« Indignez-vous ! » de Stéphane Hessel.
Voilà un sujet, qui à mon avis, ne démérite pas d’être présenté dans le contexte pédagogique…
Cet article est ‘engagé ‘, mais il est ‘laïque’, car il repose sur des valeurs commune à notre cinquième république. Et, s’il devenait contestable pour un enseignement porté devant des élèves… Ce serait, pour moi, un signe supplémentaire - d’une vérité d’aujourd’hui , que cet appel à « l’indignation » … !
« Indignez-vous ! » de Stéphane Hessel.
N’a t-on pas envie à 93ans, de dire des choses essentielles ? Stéphane Hessel, qui a vécu l’indignation des résistants face au fascisme, nous alerte sur les valeurs qui l’ont porté à vivre cette résistance, et qui sont aujourd’hui’ sournoisement bafouées ! Ce programme politique était alors porté par un ensemble de gens qui étaient parfois à des antipodes politiques, cependant – ce devait être le bon sens ! –chacun s’y retrouvait :
- La sécurité sociale : « visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail. »
- « Le retour à la nation des grands moyens de production.. fruit du travail commun, des sources d’énergie, …des compagnies d’assurance et des grandes banques. »
- « l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie. »
- « le juste partage des richesses créées par le monde du travail doit primer sur le pouvoir de l’argent ». La résistance propose « une organisation rationnelle de l’économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l’intérêt général et affranchie de la dictature professionnelle instaurée à l’image des états fascistes », et le gouvernement provisoire de la République s’en fait le relais ( P10)
- « Une presse indépendante »,
- « La possibilité effective pour tous les enfants de bénéficier de l’instruction la plus développée »
- Etc ..
Bien sûr, en 2010, nous avons les moyens technologiques, pour aller encore au-delà et développer notre réflexion à la mondialisation, et au bénéfice de la planète.. ! Malheureusement : terrible régression… ! Nous avons abandonné les fondamentaux de cette république, et nous sommes peut-être en train d’inventer un ‘nouveau fascisme’, qui - plus sournois -, semble envahir nos comportements …. ?
Stéphane Hessel, nous interroge :
- « Comment l’Etat peut-il manquer aujourd’hui de l’argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la Libération. » ?
- Que proposons-nous à notre jeunesse autre que « la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. » ?
- Et face à ces défis :
o - L’écart qui ne cesse de croitre entre les pauvres et les riches… ?
o - Les droits de l’homme : Aujourd’hui, lisons la DUDH et les articles : 15 ( la nationalité ), 22 ( sécurité sociale ) ?
o - L’état de la planète. ?
« la pensée productiviste, portée par l’occident, a entraîné le monde dans une crise dont il faut sortir par une rupture radicale avec la fuite en avant du ‘ toujours plus ‘, dans le domaine financier mais aussi dans le domaine des sciences et des techniques. Il est grand temps que le souci d’éthique, de justice, d’équilibre durable devienne prévalent. »
Stéphane Hessel s’adresse aux ‘jeunes’ :
- « La pire des attitudes est l’indifférence, dire ‘je n’y peux rien, je me débrouille ‘, en vous comportant ainsi, vous perdez l’une des composantes essentielles qui fait l’humain. » S.H.
- « La non-violence, le chemin que nous devons apprendre à suivre »
« .. la violence tourne le dos à l’espoir. Il faut lui préférer l’espérance, l’espérance de la non-violence. (…) C’est pourquoi il ne faut pas laisser s’accumuler trop de haine »
- Stéphane Hessel, appelle les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l’héritage de la Resistance et ses idéaux … « Nous leur disons : « Prenez le relais, indignez-vous ! »
« Je vous souhaite à tous, à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation. C’est précieux."
Transmission et pédagogie… avec Ph. Meirieu
En ce XXIème siècle, la question du ‘ sujet ‘ est au cœur de la réflexion pédagogique.
Le sujet est en péril., en effet la modernité promeut l’individu et met le sujet en péril… Au travers de la relation adulte-enfant, il nous apparaît clairement que nous sommes tous manipulés par l’appel du « capitalisme de la pulsion »… Cette immédiateté, ce besoin de satisfaction immédiate, mettent le sujet en péril… Enseignant, nous sommes contraints de forcer l’accès à la pensée à reconstruire. Un enfant est un corps humain ‘connecté’- en hyper activité permanente - où la pensée n’a plus le temps de se développer … Nous sommes plongés dans un capitalisme pulsionnel en évolution … A l’enfant, nous disons : Ton caprice fait la loi ! ( et il fait marcher le commerce ! )
Il faudrait passer de la pulsion au désir.. Il faudrait passer de la suractivité à la pensée..
Après une pulsion , nous revenons à l’encéphalogramme plat ; alors que le désir, ne l’abolit pas, mais l’agrandit … L’enseignant devrait être attaché à cette exigence : le désir d’apprendre …
Placer le désir au cœur du travail pédagogique, c’est placer le sujet au cœur du projet pédagogique ..
Qui peut nous dire le ‘ Bien ‘. ?
Cette question, que notre rèpublique laïque, affirme aujourd’hui non résolue, est au cœur de la démocratie ; - elle la structure, la rend précaire, donc précieuse …
C’était facile d’éduquer un enfant, quand il y avait un ‘ catéchisme ‘ qui nous disait : où et comment se trouve le bien , et règle le comportement individuel … A partir du moment, où nous ne déclarons plus légitime à quiconque, à quelque idéologie que ce soit, le droit à légiférer sur nos vies … Nous en sommes rendus à devoir le décider nous-mêmes … Quelle radicale étrangeté, par rapport à ce que nous avons vécu .. ! Nous ne pouvons même plus nous révolter contre ce pouvoir, puisque que, nous ne le reconnaissons plus … ( Et tant mieux … ! - pour ce qui était de l’emprise sociale ( pouvoir ) du religieux ! )
La montée de l’individualisme social , est le corollaire de l’effondrement du religieux… Il a fait tomber toute forme de verticalité ( qui s’imposait ), et réduit tout à l’horizontalité…
Cet état de fait, impacte la question éducative. Dans notre société, nous avons éradiqué la mortalité enfantine et chaque enfant est désiré… L’enfant devient ‘ l’enfant du désir ‘sur lequel nous allons projeté notre désir… Ce sont nos enfants qui vont faire notre bonheur …
On accuse les pédagogues d’avoir fait « l’enfant-roi » , alors que c’est un phénomène social qui n’est pas lié à la pédagogie , mais à notre modernité … C’est l’enfant qui décide de celui qu’il va aimer ( beaucoup d’exemples chez les enfant de la ‘semaine’)… L’enfant arbitre et se trouve détenteur d’un pouvoir, qu’il n’est pas capable de gérer … Ces phénomènes sont des faits . Ce ne sont pas des arguments pour interdire le divorce, la garde alternée..etc … L’enfant du XXIème siècle ne sera plus l’enfant des siècles précédents ( et tant mieux … ! )
Aussi, le défi social et politique, est de permettre aux individus de tenir ensemble, dans des relations de configuration et non pas de coagulation ( c.a.d. sans tomber dans des pulsions de fusion..)
Vivre ensemble, sans le bâton du patriotisme, du dieu tout puissant,, du fanatisme, de l’idéologie : ce dont il faut absolument nous réjouir .. !
Nous n’avons plus qu’à nous retrouver dans le débat démocratique, et bâtir du lien commun … Dans cette situation de crise ( positive )la pédagogie devient essentielle … Dans une théocratie, on peut faire du dressage, dans une démocratie, on a besoin de pédagogie qui permet de se décentrer, d’examiner, qui permet d’entrer en relation avec l’autre sur un mode qui ne soit pas sur le modèle de l’emprise … mais, de la découverte respectueuse et collective pour découvrir le bien commun…
La modernité appelle la pédagogie, pour ne pas tomber dans un libéralisme anarchiste qui n’est que le choc des individualités que ne régulera plus que la seule loi du marché , ou alors nous tombons dans des fondamentalismes les plus réactionnaires et dangereux ..
Entre l’esprit consommateur-individualiste et la fusion religieuse … Quel chemin trouver pour un collectif démocratique ?
Peut-on et comment : conjuguer transmission et émancipation ?
Transmettre n’est pas assujettir, et émanciper n’est pas promouvoir l’individualisme ..
Cet article, n’est pas une ‘inspiration personnelle’. C’est une reprise à mon compte ( essentielle pour moi ! ), d’une conférence de Philippe MEIRIEU (1) . Transcription courte et toute personnelle.
Je vous invite, à l’écouter ICI : colloque du GFEN à Lyon … Ecoute enthousiaste de ma part !
Merci d'être là, à côté et différent. Laïcité et pluralisme.
Nous pensons toujours perdre, lorsque nous donnons… ! Je parle ici de nos convictions, de nos espérances…
- Ainsi la Laïcité : régulièrement les ‘ laïques ‘ se mobilisent, serrent les rangs et fraternisent facilement sur le dos de ceux, qui ‘ à côté ‘ proposent une alternative au ‘ public ‘. Je suis chef d’établissement d’un lycée et d’un collège publics, et je suis riche et fier d’être en mission d’un service public… Seulement, je ne comprends pas pourquoi je devrais me mobiliser contre un système qui a ses valeurs, et qui ne demande qu’à co-exister. Plus..! je revendiquerais bien pour qu’ils aient le moyens d’ être là, différents … En totale équité, ce qui devrait d’ailleurs être force de proposition et nous permettre de faire évoluer nos deux systèmes …
- Ainsi, le pluralisme religieux, est plus qu’une légitimité sociale… C’est également une réalité théologique. Je suis riche d’être chrétien et catholique, ce qui ne signifie en rien qu’un bouddhiste soit pauvre d’être différent de moi ; ni à un protestant d’être pauvre de ne pas être catholique … ! Ce n’est en rien du « relativisme » ! C’est une Foi, en totale espérance d’une divinité qui ne se limite pas à ma subjectivité, à ma personne, à ma culture ... Ce qui n’empêche en rien ma personne d’être en pleine vérité avec ma foi catholique, en m'enrichissant de l'autre qui est à côté... ( merci à lui d'être là, et qu'il ne change rien à ce qu'il est !)