platon
La Réalité pour Platon, et au regard de la Science
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Confortée par ce grand mathématicien qu'est Grothendieck, Elaine a cœur à montrer la profondeur de pensée de notre ancien ''Platon'' :
Pour Platon, nous n'avons accès qu'à une représentation imparfaite de la réalité, des ''ombres''.
Par exemple, notre première expérience du cercle est imparfaite ( épaisseur du trait...) ; il nous est impossible de représenter un cercle parfait. "Seule une définition du cercle sera parfaite ". Pour Platon, seule l'idée ( la ''forme'' ) du cercle est parfaite. Et c'est avec ces outils que les mathématiques travaillent. Ces idées participent à notre compréhension et à la modélisation du monde, elles représentent notre connaissance rationnelle.
Ce qui est intéressant, c'est que Platon précise que '' l’essence des choses ne peut être saisie que par l’intellect, et non par les sens.'' On ne peut accéder à l'essence des choses que par la pensée rationnelle.
Pour aller plus loin, ajoute Elaine, Platon croit que l’âme humaine a déjà connaissance des formes parfaites avant de naître dans le monde sensible. La connaissance rationnelle est donc un processus de réminiscence, où l’âme se souvient des formes parfaites qu’elle a connues dans le monde intelligible.
- Pourquoi – se demande Yvain – parler de ''Formes'' ?
- Le mot grec que Platon emploie est “εἶδος” (eidos), qui signifie “forme” ou “image”. Platon choisit ce terme pour souligner la distinction entre le monde sensible, où tout est en perpétuel changement et imparfait, et le monde des Formes, qui est stable, parfait et accessible uniquement par l’intellect.
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Et le terme “μορφή” (morphē), se réfère à la forme physique ou apparente des objets que nous percevons avec nos sens.
Notre professeur nous prenait l'exemple de '' la table '' ( idée générale et idéale) et cette table ( singulière)... Je ne sais pas si ''la table '' ou ''le vase '' sont de bons objets pour questionner les formes idéales. Ce sont des objets technologiques, c'est à dire des créations humaines. Même le cercle , n'est en fait qu'un outil technologique de la pensée.
Je préférerais en rester à des principes abstraits universels, le Bien, la Justice, la Beauté.
- Allons plus loin :
Si la ''Forme '' est l'idée idéale, le modèle parfait ; '' l'essence '' (οὐσία, ousia) est la nature fondamentale .
Aristote nous aide pour en faire la distinction : l'essence est intégré dans l'objet, et ne fait pas partie du monde des idées. Il introduite la notion de ''Substance''.
Heidegger introduit pour l'Humain,le concept de '' Dasein '' pour décrire l'essence de l'être humain ( son existence temporelle, historique : '' l'être-là '')
Yvain se sent conquis par ce discours; d'autant que ses yeux ne peuvent quitter le visage doux et passionné d'Elaine....
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Yvain voudrait à son tour communier à cette représentation du monde. Il s'efforce de retrouver en physique, les définitions des concepts : '' Forme '', ''Essence '' et ''Substance''...
Le Forme peut faire référence à la structure géométrique d’un objet. L'Essence pourrait être rapprochée des propriétés fondamentales ( la masse, la charge...) et la Substance me fait penser à la matière constituante, ou à son état ( solide, liquide, gazeux) .
Au début de cette réflexion, nous reconnaissons que les physiciens n'utilisant que leurs observations, se limitent à ne comprendre que certains aspects des objets matériels. Ce qui ne satisferait peut-être pas, Platon...
Les physiciens identifient les propriétés fondamentales et les structures qui sous-tendent les phénomènes observables.
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A mon avis, en mathématiques, nous sommes plus proche de l'intuition de Platon.
Les mathématiques opèrent dans un domaine abstrait qui permet de développer des concepts et des théories indépendamment des limitations du monde observable. Ce qui n'empêche pas que ces concepts abstraits peuvent souvent être appliqués pour comprendre et modéliser des phénomènes réels.
En mathématiques, les concepts de “forme”, “essence” et “substance” peuvent être interprétés de manière abstraite et théorique.
La Forme peut se référer à la structure géométrique ou topologique d’un objet. Par exemple, la forme d’une courbe, d’une surface ou d’un solide est étudiée en géométrie et en topologie. Les cercles, les ellipses, et les paraboles, sont des exemples de formes mathématiques.
L’Essence en mathématiques peut être vue comme les propriétés fondamentales ou les caractéristiques intrinsèques d’un objet mathématique. Par exemple, l’essence d’un nombre premier est qu’il n’a que deux diviseurs : 1 et lui-même. Axiomes ou théorèmes quant aux groupes, aux anneaux, et aux corps, capturent l’essence de ces objets.
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La Substance en mathématiques peut être interprétée comme les éléments constitutifs d’une structure mathématique. Par exemple, les points, les lignes et les plans sont les substances de la géométrie euclidienne. En algèbre, les éléments d’un ensemble, comme les nombres réels ou complexes, peuvent être considérés comme la substance des structures algébriques.
Je vois avec l'exemple des mathématiques, que nous définissons un monde des idées, par sa structure Forme-Essence-Substance.... et finalement nous n'en restons pas comme tu le souhaitais, semble t-il Elaine, aux principes abstraits universels, le Bien, la Justice, la Beauté....
Peut-être, penses-tu que nous perdons en profondeur philosophique...
Pas du tout... Au contraire, tes exemples mathématiques donnent '' Forme '' à ce que je pense. Ainsi, si je procède par analogie... Par exemple : - la forme d’une statue est donnée par l'artiste qui transforme un bloc de marbre en une œuvre avec son identité propre. Et pour Thomas d'Aquin, l'âme serait la forme du corps humain.
Les artistes, au Moyen-âge, utilisaient des ''formes'' géométriques et symboliques pour représenter des concepts théologiques complexes, comme la divinité et la sainteté.
De Platon, et Aristote pour aborder le Moyen-âge
Lancelot avait profité, pendant l'année de propédeutique d'Elaine, de revoir avec elle, les bases de la réflexion en philosophie sous les hospices de Platon et d'Aristote. L'essentiel pour aborder le ''Moyen-âge'' !
De la Grèce nous connaissons la mythologie ; Platon, philosophe, oui... Mais que pensait-il des dieux, 4 siècles avant J.C, se demandait Elaine ?
- Lancelot répond, qu'il lui semble que Platon considérait les dieux comme des allégories écrites par les poètes … Il écrit aussi dans Phèdre, 246 c-d : « nous forgeons, sans voir et sans connaître la divinité, une idée de celle-ci; c’est un être vivant immortel, pourvu d’une âme et d’un corps, naturellement unis pour toujours »
Admettons que si aujourd'hui la question du Divin reste importante ; elle l'a toujours été et le restera sans-doute toujours ! A l'origine, il y a la question sur ce qui est ''Bien'' et ce qui est ''Mal'' et la confrontation avec la Mort.
- Cherchons les emplois du mot ''théios'', chez Platon ?
- Le contexte de son emploi est religieux, mais il signifie aussi l'excellence, la perfection, ainsi que ce qui inspire le poète... On dirait aujourd'hui c'est le spirituel ( ainsi dans le Phédon), et même l'immortel ( dans le Banquet). On retient en général que le concept de '' Theios '' est appliqué aux Idées.
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- Finalement, pour Platon, la question du Divin est d'ordre intellectuel, avant d'être religieux.
- Je lis dans La République, livre VI, 500 : « C’est ainsi que le philosophe qui vit en présence de ce qui est divin et harmonieux devient lui-même divin et harmonieux, autant qu’il est possible à un être humain de l’être. » ( )
- Pour en revenir à ta question sur la croyance aux dieux... Sa quête n'est pas : ce qui est réel, mais ce qui est Vrai ; plus exactement est réel ce qui est vrai.
Rappelle toi l'allégorie de la Caverne ( La République, livre VII, 514..): le monde sensible n'est pas le réel.
- Et chez Aristote ?
- C'est sensiblement la même chose... Pour Aristote ( disciple de Platon), le divin ( theios) est beaucoup plus large que le substantif theos : Dieu. Qualifier les astres de divins, ne signifie pas qu'Aristote considéraient les astres comme des dieux... Dans Métaphysiques, L, 7, 1072 b 29, il écrit : « Nous disons, d’ailleurs, que le dieu est un vivant éternel parfait »
- Un autre mot existe chez les grecs, c'est mûthos, Aristote l'emploie pour désigner un récit sacré, c'est-à-dire, qui met en scène des dieux, des héros... Mais un récit '' invérifiable '' ! Aristote s'en sert pour attirer l'attention, et en dégager des vérités. Un amateur de mythes est un amateur de sagesse, dit-il ; et il ne craint pas de se moquer de récits qui font consommer aux dieux du nectar et de l'ambroisie : je lis dans ( Métaph, II, 4, 1000a 8-18, ) : « Si c'est en vue de plaisir, en effet, que les immortels touchent à ces breuvages, le nectar et l'ambroisie ne sont en rien causes de leur existence; et si c'est en vue de maintenir leur être, comment seraient-ils éternels, tout en ayant besoin de nourriture ? »
Aristote le philosophe de la ''nature'' se représente le cosmos comme une intelligence ( = nature) à l’œuvre en toute chose. Tout tient admirablement à tout. Le Dieu d'Aristote ( noêsis noêseôs = la pensée de la pensée) est totalement transcendant, hors du monde. Cependant, la perfection divine s'exprime dans l'ordre du monde...
Platon, lui, voit le monde ( la totalité du monde) , comme « l'image de quelque chose » ( eikona tinos ).
En effet, pour lui, nos sens ne nous donnent pas accès au réel, mais à une ''image'' de celui-ci : le monde sensible. Nous voyons ce qui est beau, mais ce n'est pas le Beau.
Le lieu des idées ( des Formes) est au-delà de notre monde.
Dans '' Le Timée '' ( à lire !) Platon tente de trouver un discours adapté au ''Kosmos'' . Notre discours ne pourra n'être que semblable, et non pas identique, au Monde. Pour dire le Monde , il faut être philosophe ! Parce que le philosophe – s'il est en harmonie totale avec l'ordre du lieu des Formes – le saisit par la pensée. « pour l’âme, apprendre, c’est se remémorer les choses dont elle avait auparavant la connaissance » ! En effet, l'âme est immortelle... ( on en reparlera..)
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Au Moyen-âge, ce que l'on connaît, c'est le néoplatonisme, c'est à dire une philosophie qui s'est construite après Platon confrontée aux trois religions, judaïsme, christianisme et islam. Certaines orientations furent tracées par Plotin, Origène ( IIIe s.), St Augustin, Boèce, Denis l’Aréopagite...
Pour ce qui est d'Aristote, retenons que c'est d'abord l'homme de l'empirisme, de la philosophie de la nature... et quelque fois aussi de la politique.
Oublié, Aristote est redécouvert en Occident en se frottant à la doctrine de St-Augustin, et du néoplatonisme.
En effet, Thomas d'Aquin ( 1225-1274) rompt avec la tradition, et réfléchit au -travers de ce que les ''païens'' ( les arabes) nous apportent, la philosophie d'Aristote. Il en fait même, ''la servante d'une théologie chrétienne'' !