yvain
Le Miroir – La réalité – Yvain
Il arrive à Elaine, profitant d'une matinée calme parisienne, de se rendre dans un café près de chez elle, avenue Victor-Hugo. Ce lieu est assez vaste et très fréquenté. Un jour, en rejoignant une banquette libre, elle passe près d'un miroir accroché au mur du café. Ce miroir est ancien, le verre dépoli, sa surface légèrement granuleuse avec un cadre usé en bois sculpté.
En regardant dans le miroir, Elaine voit non seulement son propre reflet, mais aussi les reflets des autres clients, et le mobilier. La scène est animée, et les silhouettes se mélangent et se distordent.
Elle reste un moment pour se rendre compte de la différence entre les ''formes'' reflétées et ce qu'elle voit. Quelle étrangeté que cette abstraction rendue par ce miroir !
Ce n'est que le lendemain, avec le désir de revoir le miroir qu'elle fait le lien avec ses réflexions du moment, sur les '' universaux '' dans l'antiquité.
Elle s'attarde un peu plus devant le cadre, et lui viennent toutes sortes de questions.
Après cette rêverie métaphysique, Elaine se tourne vers un jeune homme qui se tient près d'elle et observe le miroir.
- « Fascinant, n'est-ce pas ? » l'interroge t-il
- Oui... répond-elle, et : - que voyez-vous ?
- La même chose que vous, peut-être ?
- Pas sûr ! - J'y vois une métaphore des ''universaux ''. Et vous ?
- Effectivement... ! Non... je pensais à autre chose : un miroir magique....Voulez-vous parler de cette querelle médiévale entre celui qui voyait le cheval, mais ne voyait pas la ''chevalité'' dont lui parlait le philosophe ? J'ai souvenir de ce cours de philo ; mais je n'irai pas plus loin... Cela me semblait... sans intérêt... Pardon !
- Alors, que voyez-vous, reprend Elaine un peu fâchée.
- Si je m'en tiens à une métaphore : J'y verrai volontiers un miroir magique, qui me permettrait de représenter les solutions de quelques équations qui me harcèlent depuis un long moment.
- Des équations ? !
- Oh, je suis assistant à la fac., en mathématiques. Je m’appelle Yvain
Vous avez compris que ces deux là étaient faits pour se rencontrer. Yvain ne tarda pas à connaître - avec beaucoup plus de détails – l'histoire du héros à qui il devait son prénom.... ( A lire ici : LA LÉGENDE DES CHEVALIERS DE LA TABLE RONDE – RÉSUMÉ – 4/9 – YVAIN - Les légendes du Graal (over-blog.net) )
Pour l'heure, Elaine et Yvain, sont inspirés par le même objet, qui ne se contente pas d'être un témoin silencieux ; actif, il reflète une réalité mouvante et vivante.
Il nous questionne sur notre propre capacité à appréhender ce monde...
« Pensez-vous que vous avez accès au Monde, dans sa réalité ? » questionne Elaine. « Platon pensait que ce n'était pas le cas, et opposait au ''matériel'', un monde réel que l'on peut représenter par l'intelligible ( les idées) ou les ''Formes''.
- Je me souviens de l'histoire de la caverne, et du monde idéal, que seul a vu le philosophe, puis est revenu vers ceux qui sont restés enchaînés...
- Précisément, poursuit Elaine, je ne pense pas qu'il s'agisse d'un monde idéal, ou d'un ''autre monde '' ; il s'agit de la compréhension de notre monde au-delà de son apparence.
Platon nous enseigne que notre intelligence ( les idées) ne s'oriente pas d'elle-même vers ce qu'il importe de regarder. Il s'agit de nous libérer d'un point de vue partiel que nous avons spontanément sur les choses. Il n'y a donc pas deux mondes distincts.
- J'imaginais, que ce miroir, pouvait nous montrer le vrai monde, conclue Elaine.
Yvain ne cache pas son intérêt : - Génial ! Je n'étais pas loin de tes pensées quand je disais que j'y voyais l'allégorie de quelques équations. Je t'explique : je peux te tutoyer ?
- Si tu t'appelles vraiment Yvain, oui... ''Yvain'', c'est incroyable... ! Pardon ! Alors, oui tes équations... ?
- Depuis l'enfance, je crois, je cherche à comprendre « la vraie nature profonde de la Réalité ». Pour cela j'ai voulu faire des études de Physique ; puis il s'est avéré que j'étais plus attiré par les mathématiques.
Je me suis vite rendu compte que La Réalité n’est pas simplement ce que nous observons directement, mais qu'elle inclut des phénomènes dont on ne peut rendre compte qu'avec des théories ( à vérifier, bien-sûr..) et des équations.
On peut avec des équations mathématiques, modéliser des phénomènes physiques et prédire des comportements dans la nature.
- Je te suis en cela, répond Elaine : les théories mathématiques peuvent être de bons modèles de la réalité. En cela elles n'inventent pas la Réalité, elles n'en sont qu'un reflet, au même titre que nos sensations, l'art... La Réalité elle-même, pourrait s'apparenter au monde des idées de Platon.
- Voici ce que disait le bourbakiste Alexandre Grothendieck ( dans Récoltes et Semailles ), mathématicien qui fascine tous les matheux :
« La structure d’une chose n’est nullement une chose que nous puissions « inventer ». Nous pouvons seulement la mettre à jour patiemment, humblement en faire connaissance, la « découvrir ». (….) Ces structures ne nous ont nullement attendues pour être, et pour être exactement ce qu’elles sont ! Mais c’est pour exprimer, le plus fidèlement que nous le pouvons, ces choses que nous sommes en train de découvrir et de sonder, et cette structure réticente à se livrer, que nous essayons à tâtons, et par un langage encore balbutiant peut-être, à cerner. ».
LA LÉGENDE DES CHEVALIERS DE LA TABLE RONDE – RÉSUMÉ – 4/9 – YVAIN
A partir de la Table Ronde, point central de son pouvoir, Arthur envoie ses chevaliers partout dans le royaume pour y accomplir prouesses et exploits.
Leur mission est d’apporter la justice, l’ordre et la civilisation aux quatre coins de la Bretagne.
Pour cela, Gauvain, Yvain, Lancelot et les autres vont devoir affronter maléfices et sortilèges, géants et dragons, créatures monstrueuses, chevaliers félons et magiciennes, nains malfaisants, etc. Ils devront traverser des forêts sauvages et hantées, des châteaux merveilleux aux mille dangers, des lieux déserts susceptibles de les conduire aux frontières de l’Autre Monde et beaucoup d’autres épreuves. A travers toutes ces aventures, les chevaliers diffusent partout l’idéal de la Table Ronde et les valeurs chevaleresques au nom du roi Arthur. Ils contribuent ainsi à amener le progrès et la lumière de la civilisation dans toute la Bretagne.
Chacun des chevaliers a fait le serment solennel qui les relient tous les uns aux autres jusqu’à la mort : « Que jamais Dame, Damoiselle ou Homme ne viendrait demander aide à la cour sans l’obtenir, et que, si l’un des chevaliers présents disparaissait, les autres, tour à tour, se mettraient sans trêve à sa recherche, pendant un an et un jour ».
En parallèle de leurs prouesses, la plupart des chevaliers vivent également de belles histoires d’amour, souvent tourmentées. Conformément aux règles de l’amour courtois, les femmes qu’ils courtisent sont de noble naissance, toujours très belles, mais pas toujours disponibles. Ces idylles conjuguent de grands bonheurs et de terribles déceptions qui conduisent parfois les chevaliers aux limites de la folie.
Ainsi, Yvain ( le fils de Morgane et du roi Urien ) pour sa première aventure se dirige vers ce que l’on appelle la Fontaine Merveilleuse… Il suffit de verser de l’eau du bassin sur la pierre formant la fontaine et le tonnerre se fait entendre, les nuages noirs s’amoncellent juste au dessus du malheureux qui a provoqué cette tempête.
Plus aucun animal ne reste dans les parages car en plus du tonnerre, la pluie et la foudre envahissent la forêt. Celui qui arrive à laisser passer cette tempête magique sans avoir de dommages se rend compte alors que le bruit fracassant du tonnerre a réveillé le gardien de cette fontaine…. Vêtu de noir de la tête aux pieds, il s’avance vers Yvain l’épée sortie de son fourreau.
Le combat dure un long moment, chacun cherchant les faiblesses de l’autre.
Yvain se rend compte que plus le gardien s’éloignait de la fontaine, plus ses forces diminuent. Lorsqu’il comprit cela, le chevalier s’efforce d’éloigner le gardien petit à petit et finit par le transpercer de sa lame.
Yvain n’a pas à l’esprit à ce moment là, qu’il vient de tuer le gardien, et comme dans beaucoup de légendes, il doit prendre cette place devenue vacante. ….
Yvain tombe amoureux de la dame, maîtresse des lieux qui pleure son époux…. Avec la complicité de sa servante, il épouse la belle Laudine… Mais il n’est pas dans le destin d’un chevalier de mener une « vie bourgeoise » … Yvain repart pour d’autres combats : « Si vous voulez conserver mon amour et si vous tenez vraiment à moi, pensez à revenir bien vite, dans un an au plus tard, huit jours après la Saint-Jean. »
Hélas, comment un chevalier pourrait-il ne pas dévier son chemin lorsqu’on l’appelle au secours, par exemple trois cents pucelles prisonnières car il ne peut dans sa vaillance laisser quiconque dans la souffrance, mais le terme approche et il le dépasse… Yvain devient à moitié fou lorsque Laudine se détourne de lui.
Bien des aventures plus tard, parmi lesquelles un extraordinaire compagnonnage avec un lion, Yvain reviendra et vivra heureux avec sa belle.
Pour Lancelot, c’est pire encore car il a le malheur d’être amoureux de la reine elle-même. Il est donc toujours déchiré entre cette passion irrésistible pour Guenièvre et sa loyauté envers le roi. Quant à Gauvain, les choses sont plus simples pour lui car c’est un séducteur invétéré qui préfère conquérir une multitude de femmes plutôt que de s’attacher à une seule.
Toujours est-il que ces nombreuses intrigues amoureuses sont souvent le moteur d’extraordinaires aventures aux multiples rebondissements romanesques. Elles sont souvent le point de départ des quêtes entreprises par les chevaliers.
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LA FONTAINE MAGIQUE DE BARENTON, OU, LAUDINE ET YVAIN.
Dans son roman Le Chevalier au Lion, Chrétien de Troyes met en scène une fontaine sans nom, que les critiques et les historiens s’accordent pour identifier à la fontaine de Barenton dépeinte dans le Roman de Rou de Wace. Chrétien utilise la magie de la fontaine qui déclenche la pluie lorsque l’on verse de son eau sur le perron.
L’histoire d’Yvain, le héros du Chevalier au Lion, est ici sommairement racontée à travers le rôle que joue la fontaine.
Cette fontaine maléfique se trouve en forêt de Brocéliande, domaine dont la châtelaine est Laudine et dont Lunete est la fidèle suivante et la conseillère. Son mari, Esclados le Roux est un terrible chevalier qui surgit dès que quelqu’un verse l’eau qui met en péril la forêt et ses habitants.
Le roi Arthur réunit sa cour pour des festivités à Carduel, au pays de Galles. Calogrenant, un des chevaliers, fait le récit d’un revers qui lui est arrivé six ans auparavant à une fontaine dans la forêt de Brocéliande. Armé de pied en cap, il part chercher l’aventure :
Je trouvai un chemin à ma droite
au milieu d’une forêt épaisse.
C’était une voie très pénible,
pleine de ronces et d’épines.
Non sans douleur, ni sans peine,
je suivis ce chemin et ce sentier.
Pendant presque toute la journée
je chevauchais de la sorte ;
puis je finis par sortir de la forêt :
c’était en Brocéliande.
Vers 180-189 — Chrétien de Troyes (1176-1181).
Au détour d’un chemin, un rustre indique à Calogrenant une fontaine dont il ne reviendra pas sans quelque difficulté ni avant de lui avoir payé son tribut. (v. 371) Le rustre décrit à sa manière la fontaine qui bout, plus froide que du marbre, l’ombrage de l’arbre auquel est attaché un bassin de fer, le perron sans pareil, la chapelle, petite mais très belle. Si tu veux prendre de l’eau dans le bassin et la répandre sur le perron (v. 393-394), dit-il : tu verras alors se déchaîner une telle tempête (v. 395) que les arbres de la forêt seront mis en pièces et que toutes les bêtes, y compris les oiseaux, la quitteront. Enfin, il met en garde Calogrenant d’arriver à sortir vivant d’une telle épreuve, chance qu’aucun chevalier qui y soit allé, n’a connue.
Suivant le chemin indiqué par le rustre, Calogrenant découvre le pin, le plus beau de la terre, un perron d’émeraude, un bassin d’or… La vision qu’il en a est donc bien différente de celle du rustre. Ses yeux de chevalier ne voient pas un lieu d’épouvante, mais un lieu enchanteur qui l’émerveille :
Je vis pendu à l’arbre le bassin,
de l’or le plus fin qui ait jamais encore
été mis en vente sur quelque foire que ce soit.
Croyez-moi la fontaine
bouillait comme de l’eau chaude.
Le perron était fait d’une seule émeraude
percée comme un tonneau,
et dessous il y avait quatre rubis,
plus flamboyants et plus vermeils
que le soleil au matin
quand il paraît à l’orient.
Je vous assure que jamais, sciemment,
je ne vous mentirai d’un seul mot.
J’eus alors envie de voir la merveille
de la tempête et de l’orage,
ce dont je ne me tiens guère pour sage,
car je me serais bien volontiers repris,
si je l’avais pu, aussitôt que
j’eus arrosé la pierre creuse
avec l’eau du bassin.
Sans doute en versai-je trop, je le crains,
car alors je vis le ciel si perturbé
Que, de plus de quatorze points,
les éclairs me frappaient les yeux ;
et les nuages jetaient, pêle-mêle,
de la neige, de la pluie et de la grêle.
Il faisait un temps si mauvais et si violent
que je croyais bien que j’allais mourir
à cause de la foudre qui tombait autour de moi
et des arbres qui se brisaient.
Vers 417-446 — Chrétien de Troyes (1176-1181).
Yvain à la fontaine de Barenton ( Tableau de l’église de Tréhorenteuc)
Brusquement tout s’arrête : c’est le calme absolu, laissant place au chant des d’oiseaux rassemblés sur le pin. Puis, dans un fracas de galop, surgit un chevalier en armure, Esclados le Roux, le seigneur du lieu qui fonce sur lui et le met en garde :
car vous m’avez chassé de ma maison
avec la foudre et la pluie.
[…]
car vous m’avez livré un tel assaut
dans mon bois et dans mon château,
que rien n’eût pu me venir en aide,
hommes, armes, ou remparts.
Personne n’a été ici en sécurité,
dans quelque forteresse qui ait pu y exister,
qu’elle fût de pierre dure ou de bois.
Vers 502 et 506-512
Le combat engagé est violent et bref, laissant Calogrenant aplati au sol, humilié et vaincu. Esclados laisse cependant le chevalier s’en retourner à pied, couvert de honte.
Yvain, un des chevaliers d’Arthur est le cousin de Calogrenant. Le récit terminé, il ne peut laisser cette humiliation impunie et décide de se rendre à la fontaine, seul, à l’insu de tous, pour se venger de l’affront. Parvenu à la fontaine, comme Calogrenant, il asperge le perron afin de provoquer Esclados le Roux. Un terrible et très long combat a lieu entre les deux hommes. A la fin, monseigneur Yvain/fracasse le heaume du chevalier. (v. 860-861). Esclados blessé à mort, s’enfuit à toute bride jusqu’à son château, poursuivi par Yvain. Tous deux franchissent le pont-levis mais Yvain reste prisonnier entre deux herses. Lunete, la servante, assiste à la scène et décide de le secourir. Esclados meurt, laissant Laudine, son épouse, dans un profond chagrin. Lunete donne à Yvain un anneau qui le rend invisible. Il échappe aux barons qui cherchent l’intrus pour le mettre à mort.
Yvain découvre alors Laudine. Il délire sur sa beauté et en tombe amoureux. Lunete, La demoiselle, qui était rusée comme une Bretonne, (v. 1580) présente Yvain à Laudine et persuade la veuve de lui faire appel pour défendre la fontaine et son domaine. Alors qu’ils se parlent d’amour, elle ignore qu’il s’agit du meurtrier de son mari. Suivent les noces avec la bénédiction des barons. A son tour, Yvain devient le défenseur de la fontaine.
A la cour d’Arthur, personne ne sait où se trouve Yvain. Le roi qui avait entendu Calogrenant vanter la merveille de la fontaine décide de s’y rendre avec toute sa suite,le roi vint voir la merveille/de la fontaine et du perron (v. 2174-2175). Arrivé sur les lieux, Arthur verse un plein bassin d’eau sur le perron ce qui déclenche les foudres du ciel. Aussitôt, surgit le chevalier en armes. Aucun ne reconnaît Yvain sous son armure ; lui seul sait à qui il a à faire…
L’aventure manque à Yvain. Alors Laudine lui accorde d’aller courir les tournois avec ses anciens compagnons à condition qu’il s’engage à revenir au bout d’un an. Passé ce délai, elle considérera qu’il aura manqué à cet engagement. Yvain oubliera de tenir cette promesse faite à sa belle…
Répudié par Laudine, Yvain s’enfonce dans la forêt. Pris de folie, il vit un temps sous la protection d’un ermite. Sa rencontre avec trois demoiselles, dont l’une possède de quoi le guérir, lui permet de retrouver la raison et de reprendre son chemin. En forêt, Yvain prend la défense d’un lion aux prises avec un serpent… Chrétien se sert de cette symbolique du bien contre le mal pour montrer la voie que choisit Yvain. L’animal devient son compagnon dans les épreuves à venir pour défendre le bon droit. Yvain se fait appeler le « chevalier au lion ».
Quinze jours plus tard, le hasard veut qu’ils passent près de la fontaine. Yvain ressent une vive douleur d’avoir laissé passer l’année. Il se proclame mille fois malheureux et misérable. Alors qu’il s’en prend à lui-même, une voix féminine qui se lamente se fait entendre à l’intérieur de la chapelle proche de la fontaine ; Yvain ne le sait pas, mais Lunete y est retenue prisonnière…
D’autres épreuves attendent Yvain. En échange du mal qu’il a causé à Laudine, il cherche à faire le bien en luttant contre les mauvaises coutumes, en réglant des litiges et en réparant des injustices. C’est, croit-il, le prix qu’il doit payer pour se racheter. Yvain prend conscience qu’il ne peut continuer à vivre sans l’amour de Laudine. Il lui faut la revoir pour faire cesser sa souffrance. Encore faut-il qu’elle accepte de le rencontrer :
Voici ce qu’il envisage : il partira
de la cour tout seul et ira
guerroyer sa fontaine.
Là il fera tant gronder la foudre,
déchaîner les vents, et tomber la pluie
que, par force et par nécessité,
elle sera obligée de faire la paix avec lui
ou, sinon, il ne cessera jamais
de provoquer la fontaine
et continuera donc a déclencher pluie et vents.
Vers 6507-6516 — Chrétien de Troyes (1176-1181).
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Dame de la Fontaine (Lunete et Yvain (Owain) sont sur la gauche) |
En fait, Laudine n’a personne pour défendre son domaine contre un chevalier malveillant qui viendrait verser l’eau sur le perron. Yvain vient guerroyer la fontaine jusqu’à ce que la forêt entière dût s’effondrer dans le gouffre de l’enfer (v. 6529). Très inquiète, Laudine redoute que son château ne s’écroule d’un seul coup (v. 6531)…
De son côté, Lunete intervient auprès de Laudine pour qu’elle prenne à son service un chevalier capable d’assurer sa défense avant qu’il ne soit trop tard. Personne d’autre n’en étant capable, elle parvient non sans mal à décider Laudine à recevoir le « chevalier au lion ». Alors Lunete retrouve Yvain à la fontaine :
C’est que j’ai obtenu de ma dame,
pourvu qu’elle ne veuille pas se parjurer,
qu’elle sera votre femme, exactement comme elle l’était autrefois,
et vous son mari.Vers 6674 à 6677
Sources: Fontaine de Barenton