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1948 - Le Blocus de Berlin-ouest – 2

Publié le par Régis Vétillard

Le 28 juin, 150 avions atterrissent avec 400 tonnes de ravitaillement, le trentième des besoins quotidiens des habitants. Puis, des milliers d’avions se relaient pour transporter vivres, charbon et médicaments dans la capitale allemande.

Aux heures de pointe, un avion atterrit toutes les 2 ou 3 minutes secondes à Tempelhof, Gatow et Tegel (un troisième aéroport rapidement construit en zone française.).

Une escalade peut conduire à la guerre. Pour les berlinois, l'agression est soviétique. Iraient-ils jusqu'à abattre les avions américains ?

Le pilote américain Gail Halverson a l’idée de fabriquer des mini-parachutes à partir de vieux parachutes, qu’il lâche pendant l’approche. Des bonbons pour les enfants et les jeunes qui observent les opérations aériennes y sont attachés.

 

Berlin reste bloqué, ''alliés'' et soviétiques maintiennent leurs positions. Combien de temps pourra t-on tenir ? L'hiver permettra t-il d'assurer le ravitaillement satisfaisant ?

Si les Soviétiques empêchent les communications aériennes avec Berlin, ce sera la guerre. Lancelot n'y croit pas.

Si les russes ne cèdent pas : - Pourquoi ne pas forcer le blocus ? En cette période, l'URSS a l'avantage d'une armée mobilisable et en nombre : on parle de 200.000 soldats, stationnés en Allemagne de l'est, alors que les USA, l´Angleterre et la France viennent de démobiliser leurs forces.

Les Etats-Unis n'ont en Europe que quelques rares "unités de combat", à peine 30.000 hommes, confie le Général Noiret.

Notre avantage est que les Etats-Unis possèdent la bombe atomique... De source sûre, Lancelot apprend que Truman, prévoit de déployer trois escadrilles de bombardiers stratégiques B-29 de l’USAF au Royaume-Uni.

Sinon, - un compromis ne sera pas en notre faveur.

 

Les Occidentaux parviennent à contourner le blocus au moyen d’un pont aérien massif : plusieurs centaines d’avions par jour, la construction d’un troisième aéroport en secteur français (Tegel). L’objectif des premières semaines du pont aérien est d’assurer un volume quotidien de 4.500 tonnes de marchandises. À l’automne 1948, les Alliés le rehaussent à 5.000 tonnes quotidiennes. Le charbon, qui doit garantir l’approvisionnement en énergie, représente une grosse partie de ce tonnage.

L'efficacité exceptionnelle des puissances occidentales et la participation de la Grande-Bretagne, de pilotes d'Australie, du Canada, d'Afrique du Sud, de Nouvelle-Zélande, et de la France ; est largement utilisée à des fins médiatiques. utilisent largement cette à des fins médiatiques.

La ville devient le symbole du combat pour la Liberté. Des hommes politiques et des intellectuels occidentaux se succèdent à l'aérodrome pour manifester leur soutien.

Les berlinois sont reconnaissants de n'être pas renvoyés à leur passé nazi, et fiers de représenter le combat pour la liberté et la démocratie, et les Etats-Unis deviennent une puissance protectrice.

Les jeunes allemands acclament les avions du pont aérien, surnommés les « Rosinenbomber » (les « bombardiers de raisins secs »).

L’URSS, ancienne alliée, devient une menace pour la paix et le nouvel ordre international.

 

Alfred Döblin, rentre bien avant Lancelot à Baden-Baden.

Döblin semble désabusé. Il n'accepte pas cette partition de Berlin. Il est à la fois anticommuniste et antibourgeois. Sa vision culturelle débouche sur une action spirituelle. « Élever l’esprit, cela exclut tout ce qui est contraire à la liberté de pensée. La littérature dirigée, pour moi, est le témoignage épouvantable de la misère contemporaine. Les talents sont étouffés, le sens épique dévoyé par une morale imposée de force et une fois pour toutes. Nos écrits ont tout à perdre, quand ils sont soumis aux prescriptions d’une bureaucratie... Mais un écrivain qui, aujourd’hui, n’a aucune foi, est encore moins désirable ... Thomas Mann, voyez- vous, c’est la décadence artiste et athée d’un esprit bourgeois désormais inadmissible. On peut vivre sans foi aucune, je le sais, ... Mais alors le vent de la vie n’entre plus dans votre chambre et, qu’on le veuille ou non, c’est la mort, l’asphyxie à bref délai... D’où le nom de ma revue Das Goldene Tor. »

Lancelot se souvient d'une discussion à propos de Kierkegaard et sa recherche de la vérité. En effet, le philosophe danois met à bas la certitude selon laquelle la vérité peut être obtenue par les sciences. L’objectivité n’est pas exacte ; au mieux, elle fait preuve de neutralité et propose un cadre de réflexion. C’est donc un renversement de la pensée que prône Döblin sous la tutelle kierkegaardienne, en prônant la subjectivité et le renversement des savoirs acquis : « Pour atteindre l’absolu, il faut transgresser le confort, fût-il moral, l’aménagement bourgeois de la finitude. ».

Döblin, confie à Lancelot son désir d'écrire un roman dont le héros, revenu de la guerre avec une jambe en moins, rejetterait toute convention de la vie mondaine. Seule, la Vérité, pourrait lui venir en aide.

Lancelot interroge Döblin, sur la ''Vérité'' selon Kierkegaard. Il répond, mais préfère avertir qu'il ne parle pas selon le discours scientifique. La Vérité ne concerne que les personnes ; la science en appelle à l'objectivité, et la raison s'y prête... C'est à dire, elle se prête à raisonner selon un mode d’accès au réel, parmi d'autres – c'est une question de convention entre scientifiques, Non ? D'ailleurs, si tu appelles Vérité, une vérité objective ; tu te dois de te l'approprier, pour qu'elle devienne ta vérité.

Lancelot se souvient aussi de cette remarque de Döblin:

"Tu me parlais d'Elaine, ta chère et tendre, disparue. Disparue...? Pourtant, aucun élément atomique qui la constituait n'a réellement disparu !"

Mardi 6 juillet 1948, Lancelot lit dans le Figaro que Bernanos est mort ! Un peu plus tard, il rencontrera Béguin, qui l'avait vu auparavant alors qu'il venait d'être opéré de la vésicule biliaire. Il regrettait de ne pas pouvoir se consacrer plus à l'écriture de romans : « j'en ai une douzaine en tête. » disait-il.

Il se sentait une vocation à « contraindre les aveugles à voir et les sourd à entendre » ; aussi il s'efforçait de nous convaincre de sa lecture des ''signes des temps''. Il se plaignait, parait-il, de ces autres Donissan, Cénabre, autres Mouchette, et autres Quine qui hantaient ses sommeils... !

Qui, plus que lui, à notre époque, pouvait être désigné comme ''chevalier du Graal'' ? Sa quête s'appuyait sur sa foi en Christ.

Il est certain que la mort ne nous privera pas de lui. Nous continuerons sa Quête, qui nous rejoint, en relisant le ''Journal d'un curé de campagne'' par exemple.

( Bernanos est mort le 5 juillet 1948 vers cinq heures du matin, à 60 ans. Il était rentré de Tunisie en France pour y être, si possible, soigné. )

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