’univers, de poser le dogme de l’immortalité, de nier l’existence de l’enfer. Par ses souffrances et par son travail, l’homme participe à sa régénération et à celle de la planète.

Arthur Arnould ( directeur de la revue théosophique '' le Lotus Bleu'' est un ancien élu de la commune... La nouvelle génération née autour de 1865, de jeunes artistes et futurs voyageurs influencés par l’anarchisme sont théosophes dans les années 1890, comme Ivan Aguéli (1869-1917) ou Alexandra David-Néel (1868-1969) qui intègrent la loge Ananta d’Arnould. Et d'autres ….

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Camille Flammarion, Gabrielle et Anne-Laure

Publié le par Perceval

Camille Flammarion, le réputé et populaire scientifique, rencontre Julia-Gabrielle Renaudot...

Le point commun qui semble les réunir, est non pas un objet scientifique ( du moins pour nous au XXIe s.), c'est l'intérêt pour l'occultisme... Même si, l’astronome Camille Flammarion, s’engage dans l’étude du spiritisme dans l'idée aussi de réconcilier la science et le spiritualisme.

L'occultisme semble d'ailleurs être l'un des fils rouges de ce qui a rempli la vie de Laure Sallembier... ( à suivre)... Au XIXe siècle, le mot ''occultisme'' vient d’apparaître : il concerne la théorie et la pratique des sciences occultes... Papus (1865-1916), explique que la méthode des ''sciences occultes'' est basée sur l'Analogie, et permet d'étudier la partie invisible, occulte de la nature et de l'Humain...

Gabrielle Flammarion

Julia-Gabrielle Renaudot, est née à Meudon ( près de l'Observatoire d'astronomie physique …!)  le 31 mai 1877, du sculpteur Jules Renaudot et de Maria Latini, peintre d'origine romaine et modèle de la Salomé peinte par Henri Regnault... Elle est morte à Juvisy-sur-Orge le 28 octobre 1962.

 

Gabrielle est l'une des ces premières femmes à atteindre cette maturité réservée alors aux hommes. Alors qu'elle suit une formation universitaire, elle s'essaie au journalisme, puis à la littérature...

Gabrielle, attirée par la science du ciel, est enthousiasmée par les livres de Camille Flammarion ; elle lui est présentée en 1893. A 18ans, elle commence à travailler pour lui.

Titulaire d'une licence, inscrite à la Société astronomique de France dès 1902, elle collabore à son bulletin à partir de 1910. Elle adhère alors à l'association des journalistes parisiens.

Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, elle s'engage comme infirmière ; mais elle a quelques problèmes de santé sur le 'front'. En 1915, Gabrielle remplace le secrétaire de l'association Emile Touchet, mobilisé... Elle est alors astronome adjointe à l'Observatoire de Juvisy et travaille à rédiger le tome 3 de la Planète Mars... Camille Flammarion est considéré à l'époque comme l'astronome le plus célèbre d'Europe. Entouré de nombreux collaborateurs Camille Flammarion, anime l'observatoire de Juvisy, qu'il a fait construire ( à domicile).

 

Devenu veuf, Camille Flammarion épouse Gabrielle Renaudot le 9 septembre 1919, à la mairie d'Ermont.

<-- Dans le parc de l’Institut Météorologique. En première ligne de gauche à droite , le directeur de l’Institut Météorologique, Gabrielle Renaudot, Camille Flammarion, Bernard Vermont et le Major C. Sclia

 

Le 3 juin 1925 cette union intellectuelle, d'une grande harmonie, est soudainement rompue. Le grand savant meurt dans les bras de sa femme,

Désignée par lui comme directrice de l'Observatoire de Juvisy, et chargée de la publication de ses ouvrages posthumes, Gabrielle Flammarion est, élue secrétaire générale de la Société Astronomique de France, en remplacement de son mari.

Camille Flammarion

Camille Flammarion (1842-1925), fort de ses livres de vulgarisation – a fait paraître de son vivant, 55 ouvrages qui furent presque tous traduits dans différentes les langues - et ses conférences ; le scientifique à beaucoup de succès auprès des femmes... Lui-même n'est pas insensible, à la vénération dont il est l'objet, de certaines d'entre elles...

 

Il semble que le grand homme eu un sérieux penchant pour sa belle lectrice, Anne Laure de Sallembier...

Ce devait être vers 1895... Camille Flammarion, est certainement passé par Fléchigné, sans-doute pour une séance spirite...

En 1861, Flammarion a découvert ''Le Livre des Esprits'' d’Allan Kardec (1804-1869), codificateur du spiritisme. Depuis, il associe complètement recherches astronomique, conférences, collaboration à de nombreuses revues, avec la fréquentation des milieux spirites et l'écriture de nombreux ouvrages sur les communications avec les morts...

Sylvie, Camille Flammarion et Gabrielle.

Camille Flammarion, s'intéresse aux femmes et a aussi écrit sur elles :

Rappelons qu'il eut deux épouses successives, Sylvie (1836-1919) et, précisément Gabrielle (1877-1962) sa collaboratrice, de trente-cinq ans sa cadette...

 

Dans un livre « Rêves étoilés » (1888), Camille Flammarion tient des propos qui collent à la mentalité de l'époque :

 

Uranie de Camille_Flammarion

En 1894, Camille Flammarion publie un roman d’anticipation '' La Fin du monde ''… En l'an 6000, la civilisation s'est bien améliorée :

« … On avait vu dans les resplendissantes cités une nouvelle race de femmes ramener sur le monde le charme caressant et lascif des voluptés orientales, raffinées encore par les progrès d’un luxe extravagant ».(p. 278-9)

(…) … Les femmes avaient acquis une beauté parfaite, avec leurs tailles affinées, si différentes de l’ampleur hellénique, leur chair d’une translucide blancheur, leurs yeux illuminés de la lumière du rêve, leurs longues chevelures soyeuses, où les brunes et les blondes d’autrefois s’étaient fondues en un châtain roux, ensoleillé des tons fauves du soleil couchant, modulé de reflets harmonieux ; l’antique mâchoire bestiale avait disparu pour s’idéaliser en une bouche minuscule, et devant ces gracieux sourires, à l’aspect de ces perles éclatantes enchâssées dans la tendre chair des roses, on ne comprenait pas que les amants primitifs eussent pu embrasser avec ferveur les bouches des premières femmes. Toujours, dans l’âme féminine, le sentiment avait dominé le jugement, toujours les nerfs avaient conservé leur auto-excitabilité si curieuse, toujours la femme avait continué de penser un peu autrement que l’homme, gardant son indomptable ténacité d’impressions et d’idées ; mais l’être tout entier était si exquis, les qualités du cœur enveloppaient l’homme d’une atmosphère si douce et si pénétrante, il y avait tant d’abnégation, tant de dévouement et tant de bonté, que nul progrès n’était plus désirable et que le bonheur semblait en son apogée pour l’éternité.

Peut-être la jeune fille fut-elle une fleur trop vite ouverte ; mais les sensations étaient si vives, décuplées, centuplées par les délicatesses de la transformation nerveuse graduellement opérée, que la journée de la vie n’avait plus d’aurore ni de crépuscule. D’ailleurs l’esprit, la pensée, le rêve dominaient l’antique matière. La beauté régnait. C’était une ère d’idéale volupté ». 

En 1897, il publie « Stella », un roman où l’Amour et l’Astronomie s’unissent ; en relation avec sa passion pour Gabrielle, sa jeune collaboratrice... En même temps, sa femme Sylvie fonde la Ligue de la paix et du désarmement par les femmes... Dans ce roman, il idéalise une femme qui débarque dans la solitude d'un homme qui ne vivait que de l'observation du ciel. Le coup de foudre se concrétise par une sublime nuit d’amour avec de scintillantes étoiles pour témoins.

« Les deux amants connurent ce qu’ils n’avaient jamais connu, et oublieux de la terre obscure, se trouvèrent transportés en une région de délices où, baignés de clarté, ils crurent s’endormir dans une auréole d’éternelle lumière » (Stella, p. 304).

M et Mme Camille Flammarion, dans la bibliothèque de l'Observatoire de Juvisy

En 1903 ; dans son « Astronomie des Dames », s'adressant à des lectrices, il mesure son discours :

« La femme égale l’homme en facultés intellectuelles. Écrire pour elle spécialement serait l’humilier. Ne nous targuons pas de cette prétention. Qui sait même si, en y regardant de plus près, et en nous affranchissant de tout cet orgueil masculin qui a commis plus d’une sottise, nous ne trouverions pas la femme supérieure à l’homme en finesse et en tact, au moral comme au physique, en vivacité d’impression, en puissance d’assimilation, en ressources d’imagination ; et qui sait si elle ne comprend pas plus vite que les bacheliers aux moustaches naissantes, les problèmes de l’histoire naturelle, de la physique et de l’astronomie, lorsqu’elle veut se donner la peine d’y prêter attention ? Non, n’écrivons pas pour les femmes. Ce sont elles qui pourraient nous en apprendre, car sur bien des choses, sur nous-mêmes peut-être, elles en savent plus que nous, observent mieux, voient mieux, sont plus intuitives. A bas l’orgueil du sexe prétendu fort ».

Anne-Laure de Sallembier, comme dans la plupart des assemblées intimes bourgeoises, a fait ''tourner les tables''...

Et,- d'après ses notes - ce que, Anne-Laure de Sallembier, en ces années 1900, retient : c'est l'enseignement d'une expérience de Dieu, intuitive, analogique ( le jeu des correspondances ) et symbolique.

Elle lie ses expérience spirites à la théosophie, qui l'aide à répondre aux questions existentielles ( pourquoi le monde, le mal, la mort … ?). L'idée de Nature, englobe le divin, l'humanité et l'univers... Tout le visible est le miroir de l'invisible, il peut être compris et vécu comme une expérience mystique...

L'aspect mythique de la révélation chrétienne est privilégié ; et les aspects dogmatique et clérical de la religion sont rejetés... L'aller-retour entre la raison, et l'expérience personnelle est privilégié. La science est valorisée, mais reste insuffisante pour modéliser la réalité...

 

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A propos d'Anne-Laure de Sallembier

Publié le par Perceval

Anne Laure de Sallembier (1875-1951), la petite-fille de Charles Louis de Chateauneuf, a effectivement pris la suite de ''la Quête''... En particulier, depuis le lien qu'elle a pu faire entre son "trésor" qu'elle tient de ses aïeux et ses expérience spirituelles, ses rencontres, ses voyages... Je rappelle ses origines...

Anne-Laure, unique héritière d'une riche famille de négociants qui a fait fortune dans le commerce des tissus au long du XIXe siècle, épouse le Comte de Sallembier, aristocrate – de trente ans de plus qu'elle - qui après une vie de célibataire longue et épicurienne, a su (?) monnayer son titre...

La généalogie indiquerait en amont de ces négociants en toile une Mlle Adélaïde Haton de la Goupillière devenue Mme Vétillard, morte à Pontlieue le 30 décembre 1800 ; et dont le mari faisait commerce de toiles....

* A noter: un peu plus tard, nous retrouverons Julien Napoléon Haton de La Goupillière (1833-1927) qui est un savant français, directeur de l'École des mines de Paris de 1887 à 1900, président de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale de 1888 à 1892 et de la Société mathématique de France en 1890, et vice-président du conseil général des mines de 1900 à 1903. Il était doyen de l'Académie des sciences.

Toile Mayenne

La première génération – en Mayenne - négocie la toile de lin.. Puis, le coton va se substituer au lin. La famille ne s'occupe pas à cette époque de tissage mais seulement de négoce et de finition des tissus. Une autre génération ajoute la fabrication de coutils et calicots, puis intervient en tissant et assurant sa totale finition. Le négoce est ainsi doublé d'une réelle activité industrielle.

Autour de 1850, le grand-père est membre de la Chambre consultative, lieutenant de la Garde Nationale. Un peu plus tard juge de commerce... Avant, enfin, de monter à Paris...

Louis-Ferdinand Vétillard, devient un notable commerçant de Paris. Il fut juge du Tribunal de commerce de Paris et membre de la Légion d'Honneur...

Il est propriétaire de biens immobiliers ( la moitié de son patrimoine...) , et d'une propriété à Villeneuve le Roi. Ce domaine a environ 110 ha, comporte une belle demeure et divers bâtiments d'habitation et d'exploitation, ainsi qu'un parc composé de bois et faisanderie. La succession montre également qu'elle est composée de rentes 3 et 4,5 % et divers chemins de fer ; elle est située dans les 1 % des plus grosses successions parisiennes.

Louis-Ferdinand Vétillard, le père d'Anne-Laure, va épouser Cécile-Joséphine J. (la fille de Charles-Louis de Chateauneuf et de Mme J. .. Ils auront donc une fille : Anne Laure ....

 

En cette fin du XIXe siècle, Anna Laure a su rénover et moderniser le château de Fléchigné, propriété de sa mère…..

 

Le Blason de Fléchigné : d'argent, à la bande de gueules, et deux trèfles de sinople...

Ce château se situe dans le ' Passais ' ( le passage, la marche...) à la croisée de trois règions historiques, au sud du duché de Normandie, contre la Bretagne et le Maine. Non loin de la place forte de Domfront et de Lassay les Châteaux ... Nous trouvons, non loin également, Barenton, le site de la Fosse Arthour, Sept-Forges, Saint-Fraimbault...

 

Alors qu'Anne-Laure est jolie, et riche...; elle repousse tous les prétendants qui se pressent...

Enfin; à la grande surprise de ses proches, elle accepte l'hyménée avec un vieil homme: le comte de Sallembier.

Anne-Laure, unique héritière d'une riche famille de négociants qui a fait fortune dans le commerce des tissus au long du XIXe siècle, épouse donc le Comte de Sallembier, aristocrate – de trente ans de plus qu'elle - qui après une vie de célibataire longue et épicurienne, a su (?) monnayer son titre … Le 10 Décembre 1900, elle met au monde un fils, qu'elle appelle Lancelot... Quelques années après son mariage, Georges de Sallembier, meurt subitement d’une fièvre typhoïde, à Paris...

Lorsque Anne-Laure et ses parents résidaient à Paris, elle eut la chance de vivre de nombreux moments privilégiés avec son grand-père Charles-Louis... C'était comme s'il vivait déjà dans un autre monde, et qu'il le lui faisait découvrir en le parcourant au moyen d'histoires... Ces histoires ne ressemblaient pas à celles que l'on raconte aux enfants pour les endormir... Non, celles-ci provenaient d'un temps parallèle au nôtre, qui avait eu son existence et la continuait... Il avait laissé des traces, des signes au-travers d'objets que l'on pouvait encore découvrir ci-ou-là dans des maisons, des églises, des châteaux, des musées ...etc ... Ces histoires réveillaient l'esprit, l'envie de connaître ; elles enchantaient l'âme en lui faisant découvrir son véritable lieu d'épanouissement …

Quand Charles-Louis parlait de l'Autre Monde, Anne-Laure entendait le Vrai-monde ; celui d'où elle venait, et où elle allait …

Son grand-père lui contait d'étranges histoires où se côtoyaient des fées, et des humains ; des gobelins et des paysans, des diables, des sorcières, des prêtres, des seigneurs .... L'histoire devenait bien plus qu'un conte ou une légende. Le ton, le réalisme déployé, en faisaient un enseignement de plus en plus sérieux, avec l'aide d'ouvrages, de gravures pour finalement – toujours - aborder le sujet essentiel de la Quête ; celle qu'animait secrètement les plus exemplaires de ses personnages... Cela commençait toujours au plus près de sa vie, en '' Passais'' ; ou souvent en Limousin – quand il était enfant – le relief était plus tourmenté, les routes carrossables inexistantes, des ''chemins creux'' entre forêts et tourbières, des villages isolés surmontés d'un château …

Une chapelle abandonnée gardait un secret. Seule une croix gravée rappelait qu'ici s'établissait une commanderie... Alors, le grand-père Charles, sortait l'anneau , ou une croix de fer... qui prouvaient que ceci n'était pas qu'une histoire ….

En grandissant, la petite Anne-Laure fut initiée à la légende arthurienne... Légende, signifiait qu'il ne servait à rien de consulter certaines personnes à son sujet ; il s'agissait d'une Histoire pour ''initiés''... cela se passait souvent en Bretagne ( la grande...) ou de l'autre côté du Rhin, en province allemande. Il n'était pas question alors de petite Bretagne, et encore moins de Brocéliande ( ou si peu …)

Elle se souvenait de noms: Lancelot, Viviane, Morgane... qui aujourd'hui encore la transporte dans un ''outre-monde'', un monde parallèle qui pour ceux qui sont attentifs croise parfois le nôtre...

Et puis, bien sûr, il y Parsifal; qui en ce début du siècle évoque davantage le personnage de Wagner et de Eschenbach... comme nous venons de le voir...

 

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Fin de siècle, décadence et Esthétisme... 2

Publié le par Perceval

''Maîtresse d'esthètes'' sort des ateliers de Willy ( le mari de Colette) ; et fut écrit par Jean de Tinan ; ce texte emblématique de '' la décadence'', est publié en 1897. Ce devait être un roman à clefs, appuyée par la documentation d'une correspondance intime donnée à Willy par le sculpteur Fix-Masseau ( qui devient Franz Brotteaux, dans le roman) ... On y retrouve décrit les milieux littéraires et artistiques du Symbolisme: le théâtre de l’Œuvre, le Mercure de France, le Sâr Péladan, Colette, Willy lui-même...

Ysolde, éprise d'Art et de Beauté, vampirise un sculpteur épuisé : « je suis la destructrive sorcière, la goule qui suce le sang des artistes, la stryge irrassasiable. (...) Ce que je veux, Moi, c'est qu'ils fassent avec ma Beauté de belles œuvres ».

Ysolde Vouillard : « Wagnérienne, Esotérique, Néo-Platonicienne, Occultiste, Androgyne, Primitive, Baudelairienne, Morbide, - Nietzschienne même lorsqu'elle éternue » : c'est l'aventure de Mina Schrader avec le sculpteur Fix-Masseau, qui servit de trame à Jean de Tinan. Mina est une amoureuse d'art et d'artistes... Elle se dit sculpteur, et sera internée ( comme anarchiste) pour avoir  tiré des coups de revolver sur le député et industriel Lazare Weiller.

 

 

Jean de Tinan Mina Schrader

Jean de Tinan (1874-1898), passionné de sciences, est plus encore attiré par les lettres ; il commence par écrire pour des revues symbolistes. Il confie à son journal : «Je veux vivre intensément parce que je dois mourir jeune». Il écrit sur ses nombreuses amantes... Il sera aussi l’amant éperdu de la femme que Louÿs aime depuis toujours, Marie, la fille de José-Maria de Heredia, qui a épousé Henri de Régnier. Il alterne entre la quête de l’«amour fou» et le constat de «l’impuissance d’aimer»...

Il meurt à 24ans.

Robert de Montesquiou

 

Robert de Montesquiou-Feznsac (1855-1921).

Dès 1875, il fréquente le monde, et les artistes et écrivains comme Mallarmé, Huysmans et Goncourt entre autres. Mondain, dandy, décadent, esthète, collectionneur, homosexuel, passionné d’art.. Il excelle en poésie : Un recueil de 163 poèmes : Les Chauves-souris, entraînera de la part de Mirbeau un article élogieux, en octobre 1892.

Il recherche les sensations rares et raffinées, il se grise de parfums, il organise de grandes fêtes qu’il met en scène lui-même...

Marcel Proust (22ans) et Robert de Montesquiou (37ans) se rencontrent chez Madeleine Lemaire le 13 avril 1893. Robert est d'une lignée qui appartient à l'histoire de France, ce que Marcel admire ; de plus il est poète ami de Verlaine et de Mallarmé... Conteur, il sait développer des anecdotes en magnifiques histoires...

«Montesquiou invitait fort peu et fort bien, tout le meilleur et le plus grand, mais pas toujours les mêmes, et à dessein, car il jouait fort au roi, avec des faveurs et des disgrâces jusqu’à l’injustice à en crier, mais tout cela soutenu par un mérite si reconnu, qu’on le lui passait […].» Proust

Comtesse de Greffulhe

Proust demandera à Montesquiou de lui « montrer quelques-unes de ces amies au milieu desquelles on l'évoque le plus souvent »... Le 1er juillet, chez la princesse de Wagram, Marcel aperçoit la Comtesse de Greffulhe pour la première fois... Marcel Proust lui écrit pour le remercier et lui faire part de son émotion : « Elle portait, une coiffure d'une grâce polynésienne, et des orchidées mauves descendaient jusqu'à sa nuque (…) Elle est difficile à juger (..). Mais tout le mystère de sa beauté est dans l'éclat, dans l'énigme surtout de ses yeux. Je n'ai jamais vu une femme aussi belle. »

Montesquiou s’est bien sûr reconnu en Charlus ; même si Marcel lui signale que le baron Doazan entre également en composition du personnage.

On le prétend aussi le modèle de Des Esseintes, dans A rebours, de Joris-Karl Huysmans; on le voit aussi dans Monsieur de Phocas de Jean Lorrain et Chantecler d’Edmond Rostand.

Il goûte le «plaisir aristocratique de déplaire» ( selon l'expression de Baudelaire). Sarah Bernhardt, Ida Rubinstein sont ses amies... Il vit avec Gabriel Yturri, son secrétaire, de 1885 à la mort de celui-ci en 1905.

Jean Lorrain, Boldini, Kate Moore, Madeleine Lemaire, Montesquiou, Jean-Louis Forain et Yturri

 «Une impression singulière, plus encore que pénible, est celle qui consiste à s’apercevoir tout d’un coup, brusquement, sans crier gare, sans presque l’avoir vu venir, que sa vie est finie. On est là, plus ou moins physiquement délabré, ou encore résistant, ses facultés, en apparence intactes, mais inadaptées au goût du jour, on se sent désaffecté, étranger à la civilisation contemporaine que l’on a quelquefois devancée, mais dont les manifestations actuelles blessent et choquent moins qu’elles ne paraissent vaines.» Les Mémoires du comte Robert de Montesquiou : ( ''Là résonnent des voix d'outre-tombe et défile le " bal de têtes " des idoles d'une Belle Epoque crépusculaire'', selon l'éditeur) ..

Dans les cent dernières pages du Temps retrouvé, le Narrateur est frappé, lors d’une réception chez les Guermantes, par le vieillissement brutal des personnages qu’il a connus, et l’influence considérable que le temps a eue sur leur corps.

« le plus fier visage, le torse le plus cambré n'était plus qu'une loque en bouillie, agitée de-ci de-là. À peine, en se rappelant certains sourires de M. d'Argencourt qui jadis tempéraient parfois un instant sa hauteur, pouvait-on comprendre que la possibilité de ce sourire de vieux marchand d'habits ramolli existât dans le gentleman correct d'autrefois. »

« J'eus un fou rire devant ce sublime gaga, aussi émollié dans sa bénévole caricature de lui-même que l'était, dans la manière tragique, M. de Charlus foudroyé et poli. »

(…)

« Mme de Forcheville avait l'air d'une rose stérilisée. Je lui dis bonjour, elle chercha quelque temps mon nom sur mon visage.. »

(...)

"Et pourtant de même que ses yeux avaient l'air de me regarder d'un rivage lointain, sa voix était triste, presque suppliante, comme celle des morts dans l'Odyssée. Odette eût pu jouer encore. (…)" Marcel Proust

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Fin de siècle, décadence et Esthétisme... 1

Publié le par Perceval

Félicien Rops

Ce terme de ''décadent '' reprend les paradoxes d'une époque où la sexualité est omniprésente et réprimée... L'art reprend l'impulsion sexuelle et vitale dans la vie imaginaire... Les décadents blasphèment le naturel en privilégiant les aspects les plus condamnables de la vie sexuelle.. L'exaltation de l'anormal accélère le processus d'auto-destruction, s'y mêle un sentiment de culpabilité : on profane l'amour, dans un étrange mélange de mysticisme et d'érotisme...

Il s'agit d'un imaginaire, en ce que pour beaucoup – comme pour Rachilde par exemple - si elle décrit des comportements sexuels monstrueux et aberrants , et questionne l'identité sexuelle, au grand scandale du public ; Rachilde est une jeune fille à l'existence parfaitement réglée, puis l'épouse ''honnête'' d' Alfred Valette, le directeur du Mercure de France...

 

 

 

La société que fréquente Anne-Laure verrait cela avec amusement, si sa propre jeunesse n'était pas contaminée ; et si quelques-uns ne dépassaient pas la bienséance …

Pour l'instant, restons-en à des personnalités qu'Anne-Laure a approché :

Ainsi des hommes comme, Marcel Schwob (1867-1905), Rémy de Gourmont (1858-1915), Robert de Montesquiou (1855-1921) se reconnaissent comme esthètes et sont déclarés ''Décadents''… Précisément, parlons d'eux...

M. Moreno

Anne-Laure adorait écouter Marguerite Moreno (1871-1948), dire de la poésie... Ses lectures au Collège de France, patronnées par Paul Valéry, attiraient du monde... Elle s'agace fortement de sa liaison avec l'ogre Catulle Mendès ( qui – je rappelle - a été marié avec sa vieille amie Judith Gautier).. Marguerite est ensuite la compagne de l'écrivain Marcel Schwob jusqu'à la mort de celui-ci en 1905. Entourée d'amis poètes : Verlaine, Mallarmé, Jean Moréas. Marguerite Moreno donne des récitals de poésie qui valent d'être surnommée la "Muse du Symbolisme.

Marcel Schwob, enfant de bourgeois intellectuels, est un habitué du salon de madame Arman de Cavaillet, comme Proust ou Lucien Daudet. En 1891, il a guidé l'écrivain anglais Oscar Wilde dans les milieux littéraires... Il va éprouver une grande passion pour Marguerite Moreno, confidente de Stéphane Mallarmé et grande amie de Colette ; ils sont liés par une grande complicité intellectuelle, en témoigne une extraordinaire correspondance. Ils se marient en 1900 ; en 1905, il meurt à 37ans...

M. Moreno

« Hommes, qui fûtes nombreux à éprouver pour Marguerite un violent amour, vous n'avez pu ignorer, vous n'avez jamais oublié l'odeur qu'exhalait une peau noble et douce, blanche avec un reflet d'ambre errant sous sa blancheur ! » : de Colette ; d'ailleurs, Marcel Schwob sera le premier à faire confiance à Colette - l'auteure…

 

L'imposante Berthe de Courrière (1852-1916), doit sa notoriété à ses ''relations'' avec plusieurs ministres, dont le ministre de la guerre le Général Boulanger... Elle devient la maîtresse du sculpteur Clésinger ( gendre de George Sand ), et le modèle d'un buste de Marianne et de la statue de la République lors de l'exposition Universelle de 1878... Elle va devenir la maîtresse et l'égérie de Rémy de Gourmont (1858-1915) jusqu'à sa mort... Les lettres passionnées que Gourmont lui adresse seront réunies en volume sous le titre Lettres à Sixtine... Berthe meurt en1916 et elle rejoindra Gourmont dans le caveau de Clésinger au Père-Lachaise où, elle l'avait fait déposer... Berthe de Courrière est enterrée avec ses deux amants, une sorte de ménage à trois parmi les pierres froides du cimetière du Père Lachaise. Son nom est malheureusement absent de la pierre.

Berthe de Courrière - la République

 

Anne-Laure - je l'ai déjà signalé - s'intéressait à l'occultisme ( nous en reparlerons...); et même si rien ne la rapproche de ''la vieille dame'' ( surnom qu'on donnait à Berthe au Mercure) ; il est amusant de rapporter que Berthe, férue d’occultisme, se livre à des expériences et de 'curieuses' cérémonies, au point où mêlée à une affaire de messe noire qui faillit mal tourner, cela lui valut un séjour d'un mois dans un hôpital psychiatrique, alors qu'elle avait été sans-doute la victime d'une agression sexuelle... C'était le 8 septembre 1890, elle se trouvait alors en Belgique, Berthe fut retrouvée presque nue et tremblante dans les buissons près de la maison de Louis van Haecke ( selon Huysmans) . Elle a raconté alors, qu'elle venait de s'enfuir de chez un prêtre local, et elle l'accusait d'être un sataniste. La police ne la crut pas et la fit incarcérer à l’Institut Saint-Julien . Plus tard quand on voulut enquêter sur cet épisode, on fut surpris de découvrir que les dossiers comprenant son témoignage avaient mystérieusement disparu.

Berthe de Courrière (buste)

 

Rémy de Gourmont a présenté Berthe à Joris-Karl Huysmans en 1889, qui en fera le modèle du personnage de Madame Hyacinthe Chantelouve dans son roman Là-bas (1891). 

Rémy de Gourmont, lui-même la présentait comme : «... une kabbaliste et occultiste, érudite dans l'histoire des religions et des philosophies orientales, fascinée par le voile d'Isis, initiée par de dangereuses expériences personnelles dans les mystères les plus redoutables de l'art noir. Une âme à laquelle le mystère a parlé - et n'a pas parlé en vain. »

Durtal est le personnage principal de ''Là-bas'': il est un véritable écrivain naturaliste dans sa démarche documentaire, à l’instar de Huysmans. Ses recherches sur le satanisme visent à mieux comprendre Barbe Bleue ( Gille de Rais sur qui il écrit un ouvrage...). Intrigué et obsédé par la belle Hyacinthe, Durtal s’intéresse à sa relation avec le chanoine Docre : une des figures les plus sinistres de ce roman, confesseur de Hyacinthe , un personnage débauché, célébrant des messes noires, etc. J. K. Huysmans affirma que son modèle avait été l'abbé van Haecke.

Me Chantelouve par Henry Chapnot 1912

 

Hyacinthe Chantelouve – par une correspondance assidue - séduit Durtal. Elle devient sa maîtresse, et si, sur le satanisme, elle n'a pas de connaissance intellectuelle, elle lui transmet son expérience de praticienne... Elle refuse de le mettre en relation avec le chanoine Docre, mais elle veut bien le faire assister à une messe noire.

Durtal et Hyacinthe se rendent à la messe noire du chanoine Docre. Les scènes de débauche dégoûtent Durtal..Il pousse Hyacinthe à partir avant la fin. Elle l’emmène alors dans une chambre d’hôtel, où ils font l’amour sur des fragments d’hostie. C’en est trop pour Durtal, qui rompt avec elle. L’écœurement qu’il ressent devant ces scènes sataniques peut être considéré comme le point de départ de sa conversion religieuse: il se détourne de Satan pour se tourner vers Dieu.

 

Si dans certains milieux, l'occultisme permettait aux hommes de s'adresser directement aux forces mystérieuses.. Depuis la publication en 1862, de ''La Sorcière'' par Jules Michelet, les femmes se réapproprièrent la sorcellerie comme  comme un acte de rébellion contre la société patriarcale. 

Hyacinthe Chantelouve, femme fatale fictive et initiatrice satanique, pouvait paraître comme la ''nouvelle femme'' émancipée, ou du moins celle que la société traditionnelle craignait, mais qui était secrètement désirée.

Hyacinthe Chantelouve, serait le modèle de ces femmes qui considèrent que Lucifer, serait l'image du libérateur, celui qui émancipe les femmes des liens patriarcaux de l'église, qui réhabilite Eve contre l'idée du péché originel. Au lieu de cela, elles revendiquent l'idéal romantique de Satan comme le symbole de la rébellion contre les oppressions.

Une fille décadente , de Ramón Casas , 1899

 

Une autre femme de la vie réelle, a inspiré le personnage de Hyacinthe, c'est Henriette Maillat (1849-1906), qui hante les milieux littéraires, se jette dans les bras d'écrivains: elle fut la maîtresse de Péladan entre 1884 et 1887, puis celle de Bloy et de Huysmans vers 1888-1889. Comme Berthe, Maillat était également une amatrice d'occultisme. Beaucoup des lettres d'amour qu'elle a écrites à Huysmans ont été incorporées à Là-Bas , ce qui a posé quelques problèmes à Huysmans par la suite. Une troisième influence sur le personnage de Hyacinthe fut Mme Charles Buet, épouse de Charles Buet...

On retrouve également Henriette Maillat sous les traits d'Ysolde Fouillard dans ''la Maîtresse d'esthètes'' de Willy ; et pas elle seulement...

A suivre...

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Retour de Bayreuth – En France, le Graal et l'esthétisme

Publié le par Perceval

Après un tel séjour dans l'Allemagne des passions... Anne-Laure craint de se sentir coupée de cette source artistique si exaltante... Mais, l'ambiance culturelle de la ''Belle Epoque '' lui permet de retrouver quelques-unes des ardeurs ressenties à Bayreuth...

Tous les habitués de ce pèlerinage wagnérien, gardent cette nostalgie du séjour... Déjà, en 1892, Henri de Régnier écrivait à André Gide, il s’inquiétait de leur ami commun Pierre Louÿs qui séjournait à Bayreuth et « en est à son septième Parsifal » ! et se demandait s'il parlait encore français …

Saint-Pol Roux, nomme Wagner : « celui qui dota de Parsifal le monde »

En France, dit-on, Wagner aurait influencé nombre d'écrivains, notamment ceux qui se nomment eux-mêmes décadents ou symbolistes...

 

Premier point :

Bien sûr, on pourrait rappeler que le Graal est français ( avec Chrétien de Troyes, mais personne alors ne l'a lu...) .. En 1922, Joseph Bédier se plaint que Perceval se dise en français Parsifal … !

Effectivement, en cette fin de siècle, le mythe littéraire du Graal, paraît en France oublié ; et Perceval induit la référence à l'Opéra de Wagner.

 

Joséphin Péladan, reprend le Parsifal de Wagner, pour imaginer une suite où Perceval sauve, après Kundry, son maître qu'est Klingsor...

Ainsi magnifié (par Wagner), le Graal apparaît alors comme trop pur, trop éthéré, trop sacré... Qui peut ensuite emprunter le symbole ? Jules Laforgue en 1886, lui manifeste une certaine défiance : « Le cygne du Saint-Graal, qui rame en avant/ Mais plus pâle qu'une banquise/ qu'Avril dépayse »... Le Graal n'est pas fait pour notre monde...

 

La Légende Arthurienne serait-elle oubliée... ?

Henri de Régnier, cependant, n'a pas oublié Viviane... Viviane est un mythe de la décadence : Apollinaire en 1909 écrit ''L'Enchanteur pourrissant'' … Au lieu du chevalier pur, on préfère la femme fatale ; au lieu du sauveur qui délivre, le charme qui emprisonne...

Princesses de Légende - J. Lorrain

En 1892, Henri de Régnier dans '' La Gardienne'' décrit le retour d'un vieux chevalier... Son histoire est celle de l'échec d'une Quête : échec, parce qu'il y manque le Graal... ? On part d'un adolescent, tel Perceval, et on finit avec un Anfortas , un roi blessé, vaincu, humilié...

Le ''Roi vierge'' de Catulle est aussi un roman sur l'absence du Graal : le héros vierge, n'aime personne, a horreur de la sexualité, et finalement se châtre... ! Il vit la passion du Christ, sans graal, sans mythe, sans rédemption...

''Oriane vaincue'' (1893) de Jean Lorrain, s'inspire à la fois de Morgane - à la recherche du parfait amant - qui enferme tous les chevaliers dans le val sans Retour ; et de Kundry qui attend celui qui ne tombera pas dans son pouvoir... Dans ''Viviane'', ou '' Sonyeuse'' ou ''Brocéliande'' ; Viviane est « courtisane », « lascive fée »...

« Et férocement rousse et férocement nue,
Les seins droits et pourprés, rouge tentation,
Le heaume de Myrdhinn sur l’or en fusion
De ses fauves cheveux bondissant sur ses hanches,
Viviane apparut, farouche, entre les branches. » ''Brocéliande''

Les écrivains ''fin de siècle '' s'ébattent dans les jardins de Klingsor ; mais point de Graal ...

Certains, imaginent même Wagner en magicien noir, qui a fait main basse sur le trésor du Graal .. !

( sources : Isabelle Cani '' Graal et décadence...'')

Deuxième point :

Fin de siècle, décadence et Esthétisme...

Robert de Montesquiou

Si le temps historique se présentait sous forme cyclique, nous pourrions distinguer des périodes d'essor( âge d'or) et de déclin ( de fin de siècle …?). Précisément Anne-Laure de Sallembier parcourt la vie mondaine à une époque , avant la Grande-Guerre, que l'on qualifie de fin de siècle ...

La chute du second Empire a initiée cette période promise aux changements, voire aux transgressions...

En réaction contre le Romantisme, et des idées comme, l'harmonie et l'équilibre dans la nature, la foi en le progrès ; - la mode est à présent à l'étrange, la décomposition, l’excès ; et à la désillusion, la dérision, la démystification …

Si l'humain est privé d'une transcendance ( Schopenhauer,...), la hiérarchie des valeurs n'en est-elle pas bousculée.. ?

Dans les années 1890, 1900 etc ; on lit Schopenhauer, on aime le plaisir, on fréquente les salons, on s'amuse avec tristesse, on cause avec mélancolie, on rit avec désespoir. ( cf Le Figaro 21 mars 1886. - Physiologies parisiennes d'Alfred Millaud) ...

A suivre ...

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