schelling
Réflexion autour du Mythe ( et du Graal) , avec Schelling...
Au XIXème siècle ( et déjà à la fin du XVIIIe s.) , des philosophes, des écrivains craignent que la '' Raison '' n'étouffe la sensibilité, l'imagination, la passion, le sentiment religieux... Revenir au ''moi'', au génie individuel ; c'est aussi se révolter contre le despotisme de l'état et de la religion, contre les conventions sociales... Ce mouvement se nomme '' Sturm und Drang '' …
Ces premiers philosophes du Sturm und Drang sont d'ailleurs des théologiens plus ou moins en rupture d'église... Hamann (1730-1788), Herder (1744-1803) …
Ce sera alors, Goethe... et Friedrich Schiller, qui a quinze ans l'année où paraît Werther...
Friedrich Höderlin (1770-1843) rencontre Hegel et Schelling, au célèbre séminaire de théologie de Tübingen... Poète de l'idéalisme allemand, admirateur de Kant... Dans un syncrétisme des mythes, il explore la cosmologie et l'histoire pour trouver un sens en ce monde incertain.
Un mysticisme de la nature : Chez Schelling, le Moi n'est plus la seule mesure de l'univers. Le monde qui nous entoure s'anime, révèle à l'initié ses mystères, son langage, son âme. La nature se dresse comme un temple...
En même temps certaines découvertes récentes de la physique et de la chimie, en particulier l'étude du magnétisme et du galvanisme, viennent alimenter l'imagination des romantiques : la Nature et l'Esprit deviennent les deux pôles de signes contraires qui s'attirent et aspirent à l'union, au mariage cosmique qui ramènera l'âge d'or dans le monde.
Ludwig Tieck (1773-1853) redécouvre la poésie du Moyen Âge et s'en inspire dans une série de contes : Les Quatre Fils Aymon, Mélusine, Barbe-Bleue.
Le Conte : « (…) le réel, le temps (passé/présent), les lieux, les individualités (récurrence du thème du Double) ne sont plus garantis par des frontières sûres. Tieck applique ce même principe, participant d'un processus ironique théorisé au sein du Cercle d'Iéna par Freidrich Schlegel ou Novalis, à ses productions dramatiques du tournant du siècle. Il reste à ajouter que cette propension qu'a Tieck à brouiller la perception du lecteur préfigure l'Unheimlichkeit du Marchand de sable de E.T.A. Hoffmann, et que l'auteur d'Eckbert est généralement considéré comme le précurseur du conte fantastique allemand qu'incarnera en son plus haut point Hoffmann. » ( Wiki)
Pour Schelling, les dieux sont pour l'art, ce que les idées sont pour la philosophie... Tout art est mythologique.
Le Graal, représente une Idée... grandiose et trouble … Le Graal, comme œuvre d'art totale contient un désir d’immortalité et d’éternité... À travers lui, l’homme cherche à transcender sa contingence pour s’élever à l’égal de Dieu. De plus, le Graal unifie autour de lui : le moi, la collectivité et le monde.
Pour Schelling, la nature est l’Esprit encore inconscient de lui-même, et moi comme penseur, je me dois de la délivrer de sa gangue et de la faire parler comme si elle venait à la conscience … Fasciné par la beauté de la Nature, l’œuvre d'art n’est donc que la fascination de l’esprit pour sa propre vérité ensevelie dans le silence des choses :
« Ce que nous appelons Nature est un poème dont la merveilleuse et mystérieuse écriture reste pour nous indéchiffrable. Mais si l’on pouvait résoudre l’énigme, on y découvrirait l’Odyssée de l’esprit qui, victime d’une remarquable illusion, se fuit, tout en se cherchant, car il n’apparaît à travers le Monde que comme le sens à travers les mots » (Système de l’idéalisme transcendantal).
La Critique de la faculté de juger est publiée en 1790. Kant évoque lui aussi « le langage chiffré » de la Nature... Schelling s'interroge sur la véritable énigme, la présence de la réalité finie ; et non pas la présence de l'Absolu qui ne peut jamais, par définition, devenir objet de mon savoir...
Pourtant …. L'efficacité du mythe, est bien de réduire la distance entre les deux … ?
«Tu vois, mon fils, ici (dans le temple du Graal) le temps devient espace». Parsifal de Wagner ; cet espace sauve du temps et de la mort …
Claude Lévi-Strauss a entendu cette formule comme « la définition la plus profonde qu on ait jamais donnée du mythe»... »
N'oublions pas que c'est avec Schelling, que nous commençons à prendre les mythes au sérieux ; et admettre que l'homme s'est servi beaucoup plus de la pensée mythique que de la raison. Le mythe est né bien avant la philosophie ; il a fourni à l'homme une manière de penser le monde ; et, il est un élément de la Vérité …
La mythologie, s'est engendrée « dans la vie elle-même, et il a bien fallu qu’elle fût quelque chose de vécu et d’éprouvé» Schelling.
Le thème du Graal, s'est lui-même inscrit dans la Légende arthurienne. Il s'inscrit d'abord dans le mythe celtique puis nourrit la notion chrétienne de la misère de l'homme... De la ''Bretagne'' – avec le retour attendu du Roi Arthur - , à l'humanité – avec le Christ - ...
Aussi, le mythe d'Arthur illustre un christianisme fort teinté de paganisme …
Dans la Philosophie de la Révélation, Schelling considère le christianisme de la même façon qu'il a considéré la mythologie...
Caroline Schlegel-Schelling, et le romantisme allemand. -3/3-
Schelling et Clara : le monde des esprits.
Clara, ou 'Du lien de la nature au monde des esprits', est le roman posthume de Schelling (1775-1854). Il l’a probablement écrit en 1810-1811, à la suite du décès subit de sa femme Caroline, survenu le 7 septembre 1809. Le roman est un dialogue philosophique sur l’immortalité de l’âme, composé sans doute pour faire face au deuil de Caroline.
Caroline, elle-même avait perdu trois enfants... D'ailleurs Schelling aurit d’abord été amoureux de l’aînée de ces enfants, Auguste Böhmer, morte à 15 ans en 1800, et qu’il aima aussi la fille dans la mère, avec laquelle il l’avait pleurée ; tout comme il pleura Caroline avec son amie Pauline Gotter, qui devint plus tard sa deuxième épouse.
Bien sûr, la mort est une limite radicale, mais la littérature sait se nourrir de la fiction des spectres... Schelling écrit une fiction où il rêve de saisir la pensée des morts...
Pour Schelling, la raison peut s'accomplir dans la poésie... La question est ici : l’immortalité de l'âme'.
Clara est Caroline Schlegel-Schilling (1763-1809), déjà devenue personnage littéraire de son vivant avec : Amalia dans l’Entretien sur la poésie de Friedrich Schlegel (Schelling y fut Ludovico), Lucinde (ou Juliane) dans la Lucinde de Friedrich Schlegel, et Louise dans les Tableaux d’August-Wilhelm Schlegel, ainsi que Amalia dans les Quatre lettres sur la poésie, la métrique et la langue d’August-Wilhelm Schlegel. Sans doute, la vraie Caroline était-elle une sorte de Diotima du cercle de Iéna ; mais par là elle était déjà une répétition littéraire d’une figure mythique.
Le roman se construit sur le deuil que Clara porte pour son mari récemment décédé, Albert.
Et, dans le roman : c’est le Médecin, le naturaliste, qui est le plus enclin à admettre l’existence de ces phénomènes mystiques, alors que le Religieux nie toute connaissance et même tout questionnement sur le monde des esprits.
Schilling convoque les esprits au pluriel, et ne les résorbe pas dans un sujet absolu (ni Dieu ni le moi pur de Kant ou de Fichte). (…) Pour Schelling, les esprits sont les âmes des humains, habitants d’un monde voisin du nôtre et communiquant avec lui.
Le mort, poursuit Schelling, n’est pas l’esprit mais un esprit, un être non pas purement spirituel mais démonique, non pas détaché du corps-de-chair mais conservant la quintessence de son corps...
Selon Schelling comme selon Platon, l’au-delà est un monde habité par des esprits (…) les âmes immortelles sont des êtres moraux et donc libres. Selon lui, même après la mort, « ces esprits sont donc capables eux aussi de liberté, donc du bien et du mal ».
A la différence de Platon ( avec la transmigration...) Chez Schelling, la vie terrestre est unique, et après elle l’âme poursuit son chemin dans l’au-delà jusqu’à un « jugement dernier », qui sera « un procès véritablement alchimique » par lequel « le bien sera scindé du mal », le mal étant rejeté « sous la nature » et les morts éprouveront leur résurrection, par quoi « le monde des esprits entre dans le monde effectif », en sorte que la nature et l’homme seront désormais universellement divinisés.
Libérés des limitations de la société mécanique, les esprits sont les hommes transfigurés en leur liberté pure. Leur communauté est le paradoxal lien libre entre des êtres libres, et non pas le lien mécanique d’un assemblage des rouages ; la communauté des esprits manifeste les affinités véritables des cœurs, le pur affect social sans médiateur ; amour et haine, amitié et inimitié comme tels. C’est pourquoi c’est la communauté des morts qui est véritablement libre et vivante, et pas la nôtre. C’est notre société qui est un champ de ruines habitées par les spectres, et le prix d’une société libre est la mort…
- Clara demande comment les morts sentent et pensent, et comment nous pourrions communiquer avec eux. ?
Porte-parole de Schelling, le pasteur du roman croit fermement que les morts connaissent une sorte de jour nocturne ou de sommeil éveillé : « un peu comme s’ils avaient, dans le sommeil, échappé au sommeil et accédé à l’état de veille, endormis pourtant plutôt qu’éveillés ».
Ensemble, le pasteur, le médecin et Clara croient savoir que la pensée des morts est une sorte « d’intuition dépourvue d’images » ; la « vision la plus haute » ; la « conscience la plus intériorisée, [dans laquelle] tout se passe comme si leur être entier parvenait à un point d’incandescence qui réunirait en lui le passé, le présent et l’avenir».
D’après le pasteur et le médecin, nous connaissons, ou plutôt devinons la pensée des esprits par analogie avec le sommeil magnétique, qu’on étudiait à l’époque par des expériences de mesmérisme, hypnotisme et magnétisme. Ce sommeil serait comparable à « l’état qui suit la mort […] une clairvoyance supérieure que n’interrompra aucun réveil », et dont « les approches ont la plus grande ressemblance avec les approches de la mort ».
Celui qui dort d’un sommeil magnétique doit sa clairvoyance à sa soumission totale au médecin magnétiseur. Privé de sa subjectivité – du sentiment corporel et de la volonté spirituelle dans la mesure où ceux-ci relèvent de son individualité – le dormeur a alors accès à la plus haute intériorité, qui coïncide avec un devenir-un avec le dieu.
(…) cette idée de la suppression du moi pour que l’idée puisse se déployer est analogique à la conception schellingienne de la philosophie.
Pour Schelling, du moins dans sa maturité, la philosophie est extase de la raison requérant l’abandon du soi de celui qui pense, afin que la raison – l’absolu, le dieu – puisse se penser en lui.
Extraits de ''Les hantises de Clara'' par Susanna Lindberg, dans la Revue Germanique Internationale
Caroline Schlegel-Schelling, et le romantisme allemand. -2/3-
Le premier romantisme allemand : 1796-1802.
1796 - Le couple Caroline – A. Schlegel s’installe à Iéna, et elle commence à contribuer substantiellement aux productions littéraires du cercle romantique de Iéna, notamment des traductions de l’anglais.
En 1798, le philosophe Schelling et le dramaturge Tieck (1773-1853) viennent eux aussi s’installer à Iéna. Les frères Schlegel, Novalis (1772-1801) et Tieck s’unissent dans une activité littéraire très féconde ; Schelling et Fichte leur rendent visite après leurs journées de travail à l’université...
Parmi les femmes, il y a donc Caroline Schlegel, qui joue un rôle social essentiel dans la cohésion de ce petit groupe, Dorothée Veit, qui a épousé Friedrich Schlegel, la femme de Ludwig Tieck, Amalia, la fille de Caroline Schlegel, Auguste, et la toute jeune fille de Tieck, elle aussi appelée Dorothea, qui deviendra 20 ans plus tard la plus grande traductrice de Shakespeare du XIXème siècle sans jamais rien publier sous son nom.
Le groupe d’Iéna, premier pôle significatif du mouvement de 1798 à 1806 est animé par Wilhem et Friedrich Schlegel, entourés de Tieck (1773-1853) connu pour son ironie et ses contes médiévaux et fantastiques qui ont influencé Nodier et Balzac, de Wackenroder (1773-1798) théoricien pour qui l’art est de nature divine, et enfin Novalis (1772-1801) le grand poète des hymnes à la nuit (1799) et d’Henri d’Ofterdingen (1799-1801) roman initiatique dont le héros est un ménestrel légendaire qui participe à une joute poétique dont l’enjeu est la vie!
Ce premier romantisme est nourri d’idéalisme philosophique (Fichte, Schelling), imprégné de pensée religieuse et centré sur l’expérience intérieure, sur une sorte d’ascèse morale visant une réalisation personnelle la plus pleine et la plus authentique.
Mme De Staël dans De l’Allemagne (1810-1814) précise : « Le nom de romantique a été introduit nouvellement en Allemagne pour désigner la poésie dont les chants des troubadours ont été l’origine, celle qui est née de la chevalerie et du christianisme ».
Germaine de Staël pendant son voyage en Allemagne, fait la conquête définitive de W. Schlegel qui devient le précepteur de ses enfants . Il la suit à Coppet et lui sera fidèle jusqu'à sa mort en 1817.
Le ''premier romantisme'' est inextricablement lié au nom de Caroline Schlegel. Sa maison est devenue le centre d'intérêt des écrivains allemands. Avec sa franchise et sa critique, elle oriente et approfondit les opinions de son cercle d'amis. Elle travaille sur la revue nouvellement fondée Athenaum, elle écrit des critiques, aide Schlegel à traduire Shakespeare et s'est fait un nom avec son travail sur Goethe.
La mort de sa fille surdouée, frappe durement Caroline. Auguste affaiblie par une fièvre ''nerveuse'' prolongée, décède le 12 Août 1800. Sa fille est ce qu'elle a de plus cher sur la terre. Cette perte inattendue a profondément pesé sur Caroline. Elle ne se rétablit que lentement au cours de l'automne et de l'hiver suivants à Bamberg, puis à Braunschweig (d'octobre à mars) et finalement à Harburg (en avril).
La mort d'Auguste renforce intimement l'amitié de Caroline avec Schelling, et des sentiments qui les unissaient déjà …. Schelling reproche à son ami Schlegel, d’avoir abandonné sa femme … !
Schlegel reste la plupart du temps loin de Caroline, à Berlin, où il donne des conférences publiques sur la littérature et l'art.
Au printemps 1802, elle lui rend visite à Berlin. C'est à cette époque qu'ils décident de divorcer; ce n'est que le 17 mai 1803 qu'il est légalement appliqué. Caroline se sépare de Schlegel avec un sentiment d'amitié reconnaissante et de respect cordial... Dans la conscience de la liberté retrouvée, elle se sent enfin apaisée et "presque heureuse" après tant d'excitations et de souffrances.
Caroline épouse le philosophe Schelling, de douze ans plus jeune qu’elle, en juin 1803. Ils s'installèrent à Würzburg, où Schelling est nommé professeur.
Schelling (1775-1854) est déjà à vingt-ans, 'le' philosophe de son époque … Pour lui nature et esprit coexistent au sein de l'Absolu... Plus tard, l'Absolu se personnalise et devient transcendant. Dieu est à l'origine, la création est autre et l'humain est l'être où s'opère l'unité de la puissance divine et créatrice … Schelling, au contraire de Hegel, fait une place à la Révélation du Christ.
En 1804, Schlegel et Germaine de Staël, rencontrent Caroline ( puis à Munich en 1808). Les deux maris de Caroline se réconcilient, après que Schlegel soit parvenu à faire entendre à Schelling que c'est par un acte d'amour et non de faiblesse qu'il a consenti à renoncer à son lien marital au profit du bonheur de Caroline.
Schelling obtient un poste de professeur à Munich en 1806, où ils déménagent. En 1809, lors d'un voyage à Maulbronn, Caroline meurt soudainement d'une épidémie : Fièvre nerveuse avec dysenterie.
CAROLINE SCHLEGEL-SCHELLING, ET LE ROMANTISME ALLEMAND. -1/3-
Schelling avait rejoint les critiques de Kant ( Träume eines Geistersehers) contre Swedenborg... Lui même avait alors écrit que les anges devaient être « les créatures les plus ennuyeuses de toutes»...
Puis, il eut ce choc émotionnel terrible: la mort prématurée de son épouse bien-aimée, Caroline - une intellectuelle de renom - en 1809, à l'âge de 46 ans.
L'intérêt de Schelling pour Swedenborg coïncide avec son travail de deuil. Sa curiosité pour l’autre monde est sans doute née principalement de son intense désir d’être avec l'être cher... Cependant Schelling cherche une philosophie étayée par des preuves expérimentales.
Schelling croit fermement en la communication avec le monde spirituel... L'éloge du mariage selon Swedenborg, lui parle … Si, à ses débuts, Schelling était assez éloigné de la notion d'immortalité individuelle ; Schelling envisage la notion de corporalité dans deux directions, matérielle et spirituelle. La mort est une transformation alchimique, un processus de purification, le passage d’un esprit incorporel à un corps spirituel... La mort est un processus naturel... La ''vraie mort'', la mort qui est la conséquence du péché, est la mort spirituelle, asservissement à la vie des sens physiques.
''Clara'', ou ''Sur la liaison de la nature avec le monde des esprits'' traite de la question de la survivance de l’homme après la mort et, à travers celle-ci, celle de la relation entre le monde d’ici (ou celui de la nature) et le monde outretombe (ou celui des esprits) –, c’est aussi un ouvrage qui raconte une histoire, celle d’une âme endeuillée. Schelling vient de perdre son épouse Caroline (le 7 septembre 1809).
Je vous propose de faire connaissance avec une femme qui mérite notre intérêt : Caroline Schlegel -Schelling (1763-1809)...
Vu de l'Allemagne ( au XVIIIe s. elle n'existe pas, et signifie: même appartenance linguistique : l'allemand), le XVIIIe siècle, fut pour les femmes, une époque pleine de promesses : les '' Lumières '', et ce que l'on a appelé la '' république des lettres '' , sur un fond de révolution française, laissent poindre un nouvel espace de liberté; et avec le Romantisme de nouvelles relations entre homme et femme...
Nous pouvons vivre les espoirs de cette époque avec Caroline Michaelis - Böhmer - Schlegel - Schelling (1763-1809)…
Caroline est la fille du professeur Michaelis, spécialisé en théologie et orientaliste reconnu, à Göttingen. Elle reçoit une éducation intellectuelle, et très tôt elle fréquente des familles d'intellectuels ( GE Lessing, GC Lichtenberg et JW Goethe.) et se lie d'amitié avec Thérèse Heyne et son futur mari, Georg Forster.
Le 15 juin 1784, elle épouse son ami d'enfance, le docteur Bergarzt Wilhelm Böhmer, elle déménage avec lui à Clausthal et donne naissance à trois enfants. Le 28 avril 1785, nait son premier enfant, une fille : Auguste (Gustel) Böhmer. Des trois enfants qu'elle accouche, seule la fille aînée survit. Après seulement quatre ans de mariage, son mari meurt (1788).
Elle revient à Göttingen, et décide de ne pas se marier à nouveau et vivre seule avec sa fille.
À Göttingen, elle rencontre Georg Ernst Tatter (1757-1805), et tombe amoureuse de lui.
Tatter a étudié la théologie de 1776 à 1778 à Göttingen. ( comme plus tard : Hegel, Holderlin, Schelling : 1788-1793). Secrétaire de l'ambassadeur britannique, il accompagne – dans leurs études - à Göttingen, les trois fils du Roi George III...
Elle laisse encore Göttingen et vit pendant un certain temps avec son frère à Marburg, puis retour à l'automne 1791 à Göttingen où elle revoit Tatter. Après la mort de son père en 1791, et la maison familiale vendue, Caroline déménage à Mayence, où la visite Tatter en Septembre 1792.
A Göttingen, Caroline se lie d’amitié avec le poète Gottfried August Burger et le critique August Wilhelm Schlegel.
A Mayence, Caroline y retrouve son amie d'enfance, Thérèse Forster; et a une liaison tumultueuse avec Georg Forster...
Georg Adam Forster (1754 - mort le 10 janvier 1794 à Paris) est un naturaliste allemand qui fut également ethnologue, écrivain voyageur, journaliste et révolutionnaire. Il participe à la deuxième expédition autour du monde de James Cook...
Thérèse Forster avait donc épousé Georg Forster en 1785, l'avait suivi à Mayence en 1788. Elle tombe amoureuse de Ferdinand Huber, et selon les vœux de son mari, font ménage à trois... A la mort de son mari, elle épousera Huber qu'elle suivra à Stuttgart en 1798. Elle publiera plusieurs romans
L'armée révolutionnaire française du Général Custine (1740-1793) entre dans Mayence le 21 octobre 1792.
La ville, demande son rattachement à la France sous le nom de ''République de Mayence''. Caroline fréquente les milieux révolutionnaires...
Mais, après la reddition de la ville obtenue par les troupes prussiennes (1793), Caroline tente de s'échapper en voiture avec sa fille, mais elles sont arrêtées et conduites à la forteresse de Königstein. Elle se rend compte qu'elle est enceinte d'un jeune officier français de Custine : le lieutenant Jean-Baptiste Dubois-Crancé, neveu du général François-Ignace Ervoil d'Oyré, stationné à Mayence au début de 1793.. Après avoir refusé de donner l'enfant au père qui la réclame, elle reçoit l'aide de A. W. Schlegel qu'elle épousera en 1796, plus par reconnaissance que par amour... L'enfant, lui, meurt en bas-âge
Après sa libération, Caroline, se retrouve déclarée ''persona non grata'' dans toute une série de villes où elle ne peut donc plus séjourner.
Elle épouse finalement August Wilhelm Schlegel (1767-1845) en 1796.
Schlegel, est un écrivain, poète, philosophe, critique, orientaliste et traducteur allemand et l'un des principaux théoriciens du mouvement romantique.
Schlegel a étudié à Hanovre, puis à Göttingen en 1786, où il a pour professeur, le père de Caroline.
En 1798, à Iéna, (Thuringe), où il est nommé professeur extraordinaire, il fait la connaissance de Goethe et de Schiller et fonde en mai avec son frère Friedrich une revue intitulée Athenäum.
Quand il sera séparé de sa femme en mai 1803, il deviendra, l'année suivante, l'amant de Germaine de Staël, séparée de Benjamin Constant... A suivre ...
Découverte de la philosophie de Schelling
La découverte grâce à Monsieur de Balzac, des théories de Swedenborg, semble autoriser Charles-Louis de Chateauneuf, à imaginer le monde du Graal, et de la Légende arthurienne, comme un ensemble d'arcanes et de correspondances avec le monde naturel … Cet univers serait-il parallèle au notre, comme peuvent l'être d'autres univers mythologiques … ?
L'époque étant au rationalisme, comment donner raison à tout cela … ?
Avec Mme J., Charles-Louis de Chateauneuf partage ces discussions et les querelles philosophiques du moment avec un jeune couple Marie Françoise Aglaé et Félix Ravaisson, jeunes mariés et assidus de divers salons mondains...
Ami d'E. Quinet, Félix Ravaisson (1813-1900), est agrégé de philosophie, et inspecteur général des bibliothèques... Ses goûts sont éclectiques, et ce choix lui valut sans-doute sa place à l'université en philosophie ; il est passionné d'archéologie et les recherches du Graal de Ch.-L. l'interroge … Son oncle, qui l'a beaucoup marqué disait de lui à huit ans : « Félix est un Mathématicien complet, un antiquaire, un historien, tout enfin.. »
« M. Ravaisson aimait le monde. Tout jeune, peu connu encore, il voyait, grâce à sa parenté avec l'ancien ministre Mollien, s'ouvrir devant lui bien des portes. Nous savons qu'il fréquenta chez la princesse Belgiojoso, où il dut rencontrer Mignet, Thiers, et surtout Alfred de Musset ; chez Mme Récamier, déjà âgée alors, mais gracieuse toujours, et groupant autour d'elle des hommes tels que Villemain, Ampère, Balzac, Lamartine : c'est dans le salon de Mme Récamier, sans doute, qu'il fit la connaissance de Chateaubriand. Un contact fréquent avec tant d'hommes supérieurs devait agir sur l'intelligence comme un stimulant. » Bergson
Portrait de Jean Gaspard Félix Larcher Ravaisson-Mollien par Théodore Chassériau (1846)
Félix Ravaisson avait étudié le violon avec Alard, la peinture avec Broc, élève de David ; il peint, à plusieurs reprises il expose au Salon, sous le nom de Laché... Il admire Léonard de Vinci... Il pense que l'art ou la métaphysique ont la même intuition …
D'abord disciple de M. Cousin qui règne sur la philosophie, il reste rebelle à l'autorité d'autrui ; il s'éloigne du maître, et de la chaire de philosophie … !
Le couple Ravaisson rejoint le cercle des admirateurs de madame de Staël ; germanophile il se dit élève de Schelling qu'il a rencontré en Allemagne …
Avec les conseils et les appuis d'E. Quinet, Ravaisson s'est rendu à Munich à la fin de 1839. Il a découvert dans les cours de Schelling « les éléments d’une philosophie libre et substantielle et, comme il l’appelle, véritablement positive », une philosophie nouvelle et prometteuse...
Ravaisson, admirateur de la philosophie allemande, félicite Schelling de l'avoir réorientée à partir « de la réalité vivante et de l’énergie spirituelle »
Pour nous, la nature est un spectacle, nous l'admirons de l'extérieur … Pourtant, dans la contemplation, nous reconnaissons un moment où « l’acte et la vision de l’acte ne font qu’un. ». Schelling dit qu'alors l'intuition intellectuelle est cette « faculté de voir l’universel dans le particulier, l’infini dans le fini.. » Schelling relève le contraste entre l’intuition, qui voit la continuité, et la réflexion, qui marque les césures...
Découvrons Schelling :
Alors que Kant différencie le ''moi connaissant'' et la nature ; puisque qu'il ne nous serait pas possible de connaître la nature ''en soi ''… Fr. W. Schelling (1775-1854) exprime que la nature n'est que l'expression de '' l'Esprit du monde'', elle est de l'esprit visible, un esprit qui ordonne et structure... Et cet esprit est à l’œuvre dans la conscience de l'homme...
Charles-Louis, en écoutant exposer Revaisson, se disait alors qu'en entrant à l'intérieur de soi-même l'homme pourrait ressentir le mystère du monde … Et, cela semblait vibrer avec le mystère du Graal ...
De plus, toutes ces légendes que nous affectionnons – sans nous expliquer pourquoi elles nous fascinent – imagent l'âme d'un peuple... C'est '' l'esprit du monde '' qui est présent, dans la mythe, dans l'art, dans la nature …
Pour Schelling, le monde est « en Dieu » ; pour Hegel (1770-1831) '' l'esprit du monde '' est la somme des manifestations humaines ; seul l'homme a un esprit, et cet esprit du monde progresse à travers l'histoire...
Intéressant de voir que Schelling a pris la suite de Hegel à l'université de Berlin... Et, en 1841, voir Kierkegaard (1813- et Karl Marx, ensemble, suivre les cours de Schelling … ! Même si Marx, lui, se dit que « les philosophes se bornent à interpréter le monde alors qu'il s'agit de le transformer. »
Revenons aux idées de Schelling, mises en notes par Ch.-L. de Chateauneuf, enthousiasmé :
Au commencement … était « l'Un originel », la pure indifférenciation … Il n'existe pas encore de séparation entre Dieu et ''le Monde'', la nécessité et la liberté, le conscient et l'ombre, le sujet et l'objet, ici et là, avant et après …
Ensuite... La nature est empreinte d'une volonté originelle de différenciation... Y a t-il '' quelque chose qui veut ?... C'est vrai que... Hegel se moque … « Cet ''Originel '' serait « la nuit où tous les chats sont gris, un manque de connaissance et une grande naïveté... »
Schelling tente d'expliquer que cet ''Un originel'' ne peut être objet de la pensée, avant précisément qu'il existe de la différenciation ..
L'art est l'« organon de la vérité » : en se reconnaissant dans l’œuvre, l'homme accède à sa subjectivité, sa conscience de soi et sa liberté.
Questions : Alors que dans l'univers tout a sa raison d'être, comment le mal peut-il exister ? Et quand tout dépend de tout et que chaque être et chaque fait sont liés aux autres, comme le veut chaque système, comment peut-il être question de liberté ?
Les Mythes :
Pour Schelling, le mythe n'est pas le résultat de l'imagination de l'homme, c'est au contraire la conscience de l'homme qui est le résultat des mythes. Les mythes ne sont ni des vérités cachées, encore moins des allégories ou des métaphores.
Les mythes sont des tautégories: ils ne disent rien d'autre que ce qu’ils disent. La question n'est pas de savoir s'ils sont vrais ou faux. Ils existent et ne signifient que ce qu'ils sont. « Pour elle, les dieux sont des êtres qui existent réellement, qui ne sont rien d’autre, ne signifient rien d’autre, mais signifient seulement ce qu’ils sont. »
Il faut reconnaître au mythe la capacité de véhiculer une vérité qui lui est propre, c'est à dire encore – pour être bien compris – « tout dans le mythe doit être compris comme il l'énonce, , et non pas comme si une chose était pensée, une autre dite. » Schelling... Malheureusement... - si l'on peut dire - nous ne croyons plus aux dieux … !
Et '' en même temps '' Le mythe est à la fois porteur d’un sens, d’une « vérité » plus ou moins haute, et investi d’une fonction sociale qui en double l’importance.
Le Romantisme, la philosophie et les Mythes. 2/2
En 1793, Fichte (1762-1814) est nommé Professeur de philosophie à Iéna, où il succède à Karl Leonhard Reinhold, qui était lui aussi un disciple important de Kant et une source d'influence pour Fichte. Ce dernier suscite très vite un enthousiasme considérable par son éloquence, par la fulgurance et la nouveauté de ses idées, mais aussi par le caractère en apparence énigmatique, voire hermétique de sa pensée. Il est renommé dans toute l'Allemagne et même en dehors ( c'est Madame de Staël qui le fait connaître en France).
La '' Querelle de l’athéisme '' ( de 1798 à 1800) contraint Fichte à renoncer à son poste de professeur de philosophie à Iéna... et rappelle les '' péripéties '' connues par Spinoza un peu plus d’ un siècle avant Fichte.
Fichte, dans son ouvrage pointe ses accusateurs en les vilipendant comme « idolâtres ». Selon lui, toute conception de « Dieu » comme « substantiel », comme une entité distribuant des récompenses et des punitions sous forme de bien être ou de mal être, doit être écartée comme idolâtre.
« Un Dieu qui doit être le serviteur des désirs est un être méprisable ; il remplit une fonction qui répugnerait à tout honnête homme. Un pareil Dieu est un méchant être ; il entretient et éternise la perdition des hommes et la dégradation de la Raison ; un pareil Dieu, c'est à proprement parler et tout justement ce Prince de la terre, jugé et condamné depuis longtemps par la bouche du Verbe dont il fausse les paroles. Son office est l'office de ce Prince ; sa fonction, de subvenir aux besoins de la police. Ce sont eux les véritables athées, ils n'ont absolument pas de Dieu ; ils se sont forgé une idole impie... Accomplir certaines cérémonies, réciter certaines formules, croire des propositions incompréhensibles, ce sont tous leurs moyens de se mettre bien en cour avec lui et de recevoir ses bénédictions. Ils adressent à Dieu des louanges, ils lui font une gloire, dont un homme ne voudrait pas ; et, ce qu'il y a de plus impie, ils ne croient même pas aux paroles qu'ils prononcent, ils s'imaginent seulement que Dieu aime à les entendre, et pour avoir ses faveurs, ils abondent en ce sens. » Fichte
Je rappelle l'évolution conceptuelle : avec Descartes je m'interroge sur ce qui est réel : je peux être victime d'erreurs, d'illusions...mais ce qui certain c'est que J'existe ( je pense être). Suis-je alors limité à ma propre perception ? Descartes ''croit en Dieu'', il est celui qui conduit ma pensée...
Puis-je penser le réel, sans faire appel à une Transcendance ?
C’est en ce sens que Kant propose de distinguer les « choses en soi » : qui est l’inconnaissable réalité objective des simples « phénomènes », qui sont ce que je perçois, grâce à l’aide d’un certain prisme : celui de l’espace, du temps, de la grandeur, des relations de cause à effet, etc.
Mais... - Y a t-il plusieurs ''choses en soi'' .. ? - Leur existence est-elle nécessaire... et seraient-elles la cause des ''phénomènes'' ?
Fichte, lui répond de façon ironique : « Comment ! tu es capable de parler d’une réalité, sans en rien savoir, sans en avoir au moins obscurément conscience, sans la rapporter à toi ? ...»
Précisément, pour Schelling, l'athéisme consiste à séparer l'homme de Dieu... Moi et non-moi, sujet et objet, phénomène et 'chose en soi' ne forment qu'un. Le monde est unité essentielle et il n'y a pas lieu d'opposer le monde idéal et le monde réel. Humain et nature ne sont que les deux faces d'un seul et même être, l'Un, l'Absolu...
Panthéiste Schelling ? Pourtant, il affirme que Dieu est point de départ, à la fois existence nécessaire, mais dès l'origine « puissance » (possibilité) d'une autre existence. La création est actualisation de cette puissance de l'être autre. L'homme est le point où l'unité des puissances est restaurée mais actualisant à nouveau cette puissance, cette fois sur le plan de la conscience : c'est l'odyssée religieuse de l'humanité d'abord sous la forme ''imaginaire'' de la mythologie puis sous la forme d'une conscience délivrée, en personne dans la Révélation.
Attention : ''imaginaire'' ne signifie pas '' qui n'existe pas '' … ! ( Voir le monde imaginal de H. Corbin...)
Sources : diverses.., notamment Van Riet Georges. Mythe et vérité. In: Revue Philosophique de Louvain.
L'émigration – le Romantisme, la philosophie et les Mythes. 1/2
L'émigré, J. L. de la Bermondie, arrive donc en Allemagne ; avec sa principale question qui concerne le Graal, le Mythe... Des articles précédents ont fait référence à Roger de Laron, chevalier templier, dont il est l'héritier …
Et précisément, il se rend compte qu'ici, des intellectuels en ont fait un problème philosophique ...
Quel est ce problème ? Tout simplement, celui de savoir ce qu'est un mythe, ce qu'il signifie, comment il faut le comprendre et l'apprécier. Quel est le sens du mythe, quelle est sa fonction dans la vie humaine, quelle valeur doit-on lui reconnaître ?
Auguste Schlegel (1767-1845) écrivain, philosophe ; en 1798 professeur à Iéna, fonde avec son frère la revue Athenaüm; il y a là également Ludwig Tieck, Wackenroder, Novalis … D'abord marié avec l'étonnante Caroline Michaelis... En 1804, il devient l'un des amants de Madame de Staël... Il lui restera fidèle jusqu'à sa mort ( à elle en 1817). Il écrit :
« Le mythe est un produit universel et nécessaire de la faculté poétique des hommes: c'est en quelque sorte une poésie originelle du genre humain »... Schlegel définit la mythologie comme « langage imagé de la raison et de l’imagination, sa sœur : ici, chaque corps se voit attribuer une âme, et tout ce qui est invisible est rendu visible »
Ces formules indiquent clairement que la mythologie n'est pas le produit d'un passé lointain ou d'une époque primitive de l’humanité. Comme le langage, elle constitue au contraire un phénomène indissociable du fait d'être homme, un principe structurel de son esprit.
L'homme appréhende le Monde par le mythe. Le peuple s'approprie le mythe et lui donne vie. Les allusions symboliques du mythe font qu'il est parfaitement reconnu par notre imagination... « Le premier mouvement de notre imagination est celui par lequel notre existence et le monde extérieur deviennent réels pour nous », écrit Schlegel...
« L'homme donne une forme humaine à toutes les forces de la nature qu'il perçoit. La personnification est la figure universelle de son langage naturel. » A. Schl.
« Le langage n'est pas un produit de la nature, mais une reproduction de l'esprit humain, qui y consigne l'apparition et les affinités de sa pensée, et tout le mécanisme de ses opérations.
Dans la poésie, quelque chose de déjà formé est donc à nouveau formé; et la capacité de son organe à prendre forme est aussi illimitée que la capacité de l’esprit à revenir sur lui-même par des réflexions toujours portées à la puissance supérieure. Il n'est donc pas surprenant que la manifestation de la nature humaine puisse en poésie plus que dans les autres arts se spiritualiser et se transfigurer, et qu'elle sache s'y frayer une voie jusqu'à de secrètes régions mystiques » A. Schl.
Critique de la philosophie des ''Lumières'' dans les leçons de Berlin d' August W. Schlegel :
L'âme humaine, écrit Schlegel, est divisée, comme l'est le monde extérieur, entre « lumière et ténèbres », et « la succession du jour et de la nuit est une image très pertinente de notre existence spirituelle ». Tandis que la lumière de la raison nous enchaîne aux « conditions de la réalité », celles-ci sont abolies la nuit, entourées d'un « voile bienfaisant », et c'est ainsi que s'ouvrent « des perspectives sur les espaces du possible ».
En ce sens, la raison et l'imagination représentent les forces fondamentales de notre nature : la raison « toujours à la recherche de l’unité », l'imagination « produisant sens cesse une variété illimitée ».
Schlegel illustre l’indépendance de l'imagination face à la raison, en évoquant les rêves où l'imagination « s'adonne à ses jeux sans connaître aucune contrainte ».
Le philosophe Friedrich Wilhelm Joseph (von) Schelling (1775-1854) fera également de la mythologie, au fil des années, sa préoccupation principale...
En 1790, il rentre au Stift (séminaire) de Tübingen où il rencontre Hölderlin et Hegel.
En 1798, Schelling arrive à Jena. Comme Novalis et Ludwig Tieck , il fréquente également Schlegel. Il s'engage, même, dans une histoire d'amour avec Caroline Michaelis-Schlegel (1763-1809), qui est tolérée par son mari ; elle a créé autour d'elle un cercle d'écrivains qui est le creuset de toutes ces nouvelles idées …
En 1800, August Schlegel part à Berlin ; il va se séparer de Caroline qui va se marier en 1803 à Schelling...
À cette époque, l'idée la plus répandue sur les mythes était la suivante : ceux-ci seraient, ou bien le résultat de l'imagination des hommes, ou bien des vérités déguisées, traduisant la réalité par des allégories ou des métaphores.
Schelling s'oppose radicalement à cette interprétation du mythe. Pour lui, le mythe ne peut être d'aucune manière le résultat de l'imagination de l'homme, c'est au contraire la conscience de l'homme qui est le résultat des mythes. Les mythes ne sont ni des vérités cachées, encore moins des allégories ou des métaphores.
Les mythes sont des tautégories ( définition : les figures mythologiques signifient ce qu'elles sont et sont ce qu'elles signifient. ): ils ne disent rien d'autre que ce qu'ils disent. La question n'est pas de savoir s'ils sont vrais ou faux. Ils existent et ne signifient que ce qu'ils sont.
Quand j'écris ( voir: St-Augustin, Zundel … Secrétan...) « en moi habite quelqu’un de plus grand que moi », je suggère que la transcendance ne m'est pas externe, mais interne ; ce qui dépasse mon moi, est en moi...
« En nous tous est présente une faculté mystérieuse et merveilleuse, celle de nous retirer dans la partie la plus intime de nous-mêmes (...) afin d'intuitionner l'éternel en nous, sous la figure de l'immutabilité. Cette intuition est l'expérience la plus intime, la plus proche, celle dont dépend tout ce que nous savons et croyons quant au monde suprasensible » ( A. Schelling. Lettres sur le dogmatisme ..).