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Denoël – Valéry
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En avril 1945 ; alors que la victoire engendre l'épuration et que Jeanne L. cache Robert Denoël dans un petit appartement qu'elle loue; elle annonce à Valéry, son projet de mariage avec Denoël. Nous savons que Valéry est fou amoureux d'elle, alors qu'elle est plus jeune de 32 années.
« Ma Bien-Aimée, / Un jour si beau / Le malheur vint / D’entre tes lèvres… / (…) / Ma bien aimée / Ta bouche tendre / Fit un poison / De tout mon sang… / (…) / Ma bien aimée / Trois mots suffirent : / Ce fut pour dire : / Tu dois mourir…
La vie exige / Qu’un autre obtienne / Celle qui fut / La seule Tienne ; (…) »
L’absence habite l’ombre où je n’attends plus rien / Que l’ample effacement des choses par le mien. »
Trahi, de plus malade, Paul Valéry meurt le 20 juillet. Son enterrement a lieu le jour de l'ouverture du procès du Maréchal Pétain.
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Jeanne L. connaît Denoël depuis 1943, alors qu'elle prend - à la mort de son père - la tête des éditions d'ouvrages de droit ( les Editions Domat-Montchrestien ). Denoël ( 1902-1945) est fasciné, exalté par son amante ; il la seconde dans ses affaires.
Denoël qui a édité Rebatel, Céline, mais aussi Aragon et Elsa Triolet, est isolé par ses confrères; et plus gravement par ses auteurs sur qui, il comptait... Seule, Jeanne L. se démène pour le sortir d'embarras.
Avec le procès de Pétain ; on se contente de refaire l'histoire, celle de la IIIe république et de l'armistice. Blum évoque l'armistice comme « un énorme abus de confiance moral » ; mais surtout, on accuse le Maréchal d'intelligence avec l'ennemi. On parle de la traque et de la cruauté envers les résistants, et trop peu de la déportation des juifs.
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Le 15 août. La sentence de mort rendue sera commuée en réclusion criminelle à perpétuité. Transféré à l'Ile d'Yeu, Pétain y mourra le 23 juillet 1951.
Août 1944 : Valéry - La résistance à Fléchigné.
![]() Paul Valéry et Jeanne L. (Jean Voilier) |
Le 1er août 1944, Anne-Laure de Sallembier et son fils, sont invités dans les jardins de la demeure de Jeanne L., 11 rue de l'Assomption, pour entendre la lecture d'une pièce que Jeanne appelle '' le troisième Faust'' , et que l'auteur, Paul Valéry, nomme ''Lust'' ( idéal en allemand, idéal féminin) et qui est tout à la gloire de sa maîtresse. Les invités échangent dans le jardin; beaucoup de gens ''bien'', comme Duhamel dont on dit qu'il « tient en respect les forces maléfiques » - Anne-Laure apprécie beaucoup sa femme, Blanche Albane célèbre actrice dans les années 1920 - Mauriac est absent. Duhamel est de formation scientifique, et Lancelot profite également de la présence de Louis de Broglie pour l'interroger sur la genèse de la mécanique ondulatoire.
Lancelot a retenu, en particulier, que Louis de Broglie a profité de l'analogie entre le principe de moindre action en mécanique et le principe de Fermat en optique pour formuler la mécanique ondulatoire. Ce serait intéressant d'en reparler, car cela met en valeur, - pense Lancelot - à la place d'un langage mathématique sous forme d'équations différentielles, un système de formulations ''élégantes'' exploitables en science et en philosophie. Paul Valéry ne pourrait qu'apprécier...
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Si chacun, ici, reconnaît Jeanne L. dans Lust, et peut-être Valéry dans Faust ; que penser de Robert Denoël, présent également et nouvel amant de cette femme ambitieuse ? Lust pourrait bien finalement, tomber dans les bras du ''disciple''.
Faust - transporté à l'époque moderne - est l'intellectuel qui se voudrait le maître de sa secrétaire, et qui se venge ; elle qui - si elle ''n'est pas là pour comprendre'' - interroge le sens du message, le commente, ironise... Lust répond avec son rire, son corps. C'est parole contre parole.
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Deux personnages interviennent, Méphisto ( ridicule, avec un esprit médiocre, ordinaire) et le disciple auquel Faust se confie : « revivre, ce n'est plus vivre ».
Mais, Faust découvre un moment de plénitude : « Je respire ; et rien de plus, car il n’y a rien de plus. Je respire et je vois (...). Mais ce qu’il y a peut-être de plus présent dans la présence, c’est ceci : je touche (...) » Et, Lust devient '' l'autre '' : « Viens faire un tour dans le jardin », murmure Faust » ( le jardin, la femme, le fruit, l'arbre, le serpent...).
Lust tient tête à Méphisto et se dérobe (?) à l’amour banal du Disciple.
Cette pièce inachevée, se termine ici par un Faust qui meurt d'amour. « II dépend de ton coeur que je vive ou je meure / Tu le sais à présent, si tu doutas jamais / Que je puisse mourir par celle que j'aimais. »
Après qu'une jeune femme, accusée de '' collaboration horizontale '' avec l'ennemi, ait été molestée; Geneviève a été dénoncée et inquiétée pour avoir eu une relation avec un officier allemand.
Au mois d'août 1944, Lancelot et Geneviève enceinte, ont rejoint Fléchigné. Avec l'accord d'Anne-Laure, ils ont pris la décision d'organiser très rapidement leur mariage. Il eut lieu dans l'intimité.
Ils assistent de loin à la libération de la Normandie …
Il a fallu attendre, après le 6 juin, que l'armée américaine du général Patton perce les lignes allemandes à Avranches. Le 3 août 1944, elle libère Rennes. Ensuite partagée en trois, un corps d'armée reçoit l'ordre d'établir des têtes de ponts à Mayenne, Laval pour prendre les Allemands à revers.
Le 5 août, les américains sont à Mayenne, qu'ils libèrent.
De plus près, la comtesse de Sallembier, son fils et leurs employés soutiennent l'intendance du maquis Fleury.
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Tout se précipite alors, les soldats allemands sont harcelés. Trois d'entre eux sont tués route d’Izé à Bais en début d’après-midi ; en représailles, les Allemands encerclèrent dans la nuit le village de l’Aubrière situé à 500 mètres de Bais. Le 5 août, dans une ferme appartenant à un cousin de notre famille, Albert Vétillard, lui et quatre autres personnes sont désignés comme otages. Alignés, battus et fouillés, ils sont froidement abattus.
Le 6 août, à proximité de Fléchigné, des résistants du groupe Fleury tendent une embuscade sur la route au lieu-dit la Nivelaie, en tirant un fil de fer en travers de la route. Une moto ennemie arrive et heurte le fil de fer. Le conducteur chute, se relève et essuie les tirs des maquisards. Après avoir fait demi-tour, il revient accompagné d'une automitrailleuse, qui oblige les résistants à décrocher, après un cours mais violent engagement au cours duquel Edouard Lemée est tué.
Le 12 août au matin, Alençon est libérée par la 2e Division Blindée française du Général Philippe Leclerc de Hauteclocque.
De retour d'une promenade aux Tuileries, le 11 août 1944, Drieu la Rochelle a tenté de se suicider. Il travaillait - avait-il dit - sur une pièce concernant Judas. Il s'interrogeait sur le rôle que le traître devait maintenir pour que les choses s'accomplissent. Judas nécessaire, mais Judas méprisé. Pour Drieu, une des valeurs supérieure qui légitimerait sa trahison, serait la dimension européenne du patriotisme nouveau. Drieu est un précurseur, et son suicide semble pour les jeunes générations, une réponse à cette phrase qui ouvre l'essai de Camus '' Le Mythe de Sisiphe '' : « Il n’y a qu’un problème philosophique vraiment sérieux : c’est le suicide ? »
Découvert par sa femme de ménage, c'est Colette Jéramec ( sa première femme) qui l'a conduit à l'hôpital américain.
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Quelques semaines auparavant, Lancelot, avait noté quelques idées de sa conversation. Il se disait vexé « de l'incapacité du fascisme, de l'incapacité allemande, de l'incapacité européenne. » Il parlait souvent de la mort, il avait commencé à vivre ''l'heure de la mort''. Elle lui devenait « merveilleusement, délicieusement familière. »
De sa difficulté de croire en Dieu, il disait : « Impossible d'imaginer l'infini créant le fini... Pourquoi le parfait rêverait-il de l'imparfait ? Pourtant, c'est l'explication la moins impossible. Mais l'Infini n'a pas besoin du fini pour se concevoir ; il n'a pas à se concevoir. »
L'idée de la survie de l'âme individuelle lui paraissait, enfin, lui paraît ( il n'est pas mort...), vulgaire. Se confronter à la mort, volontairement ou non, ne consiste pas à s'interroger sur la question de perdre ou sauver son âme : « Ce que je sens de spirituel en moi, d'immortel, d'inépuisable, c'est justement ce qui n'est point particulier. J'ai toujours eu le sentiment, dans mes moments de plénitude, de lucidité, que ce qui compte pour moi, en moi, c'est ce qui n'est pas moi, c'est ce qui en moi participe à quelque chose d'autre que moi. »
Si la rivalité entre Giraud et De Gaulle tourne à l'avantage de De Gaulle ; beaucoup s'inquiètent de la volonté des communistes de s'imposer dans la résistance pour prendre le pouvoir. Les communistes ne souhaitent pas seulement la libération du territoire ; mais aussi le pouvoir de conduire le peuple vers une idéologie, elle-même totalisante ; ainsi ce tract, dans lequel le PC se dit être « le parti qui, guidé par le marxisme-léninisme et par l'enseignement de Staline, a su dégager ce que représente la nation comme facteur de libération humaine. »
La nouvelle du succès du débarquement de Provence, le 15 août, a déclenché l'insurrection à Paris.
1942 – Valéry – L'analogie et la science.
Anne-Laure de Sallembier et son fils, sont conviés à une après-midi chez les Valéry, au 40 rue de Villejust.
Sur une table près de l'entrée, plusieurs paquets qui contiennent des ouvrages, que des lectrices en particulier, ont demandé au maître de leur dédicacer. Sur l'un, Anne-Laure reconnaît le nom de Hélène Berr, cette jeune fille qu'elle a reçue pour un dossier que lui a soumis le service social d'aide aux émigrants ; et qu'elle a défendu auprès de l'administration allemande.
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Lancelot observe l'illustre écrivain vieillissant épris d'une femme beaucoup plus jeune, et qui lui rend la poésie de sa jeunesse. Gide s'était plaint à lui de cette relation qui commença en 1938, alors qu'il avait 67ans et elle, 35ans. ( 1938 – André Gide - Les légendes du Graal (over-blog.net) )
Cette femme, Lancelot la connaît bien, Jeanne L. que lui-même - alors étudiant comme elle - avait aimé. - 1921 – Lancelot– Jeanne L. - Les légendes du Graal (over-blog.net) - 1921 – André Gide. - Les légendes du Graal (over-blog.net) -
Mais qu'a t-elle de commun - cette Jeanne passionnée de littérature - avec Jean Voilier plus attachée aujourd'hui aux hommes influents qu'à leurs écrits ? Avec Frondaie, elle devient une femme du monde, directrice de théâtre, et commence à publier sous le nom de Jean Voilier.
Anne-Laure de Sallembier admire Paul Valéry (1871-1945), non pour son charme et ses yeux « eau bleue et verte, regard marin », mais pour la finesse de sa pensée. S'il est un badineur impénitent ; il est surtout le poète qui écrit en vers, non pour embrumer son propos, mais pour le clarifier.
En 1941, Vichy a destitué Valéry de son poste d'administrateur au Centre Universitaire méditerranéen de Nice, en représailles de son discours - en sa qualité de secrétaire de l'Académie française - et éloge funèbre du « juif Henri Bergson ».
Valéry, grand consommateur de tabac et de café, travaille le matin et s'adonne aux mondanités en soirée. Lancelot a remarqué son goût pour les sciences, et les mathématiques en particulier.
![]() L’homme et le macrocosme planche tirée du De utriusque cosmi maioris et minoris historia de Robert Fludd (1619) |
Lancelot reprend une phrase des ''Regards sur le monde actuel'' de 1931 : « Les événements sont l’écume des choses. Mais c’est la mer qui m’intéresse ». En effet, commente t-il : Nous vivons chaque instant ce décalage entre l’événement, l'accident, le discontinu associé à ce qui est éphémère et l'unité, le continu associé à la permanence. Ainsi en physique, Einstein nous propose au niveau macroscopique, à une échelle interstellaire la figure ondulée de l'espace temps, à l'image d'une mer agitée vue de haut... Alors qu'en physique quantique, et au niveau microscopique, telle l'écume de cette mer agitée, la science nous propose la turbulence des particules, un univers fragmenté, discontinu.
Valéry s'étonne que l'on tienne le plus souvent la science en opposition de la poésie ; alors que la représentation scientifique ne peut se passer de recourir à l'analogie. De même, sans la religion, notre cerveau n'aurait pas été habitué « à s'écarter de l'apparence immédiate et constante qui lui définit la réalité. » ( Analecta 1935 )
L'analogie ouvre un espace de pensée, c'est ce qui permet à Léonard de Vinci de percevoir les forces invisibles à l’œuvre dans la nature.
Ainsi vers 1900, c’est la thermodynamique qui a permis d'offrir des modèles à l'aide de cycles régis par les lois de la conservation de l’énergie et de l’entropie.
Faraday - avec la notion de champ - imaginait « un système de lignes unissant tous les corps, traversant, remplissant tout l’espace pour expliquer les phénomènes électriques et même la gravitation […] Faraday voyait par les yeux de son esprit des lignes de force traversant tout l’espace où les mathématiciens voyaient des centres de force s’attirant à distance ; Faraday voyait un milieu où ils ne voyaient que la distance. » ( Paul Valéry, Introduction à la méthode de Léonard de Vinci [1894] )
Après la Grande Guerre, le Monde, les salons... 1
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Lancelot, qui a bénéficié pendant quatre années du préceptorat de l'abbé Degoué ; craint pour cette première année universitaire d'être distancé ; aussi est-ce avec application et assiduité et recherchant l'attention de ses professeurs, qu'il va somme toute, avancer vite, avec méthode et, au final, accomplir brillamment son cursus jusqu’à la licence...
A son avantage, il profite de bonnes conditions matérielles ; avec un grand appartement et une gouvernante à ses soins, qui ne manque pas d'effectuer son rapport régulier à sa mère ; elle le rejoint de temps à autre... Il se rend, régulièrement, au ministère des armées, pour rendre compte de ses études, et se préparer au concours de rédacteur...
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Seule ombre, dans cette vie studieuse, son amie Jeanne, qui disparaît de longs jours, sans donner de nouvelle, puis revient avec une envie précise, pour laquelle elle sait se montrer très convaincante afin d'entraîner le jeune homme avec elle... En général, il s'agit de se mettre sur la piste d'un écrivain, et s'introduire dans ce monde réservé à la grande bourgeoisie, et aux artiste renommés...
Anne-Laure de Sallembier, voulut s'informer de la demoiselle, sujet de cette amourette, et les surprenant tous deux ; les emmène un après-midi au salon de thé Angélina, près des Tuileries goûter un chocolat chaud... Son idée, qu'elle partage bien vite à son fils ; est que la demoiselle l'utilise pour pénétrer le monde. Jeanne serait certes, une jeune et jolie jeune fille intelligente; mais, elle déconcerte la comtesse de Sallembier par son ambition qui lui semble démesurée et pour le moins, peu adaptée, pour une jeune étudiante dépourvue de fortune...
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Jeanne parle très peu de ses parents, encore moins de sa jeunesse ; mais se montre prolixe pour se projeter dans ses aspirations; comme celle d'envisager reprendre les affaires de son père et développer sa maison d'édition ; ou devenir journaliste et écrivain comme Colette, ou une grande avocate, métier peu féminin, de l'avis de la comtesse...
A Paris, et avec son mari, La Comtesse de Sallembier avait fréquenté les salons ''orléanistes''. Sallembier était proche du duc de Broglie (1821-1901), et de son fils Victor de Broglie (1846-1906). A Paris, ils ont retrouvé Albert de Mun, légitimiste et social chrétien... Malheureusement, celui-ci meurt en 1914... Anne-Laure a souhaité être présente, avec son fils, à une soirée en son honneur, le samedi 24 janvier 1920. Elle présente Lancelot au général Édouard de Castelnau, conférencier, qui continue à porter le message d'Albert de Mun, celui d'une droite sociale...
Albert de Mun, a pour cousine, Élisabeth de Gramont, duchesse de Clermont-Tonnerre. Anne-Laure s'était liée à Élisabeth de Gramont, du même âge qu'elle, et s'en est éloignée après la guerre... C'était peut-être bien par son entremise qu'elle fréquentait le cercle littéraire du '' Mercure de France '', et surtout qu'elle a rencontré Remy de Gourmont, et l'a visité semble t-il assez souvent : rencontres surréalistes ! ( enfin, disons ''symbolistes''...), jusqu'à sa mort en 1915...
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Les femmes du monde, même si elles ne revendiquent pas la notoriété des hommes, ne sont pas sans influence, et sans talent ...
Anne-Laure de Sallembier a repris dans ses carnets, beaucoup de ces apports féminins...
Ainsi le début de ce poème de la baronne de Brimont: " Ma pensée est un cygne harmonieux et sage/ qui glisse lentement aux rivages d’ennui /sur les ondes sans fond du rêve, du mirage, /de l’écho, du brouillard, de l’ombre, de la nuit... (...) « Renoncez, beau cygne chimérique, (...) nul (...), nulle (...) ne vous accueilleront en des havres certains." qui exprime peut-être le peu de cas porté à ces pensées de femme... Pourtant quelqu'un comme Gabriel-Louis Pringué, qui ''croit au monde '' reconnaît le grand esprit, et voit, en quelques-unes abondamment titrées, de ''profonds philosophes''...
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Ainsi, de Mme Manœuvrier-Duquesne « La nature est un grand livre ouvert sur lequel chacun se penche mais qui est rédigé en caractères secrets. » Ou bien ceci : « Le souvenir erre souriant parmi les deuils dans cette union de la vie et de la mort qui accompagne nos pas. » Ou encore : « L'amour est la seule richesse qui ait cours à la fois dans le temps et dans l'éternité. »
D'Élisabeth de Gramont: « On ne comprend vraiment la vie qu'au moment de la quitter. » « En général, on n'aime jamais qu'à contretemps. » « L'expérience est un fruit que l'on ne cueille que mûri et inutilisable. »
Imaginons ce genre de phrase, dite dans un diner, et essayons de répondre avec autant d'esprit et de répartie... La comtesse de Durfort, continue: « Vivons au jour le jour, chaque heure est une voyageuse qui vient timidement à nous. Recevons-la avec des brassées de rose et des sourires. Cela sera mieux pour elle et pour nous. »
Tout ceci est à prendre avec beaucoup d'esprit... et d'humour.
La princesse de Wagram, la tante d'Elisabeth de Gramont, passait pour savante, elle répondait: " Je suis peut-être pédante, mais mon instruction me le permet." Elle élevait souvent la discussion à des hauteurs que l'on pouvait trouver incommodant, le père d'Elisabeth se disputait alors avec elle en la traitant d'étudiante d'Heidelberg...
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Paul Valéry est un grand adepte des salons privés ; on l’aperçoit chez Mme Aurel et chez Misia Sert, chez Marie Scheikevitch, Anna de Noailles, Marie-Louise Bousquet et Boni de castellane, chez la Baronne de Brimont, la comtesse de Béhague, les Duchesses de Clermont-Tonnerre ou de la Rochefoucauld, la Princesse Edmond de Polignac....
Paul Valéry, donc assure que « Certains propos échangés autour d'une table de dîner ou de thé instruisent et murissent un homme bien plus que la lecture de cent volumes. En quel lieu de l'univers se peuvent donc rencontrer le politique, le financier, le diplomate, l'homme d'église, l'homme d'esprit, l'homme de club, l'homme de lettres, si ce n'est sur le bord d'une tasse et à l'occasion de petits gâteaux. » ( Frédéric Lefèvre, Entretiens avec Paul Valéry (1926))
Anne-Laure de Sallembier, en effet, se souvient d'un certain Paul Valéry, dont on parle beaucoup en ce moment... : « un hyper-nerveux, on fait état de ses yeux saillants, comme de bourrache éblouie, de sa diction chantante, légèrement zézayante, et de son extraordinaire faculté de résoudre n'importe quel problème. », comme l'a très bien rapporté alors Anna de Noailles.