Au Collège Royal de Limoges, Charles-Louis de Chateauneuf a rencontré un camarade de son âge avec qui il peut partager l'une des ses passions: la découverte du Moyen-âge, et de plus :sur la trace de l'un de ses ancêtres : Roger de Laron, chevalier templier... Il se nomme Elie Berthet. Le jeune Elie a, de plus, le goût de l'écriture et tous deux notent sur des cahiers, des récits qui serviront de thèmes au futur romancier...
Elie Berthet
Et c'est précisément le cas, pour ce qui est des Catacombes...
En effet, à 16 ans, Elie Berthet monte à Paris soi-disant pour étudier le droit, mais en réalité pour se vouer à l'écriture. En 1835 il trouve un éditeur:''le Siècle'' qui publie ses premiers récits ''La Veilleuse'', sous le pseudonyme Élie Raymond.
Et précisément, il publie très tôt, un texte écrit au Collège de Limoges : c'est la première version de « Les Catacombes de Paris », un roman d’Élie Berthet, dans une première version de 1832 (in folio imp. L. Grimaux) qui ne comprend que 20 pages. (1)
Les souterrains urbains sont fascinants, et les histoires s'y rapportant, légion.
La cathédrale de Limoges, vue prise du clos Sainte-Marie, vue d'ensemble. XIXe s
Revenons à Limoges, avant 1832... Chaque maison de centre ville est reliée par des souterrains, même s'y certains s'en sont appropriés une partie en les cloisonnant; tous les jeunes gens y ont connu diverses aventures ou des soirées ''endiablées'' … !
On dit qu'ils existent depuis l'époque gallo-romaine. Caves creusées ou caves bâties ( façonnées) … Caves à plusieurs niveaux, puits, aqueducs, silos ont été construits au cours des siècles... Dès le Moyen Age, en ville, on recherche à étendre son domaine (commerces, stockage...) En tout, on estime entre 40 et 80 kilomètres la superficie des galeries qui parcourent le sous-sol de la ville.
A l'époque, le grand défi était de trouver le circuit qui permettait par les souterrains de traverser la Vienne ; ou selon Elie Berthet lui-même de joindre Limoges au château de Chalucet …
Elie Berthet et Charles-Louis de Chateauneuf racontent, qu'un moine aurait été enterré vivant et qu'il aurait réussi à traverser la ville par les souterrains. Avec ce moine errant dans les galeries, certains assurent avoir aussi reconnu le fantôme de Sainte Valérie - portant sa tête coupée - qui hanteraient encore les souterrains de Limoges...
Souterrains de Limoges
Lorsque ce sous-sol est voûté d'ogive, la croyance populaire y voit des lieux de culte : chapelles, églises ou même restes d'abbaye... ou encore Temple maçonnique.
Pour ce qui est du Temple : voici une autre histoire bien étrange...
Le grand-père de Charles-Louis de Chateauneuf, était sans-doute franc-maçon à l'Orient de Limoges... C'est lui qui avait remis à son petit-fils un ensemble de documents ( médiévaux précisait-il ! ) qu'il disait avoir reçu de Jean-Léonard de la Bermondie. Ces documents étaient composés de dossiers sur la philosophie, l'alchimie..., et divers témoignages ; et également quelques objets dont une croix métallique et une bague templière … ! Et il lui avait fait comprendre qu'à partir de ce ''trésor'' ; il devait accomplir sa propre quête et transmettre le ''Tout'' à un descendant qu'il aurait choisi …
Aussi, tout ce qui pouvait avoir un lien avec la Chevalerie, intéressait au plus haut point Charles-Louis...
Initiation maçonnique. XIXe
Précisément, au Collège Royal de Limoges un jeune garçon, dont il s'est fait un ami, lui a laissé entendre que son grand-père est franc-maçon... Il se nomme Félix-Joseph de Verneilh (1820-1864), lui aussi, né au château de Puyraseau près de Nontron, fera carrière à Paris. Il deviendra historien et archéologue. Son grand-père – âgé à présent, ami de Maine de Biran, a rencontré des personnages comme le pape Pie VII, Napoléon... Il a raconté tout cela dans ses mémoires. Pour l'heure, il échange beaucoup avec son petit-fils... Et Félix de Verneilh assure Charles-Louis, qu'il existe dans les souterrains de Limoges, un Temple maçonnique là-même où existait au Moyen-age un sanctuaire templier. !
Temple dans souterrain à Limoges ( Le Populaire)
Bien sûr, Charles Louis et Elie vont se passionner pour toutes ces histoires autour des souterrains de Limoges ; et s'ils n'ont rien découvert de plus …. Sachez que :
En 2016, on vient de mettre à jour, une sorte de cathédrale cachée dans les sous-sols de l'ancienne bibliothèque municipale de Limoges. Ce serait le premier véritable temple maçonnique de la ville. Je lis dans le quotidien ''le Populaire du Centre'' une explication...
Les francs-maçons se seraient réunis à partir de 1750, rue Pisse-Vache dans le centre-ville de Limoges au sein de la loge Harmonie. Leur nombre grandissant, ils auraient déménagé en 1806 dans cet endroit en prenant le nom des ''Amis réunis''....
Effectivement, des embryons de loges sont connus dès 1750. Puis se constitue la loge « Harmonie » dont le vénérable maître est un fonctionnaire de préfecture nommé Jacquet. Les frères se réunissaient à la tour Pisse-Vache, au carrefour du boulevard Gambetta, de la rue Vigne-de-Fer et de la rue Dupuytren. Peu importante, placée sous la juridiction de la Grande Loge du Royaume de France, cette loge prend de l’ampleur à partir de 1767 sous un autre nom : elle est rebaptisée '' Les Frères unis ''. La loge reprend force et vigueur en 1806, et prend le nom d'Amis réunis.
Régulièrement, ces galeries se rappellent à nous, quand par exemple : en novembre 1649, l'écroulement de quatre maisons rue ''Elie Berthet'' (2) fit deux morts. En août 1860, l'effondrement de trois immeubles place du Poids Public provoqua le décès d'une femme de 55 ans.
L'intérêt d'Elie Berthet pour les souterrains, s'est déplacé sur Paris (3). Leur vogue dans la capitale, au XIXe siècle, crée des abus au point d'entraîner une fermeture de la visite publique en 1830... Si certains s'y égarent, d'autres y font la noce...
Note (1) : puis existent une édition en 4 volumes in 8° (éditions L. de Potter) en 1854, une édition in 8° de 140 pages (aux Bureaux du siècle) et une édition en 2 volumes in 16 (chez Hachette) en 1863. L’édition de 1856 va connaître 22 réimpressions entre sa première parution et 1877 !
Note (2) : … Oui, il s'agit du nom actuel de la rue … Bizarre.. ! précisément elle se nomme bien à propos... Dans les années 60, les fêtards se donnent rendez-vous dans des boîtes de nuit en sous-sol, rue Elie-Berthet, rue Rafilhoux ou sinon à la « Cave des templiers » rue du Temple. En 1996, la bijouterie Philipparie est victime d'un vol de bijoux. Les auteurs ont utilisé les cavités souterraines pour s'emparer de 2 millions de francs.
Note (3) : A lire chez les Ardents Editeurs : Les Souterrains de Limoges de Aug. M. ( roman ''gothique'' écrit sans doute par Auguste Maquet ( (1813-1888) et nègre d'Alex. Dumas)
Je reviens sur les études de Charles-Louis de Chateauneuf, au Collège Royal de Limoges, qu'il voudrait terminer avec le baccalauréat; il a 16 ans ... Le proviseur est Monsieur Lary.
Sous napoléon, le 17 mars 1808 est créé le baccalauréat. Les candidats doivent être âgés d'au moins 16 ans et l'examen ne comporte que des épreuves orales portant sur des auteurs grecs et latins, sur la rhétorique, l'histoire, la géographie et la philosophie.
Si les collèges (ou lycée) préparent au bac, ce sont les facultés de lettres qui décernent le baccalauréat à des collégiens qui ont achevé leur rhétorique ou leur philosophie... Les facultés de sciences délivraient aussi un bac es-sciences, ou es-math.
Le Bac, est alors équivalent à un concours d'entrée: en 1815, on ne peut être admis au baccalauréat dans les facultés de droit et de médecine sans avoir au moins le grade de bachelier dans les celle des lettres.
Mais, il s'agit alors aussi de concurrence celui de l'entrée à l’Ecole polytechnique, aussi pour rendre l'épreuve plus difficile, on introduit la première épreuve écrite (composition française ou traduction d'un auteur classique).
La classe de première ou de rhétorique prépare à des épreuves orales d'explication de textes anciens, à des questions de Rhétorique, et de mathématiques ...
La deuxième année permet de préparer des épreuves au Concours général, et assure l'admission en licence à l'université ...
Versailles – Lycée Hoche – Une Étude
Intéressant aussi de se rappeler le « vécu » des collégiens, et celui des professeurs, à cette époque, à Limoges : ( Sources: Pierre Delage,Lycée Gay-Lussac : 5 siècles d'enseignement, Saint-Paul, Le Puy Fraud éd., 2010)
À cette époque, la journée d’un collégien est rythmée de la manière suivante :
5 h 30 : lever (au son du tambour) ; habillage ; prière
6 h 00 : étude ; vérification des devoirs ; récitation des leçons
7 h 30 : déjeuner ; récréation
8 h 00 à 10 h 00 : enseignement des matières littéraires, dans lesquelles s'insèrent les cours de sciences et de mathématiques ...
10 h 00 à 12 h 00 : étude ou cours spéciaux (ex : dessin)
12 h 00 : dîner ; récréation
13 h 30 : étude ; vérification des devoirs ; récitation des leçons
14 h 30 à 16 h 30 : enseignement des matières littéraires ( avec + ou – de sciences ...)
16 h 30 : goûter ; récréation
17 h 00 : étude ; vérification des devoirs ; récitation des leçons
19 h 30 : souper ; récréation
21 h 00 : coucher.
Elèves - collégiens
Les collégiens de cette époque sont habillés d’un costume civil, et non militaire, un « frac » en drap bleu foncé, avec col blanc; ils ont, pour se coiffer, un tricorne... Les enseignants portent la robe professorale; les professeurs donnent leurs cours de 8 h 00 à 10 h 00, et de 14 h 30 à 16 h 30, sauf le jeudi...
Charles-Louis de Chateauneuf est bon élève. Et, son professeur de mathématiques, Monsieur Gouré, qui se passionne à le faire progresser dans cette matière, tient à le présenter à l'entrée de l’École polytechnique... Nous avons vu précédemment que Charles-Louis préférerait des études de droit, bien plus attirantes et surtout, parce qu'elles sont un prétexte de vivre à Paris à la façon dont les jeunes gens de l'époque imagine une vie de bohème ...
Seulement... Sa famille ( peu présente ...) et surtout M. Gouré ont des arguments sérieux, financiers, et même spirituels et politiques ...!
Charles-Louis aime le langage virtuel des mathématiques. C'est une manière d'entrer dans les secrets de l'esprit, une logique pour se promener dans les arcanes alchimiques de l'esprit... Monsieur Gouré l'a même initié à ce qui pourrait être à la source d'immenses progrès, l'appréhension de l'infiniment petit, pour de grandioses calculs ...!!! M. Gouré nomme cela: les "Mathématiques transcendantes", c'est à dire le calcul différentiel et intégral... Nous en reparlerons ...
Ayant passé le bac. ès-lettres, Charles-Louis prépare ensuite le bac. ès-sciences jury qui l'admet au grade avec deux boules blanches pour les mathématiques et une boule rouge pour les sciences physiques... Il suit avec M. Gouré les classes de Mathématiques élémentaires, puis la classe de Mathématiques spéciales... Enfin, il se prépare au concours d'entrée au concours de l'École polytechnique, il a vingt ans, mais il est refusé pour la session de l'été 1836...
Le pivot de la formation mathématique est, durant presque tout le XIXe siècle, l’École Polytechnique, centre à peu près unique de la culture scientifique... Stendhal, qui lui aussi, remportait les prix en mathématique, s'était préparé à entrer à l’École polytechnique, alors installée rue de l’Université...
Une autre raison qui compose l'ensemble des raisons qui vont permettre à Charles-Louis de monter à Paris, est d'une part l'attachement de M. Gouré au passé jésuite du Collège, et aux jésuites en général; et d'autre part les convictions légitimistes du professeur ....
M. Gouré assurait au jeune homme que Paris lui ouvrirait les bras, et en particulier ceux de l'un des maîtres du professeur limougeaud : Augustin Cauchy (1789-1857); s'il était initié aux "Mathématiques transcendantes"...
C'est ainsi, que Charles-Louis de Chateauneuf, pourra rejoindre son ami Elie Berthet à Paris... Et, ce sera pour entrer dans un monde des arcanes scientifiques promis par son professeur.. Egalement, il fera connaissance de sociétés, certaines secrètes, qui lui permettront de commencer une Quête personnelle, et continuer celle de ses ancêtres: Roger de Laron et Louis-Léonard de la Bermondie...
Cette quête commence: - par les mathématiques, - la société jésuite nommée '' la Congrégation'' et - la fidélité au roi ''Bourbon'' ...
Fils ou neveu : de M. Joseph Châteauneuf ( né en 1759) et de Marie-Catherine-Louise de la Bermondie d'Auberoche ( née en 1780) , mariés en 1803. Jean de Châteauneuf est mort en son château de La Villatte (cne de Saint-Junien-la Brégère, Cr.) vers 1820...
Marie Catherine de La Bermondie, née vers 1780, a pour parents: Jean Léonard de La Bermondie né le 16 avril 1739 et Jeanne de VILLOUTREYS née vers 1740 ou 1750...
Charles-Louis de Chateauneuf est né en 1816, sans doute enfant adultérin...
Il est placé en nourrice dans la campagne environnante, et grandit ainsi, avant d'intégrer le collège royal ( nom sous la restauration) de Limoges, en qualité d'interne...
De bonne heure, il se livre ainsi à la vie contemplative, à l'observation de la nature et l'écoute des contes et légendes qu'emplissent les veillées dont il est friand....
Puis, il parcourt les romans du dernier siècle, et autres miraculeux trésors qu'il peut arracher à sa famille, qu'il voit peu … Son goût pour la lecture va vite devenir impérieux... Ses loisirs en sortie du Collège se passe chez les bouquinistes de Limoges.
Le Collège Royal ( plus tard Lycée Gay-Lussac) a peu changé depuis ; si ce n'est en 1828, la chapelle ( abandonnée...) qui – réouverte au culte - est dotée à présent d'un plafond et d'une toiture ; et, la construction des quatre dortoirs des pensionnaires , dans une aile construite sous l'Empire...
Lycée Gay-Lussac
On a repris la désignation des classes des ex collèges des Jésuites : classes élémentaires (8e, 7e) jusqu'à la classe de philosophie...: De la 6e à la 3e les élèves doivent rendre chaque jour un thème (une traduction du français en latin). En seconde on ajoute des pièces de vers latins et en rhétorique des exercices de thèmes et de versions latines et grecques, des exercices de prose. On cherche à développer l’élocution écrite.
On y enseigne aussi : le français, les premiers principes de géographie, d’histoire et de mathématiques, puis se renforcent les sciences : le cours de sciences physiques (zoologie, botanique, minéralogie, chimie, physique) est commun aux classes de 3e/2de/Rhétorique …
Un professeur de philosophie ( pour la première fois il n'est pas prêtre) va les marquer : Charles Mallet (1807-1875) nommé en 1832, au collège royal de Limoges, en remplacement de l'abbé Garrigou. Ch. Mallet élève de l'Ecole normale a passé le concours de l'agrégation de philosophie sous la présidence de Victor Cousin (1792-1867), autre personnage que rencontrera C.-L. de Chateauneuf....
Charles-Louis rencontre un camarade de son âge avec qui partager sa passion, il se nomme Elie Berthet. Le jeune Elie, a, de plus, le goût de l'écriture et lui fait noter sur un cahier les récits du jeune romancier qu'il devient …
A la suite d'Elie Berthet, Charles-Louis devient excellent en rhétorique et en mathématiques ; tous deux se partageant les prix ...
Le père d'Elie Berthet est un négociant de Limoges, honorable mais peu riche... Il s'inquiète de l'avenir de son fils qui semble plus attiré par la passion littéraire que par une profession bourgeoise... A douze ans, il était passionné de botanique ; et possédait déjà une riche collection de papillons et d'insectes qui peuplaient alors le Limousin... Avec l'aide de Charles-Louis, ils vont enrichir cette collection ; le but secret entre eux est de ne jamais être à charge et de subvenir eux-mêmes à leurs besoins... Ainsi, ils vendront à des amateurs les collections d'histoire naturelle ainsi composées...
Leur rêve serait de ''monter'' à Paris, faire leur droit, vivre de ''bohème'' etc ...
Autographe - Elie Berthet
«L'étude la plus charmante pour une femme, et surtout pour une jeune fille, est celle de la botanique. Cette science s'apprend avec une extrême facilité par la pratique, et l'on se crée ainsi une source de jouissances intarissable, en même temps que l'on jette un peu de poésie dans l'existence, si dure et si brutale pour tous. J'aime beaucoup la botanique, et je m'efforce de communiquer ce goût à mes petits-enfants. Elie Bertet ». autographe
Limoges autour de 1830:
Le pont Saint-Etienne à Limoges vers 1838
En 1827, Limoges est soumise à une triade autoritaire :
- le préfet : le rigide baron de Coster
- l'évêque, Prosper de Tournefort, enfermé dans ses positions réactionnaires,
- le maire : Athanase Martin de la Bastide qui règne sur la ville de son château en campagne limousine ...
Louis-Philippe, roi des Français
Dès le 30 juillet 1830, après la fuite de Charles X, les républicains proposent au duc d’Orléans la lieutenance générale du royaume . Le 7 août 1830 après un vote favorable des Chambres il devient Louis-Philippe 1er. Il refuse le titre de roi de France qui l’aurait fait Philippe VII et se fait proclamer roi des Français. Ce nouveau titre, déjà porté par Louis XVI de 1789 à 1792, lie la monarchie au peuple et non plus au territoire. Comme autre symbole fort, la nouvelle monarchie adopte le drapeau tricolore pour remplacer le drapeau blanc de la Restauration.
A Limoges, la précarité de la condition des ouvriers, les a conduit à participer aux mouvements de révolte et de révolution. Pendant la révolution de 1830, de juillet à novembre, des grèves éclatent pour l'augmentation des salaires et la diminution de la journée de travail.
Tous les députés élus sont des libéraux... C'est la fin de trois décennies ''calmes''...
C'est véritablement alors l'heure de la bourgeoisie triomphante. Le nouveau Maire Fr. Alluaud entend insuffler modernité et progrès dans la gestion de la ville...
François II Alluaud s’attelle à poursuivre l'œuvre de son père et implante une usine de porcelaine aux Casseaux en 1816, en bord de Vienne, à une époque où celle-ci était une authentique route du bois. Il est également Maire de Limoges (1830-1833), et va participer à l'amélioration de la qualité de fabrication, de cuisson, et va franchir les barrières esthétiques en terme de création. Sous son influence, l'industrie porcelainière de Limoges va devenir une véritable industrie d'art.
Bord de Vienne - Limoges
Après les 3 glorieuses (1830) , les naveteaux armés de leur interminable lancis figurent dans les rangs de la garde nationale.
A noter en 1835, une très grave inondation des bords de Vienne...
Après six siècles de durée, le pont Saint-Martial et le pont Saint-Étienne servent encore aux communications de deux pauvres faubourgs, et heureusement ils ont tout juste assez d'utilité pour qu'on les entretienne...
Entre 1833 et 1839, le Pont-Neuf est construit puis livré à la circulation le 29 juillet 1839. La première pierre de ce pont a été posée le 17 juillet 1832. Cette pierre renferme une plaque en porcelaine portant les noms des officiels. Appelé pont ''Louis Philippe'' , il fut baptisé ''Pont Neuf'' après la révolution de 1848. Les emplacements prévus pour de grandes assiettes en porcelaine évoquant l'importance de la profession et sa vocation à réaliser des chefs d'oeuvre , sont hélas demeurés vides.
Le champ de juillet fut établi en 1830 pour permettre les charges d’entraînement des régiments de cavalerie, dont le XXème dragon. L'armée refuse le lieu qui devient un espace de promenade... L'oeuvre des frères Bühler, célèbres paysagistes du XIXe siècle, en 1858 a disparu, et est malheureusement oubliée. (Le jardin a été entièrement reconstruit dans sa partie basse vers 1928.)
1840, voit le Théâtre, place Royale ( de la République )
1846, le Palais de justice
1852, une halle sur la Place de la Motte
1856, la gare d'Orléans
1861, la Caserne de la Visitation...
La Porcelaine :
Vers 1830, la grande industrie de Limoges, reste la production de textiles. En 1837, la ville compte 25 manufactures de flanelles établies au bord de Vienne. Le déclin est du à la concurrence des tissus du nord de la France ; et il est contrebalancé par le développement de la porcelaine...
Sous la Restauration, l’augmentation de la production de porcelaine, sans doute liée à une augmentation de la consommation, est notable. Elle est due à deux facteurs : l’abondance des matières premières – kaolin et bois – dans la région et la présence d’une main-d’œuvre nombreuse et habile. En 1830, on inventorie seize fabriques, puis vingt-quatre en 1836-1837, soit quarante fours. Onze d’entre elles sont établies à Limoges et les autres en Haute-Vienne. Au niveau des effectifs, l’enquête industrielle de 1840-1844 recense 3198 personnes travaillant dans l’industrie porcelainière, qui est ainsi la première de la région. La production est alors majoritairement constituée de porcelaine blanche. Les décors sont principalement exécutés par des artistes qualifiés à Paris ou Toulouse, principaux centres de vente de cette porcelaine. Cependant, des ouvriers porcelainiers limousins décorent également la porcelaine. Quant aux exportations, elles se font en direction des marchés allemand, italien, espagnol et américain, mais encore modestement.
Jean-Léonard de la Bermondie, naît en 1739, en Limousin... Ancien page du Roi, officier dans les Gardes Françaises ; il y rencontre le marquis de Lusignan, avec qui il emprunte le chemin de la Franc-maçonnerie... Fort de l'héritage de son ancêtre Roger de Laron, templier...; il découvre diverses routes qui conduiraient au Graal; et comme émigré (pendant la révolution ), la pilosophie...
Avant de tourner cette page, il laisse à sa descendance les traces de ce chemin de vie. Le relais va être assuré par Charles-Louis de Chateauneuf, né en 1816 à Limoges...
Il y a tout juste 200 ans, naissait une génération qui s'est fait appeler ''enfant du siècle''...
L'une des meilleures illustration de ce type d'homme et de femme, est le roman d'Alfred de Musset (1810-1857): '' La Confession d'un Enfant du Siècle '', roman autobiographique publié en 1936...
En 1833, Musset rencontre George Sand...
Cette histoire est inspirée de la passion réelle vécue par Alfred de Musset et George Sand entre juillet 1833 et Mars 1835. Ces amours cohabitent avec la vie de débauche dont Musset ne parvient pas à se défaire et avec la liaison que Sand a avec le docteur Pietro Piagello à Venise. Dans le roman, tout y est romancé et rien ne s'est réellement passé comme le décrit Musset. Le procédé sera repris par George Sand (1804-1876) elle-même dans son texte '' Elle et Lui'' (en 1859), où tout et rien ne sont vrais … !
''Enfant du Siècle '': désigne les temps nouveaux, placés sous le signe du héros fondateur ( « Ce siècle avait deux ans. Rome remplaçait Sparte »), à présent déchu ; mais signifie encore : gloire, énergie, espoir, avenir, jeunesse.
P.-N. Guerin - Rochejaquelin (1817)
« C'est à nous jeunes gens, enfants du siècle et de la Liberté, à favoriser l'aurore du bonheur des nations, à faire accorder la sûreté des trônes avec la liberté des peuple... » écrit le jeune Balzac (1799-1850) (Sténie : roman inachevé commencé en 1819) ).
Victor Hugo (1802-0885) , se reconnaît lui-même dans ''Feuilles d'automne '' : « Je suis fils de ce siècle !... »
E. P. de Senancour (1770 - 1846), écrivain du premier romantisme français. Dans ses Rêveries, il décrits les enfants du siècle, comme des « esprits légers et insouciants, enivrés d'esprit et privés d'âme, qui voient dans le monde comme il va, le monde comme il doit aller.»
Ce siècle est nourrit des nostalgies de la noblesse mais aussi des mécomptes de la liberté puis des humiliations de la défaite. On y retrouve mêlés : vocabulaire passéiste, et attitude aristocratique, avec une inquiétude métaphysique ou sa crispation en révolte.
Benjamin Constant dans son roman autobiographique paru en 1817 : ''Adolphe'', met en scène les relations amoureuses entre Adolphe, un jeune homme de bonne famille, et Ellénore ( inspirée de plusieurs femmes, mais surtout de Germaine de Staël )... cette œuvre exprime ce mal du siècle; l'auteur affirme en effet : « J'ai voulu peindre dans Adolphe une des principales maladies morales de notre siècle : cette fatigue, cette incertitude, cette absence de force, cette analyse perpétuelle, qui place une arrière-pensée de tous les sentiments, et qui les corrompt dès leur naissance ».
Je reviens à la Confession d'un enfant du siècle (1836), ; avec le film de Diane Kurys, on entend Musset prononcer ces paroles ( et qui est en fait un résumé du Chap II de la Confession.):
« Le monde était en ruines, et nous venions au monde. La guerre était finie, nous arrivions après la gloire, après l’idéal, il nous restait le désespoir pour seule religion et pour toutes passions et mépris. Les femmes s’habillaient de blanc comme les fiancées, et nous les enfants du siècle, vêtus de noir comme les orphelins, nous les regardions, blasphème à la bouche et le cœur vide. J’allais dans ce désert, serré dans le manteau des égoïstes… quand soudain, je la rencontrai… »
Voilà ce qui en est de cette génération : '' Enfant du Siècle''.
Charles-Louis de Chateauneuf, né en 1816 à Limoges, tentera lui, de se défaire de cet atavisme, en retrouvant des racines bien plus anciennes...
J. L. de La Bermondie va vivre le début de la Révolution, en Limousin.
Le Limousin est alors une région pauvre et isolée... Les céréales, et en priorité le seigle, sont la principale des cultures à côté de l'élevage du bétail : bovins et moutons... Le porc est le seul animal que le paysan se permet de tuer pour sa propre consommation..
Un peu de sidérurgie, au sud de la Vienne ; et à Limoges une activité industrielle assez développée : papeteries, manufactures textiles... et, des échanges commerciaux limités.
Un peuple des campagnes indigent, et un attachement aux traditions religieuses populaires... Pour 700.000 habitants, on compte 3000 personnes au service de l'Eglise ( neuf communautés religieuses de femmes à Limoges)...
Suppression des Ordres religieux 1790
Les 20, 21 et 22 août 1787, se réunit l 'Assemblée provinciale de la généralité de Limoges. Puis dès février, mars 1789, des Assemblées ont lieu pour rédiger des cahiers de doléances et élire des députés aux États Généraux.
Les trois ordres se réunissent du 16 au 23 mars au chef-lieu des sénéchaussées.
J. L. de La Bermondie est à Limoges, pour la noblesse. Un document d'archive, qui nous donne la liste la des gentilshommes qui assistent à l'Assemblée des trois ordres de la sénéchaussée de Limoges et Saint-Yrieix, en 1789; le nomme et l'appelle "seigneur de Saint-Julien et de Laron".
Le lycée ( Gay-Lussac aujourd'hui) est le théâtre de la réunion des États Généraux du Limousin, dans l'enceinte de la chapelle, le 16 mars 1789.
« Le collège royal bordait le boulevard. L’arrière des bâtiments et la chapelle s’ouvraient de l’autre côté, tout près de la place dans l’étroite rue Boucherie. La lumière, encore frisante à cette heure soulignait d’ombre, les pilastres, les entablements, les frontons, les niches en coquille : tout l’ensemble du style jésuite, plaqué sur un appareil assez rudimentaire, comme les deux tourelles à bonnet pointu qui épaulait cette façade. Si bien qu’en dépit de ses ornements l’église ouvrait plutôt un aspect militaire. En outre, quand on arrivait par la rue de l’Arbre-Peint, un des singuliers clochetons du cloche, apparaissant par-dessus ladite Église ou chapelle évoquait les épaules et la tête d’un guetteur en armure et casque noirs.
L’intérieur sans pilier formait un assez vaste vaisseau, très clair. Tournant le dos à l’hôtel, les magistrats de la Présidial et de la Sénéchaussée : conseillers, gens du roi, le lieutenant des Pais, le lieutenant criminels étaient assis en robes du palais. Ils composaient et un groupe uniforme, noir et rouge, où tranchés la blancheur des hermines ; Sur un côté du vaisseau, se tenait le Tiers-État imposant par son nombre. Les campagnards en habit court à basques, y voisinaient avec les fastueux citadins du genre Naurissane. En face, siégeaient la noblesse et le clergé, à droite et à gauche du grand sénéchal qui présidait, assisté par le lieutenant général de Reilhac, le procureur du Roi et les huissiers. Cet ordre n’avait pas été établi sans mainte querelle de préséance. Aujourd’hui, tout le monde était très digne, très pénétré de l’importance de ce qui s’accomplissait ici. » Robert Margerit '' La Révolution - L'amour et le temps ''
Chapelle et arrière des bâtiments du Lycée Gay-Lussac -Limoges
En même temps, une crise des subsistances atteint son ampleur...
En 1788, du fait de la sécheresse et d'orages de grêles, les moissons sont détestables... le marché est également mal approvisionné ( certains accaparent pour gagner plus …), et c'est une forte hausse des prix... L'hiver qui suit est très rigoureux, même les châtaigniers périssent !
Les 12 et 13 mai 1789, Limoges connaît une émeute engendrée par ce problème de subsistances...
Après le 14 juillet 1789, les limousins connaissent ce qu'on appelle '' la Grande Peur '' : le bruit circule que des bandes de brigands ( ou mercenaires …) sans-doute recrutés par les nobles, arrivent en pillant et détruisant tout sur leur passage... cela induit une '' révolution municipale'', avec la constitution de '' comités de patriotes » » qui se substituent aux autorités municipales en place … On crée des gardes nationales, en grande partie formées de petits bourgeois.
Article 1er : « l'Assemblée nationale détruit entièrement le régime féodal. »
En France, le 4 août voit la suppression des privilèges, de la dîme et de certains droits seigneuriaux. On brûle les bancs des ''privilégiés'' des église, on détruit les girouettes ( réservées aux possesseurs de fiefs) … Et en décembre, se généralise le refus du paiement des droits seigneuriaux...
En janvier 1790, en Bas-Limousin ont lieu des révoltes anti-seigneuriales.
C'est en février 1790 que se constituent les trois départements de la Creuse, de la haute-Vienne et de la Corrèze.
A lieu la fédération des gardes nationales – c'est à dire que les gardes nationales voisines se jurent un appui mutuel et fraternel - et le 14 juillet 1790, les municipalités organisent une fête pour célébrer cette Fédération. Se créent des clubs : des sociétés patriotiques avec beaucoup de commerçants et d'artisans.
A partir de janvier 1791, c'est la Constitution Civile du Clergé. On demande aux ecclésiastiques de prêter serment et on élit des évêques constitutionnels. C'est alors un tournant dans la révolution, car cette décision provoque de profondes divisions... Le bas-clergé est favorable à la Révolution, mais beaucoup de réfractaires invoquent leur conscience... Les ''jureurs'' ne sont pas enthousiastes... Pourquoi devoir choisir entre la Nation et l'Eglise ? Les ''jureurs'' seraient 62% en Corrèze, 47% en Haute-Vienne et 75% en Creuse ( selon l'Assemblée Constituante), des prêtres vont ensuite se rétracter …
Léonard Cramouzaud, le curé de Saint-Julien-le-Petit, refuse de prêter serment à la constitution ''schismatique'' du clergé, et émigre …
Pierre-Psalmet Cramouzaud, curé de Beaumont (du Lac), près d'Eymoutiers, nommé en 1762, refuse également de prêter serment. Il est condamné à la déportation hors de France. Malgré cette loi de déportation du 26 août 1792, il reste « caché dans le voisinage de sa paroisse, afin de continuer à veiller sur elle, et porter à ses habitants les secours de la religion »... Il est arrêté, et conduit à Limoges, où le tribunal criminel le condamne à mort, et le fait guillotiner le 21 novembre 1793. ( sources : l'abbé A. Lecler - 1918 )
Puis, les 20 et 21 juin 1791, le Roi ''s'enfuit'', puis il est fait prisonnier...
Le 23 août à La Souterraine, a lieu une insurrection contre le rachat des droits seigneuriaux...
La famille royale est arrêtée à Varennes le 21 juin 1791
Durant l'année, les départs en émigration deviennent nombreux.
Selon des actes: Jeanne de Villoutreys, et Jean Léonard de la Bermondie, vont divorcer durant la Révolution pour conserver les biens de Jean qui émigre en 1791; mais ils vont négliger de se remarier civilement après son retour...
Ce que j'en dis...: Jean Léonard de la Bermondie, après la fuite du Roi, puis son arrestation va considérer que son devoir est de rester au service du Roi de France. Bien que, partisan d'une monarchie Constitutionnelle, et donc favorable à la Révolution en son début, il partage certaines analyses du ''girondin'' et limougeaud Pierre Vergnaud (1753- et guillotiné en 1793), du moins en cette année 1791... Jean-Léonard comme noble, de plus, ancien page du Roi et officier, craint pour sa sécurité... Il choisit d'émigrer, mais refuse de servir dans l'armée avec les prussiens et les autrichiens contre la nation Française ... Aussi, choisit-il la Suisse, et Berne en particulier ...
- Note: Emigration française en Suisse: principalement à Neuchâtel, Fribourg, Berne et Bâle. On a recensé 3 700 ressortissants français dans le canton de Fribourg en 1793, dont deux tiers d'ecclésiastiques...
A suivre:... J. L. De La Bermondie rencontre le jeune Hegel..!
Limoges, comme chaque ville du royaume, a son cortège de fêtes et de processions annuelles...
Processions le dimanche de la Passion, le jour de Pâques, à la Fête-Dieu et dans l'octave, pour l'Assomption encore... Le 30 avril, on plante très officiellement des arbres de mai dans la ville, en présence du maire, des valets de ville, des fifres et des tambours. Il faut ajouter à cette trame les noubas du Carnaval et de la Saint-Jean, et le reste! Les Rois, les Rameaux...
Ostensions du Dorat en 1918
A Limoges, chaque année les six prévôts-consuls maudissent solennellement Gauthier, le méchant traître. Au début du XVe siècle, Gauthier Roi dit Pradeau avait cru pouvoir livrer la ville. Mal lui en prit, car, pendant plus de trois cents ans, les Limougeauds consacrent le 27 août à courir sus à Gauthier (voir note *). Cela commence à l'hôtel de ville et se poursuit dans la rue.
Mais tout cela, n'est jamais qu'ordinaire. En fait, les élites ne répugnent pas aux rites colorés, grivois parfois, qui scandaient les douze mois de l'année. A Carnaval hormis quelques dévots qui se réfugient chez les Jésuites pour y expier les fautes de leurs semblables, tout le monde se retrouve pour faire le maximum de ce qu'autorise l'état de son porte-monnaie. Moment sacré à l'occasion duquel les parents s'invitent de loin, comme pour la Saint-Jean, notamment pour le bal, l'un des plus importants de l'année.
On retrouve tout cela à la campagne, où les ''reinages'' des confréries ( vente de titres dans une confrérie) continuent de mêler inextricablement la religion, les gaietés populaires et la mangeaille.
Nobles et bourgeois font partie de la fête...
Dans la banlieue de Limoges, la fête des Cornards de Saint-Lazare sort la population de la ville pour sa première ballade de l'année, le dimanche de la Passion, en plein carême. Les aubergistes du village arborent à leur porte de magnifiques cornes de béliers enrubannées, à la place du bouchon obligatoire qui est le signe de leur commerce, et tout ce joyeux peuple ne manque pas d'aller saluer d'un même souffle les reliques de Saint-Lazare que le curé expose pour l'occasion dans la vieille église.
Les reliques et la fête mêlées, c'est là la marque propre du Limousin. ( …) La confrérie des cornards du lieu; se charge charitablement de déposer chez tout nouveau marié la superbe ramure de cerf qu'il n'aura plus qu'à transmettre à l'époux suivant. On pourrait encore évoquer l'Académie des ânes d'Ambazac...
Pour satisfaire ce besoin de sacré, Limoges a ses pénitent... Bleu, noir, gris, blanc, rouge ou feuille morte, le pénitent de Limoges trouve dans sa confrérie un moyen de sortir de son milieu professionnel et une identité religieuse et sociale que ne boudent pas les officiers de la ville.
L’historien Michel Cassan a écrit : « dans le courant des XVIIe et XVIIIe siècles, de ce dernier surtout, il n’y avait pas un seul chef de famille de Limoges qui ne fut membre de quelque confrérie à laquelle avant lui son père, son grand-père, ses ancêtres avaient appartenu. C’est par centaines qu’elles comptaient leurs membres. » Contrairement à ce que l’on pourrait penser par ailleurs, les confréries se montraient souvent très indépendantes vis-à-vis du clergé, en particulier à Limoges.
Selon Francis Masgnaud, « leur indépendance vis-à-vis du pouvoir religieux a dû plaire aux francs-maçons et, comme dans la ville tout le monde en était, nombre de francs-maçons furent également pénitents. »
Il existait des maçons ecclésiastiques, comme par exemple Cramouzaud, chanoine théologal de saint Martial, membre de « L’Heureuse Réunion » à la fin du XVIIIème siècle.
Dans son costume de pénitent, l'homme qui va pieds nus dans les rues jonchées de fleurs précédant le Saint-Sacrement, est un peu prêtre lui aussi. Instrument d'intégration sociale, la confrérie limousine accueillait les jeunes fils de ses membres, les militaires en garnison, soldats aussi bien que capitaines, et les négociants des villes d'alentour amenés par leur commerce à de fréquents passages.
Le Limousin présente la caractéristique de rester fidèle à ses reliques dont le culte y revêt depuis longtemps, une ampleur toute mérovingienne...
Tous les sept ans - et cela se fait encore au XXIe s. -, des ostensions solennelles permettent aux fidèles de promener et de vénérer les corps, les chefs et les morceaux les plus précieux des saints locaux: Martial, Léonard, Victurnien, Austriclinien, Théobald, IsraëI, Genest, Priest et mille autres, et cela avec une débauche d'usages et de rites qui s'étendent sur plusieurs mois et mobilisent l'ensemble de la population aux côtés de ses cadres sociaux dans un vaste psychodrame.
Procession maçonnique - au XVIIIe siècle détail
Également, un jour de Saint-Jean, les francs-maçons de la loge de Limoges peuvent donner un banquet et faire un feu d'artifice, avant d'envoyer à leurs frais une musique régimentaire donner la sérénade par les rues.
Sources : Michel C. Kiener et Jean-Claude Peyronnet : ''Quand Turgot régnait en Limousin''
(*) La fameuse conspiration de Gautier Pradeau (1426)
Le procès du consul Gautier Pradeau constitue un des épisodes les plus saillants et les plus dramatiques de notre histoire provinciale au moyen âge.
Limoges Médiéval ( BD de Pascal Jourde)
On sait que Pradeau, originaire de Lesterps ( aux limites du Limousin ), était venu, jeune encore, et avec peu de ressources, s'établir à Limoges où il entreprit un commerce.
Il va entrer dans la bonne société limougeaude par le mariage ; il épouse Marie Vidal qui appartient à une famille de drapiers et lui apporte « moult chevance »
Peut-être '' maître des monnaies'', il fait des prêts à des notables; surtout il devient trois fois consul (1412, 1416 et 1422). C’est donc, en quelques années, une réussite publique fulgurante.
Les adversaires de Gaultier Pradeau ont dressé de lui un portrait qui allait devenir traditionnel, celui du traître modèle : étranger à la ville, arrivé pauvre mais enrichi par le mariage et de louches affaires... Ici, le chef d’un parti vicomtal dans la ville, se heurtant à un parti consulaire mené par les anciennes familles patriciennes de Limoges...
Jean de Bretagne, sieur de Laigle, est le frère et le lieutenant général du vicomte de Limoges. Celui-ci revendiquait les anciens droits féodaux de sa famille. Les habitants repoussaient avec énergie cette prétention, rappelant le don fait par la veuve de Charles de Blois de leur ville au roi Charles V, et l'engagement solennel pris par le même prince vis-à-vis des bourgeois, de les garder sous sa main et de maintenir leurs consuls élus seuls maîtres et seigneurs du château de Limoges.
Pour dix mille écus et quelques rancunes personnelles, Pradeau consentit à servir les projets du seigneur de Laigle...
Quand ce fut le tour d'investir la charge de prévôt-consul, d'entre tous les magistrats de la Commune, Gautier Pradeau devait faire ouvrir sous un prétexte quelconque , un matin au point du jour, la Porte des Arènes...
Mais, le projet du traître fut découvert avant sa réalisation... L'alarme se répandit aussitôt dans la ville et les bourgeois se précipitèrent aux murailles …
Jean de Laigle demeura une semaine sous les murs de la ville avec les 6 ou 700 hommes qu'il avait réunis pour son expédition; mais avec d'aussi faibles troupes, il ne pouvait songer à prendre Limoges de vive force, il dut se retirer.
Le corps de ville s'assembla : Gautier fut appelé devant ses collègues; on mit les preuves de sa trahison sous ses yeux. Il essaya d'abord de nier; mais, bientôt convaincu par l'évidence, menacé d'être appliqué à la question, il se décida à tout avouer: il remit même aux consuls le traité qu'il avait en sa possession. Livré au prévôt criminel, il eut la tête tranchée au pilori de la place des Bancs, le 3septembre. La tête du coupable fut placée au bout d'une pique, au-dessus de la porte des Arènes.
Une procession annuelle - organisée peut-être dès les années 1430 et jusqu’à la veille de la Révolution - permettait à la population d’insulter « l’homme de fer » .
Après Ambazac, enfin, la voiture empruntée par J. L. de La Bermondie retrouve - vers Limoges - une route praticable ..
« La voiture dérangeait les ateliers paroissiaux de la corvée des chemins. Ils travaillaient aux routes entre les grands labeurs de l'été et les pluies et le gel de l'hiver... le cœur n'y était guère et les corvoyeurs y mettaient toute l’ardeur qu'on peut attendre des gens qui font un travail forcé non payé... »
Plan: Ville de Limoges 1785
La ville de Limoges ( le château) est ceinturée de remparts qui tombent en ruine ; pourtant la plupart ont disparu et remplacés par une allée d'arbres, appréciée des citadins … Les routes de Paris et de Poitiers aboutissent à la porte Montmailler, l'une des quatre portes fortifiées … Là, on y trouve tout à côté la poste aux chevaux et une brigade de la maréchaussée... En 1781, une place ronde a été aménagée : la place Montmailler, rebaptisée Dauphine à la naissance de l’héritier de la couronne.
Tout le trafic Nord-sud doit ensuite s'engouffrer dans le dédale de rues étroites, bordées de maisons ventrues aux faîtages fatigués, pour, éventuellement, ressortir par la porte Manigne et de là dévaler le faubourg Saint-martial vers la Vienne...
Vue de Paris, Limoges apparaît comme une ville méridionale et pauvre. Et, une vraie ville dans la mesure où le jour et la nuit n'y sont, pas très bien partagés... Même si la chandelle pousse à suivre le soleil pas à pas. On se lève au premier jour, partout les premières messes se disent en hiver dans l'ombre ténue de l'aurore. A la ville, la nuit n'interrompt guère le mouvement de la ville.
A la campagne, chacun prolonge la soirée par la veillée. On y pèle les châtaignes du lendemain entre proches voisins car les chemins étaient trop infernaux, au sens propre comme au figuré, pour qu'on ose se risquer bien loin- Les paysans s'en repartent dans la nuit, les enfants accrochés aux basques, les oreilles pleines d'histoires de loups-garous.... La veillée terminée, la campagne s'endort, la porte soigneusement barrée.
En ville, après avoir blagué autour de l'âtre de la salle, souvent l'unique pièce du rez-de-chaussée de maisons bâties tout en hauteur, les enfants et les domestiques des familles bourgeoises grimpent les escaliers grinçants dans le noir épais, faute d'oser allumer des chandelles qui représentent alors une menace mortelle dans des villes de colombage et de lattis...
Les beaux jours, quand le soir décline, vient l'heure sacrée de la promenade. On se sort du centre aux rues infectes et au pavé disjoint dans lesquelles se déversent encore librement les latrines des maisons de notables. On s'en va marcher par les chemins ivres qui serpentent entre les jardins et les vignes soigneusement clos de murs. On marche encore à la nuit tombée. Plus moderne, les villes se pourvoient de promenades, endroits plantés et aérés, qui représentent le seul espace de rencontre possible. L'un des titres de gloire des intendants des XVIIe et XVIIIe siècles fut de doter les principales villes de leur généralité de ces allées, de ces cours qui portent encore souvent leur nom.
A Limoges, on peut trouver une promenade à plusieurs allées d'ormes, tout auprès d'un ancien amphithéâtre romain : les Arènes. C'est Boucher d'Orsay, qui les fait aménager en « vraie » promenade.
A l'intérieur de la ville, on a fait aménager une terrasse, la '' place sous les arbres'', à l'ombre immédiate du chevet de la basilique de Saint-Martial. Puis, c'est Tourny qui fait aménager les allées ; il fait démolir une vieille tour du rempart puis construire une porte de ville en forme d'arc de triomphe, frappée aux armes du roi, de la ville et des siennes propres. Et en calcaire, s'il vous plaît, importé à grands frais ! Tourny lui donne pour perspective un vaste cours planté d'où part la route de Clermont, si bien que s'y installe tout naturellement un champ de foire.
Les pauvres, qui habitent souvent des antres sans fenêtres, se.laissent prendre par la nuit assis sur le seuil de leur porte. Les auberges se remplissent, installées comme il se doit aux portes mêmes de la ville, comme les Trois Anges du faubourg des Arènes, dans ces faubourgs qui échappent un peu mieux que le centre à l’œil parfois sourcilleux des autorités de police et de commerce. Les joueurs de cartes s'y entassent dans des chambrettes empuanties par le tabac.
La nuit est bruyante d'un remue-ménage de caravansérail, et le tapage nocturne ne semble gêner que le sommeil des plus grincheux.
La poste aux chevaux, installée porte Montmailler, et les courriers de la poste aux lettres ajoutaient encore au vacarme. (…) Celle-ci s'arrête tard et reprend vers les deux ou trois heures du matin. Autant dire que ce carrefour, où aboutissent les deux chemins du nord et du nord-ouest, ne s'endort jamais. Les équipages vont boire aux étangs de la Motte, au coeur du vieux Limoges.
Puis, c'est le bruit des convois qui arrivent aux premières heures du jour aux portes de la ville où sont installés les différents marchés, de tradition immémoriale.
Les fers qui sonnent sur le pavé, les chevaux qui s'ébrouent, les longues plaintes criardes des ânes esseulés, le cri des coqs à 1'aube, les grognements des cochons des voisins, toute cette ménagerie n'était pas seule, loin de là, à remplir les nuits limougeaudes.
Sources : Michel C. Kiener et Jean-Claude Peyronnet : ''Quand Turgot régnait en Limousin''
« L’an du Seigneur 1536, au mois d’août, maître Charles Cadumpnat, chantre de ce monastère, étant assis dans le cloître avec frère Jean Massias, maître des novices, et plusieurs autres composa la petite prose ci après en disant: «Je vous assure, mes frères, que si je me tais, les pierres parleront. Nos ruines ne parlent-elles pas à la postérité ? » Puis, voyant enlever quelque chose du trésor de l’église, il dit en soupirant et en sanglotant :
« O illustre confesseur du roi des rois Jésus-Christ, grand saint Etienne, gloire du pays d’Auvergne, que votre prière nous recommande à la Trinité souveraine ! Regardez d’un œil pieux vos serviteurs qui soupirent vers vous ! Si vous n’étendez vers nous vos mains secourables, votre Ordre de Grandmont - va rester dans la désolation; car vos brebis sont dévorées par des loups ravisseurs, et elles souffrent chaque jour, les plus graves dommages.
Des maîtres étrangers ne cessent de dévorer tous nos biens sous nos propres yeux....
Malheur ! et encore malheur ! Quand le grand arbre SERA RENVERSÉ, SA CHUTE SERA SUIVIE DE BEAUCOUP DE RUINES, DE TRIBULATION ET DE DÉSOLATION ! ».
Comme il n’est question dans cette prose que de l’abbaye de Grandmont on ne peut entendre cette figure symbolique le Grand arbre , que de cet Ordre célèbre qui couvrait plusieurs provinces de ses vastes rameaux. Cette prophétie annonçait que le Grand arbre (l’Ordre de Grandmont) serait un jour renversé, et que sa chute serait suivie de beaucoup de ruines, de tribulation et de désolation. C’est ce qui est arrivé sur la fin du XVIII e siècle. »
Sources : HISTOIRE DE PAROISSE DE SAINT-SYLVESTRE (HAUTE-VIENNE) par le Chanoine A. LECLER - 1909
Une réforme de ''sticte observance'' est proposée, et le refus des autres religieux et la convoitise de l’évêque entraînent la suppression de l’ordre par la commission des réguliers en 1772.
Par les lettres patentes de 1769, Louis XV a autorisé la suppression de l’ordre de Grandmont. L'extinction de l'Ordre fut prononcée par le pape Clément XVI cédant aux instances de la Cour de France le 6 août 1772, mais ne fut confirmée par Louis XVI qu'en Mai 1784, le parlement de Paris ayant mis obstacle .
Le dernier abbé de Grandmont, François-Xavier Mondain de la Maison Rouge va résister le plus longtemps possible. Homme de grande foi, celui-ci va tenter vainement une réforme pour satisfaire la Commission avant de découvrir la réalité de la machination ourdie contre son abbaye et de combattre courageusement aussi bien la décision du pape que celle du roi lui-même.
Malgré la résistance du dernier abbé de Grandmont, l'Ordre disparait à sa mort le 11 avril 1787 ; en dépit des protestations des habitants, en particulier ceux de la paroisse de Saint-Sylvestre.
Les derniers grandmontains quittent l'abbaye en Juillet 1788.
Sa dernière rénovation datait du XVIIIe siècle; et l'abbaye est détruite en 1789. Les matériaux qui la composaient ont été utilisés en majeure partie pour la construction de la prison de Limoges puis pour les maisons du village. Une chapelle a été construite avec des matériaux de l'ancienne abbaye en 1825 par le dernier moine de Grandmont.
La destruction de l'Ordre de Grandmont fut conduite par Mgr Loménie de Brienne, archevêque de Toulouse, et rapporteur devant la Commission des Réguliers instituée par Louis XV en 1765 (1), et Mgr. Plessis d Argentré, évêque de Limoges, grand bénéficiaire de l'opération .
(1) ( cette commission devait permettre de refréner les abus du clergé et examiner la situation financière des établissements ecclésiastiques aux ressources insuffisantes..)
Le Cardinal Loménie de Brienne
Étienne-Charles de Loménie de Brienne (1727-1794) est aussi incroyant que manipulateur.. En utilisant trahison et duplicité, il s'acharne sur l'ordre. Avec l'appui de la reine Marie-Antoinette, il deviendra ministre. En 1788, il doit se retirer, laissant un trésor vide. En 1791, il deviendra évêque constitutionnel...
Louis Charles du Plessis d'Argentré (1723-1808) est évêque de Limoges ; il est épris de luxe et endetté par son projet fastueux de palais épiscopal qu'il se fait édifier ( actuel musée de l'évêché) et construit principalement par Joseph Brousseau ( né à Solignac, près de Limoges, vers 1733), de 1766 à 1773.
Description du site par Honoré de Balzac dans Le curé de village (1838-1841): « Le palais épiscopal de Limoges est assis sur une colline qui borde la Vienne, et ses jardins que soutiennent de fortes murailles couronnées de balustrades, descendent par étages, en obéissant aux chutes naturelles du terrain. L’élévation de cette colline est telle que, sur la rive opposée, le faubourg (…) semble couché au pied de la dernière terrasse. De là, selon la direction que prennent les promeneurs, la rivière se découvre, soit en enfilade, soit en travers au milieu d’un riche panorama. (…) La magie du site et la riche simplicité du bâtiment font de ce palais le monument le plus remarquable de cette ville où les constructions ne brillent ni par le choix des matériaux ni par l’architecture. »
Limoges - Evêché-Musée aujourd'hui
On peut se reporter au livre de M Gilles BRESSON : "La Malédiction des Grandmontains"
Les jésuites possèdent, en 1710, six cent douze collèges. Ils sont concurrencés en particulier par les Oratoriens ( fondés en 1611). Les Jésuites mettent au point dès 1599 leur Ratio studiorum, manuel condensant le programme de leurs collèges, accessible à tous.
Costumes des jésuites du XVIIe au XIXe siècle.
La belle place est faite aux lettres classiques : latin et grec. Dès la 5e (deuxième année), l’élève est plongé dans un autre univers : il côtoie les auteurs anciens, des cours se font en latin … Le latin est le sésame vers les humanités, fondement à leur tour des Belles-Lettres.
La philosophie est celle d’Aristote. Le collège est pour les jésuites, une citadelle de l’orthodoxie romaine contre les protestants, les jansénistes et les libres penseurs.
L’Histoire et la géographie sont marginales, les sciences naturelles (observations et expériences) sont peu présentes et les mathématiques ne sont abordés que durant la dernière année (deuxième année de philosophie). Cependant au XVIIIe siècle, certains cours innovent avec des leçons de chimie et des expériences sur les phénomènes électriques. Les Oratoriens insistent davantage sur les disciplines scientifiques...
La religion (messes, confessions, prières) tient évidemment une grande place dans l’enseignement, les collèges constituant le « fer de lance » de la Contre-Réforme. A côté de la religion est enseignée la morale et la civilité (l’art de se tenir en bonne société). A la pointe de la Contre-Réforme, la Compagnie de Jésus valorise l’art théâtral qui revêt à leurs yeux trois qualités : améliorer la mémorisation, obliger le contrôle de sa voix (effets de voix) et la maîtrise de son corps (se tenir droit, ne pas faire de gestes brusques). Les représentations sont publiques, les habitants de la ville ou du village venant y assister librement.
La discipline du collège jésuite est stricte; les punitions corporelles sont peu à peu abandonnées (au profit des blâmes, retenues,…). L’émulation et le sentiment de l’honneur sont largement mis à profit Par exemple, on peut diviser les classes en groupes, Romains, Carthaginois... qui s’affrontent pour faire gagner leur camp … En fin d’année se tient la remise des prix en public pour les meilleurs élèves, où les familles et les notables de la ville sont conviés à la cérémonie.
Une grande partie du travail de surveillance est effectuée à l’intérieur de la classe par les élèves eux-mêmes. Dans chaque classe est choisi parmi eux un normateur dont le travail est de tenir le registre quotidien des présences. D’autres élèves (un par groupe, ou décurie, là où existe ce système) jouent le rôle de gardiens de la morale. Ils sont habituellement appelés censores et leur tâche consiste à rapporter au professeur toute manifestation d’indiscipline. Chaque membre de la décurie, du chef jusqu’au dernier de la troupe, est noté en fonction de son travail et apparié avec son homologue des décuries rivales. Les équipes concurrentes combattent pour la meilleure place presque quotidiennement, chaque membre de la décurie défendant l’honneur du groupe contre ses rivaux.
L’objectif ultime de l’élève est de gagner la compétition mensuelle pour prendre le titre d’Empereur, il capo dei capi.
Les élèves des collèges jésuites gardent le même régent quand ils montent de classe en classe, et l’enseignement de ce dernier est supervisé par ses supérieurs.
Le passage d'un élève dans une classe correspond généralement à la durée d'une année, de la Saint-Rémi – soit du 1er octobre – jusqu'à la mi-septembre. C’est seulement après avoir réussi une forme d'examen de passage que le collégien intègre un certain niveau de classe.
Le collège organise cinq niveaux différents de classes : aux trois premiers niveaux – grammaire inférieure nommée aussi « rudiments » ou « figures » ; grammaire dite moyenne ; grammaire supérieure, appelée aussi syntaxe – succèdent l'enseignement de la poésie ou humanités et le dernier niveau prévoyant l'apprentissage de la rhétorique, couronnement des quatre années préalables. Avant d'atteindre cette cinquième classe destinée à la rhétorique, l'élève a bénéficié de quatre années complètes consacrées à la grammaire, à la poésie et aux humanités. Ces quatre étapes jouent en quelque sorte le rôle de classes préparatoires permettant à l'élève jésuite de rayonner dans la discipline reine, celle de l’art de dire. Cet art occupe une place de choix parce qu’il est considéré comme nécessaire aussi bien à l’éloquence du prédicateur qu’à celle du courtisan qui devra plaider sa cause en société.
Au XVIIIe siècle, les effectifs dans les établissements secondaires chutent. En cause :la multiplication des établissements secondaires mais surtout le changement des mentalités. Le contenu enseigné par les congrégations ne correspond plus à « l’air du temps », dans un siècle de déchristianisation. Des voix s’élèvent contre la tyrannie gréco-latine pour réclamer le renforcement des cours de français, d’Histoire, de géographie et de sciences naturelles. Les élites (notamment les marchands) reprochent aux collèges de manquer de pragmatisme, de ne pas préparer les adolescents à la vie adulte.
En 1762, les Jésuites - sont expulsés hors du royaume par ordre du roi… ! ( nous aurons l'occasion d'en reparler …). Ils possèdent alors un tiers des collèges du France … Ce sont des raisons politiques et historiques qui conduisent à la suppression de l’ordre en 1763.
Pour l'heure, les Jésuites assurent même la gratuité de l’externat à partir de 1719, ce qui leur assure un large succès, en particulier de la bourgeoisie des villes... en même temps que croit la contestation de leur emprise sur la jeunesse et les esprits.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, la clientèle des collèges jésuites n'est nullement limitée à la noblesse et aux couches supérieures de la bourgeoisie : les premiers ne constituent, en fait, que 4 à 6 % des effectifs. L'écart d'âge, dans une même classe peut être très important ...
Collège Jésuites - Limoges - retable architecturé
Les jésuites ont introduit trois nouveautés : la progressivité dans les études, les devoirs écrits (thèmes, dissertations latines), les notes, classements, concours, récompenses honorifiques et donc, je me répète : l’esprit de compétition.
En 1661, le collège de Limoges a 1200 élèves et 36 régents. En 1762, le Parlement de Paris proclame que la doctrine des Jésuites est "perverse, destructrice de tout principe de religion et même de probité, injurieuse à la morale chrétienne, pernicieuse à la vie civile". Le collège reste fermé un an , puis douze prêtres, sous le contrôle de l'évêque les remplacent. Le collège s’appellera Collège royal de Sainte Marie de Limoges. Aujourd'hui, il est devenu le Lycée Gay-Lussac.
Les continuelles difficultés de trésorerie ont empêché les pères jésuites d'entretenir convenablement les locaux qui sont abandonnés dans un état déplorable au moment de l'expulsion de la Compagnie. Une des premières tâches du bureau d'administration après 1763 consistera à faire reconstruire le corps principal des bâtiments (1767-1777).
Adémar V, qui conteste l’autorité anglaise, alors que le duché d’Aquitaine est passé sous le contrôle de l’Angleterre suite au mariage d’Aliénor avec Henri II Plantagenêt. En 1171 (?), d’après Geoffroy de Vigeois, le jeune Richard Cœur de Lion, nouveau duc d’Aquitaine, après une entrée processionnelle devant la foule en liesse, où il est accompagné par sa mère, reçoit à la cathédrale (« église matrice du Limousin ») la bénédiction de l’évêque de Limoges, une belle tunique de soie et une relique précieuse mais sans doute apparue pour « la cause » : l’anneau de sainte Valérie, signe d’une union mystique entre le prince et la Cité, le culte de la sainte ayant été redynamisé depuis une dizaine d’années. Suivent diverses festivités : tournois et banquets. L’Eglise limougeaude légitimant ainsi la Cité comme le lieu du couronnement ducal – Reims étant celui du sacre royal. Mais, progressivement, l’opposition entre le duc et les Limousins grandit et le Château se retrouve au cœur des affrontements.
En 1183, Henri II en fait raser l’enceinte et démantèle le pont Saint-Martial pour châtier les habitants indociles.
En 1199, faisant face à une coalition entre Philippe-Auguste, le comte d’Angoulême et le vicomte de Limoges, Richard Cœur de Lion est mortellement blessé (vraisemblablement par Pierre Basile) d’un carreau d’arbalète à Châlus-Chabrol, ce qui inspira nombre de chroniqueurs médiévaux puis Walter Scott dans Ivanhoé. Il rend son dernier souffle dans les bras de sa mère Aliénor.
Sources : Laurent Bourdelas, historien et écrivain, auteur de L'Histoire de Limoges (Geste Editions).
Récapitulons : Limoges, en Limousin, en Aquitaine...
Le nom de ''Limoges'' vient de "Civitas Lemovicum", la "Cité des Lémovices", devenu "Lemovicas". Ce nom vient donc de celui de la tribu gauloise des Lémovices, vivant sur le territoire limousin durant l'Antiquité.
C’est à Limoges que le fils de Charles le Chauve, Charles l'Enfant, fut couronné roi d’Aquitaine en 855. Au cours des Xe et XIe siècles, les comtes de Poitiers, cumulant aussi le titre de comte de Limoges, se parèrent du titre de duc d’Aquitaine puis devinrent également ducs de Gascogne...
Aliénor d'Aquitaine l'apporta en dot en 1152 à son second mari, Henri Plantagenêt, comte d'Anjou et futur roi d'Angleterre. La vicomté de Limoges, maîtresse de la plus grande partie du Haut Limousin, resta cependant le plus souvent indépendante.
Le Limousin est connu pour être une terre de vicomtes. Toutes les grandes familles vicomtales (Limoges, Turenne, Comborn, Ventadour, Aubusson, Brosse, Rochechouart), ont en commun de contrôler plusieurs forteresses.
Limoges, « fleuron du duché », conserva dans cet ensemble un rôle essentiel jusqu’au XIIe siècle au moins, comme lieu de couronnement des ducs : c'est en cette ville que Richard Coeur de Lion fut investi en tant que duc d'Aquitaine vers 1170, en passant à son doigt l'anneau de sainte Valérie.
L'abbaye Saint-Martial, dont les fouilles archéologiques révèlent actuellement les vestiges carolingiens et romans, tenait de toute évidence un rôle majeur dans ce rituel hautement symbolique.
Marie de Comborn, héritière des derniers vicomtes, épousa en 1275 l'héritier des ducs de Bretagne, le futur Arthur II. L'hermine de Bretagne brisée d'une bordure forma les armes de la vicomté. Au 15e siècle le Limousin passa par héritage à la maison d'Albret et le roi Henri IV, le dernier vicomte, le réunit à la Couronne en 1589.
La Devise de Limoges est « Dieus gart la vila e Sent Marsals la gent » (Dieu protège la ville et Saint-Martial son peuple).
Le Blason de Limoges : ''De gueules, au chef de Saint Martial de carnation, orné à l’antique d’or, ombré de sable, entre deux lettres gothiques d’or S et M ; au chef d’azur, chargé de trois fleurs de lis d’or.''
Louis VII de France, (1120-1180), roi des Francs de 1137 à 1180.
Henri II d'Angleterre (5 Mars 1133 au 6 Juillet 1189)
Aliénor d'Aquitaine (1122 ou 1124 à 1 Avril 1204)
Marie , comtesse de Champagne (1145 - 1198) est la fille aînée de Louis VII de France et de sa première épouse, Aliénor d'Aquitaine .
Geoffrey de Monmouth, Historia regum Britannie 1136 (latine)
Wace (1100- 1174) Roman de Brut , c. 1155 (anglo-normande)
Chrétien de Troyes (1135-1185)
Wolfram d'Eschenbach ( 1170-1220)
- La cathédrale d'Otrante, c. 1163 Mosaique : Rex Artirus
- ''Découverte'' de la tombe d'Arthur : 1190 (latin ) rapportée par Gerald of Wales
Le cycle de la Vulgate : la Queste del Saint Graal , la Mort (le roi) Artu , le Lancelot , le Estoire del Saint Graal , et la Vulgate Merlin c. 1215-1235 (Français)