Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

drieu la rochelle

La Complainte du Partisan

Publié le par Régis Vétillard

Évoquer ( précédemment) Emmanuel d'Astier, c'est alors l'occasion de se tourner vers une autre personnalité, à l'antipode de son parcours : Gaston Bergery ( 1892-1974). Leur point commun est une femme, Lioubov Krassine (1908-1991) citoyenne soviétique, qui épousa Bergery en 1927, et d'Astier en 1947.

Lancelot connaît assez bien Bergery, licencié en droit. Il habite, 29 rue de Bourgogne, (7e). Dandy, ambitieux, plutôt froid, souvent ironique ; il fréquente les mêmes milieux que Berl et Drieu la Rochelle qui s'en inspire pour décrire le personnage de Clérences.

Après le parti radical, il est à la recherche politique d'une troisième voie.

Louba Krassine - fille du premier ambassadeur en France de la nouvelle URSS - avait seize ans quand elle rencontra le jeune avocat. Son père, l'ambassadeur des soviets à Paris, était un grand bourgeois, ingénieur, rallié à la cause de la Révolution, qui recevait la société parisienne avec faste. L'une de ses ravissantes filles, Louba, devint la femme de Gaston Bergery, en 1927, très fier de pouvoir la présenter à son entourage de gauche. Ils divorcèrent l'année suivante.

Dans les années trente, Lancelot se souvient que Jean Hugo était vraisemblablement très amoureux de Louba Krassine, alors même qu'elle était la meilleure amie de Frosca Munster, son grand amour...

Gaston Bergery soutient Léon Blum, en 1936. Il est pacifiste, munichois ; et après la défaite promeut un « ordre nouveau, autoritaire, national, social, anticommuniste et antiploutocratique ». Acteur de la collaboration, il souhaitait établir un parti unique, ce que refusait les allemands. Il est l'ambassadeur de Vichy à Moscou ( avril 41), puis à Ankara (juin 1942).

Anna Marly

Pendant ce temps, Louba Krassine rencontre à Londres, Anna Marly exilée russe, chanteuse et guitariste.

En 1943, un soir, Louba, devenue la maitresse d'Emmanuel d'Astier, réunit dans son appartement Anna Marly et Joseph Kessel. Anna propose une chanson qu’elle destine aux combattants russes assiégés dans Stalingrad et qu’elle a titré Guérilla Song. Kessel et Druon en feront l'inoubliable Chant des partisans.

Parallèlement, Emmanuel d’Astier écrit les paroles de La Complainte du Partisan dont Anna Marly compose la musique et qui sera reprise par Leonard Cohen en 1969.

En désaccord avec De Gaulle, Emmanuel d'Astier quitte le gouvernement ; il est alors proche des communistes et fonde Libération, comme quotidien. Le 19 août 1944, Libération s'était installé dans les locaux de Paris-Soir rue du Louvre, avec une rédaction en majorité communiste.

D'Astier, va divorcer de l'américaine France Temple qu'il a épousé à Paris en 1931. Et, le 9 août 1947, il se remariera avec Louba Krassine.

 

Avant que Drieu ne tire sa révérence, le 15 mars. Il apprend le 19 janvier, la condamnation à mort de Robert Brasillach, fusillé le 6 février 1945 au fort de Montrouge.

«  Vous avez beau dire : ce qu'il y a de meilleur en France ne se console pas de la destruction d'une tête pensante – aussi mal qu'elle ait pensé. N'existe-t-il donc aucune autre peine que la mort ? » ( Mauriac, le Figaro du 24 janvier 45).

La question de la responsabilité de l'écrivain est médiatisée, et taraude Drieu.

Difficile, se questionne Lancelot, de ne pas prendre extrêmement sérieusement l'engagement de ces intellectuels qui allaient jusqu'à réclamer eux-mêmes, la peine de mort pour des millions de morts parce qu'ils étaient juifs.

Lancelot se souvient de ces dernières conversations, avec Drieu, à propos de Judas, l'apôtre condamné pour son rôle essentiel, mais conduit, dit-on, par l'argent. Pour Camus, la situation de l'homme absurde peut être présentée au travers de Don Juan, ou Hamlet. Pour Drieu en août 44, c'est par Judas.

Il se souvenait du livre de Claudel, auteur qu'il admirait, '' Mort de Judas '' publié en 1933. Dans ce texte, Claudel livre un plaidoyer en faveur du pêcheur Judas. La faute de Judas serait de rester dans l’orgueil et dans le péché d’Adam. L’arbre de la pendaison rappelle l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Maurras après sa condamnation, s'en prend à Claudel qui qualifiait Judas de maurassien. Maurras tente de lui montrer que ce sont les autres apôtres qui le sont ; et que Judas c'est Claudel !

Judas, disait Drieu la Rochelle, a trahi - nous le savons bien, fondamentalement - non pour de l'argent, mais pour révéler la nature divine du Christ. Et bien, lui, Drieu, aurait trahi pour annoncer la dimension européenne du patriotisme ; et cette dimension pouvait s'élaborer dans le cadre de la collaboration avec l’Allemagne nazie. « J’ai toujours été nationaliste et internationaliste en même temps, (...) mais dans le cadre de l’Europe. »

Drieu appréciait beaucoup d'échanger sur la spiritualité. Il disait encore : « je veux surtout me délivrer de cette trivialité de la politique dont je me suis affublé. »

Charles Maurras, a été condamné à la réclusion perpétuelle.

Rentré en France, Gaston Bergery est arrêté le 25 octobre 1945 et aussitôt inculpé d’intelligence avec l’ennemi. En février 49, Gaston Bergery bénéficiera d’une relaxe pure et simple.

Voir les commentaires

1945 - Suicide de Drieu la Rochelle.

Publié le par Régis Vétillard

Vendredi16 mars : Drieu la Rochelle a été trouvé mort dans la matinée, au 23 rue Ferdinand, dans un appartement de Colette Jéramec. Il a succombé à une dose massive de somnifères et une asphyxie au gaz d'éclairage. Une instruction venait d'être ouverte contre lui, et le considérait comme en fuite. il meurt dans les bras d'une juive, Colette prévenue par Gabrielle, sa cuisinière-gouvernante..

Mauriac ne pouvait pas ne pas réagir à la mort de celui pour qui, il avait une certaine considération. Il le considérait comme un « enfant perdu que nous n’avons pas été dignes de sauver ». Mauriac avait célébré '' Blèche'' de Drieu (1928), beaucoup aimé – comme Lancelot d'ailleurs - '' Gilles '' : un livre « essentiel, vraiment chargé d’un terrible poids de souffrance et d’erreur ».

Drieu est passé de sa recherche d'un néo-socialisme à poigne, à l'engagement dans la collaboration. Mauriac dans le Figaro écrit que Drieu ne pardonnait pas à la France, sa faiblesse. Et comment, alors, lui-même a t-il pu céder « au vertige du vaincu que grise l'odeur de son vainqueur. » ? Puis, « il découvrit que ce vainqueur bien-aimé était lui aussi un faible, que le Grand Reich n'était pas si grand devant la Russie soviétique. »

Cependant, Lancelot fait partie de ces quelques uns qui gardent un certain respect et même un peu d'amitié pour celui qui rêvait d’être un Viking. Lui-même, nous exhortait : « Soyez fidèles à l'orgueil de la résistance comme je suis fidèle à l'orgueil de la collaboration. Ne trichez pas plus que je ne triche. Condamnez moi à la peine capitale. Nous avons joué. J'ai perdu. Je réclame la mort. » ( Drieu la Rochelle - Récit secret (1944, rendu public en 1961) )

C'est insuffisant, bien sûr, mais Drieu a aidé André Malraux, et précisément Clara sa femme d’origine juive, il a sauvé Jean Paulhan arrêté par la Gestapo en 1941, alors que l'on venait de trouver chez lui, la ronéo servant à l'édition clandestine des ''Lettres Française''.

Août 1944 : Emmanuel d'Astier, un ami de Drieu, devenu ministre de l'intérieur dans le GRPF est venu lui proposer de le faire passer en Suisse. Voyage sûr, dans une voiture du ministère. Il a refusé.

Je profite de le nommer, pour évoquer Emmanuel d'Astier de La Vigerie ( 1900-1969). Il a partagé avec Drieu, beaucoup de ses errements de l'entre-deux-guerres, et cependant, dès 1940, il s'est refusé à entériner la défaite, il a dénoncé l'accord entre Pétain et les nazis, pour se retrouver finalement du côté de la résistance.

D'Astier après avoir démissionné de la marine, s'était essayé dans une carrière littéraire, avant de devenir journaliste, soutenu par Drieu, d'abord dans l'Action Française, puis à l’hebdomadaire Marianne sous la direction E Berl. Il rejoint la gauche, admire Doriot, dans les années trente.

Je m'interroge sur les causes d'un tel engagement dans la résistance ; aussi remarquable, qu'il est précoce, immédiat. En général, l'antériorité du combat politique l'explique, pourtant ce n'est pas suffisant. Peut-être, observe t-on, dans une telle occasion, une modification brusque de l'environnement social de la personne ; une réaction émotive forte, la sensation d'un écart trop important entre le nouvel ordre du monde imposé et ses propres valeurs, et enfin le désir, de passer à l'action directe ? Tout ceci était réuni pour Emmanuel d'Astier.

Après plusieurs autres mouvements, il crée avec Jean Cavaillès le mouvement ''Libération-Sud''. Dans la clandestinité, il est 'Bernard', puis 'Merlin'. ... !

''Libération'' est l'un des premiers mouvements de résistance, c'est aussi un journal : 53 numéros paraissent dans la clandestinité, pour condamner le régime de Vichy qui a trahi. En quoi... ? Le premier point de rupture a été l'armistice ; ensuite il a collaboré politiquement, militairement, économiquement, Vichy a parié sur une victoire allemande, et accepté la domination hitlérienne. ''Libération '' a critiqué également l'idéologie de la ''Révolution Nationale'' et lui attache la persécution des juifs, des francs-maçons, la censure, la suppression des libertés...

Emmanuel d'Astier, très grand, le visage droit, le profil rectiligne, en impose ; il a du charme et du charisme. Il écoute, essaie de comprendre son interlocuteur. Il attire la confiance, et devient le chef respecté par la pratique des responsabilités au jour le jour.

En novembre 43, il part pour Alger, réclamer, à de Gaulle, des armes pour la résistance. Cadre de la résistance, il fait partie du Gouvernement Provisoire de la République (GRPF) .

Voir les commentaires

Août 1944 : Valéry - La résistance à Fléchigné.

Publié le par Régis Vétillard

Paul Valéry et Jeanne L. (Jean Voilier)

Le 1er août 1944, Anne-Laure de Sallembier et son fils, sont invités dans les jardins de la demeure de Jeanne L., 11 rue de l'Assomption, pour entendre la lecture d'une pièce que Jeanne appelle '' le troisième Faust'' , et que l'auteur, Paul Valéry, nomme ''Lust'' ( idéal en allemand, idéal féminin) et qui est tout à la gloire de sa maîtresse. Les invités échangent dans le jardin; beaucoup de gens ''bien'', comme Duhamel dont on dit qu'il « tient en respect les forces maléfiques » - Anne-Laure apprécie beaucoup sa femme, Blanche Albane célèbre actrice dans les années 1920 - Mauriac est absent. Duhamel est de formation scientifique, et Lancelot profite également de la présence de Louis de Broglie pour l'interroger sur la genèse de la mécanique ondulatoire.

Lancelot a retenu, en particulier, que Louis de Broglie a profité de l'analogie entre le principe de moindre action en mécanique et le principe de Fermat en optique pour formuler la mécanique ondulatoire. Ce serait intéressant d'en reparler, car cela met en valeur, - pense Lancelot - à la place d'un langage mathématique sous forme d'équations différentielles, un système de formulations ''élégantes'' exploitables en science et en philosophie. Paul Valéry ne pourrait qu'apprécier...

11 rue de l'Assomption Paris

 

Si chacun, ici, reconnaît Jeanne L. dans Lust, et peut-être Valéry dans Faust ; que penser de Robert Denoël, présent également et nouvel amant de cette femme ambitieuse ? Lust pourrait bien finalement, tomber dans les bras du ''disciple''.

 

Faust - transporté à l'époque moderne - est l'intellectuel qui se voudrait le maître de sa secrétaire, et qui se venge ; elle qui - si elle ''n'est pas là pour comprendre'' - interroge le sens du message, le commente, ironise... Lust répond avec son rire, son corps. C'est parole contre parole.

Faust - mythe

Deux personnages interviennent, Méphisto ( ridicule, avec un esprit médiocre, ordinaire) et le disciple auquel Faust se confie : « revivre, ce n'est plus vivre ».

Mais, Faust découvre un moment de plénitude : « Je respire ; et rien de plus, car il n’y a rien de plus. Je respire et je vois (...). Mais ce qu’il y a peut-être de plus présent dans la présence, c’est ceci : je touche (...) » Et, Lust devient '' l'autre '' : « Viens faire un tour dans le jardin », murmure Faust » ( le jardin, la femme, le fruit, l'arbre, le serpent...).

Lust tient tête à Méphisto et se dérobe (?) à l’amour banal du Disciple.

Cette pièce inachevée, se termine ici par un Faust qui meurt d'amour. « II dépend de ton coeur que je vive ou je meure / Tu le sais à présent, si tu doutas jamais / Que je puisse mourir par celle que j'aimais. »

 

Après qu'une jeune femme, accusée de '' collaboration horizontale '' avec l'ennemi, ait été molestée; Geneviève a été dénoncée et inquiétée pour avoir eu une relation avec un officier allemand.

Au mois d'août 1944, Lancelot et Geneviève enceinte, ont rejoint Fléchigné. Avec l'accord d'Anne-Laure, ils ont pris la décision d'organiser très rapidement leur mariage. Il eut lieu dans l'intimité.

Ils assistent de loin à la libération de la Normandie …

Il a fallu attendre, après le 6 juin, que l'armée américaine du général Patton perce les lignes allemandes à Avranches. Le 3 août 1944, elle libère Rennes. Ensuite partagée en trois, un corps d'armée reçoit l'ordre d'établir des têtes de ponts à Mayenne, Laval pour prendre les Allemands à revers.

Le 5 août, les américains sont à Mayenne, qu'ils libèrent.

De plus près, la comtesse de Sallembier, son fils et leurs employés soutiennent l'intendance du maquis Fleury.

Tout se précipite alors, les soldats allemands sont harcelés. Trois d'entre eux sont tués route d’Izé à Bais en début d’après-midi ; en représailles, les Allemands encerclèrent dans la nuit le village de l’Aubrière situé à 500 mètres de Bais. Le 5 août, dans une ferme appartenant à un cousin de notre famille, Albert Vétillard, lui et quatre autres personnes sont désignés comme otages. Alignés, battus et fouillés, ils sont froidement abattus.

Le 6 août, à proximité de Fléchigné, des résistants du groupe Fleury tendent une embuscade sur la route au lieu-dit la Nivelaie, en tirant un fil de fer en travers de la route. Une moto ennemie arrive et heurte le fil de fer. Le conducteur chute, se relève et essuie les tirs des maquisards. Après avoir fait demi-tour, il revient accompagné d'une automitrailleuse, qui oblige les résistants à décrocher, après un cours mais violent engagement au cours duquel Edouard Lemée est tué.

Le 12 août au matin, Alençon est libérée par la 2e Division Blindée française du Général Philippe Leclerc de Hauteclocque.

 

De retour d'une promenade aux Tuileries, le 11 août 1944, Drieu la Rochelle a tenté de se suicider. Il travaillait - avait-il dit - sur une pièce concernant Judas. Il s'interrogeait sur le rôle que le traître devait maintenir pour que les choses s'accomplissent. Judas nécessaire, mais Judas méprisé. Pour Drieu, une des valeurs supérieure qui légitimerait sa trahison, serait la dimension européenne du patriotisme nouveau. Drieu est un précurseur, et son suicide semble pour les jeunes générations, une réponse à cette phrase qui ouvre l'essai de Camus '' Le Mythe de Sisiphe '' : « Il n’y a qu’un problème philosophique vraiment sérieux : c’est le suicide ? »

Découvert par sa femme de ménage, c'est Colette Jéramec ( sa première femme) qui l'a conduit à l'hôpital américain.

Drieu la Rochelle

Quelques semaines auparavant, Lancelot, avait noté quelques idées de sa conversation. Il se disait vexé « de l'incapacité du fascisme, de l'incapacité allemande, de l'incapacité européenne. » Il parlait souvent de la mort, il avait commencé à vivre ''l'heure de la mort''. Elle lui devenait « merveilleusement, délicieusement familière. »

De sa difficulté de croire en Dieu, il disait : « Impossible d'imaginer l'infini créant le fini... Pourquoi le parfait rêverait-il de l'imparfait ? Pourtant, c'est l'explication la moins impossible. Mais l'Infini n'a pas besoin du fini pour se concevoir ; il n'a pas à se concevoir. »

L'idée de la survie de l'âme individuelle lui paraissait, enfin, lui paraît ( il n'est pas mort...), vulgaire. Se confronter à la mort, volontairement ou non, ne consiste pas à s'interroger sur la question de perdre ou sauver son âme : « Ce que je sens de spirituel en moi, d'immortel, d'inépuisable, c'est justement ce qui n'est point particulier. J'ai toujours eu le sentiment, dans mes moments de plénitude, de lucidité, que ce qui compte pour moi, en moi, c'est ce qui n'est pas moi, c'est ce qui en moi participe à quelque chose d'autre que moi. »

 

Si la rivalité entre Giraud et De Gaulle tourne à l'avantage de De Gaulle ; beaucoup s'inquiètent de la volonté des communistes de s'imposer dans la résistance pour prendre le pouvoir. Les communistes ne souhaitent pas seulement la libération du territoire ; mais aussi le pouvoir de conduire le peuple vers une idéologie, elle-même totalisante ; ainsi ce tract, dans lequel le PC se dit être « le parti qui, guidé par le marxisme-léninisme et par l'enseignement de Staline, a su dégager ce que représente la nation comme facteur de libération humaine. »

La nouvelle du succès du débarquement de Provence, le 15 août, a déclenché l'insurrection à Paris.

Voir les commentaires

1943 – Drieu – Colette - La vie continue

Publié le par Régis Vétillard

Drieu la Rochelle a le génie de se rendre insupportable. Centré sur lui-même, il tient à vous convaincre qu'il tient à vous. Il se plaint des femmes et badine avec Geneviève. Très agressif, il cible continuellement les juifs; et ne dort plus depuis que « sa femme N°1 » est retenue à Drancy.

Anne-Laure l'interroge sur Colette Jéramec, qui vient d'être internée avec ses deux enfants ( avril-mai 1943). Devenue médecin pédiatre, elle travaille comme chercheur à l'Institut Pasteur avec le professeur Legroux, bactériologiste. Son troisième époux, père de ses deux garçons, est Paul Tcherniakovsky qui travaille à la faculté des sciences. Elle refuse de porter l'étoile jaune.

Colette Jeramec

Drieu, ami d'Otto Abetz, est aussitôt prévenu. Abetz est absent, pour le remplacer Rudolf Schleier, très impliqué dans la déportation des juifs, que Drieu méprise... Cependant, il va tout faire, mobiliser chacun pour intervenir; et finalement la faire libérer, le 25 mai, la veille de son transfert vers Auschwitz.

Drieu est allé la voir au camp d'internement établi dans un grand ensemble de logements en construction, à Drancy, une banlieue ouvrière. Il décrit les barres d'immeubles, la cour fermée de barbelés, le parloir, la misérable apparence de Colette... Mais c'est lui que l'on doit plaindre: d'avoir été forcé à voir ça !

Il ne peut s'empêcher d'ajouter qu'il la trouve insupportable, « aux manières petites-bourgeoises, terriblement scientiste, et surtout, surtout pas artiste pour deux sous, sans humour. »

 

En décembre 1943, Eugène Wollman ( bactériologiste) et sa femme Elisabeth ( biologiste) sont tous deux transférés à Drancy, puis déportés à Auschwitz par le convoi 63, ils seront assassinés à leur arrivée.

 

Appuyé par Paul Langevin, en résidence surveillée à Troyes, Frédéric Joliot est élu à l'académie des sciences, en juin 1943. La question se pose pour certains : s'agit-il d'une compromission avec Vichy, ou de la victoire d'un camp opposé à Vichy ? Est-il vrai que Joliot est en négociation avec des industriels et envisage la réalisation d'une usine centrale produisant jour et nuit une puissance électrique de 300.000 kW avec consommation annuelle d'une tonne d'uranium ? A moins qu'il ne s'agisse que d'un projet pour les '' jours d'après'' ?

Joliot précise que son travail, en relation avec l'occupant «  concerne principalement la technique du cyclotron et la radioactivité artificielle. » et n'a aucun rapport direct ou indirect avec la guerre ; refusant toute participation à l'effort de guerre allemand.

Irène Joliot-Curie part en Suisse, pour soigner sa tuberculose. Elle obtient avec l'aide de Gentner les autorisations de Vichy.

 

La comtesse de Sallembier rejoint Duhamel, pour intervenir auprès de Brinon, et obtenir la libération de Béatrice de Camondo et de son mari, le compositeur Léon Reinach, arrêté parce que trahi par son passeur alors qu'il tentait de rejoindre l'Espagne. Anne-Laure avait suivi la conversion de Béatrice au catholicisme, ne s'étant jamais sentie de confession juive... Ils feront partie du convoi 62, avec 1200 personnes conduites vers la mort à Auschwitz.

 

Il fallait s'en douter ! Anne-Laure partage à Lancelot le souci que lui a confié Geneviève T. Un officier allemand se montre très empressé auprès d'elle pour l'inviter, et la voir seule...

 

Les ''légionnaires '' de la Révolution Nationale sont devenus '' La Milice '' ( janvier 1943) et se mettent au service de la Waffen SS ; Laval en est le chef, avec Joseph Darnand pour adjoint.

 

Un professeur de philosophie au lycée Condorcet, Jean-Paul Sartre, publie un essai philosophique "L'Etre et le Néant", et Marcel Aymé, un roman ''Le Passe-Muraille", puis le conte "La Patte du chat" dans l'hebdomadaire "Je suis partout".

Jacques Bergier qui passe à Paris régulièrement sous une fausse identité ( Jacques Verne) , informe de l'arrestation du chimiste André Helbronner chez lequel il avait travaillé , le 7 juin 1943 à Lyon, sur dénonciation d'un milicien (français) dénommé Plouvier travaillant pour la gestapo de Klaus Barbie. Il mourra en mars 1944 au KZ Buchenwald.

Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir

 

Un ami, raconte avec entrain sa soirée en petit comité de la représentation d'une pièce de Sartre '' Les Mouches '' au Théâtre de la Cité : une pièce, bien-sûr à visée philosophique. Sartre nous disait qu'il voulait s'opposer à la religion du repentir qui avait cours, suite à ''la défaite'' , Jupiter est ''le roi des mouches''. Comme Oreste, nous ne devons pas nous demander si nous sommes libres, nous devons prendre conscience que nous le sommes, nos actes sont de notre responsabilité. Le cadre mythique de la pièce, nous indique l'absolu de la liberté. Oreste tue sa mère, la reine Clytemnestre et son amant ( assassin de son père) ; et se déclarant responsable de son crime, il se libère de son destin. Cet acte engage alors tout le peuple d'Argos, à qui, Oreste révèle, qu'il est libre. Cette pièce n'aura sans-doute aucun succès, dans notre contexte d'occupation ; pourtant... ! Le jeune Albert Camus était présent, il l'a félicité et sans-doute remercié pour l'article de Sartre sur L'Etranger.

Voir les commentaires

1942 - Drieu la Rochelle – Jacques Decour

Publié le par Régis Vétillard

En mai 1940, Drieu avait décidé de ne plus travailler avec la NRF, une revue qui publiait le communiste Aragon. Il avait conservé un désir de vengeance envers elle, alors que Paulhan avait suspendu sa publication. Il s'engagea avec le soutien d'Abetz, de la republier ; Gallimard soucieux de ne pas tout perdre, a choisi le moindre mal. Paulhan, refusait la co-direction, mais gardait certaines responsabilités...

Drieu écrit dans ''Je suis Partout'', des articles antisémites, comme celui intitulé «  De Ludovic Halévy à André Maurois ou l'impuissance du juif en littérature. ». Le 23 juin 1941, « Ils n'ont rien oublié, ni rien appris. », il s'en prend à Mounier et à Esprit qui reparaît à Lyon.

« La Revue Esprit - qui représenta si parfaitement pendant les dernières années le culte de la confusion, le barbouillage des esprits sous prétexte de mesure et de scrupule et bref, qui sut maintenir par des moyens, tantôt inconscients, tantôt sournois, une partie de la jeunesse française dans l'esprit du plus vieux centre gauche - a reparu à Lyon cet hiver. Emmanuel Mounier persévère dans son libéralisme camouflé, dans sa méthode de pieux sabotage de tous les efforts français pour sortir de l'hésitation. (…) »

Goebbels Accueil Weimar

Drieu fréquente assidûment les réceptions de l'ambassade ( Abetz) et les manifestations organisées par l'Institut allemand. Il sympathise avec Karl Epting ( directeur de l'institut allemand), Ernst Jünger et le lieutenant Heller. En 1941, du 5 au 11 octobre , il est présent au congrès de Weimar, organisé par les services de Goebbels, il est accompagné de Robert Brasillach, Ramon Fernandez, et de Jacques Chardonne et Marcel Jouhandeau, grands stylistes qui se disent ''apolitiques''...

Weimar, ville culturelle emblématique empreinte d’une tradition de philosophie, d’art et de sciences éclairées. Cette jolie ville, vit dans la fumée des crématoires nazis, situés à proximité, à Buchenwald.

Ce camp de concentration, érigé en 1937 par les premiers détenus allemands qui déboisèrent la forêt de hêtres de l’Ettersberg. Sur l’esplanade du camp, un arbre a été conservé : celui où Goethe aurait conversé avec Eckermann.

A présent, ici, arrivent des centaines de personnes, entassées, une centaine de corps serrés, soudés, par wagon. Un voyage de plusieurs jours.

Un train pour Weimar

C'est un autre type de train, qui a été affrété par le Ministère du Reich à l’éducation du Peuple et à la Propagande, de Joseph Goebbels, aux représentants des intellectuels français avec de nombreux autres venus de toute l'Europe. Ces écrivains traversent le Reich et visitent les ''hauts-lieux'' de culture. Jacques Chardonne, est séduit : « Les Allemands d’aujourd’hui ne sont pas un peuple de guerriers. C’est un peuple de constructeurs » (La Gerbe, Paris, 13 novembre 1941). il applaudit Goebbels, à son initiative de créer à Weimar « l’Association des écrivains européens ».

Le message de cette invitation, est de faire entendre à toute l'Europe, la voix de l'Allemagne : il s'agit de de « convaincre l’Europe de la force spirituelle de la nouvelle Allemagne pour intervenir elle-même spirituellement dans l’histoire du monde, ce qui se réaliserait avec une ampleur inimaginable après le victoire » Rudolf Erckmann.

Dans le hall du bâtiment du NSDAP se trouve un stand présentant des livres and-bolcheviques. Les organisateurs veulent ainsi, comme l’a dit Rudolf Erckmann, « montrer combien il faut garder à l’esprit, même pendant ces journées de Weimar, la signification profonde de la guerre en Russie ».

Et il poursuit : « Ce n’est pas le culte du passé qui motive une telle action. Elle ne peut trouver son origine que dans la force interne et externe du Reich et l’autorité du Führer. Le miracle de Weimar dans la construction d’une nouvelle Europe réside peut-être dans ce que l’Allemagne, à la confiance qui règne parmi les peuples européens, ajoute maintenant aussi une base culturelle ».

 

Tous les hôtes étrangers sont invités à s'incliner devant les tombes des grands de Weimar , dans le palais Wittum éclairé par des centaines de bougies. C’était la résidence baroque où Anna Amalia veuve, passa les trente dernières années de sa vie (1775-1807), et reçut les grands noms de la culture allemande, tels que Wieland, Goethe, Herder et Schiller.

Jacques Decour

 

Au même moment, Jacques Decour (1910-1942) - que Lancelot ne connaît pas – jeune professeur d'allemand au lycée Rollin, professe que le germanisme était un humanisme et fait partager son amour de Heine, Hölderlin, Nietzsche. Il fait lire Lessing, dont le ''Nathan le Sage'' condamnait par avance les persécutions hitlériennes, il rappelle le «Guillaume Tell» de Schiller, et que Goethe reste le champion de la diffusion des Lumières. Il travaille à faire connaître ''l'Homme sans qualités'', de l'Autrichien Musil. Résister au fascisme, pour lui, c'est faire lire les auteurs allemands condamnés par le IIIe Reich, parmi lesquels le juif Heine. C'est encore , par des tracts en allemand, rappeler aux forces d'occupation qu'en servant Hitler, elles trahissent Kant, Hegel, Bach, Beethoven ou Dürer, et c'est imprimer en allemand, à la une de ''la Pensée libre'', l'épitaphe de Goethe: '' Mehr Licht'' (''Plus de lumière'').

<-  Jacques Decour au Lycée Rollin

Jacques Delcour, est aussi communiste. Grand, le visage fin et la bouche moqueuse ; il est devenu en 1932, le plus jeune agrégé d'allemand de France. « Il ne faut pas oublier que c'est à toute la littérature allemande qu'Hitler a déclaré la guerre. » dit-il.

Il fait avec Georges Politzer et Jacques Solomon, ''la Pensée libre'' qui paraît au début de 1941.

Avec Paulhan - alors qu'il cède sa place à Drieu la Rochelle - Jacques Delcour, épaulé par Aragon, ont le projet des Lettres Françaises, c'est-à-dire du journal du Comité National des Écrivains (C.N.E) naissant.

 

Un mois après le retour à Paris de Drieu la Rochelle et ses collègues de ce voyage à Weimar, Jacques Decour les accuse dans "Une lettre ouverte à MM. Bonnard, Fernandez, Chardonne, etc., anciens écrivains français" : « Vous revenez d'Allemagne. Tandis qu'à Paris, la Gestapo emprisonnait cinq membres de l'Institut de France, vous alliez, "invité" par l'Institut allemand, prendre à Weimar et à Berlin les consignes de M. Goebbels (...) Honneur, fidélité, patrie: pourquoi faire sonner à vos oreilles des mots dont le sens vous échappe? (…) Vous avez choisi l’abdication, la trahison, le suicide. Nous, écrivains français libres, avons choisi la dignité, la fidélité, la lutte pour l’existence et la gloire de nos lettres françaises. ».

Jacques Decour sera arrêté et exécuté deux mois plus tard.

Le 17 février 1942, Decour ( il a 32 ans) est arrêté, avec ses camarades, par la police française. C'est cent seize militants communistes, qui seront arrêtés et transférés en tant que terroristes à la Gestapo, et dont le tiers va être fusillé comme otages au Mont Valérien.

Jacques Decour est fusillé le 30 mai 1942 à 14 h, une semaine après Georges Politzer et Jacques Solomon.

Dans sa dernière lettre à ses parents, il écrit: «  (…) Vous savez que je m’attendais depuis deux mois à ce qui m’arrive ce matin, aussi ai-je eu le temps de m’y préparer, mais comme je n’ai pas de religion, je n'ai pas sombré dans la méditation de la mort : je me considère un peu comme une feuille qui tombe de l’arbre pour faire du terreau. La qualité du terreau dépendra de celle des feuilles. Je veux parler de la jeunesse française, en qui je mets tout mon. Espoir... »

Voir les commentaires

1941 – Paris -2- Drieu la Rochelle

Publié le par Régis Vétillard

Le 13 novembre 1941, Drieu la Rochelle fait paraître ses ''Notes pour comprendre le siècle''. Ce livre a intéressé Lancelot pour sa manière intelligente et courageuse de comprendre les raisons qui ont conduit les français à ce désastre actuel. Il est courant de mettre en avant des responsabilités superficielles et institutionnelles ; Drieu préfère ici étudier la question culturelle du déclin et la renvoie à chacun : ne s'agit-il pas d'un déséquilibre du corps et de l’esprit ? Il en fait une lecture historique.

 

A la Renaissance :  « Dans les villes commence à se former la conception bourgeoise de la vie, la conception intellectuelle et rationaliste de l’homme sans corps, de l’homme assis » (p. 43). Il présente la Réforme comme une déviation du christianisme dans un humanisme rationaliste.

Un premier romantisme détache l'esprit de l'homme de son corps, dans une mystique matérialiste exaltant une vision dégradée du corps. Cependant Drieu analyse, dans le mouvement symboliste, une reprise du romantisme vers cette fois une mystique de la force par un retour au corps. Drieu apprécie – dans ce sens – Claudel ; « le cercle est bouclé, l’homme s’est reconstruit, l’âme et le corps après une si longue séparation se sont rejoints » (p. 87).

Le prophète Nietzsche, « jette un anathème écrasant et bientôt définitif sur tout le rationalisme » (p. 105).

Drieu pense que le national-socialisme peut retrouver l'harmonie médiévale : « L’homme nouveau a réuni les vertus qui étaient depuis longtemps dissociées et souvent opposées les unes aux autres : les propriétés de l’athlète et du moine, du soldat et du militant » (p. 120).

- Cette notion de force, n'est-elle pas pour le fascisme un moyen d'embrigader... ? Après tout les universités anglaises utilisent, avec plus de naturel, le culte de l'esprit dans un corps sain ; répond Lancelot.

- Et Nietzche, lui-même, n'est-il pas éloigné de cette folie raciste du nazisme ? Il fait l'éloge du cosmopolitisme européen et de ses différentes cultures grecque, romaine, chrétienne et juive. Le surhomme n’appartient pas à une race : il est un esprit libre, dégagé de la morale religieuse.

- Le fascisme au contraire du symbolisme qui vous va bien, s’absorbe totalement dans l'action. Le symbolisme s'oppose à l'idée de collectivisme... Non ?

Vous voyez le fascisme en esthète, en décadent... Vous êtes paradoxal.

A Paris, la population se sent abandonnée par Vichy... En zone occupée, Vichy semble loin, décalé, soumis.

Jusqu’en fin 1940, les parisiens pensaient voir le Maréchal revenir dans la capitale. De plus en plus de gens pensent que Pétain décide sous l'influence de son entourage ou de l'occupant. Personne ne connaît le nom des ministres, seul celui de Laval est cité, en mal.

A Paris, le préfet gère, sous les ordres des autorités d'occupation ; et l'occupant se sert, abondamment, sans restriction... Des tracts, des affichettes circulent, et imaginent toutes sortes de petites résistances. La manifestation du 11 novembre 1940, initiée par des jeunes a marqué les esprits.

Chaque parisien passe de nombreuses heures à faire la queue. Aussi, ceux qui ont les moyens, paient des coursiers pour effectuer certains achats ; ceux-ci utilisent éventuellement leur carte de priorité ( de blessé de guerre, par exemple).

Lancelot a la chance de profiter des soins d'une bonne, qui s'occupe avec beaucoup de succès de fournir l'essentiel, avec l'aide de la concierge également - personne clé où sa loge sert de lieu d'information, d'échange et de solidarité - le tout grâce aux moyens financiers de la comtesse de Sallembier et de son fils ; et des ressources alimentaires que procurent Fléchigné. Une chose est très difficile à dompter, c'est le froid.

 

Par ce froid février 1941, la proposition faite à la France occupée, est la ''nouvelle Europe'' et à l'appui une Exposition : « La France européenne » inaugurée le 6 juin 1941 à Paris au Grand Palais ; avec réception pour le grand monde. Anne-Laure de Sallembier est invitée avec les personnalités féminines que sont la princesse de Polignac, la comtesse de Chambure ou la duchesse de Noailles qui se pressent également aux galas organisés par Otto Abetz. Fernand de Brinon qui représente le gouvernement français auprès des allemands mène la grande vie, et retrouve régulièrement Josée de Chambrun, la fille de Pierre Laval. Que ce soit lors de premières au théâtre et à l'opéra, ou de grands dîners, les habitués peuvent croiser Otto Abetz et sa femme, Gerard Heller, Ernst Jünger, de nombreux militaires allemands avec les Cossé-Brissac, la duchesse d'Harcourt, le prince de Beauvau-Craon, les Dubonnet, les Morand, le couple Brinon, Jean Luchaire et sa fille Corinne, Arletty, Cocteau, Sacha Guitry...

 

Par exemple, Lancelot put retrouver Jean Luchaire au faite de sa gloire, lors d'une grande soirée en l'honneur du 100ème numéro de son journal ''Les Nouveaux Temps'' et où fut conviée la haute société parisienne ainsi que des personnalités allemandes comme son ami Otto Abetz, ou Ernst Achenbach, le Dr Schleier et le Dr Michel.

 

Lancelot s'est entretenu avec Gerhard Krüger (1908-1994), personnage assez antipathique qui ne tient à parler qu'allemand. Il se présente comme historien, adhérent du NSDAP, et qui défend une spiritualité païenne face à un christianisme qui pour '' l'être allemand'' serait une aliénation. Plus intéressant, il relate comment Hitler a ordonné - après l’Anschluss de l’Autriche au Reich nazi en 1938 – que les insignes impériaux (Regalia) soient rendus au Reich à Nuremberg. Ces '' Reichskleinodien'' sont composés en particulier de la couronne impériale qui a peut-être été portée par Otton Ier ( Xe s.), et de la Sainte-Lance ( de Longinus) obtenue par Henri Ier de Germanie ( père d'Otton, et grand-père d'Hugues Capet...!). "Ce sont les reliques du Reich..."

Hitler devant les Regalia - 1938

Himmler avec la lance de Longin

 

Il est possible également de se retrouver lors de la réouverture de la saison hippique de Longchamps ; vous y croiserez certainement Geneviève Fath, la comtesse d'Oncieu de Chaffardon, la baronne de Beaufort, ou la comtesse de Monjout... Enfin, vous serez peut-être sur la liste des invités de la réception organisée par la Comtesse de Beaumont dans son magnifique jardin parisien.

Si on accepte de se tenir éveillé, de partager un tant soit peu le quotidien des français ; on sent que l'hiver 1940-1941 est dur. Il fait très froid et il n'y a plus le chauffage central, Lancelot a la chance que Louise puisse lui préparer de l'eau chaude dans un pichet de faïence. Chacun vit la difficulté pour se chauffer, mais aussi pour se nourrir... Avec de la chance, sans ticket, on peut avoir des sardines salées de Tunisie, des légumes au vinaigre, des abricots sucrés... On dit que les poils du lupin peuvent remplacer le café...

Voir les commentaires

1941 – Paris –1– Drieu la Rochelle

Publié le par Régis Vétillard

Lancelot remonte vers Paris, en passant par Royat, à l’Hôtel Saint Mart où il rencontre le colonel Bonotaux du SMA, puis par Vichy. Il utilise le train spécial Paris-Vichy qui, deux fois par semaine, fait la liaison pour les ministres et les fonctionnaires qui s'arrête à la gare de Moulins-sur-Allier, point de passage de la ligne de démarcation en train.

Passer la frontière, à Moulins, ce n'est pas ordinaire, surtout pour Lancelot qui n'est pas encore retourné à Paris, depuis la défaite... Des soldats allemands, surgissent dans les wagons, vident les couloirs et réclament poliment dans chaque compartiment, les ''ausweis'' ( laisser-passer).

Selon la couleur, on reconnaît des ausweis, pour un voyage, ou plusieurs. Certaines catégories de personnes, bénéficient d'un ausweis permanent, comme Lancelot.

Les habitants de Moulins, peuvent présenter au poste de passage, un Ausweis für den kleinen Grenzverkehr (laissez-passer pour la petite circulation frontalière) provisoire... En règle générale, l'ausweis est très difficile à obtenir...

 

A la gare, la mère de Lancelot l'attend, seule, sans voiture ; et lui fait la surprise d'une promenade en vélo-taxi.

Qu'il semble étrange d'arriver à Paris, pour quelqu'un comme lui qui l'avait quittée avant l'armistice, et d'y reconnaître sa ville, vide, dans les mains d'allemands qui se sentent chez eux. Des drapeaux nazis ont remplacé les couleurs françaises. Les horloges, même, sont à l'heure allemande, plus matinales d'une heure.

Par crainte que l'automobile soit repérée et réquisitionnée, elle ne sert plus qu'aux alentours de Fléchigné.

Lancelot occupe avec sa mère un appartement rue Victor-Hugo ; avec eux également, une ''bonne'' - Louise M. - qui s'était déjà occupée de Lancelot quand il allait au petit-lycée Janson de Sailly.

 

La nuit, Paris est plongée dans l'obscurité et le silence, humiliée.

Abetz offre à Drieu le rôle culturel qu'il envisage pour lui, afin de servir les vainqueurs. C'est à la tête de la prestigieuse NRF, que Drieu revient ; après s'en être écarté reprochant à Paulhan de soutenir des écrivains communistes. Gallimard accepte, pour sauver la « maison » ; et un premier numéro est paru en décembre 1940.

Une ''liste Otto'' juge subversifs 850 auteurs et 2000 titres, et appelle à les faire disparaître des rayons de librairie.

Drieu la Rochelle

 

Lancelot retrouve Drieu, non pas, comme il l'imaginait, en homme satisfait, à la tête de la Nouvelle Revue Française, mais en homme frustré de se retrouver, déjà, dans une voie sans issue... Faute de pouvoir faire l’œuvre littéraire qu'il imaginait, il aimerait, dit-il, être l'éminence grise d'un fascisme français ; qu'il ne voit pas dans ce Vichy pauvre et triste, et qui présente les mêmes tares que la France de gauche, qu'il a remplacé. « Peu de fascisme, peu de vie ! ».

 

Par l'intermédiaire de Drieu, Lancelot croise Otto Abetz, il l'avait rencontré en 1930, chez Jean Luchaire, quand se montait le projet de Sohlberg. Puis, ce professeur de dessin au lycée de Karlsruhe, a rejoint le NSDAP (1935) et animé le Comité France-Allemagne grâce auquel il a travaillé et sympathisé avec Drieu la Rochelle. Marié avec une française, Abetz s'est senti humilié quand il fut expulsé en début d'été 1939 par le gouvernement Daladier. A présent, il revient à Paris avec le titre d'ambassadeur du Reich à Paris.

Pétain - Abetz - Laval

Drieu a senti qu'Abetz n'avait pas vraiment confiance en Lancelot, qu'il rattache ( après Daladier...) à Vichy et à ses services de renseignements... Drieu, dit-il, tente de persuader les ''occupants'', de ne pas pratiquer ce qui fut une erreur de la France envers l’Allemagne. Il tente de convaincre Abetz, qui fait semblant de le comprendre, que le redressement de la France dans le cadre d'une nouvelle Europe pourrait être un modèle pour les autres nations. Drieu envisage un parti unique, avec Doriot à sa tête. Les allemands se méfient d'un parti unique, et préfèrent plutôt jouer des divisions internes du pays.

Drieu raconte à Lancelot son invitation à l’ambassade d'Allemagne le 15 août 1940, seul au milieu de dignitaires allemands ; sa gêne, son angoisse même, d'être en pareille compagnie...

Lors du retour des cendres de l'Aiglon, Drieu était aux premières loges, savourant la rencontre d'un Napoléon et d'un Hitler.

Mais Drieu semble déjà désabusé : il méprise '' le vieux '' conservateur de Vichy ( Pétain); et se rend compte que les allemands n'envisagent pas de ''relever'' la France...

Voir les commentaires

1939 – Elaine – Tchécoslovaquie -

Publié le par Régis Vétillard

Cette maladie qui la maintenait de plus en plus fiévreuse, et qu'elle tenait comme passagère à ses proches, sauf à Lancelot, finit par emporter Elaine, ce mardi 21 février 1939.

Gustav-Klimt-1915-TodLeben

Lancelot, dira t-il, a ressenti ce même vertige que le héros du roman de Drieu, Gilles, alors que Pauline se meurt, et qui se voit entraîner dans une apocalypse...

Sauf que, cet amour doit avoir un sens jusque dans la mort, et selon la volonté d'Elaine : sa mort se transfigure en ''sacrifice d'amour'', voie d’accès à la contemplation de Dieu, disait-elle.

Lancelot est sonné de nombreuses semaines ; et c'est le soutien et la patience de sa mère qui le maintiennent, à la surface du cours des choses … Cependant, l'incertitude des jours prochains rend insaisissable le début d'une solution pacifique ; et Lancelot vit dès à présent les prémices de la catastrophe.

 

L'accord Bonnet-Ribbentrop ( décembre 1938) défendu par Luchaire, est dénoncé par certains de ses anciens amis comme Brossolette ; de plus, ceux-ci dénoncent le rôle d'Abetz et le réseau d'espionnage nazi...

Luchaire ne croit pas qu'Hitler souhaite étendre l'Allemagne à l'ouest : - « L'Allemagne hitlérienne ne veut pas la guerre. Elle ne l'envisage même pas pour réaliser ses revendications coloniales. » ( Luchaire dans Notre Temps, n°1000, 05/02/1939.)

 

Notre ambassadeur à Moscou, puis à Berlin ( oct 1938), Robert Coulondre, prévient Paris de la volonté d'expansion à l'Est, du 3e Reich. Il prévoit l'anéantissement de la Tchécoslovaquie, et le futur partage de la Pologne entre l'URSS et l'Allemagne...

 

** Le 15 mars 1939, les allemands pénètrent en Tchécoslovaquie. A quand le tour de la Pologne ?

Le lendemain Coulondre écrit à son ministre de tutelle une analyse lucide de la méthode hitlérienne qui marie « cynisme et perfidie dans la conception, secret dans la préparation et brutalité dans l’exécution ».

* 17 mars, depuis Londres, Chamberlain se déclare profondément affecté par cette trahison.

L'ambassadeur soviétique Souritz propose à Bonnet de travailler sur une Conférence à Bucarest pour que la Pologne, la Roumanie, La France, l'Angleterre et la Yougoslavie se protègent et fasse bloc... Bonnet plaisante sur l'ardeur des russes qu'il faut contenir ; et leur volonté de bolcheviser l'Europe.

 

A la suite de l'invasion de la Tchécoslovaquie par l'armée allemande, les membres français du '' Comité France-Allemagne'' suspendent leurs activités.

Malgré cela, Otto Abetz s'emploie à réanimer le CFA, Drieu l'en décourage... Pour lui, si son pays a manifestement choisi la guerre, il se doit d'être français et discipliné.

La ''générosité'' d'Abetz qui dépense sans compter des fonds hitlériens, touche des personnalités haut placés. Nos services, souhaitant mettre fin aux manœuvres de ce nazi, ''ami des français'', convainquent Daladier d'expulser Abetz (30 juin 1939). Il reste cependant quelques-uns de ses ''amis français'' à surveiller comme Fernand de Brinon, Melchior de Polignac, ou Abel Bonnard...

Jean Luchaire proteste de cette interdiction de séjour dans ''Notre Temps''.

Le rôle de l'espion allemand Hans-Günther von Dincklage en France est officiellement repéré, et sa nouvelle maîtresse - la baronne Hélène Dessoffy - blessée d'avoir été manipulée, le quitte.

 

Lancelot se souvient d'une conversation avec Drieu la Rochelle, alors que son ouvrage ''Socialisme fasciste'' était publié, c'était en 1933 ou 34. Il décrivait une sorte de théocratie où fusionnaient spirituel et temporel... Devant la crainte exprimée d'une extrême violence qui n'était déjà plus imaginaire ; Drieu se montrait préoccupé par la pente guerrière engagée ; mais la jeunesse française se devait d'être plus sage, se « façonner à une tension plus saine et peut-être pus durable » disait-il ; il pensait au sport. Le fascisme à la française, ce serait la rénovation, en sauvegardant la paix.

Aujourd'hui, la situation s'est aggravée ; cette littérature - qui de Drieu jusqu'à Céline, se complaît à pointer le Mal et à s'en repaître - renvoie le trouble de Lancelot à ce qu'en disait Maritain alors qu'il conversait avec Mauriac : '' décrire le Mal, oui, mais sans connivence ''.

C'est également ce que soutient Anne-Laure, sa mère : dans les livres de Bernanos, et même ceux de Mauriac, on y sent présente, la Grâce. « Elle peut y être méprisée, en apparence refoulée », et pourtant tout nous y conduit... D'une force mystérieuse... Celle qui appartient aux saints, dirait Bernanos... Le Mal n'en est pas légitime pour autant.

Mauriac soutient être fidèle à ce qu'est l'homme, la Grâce sait se frayer un chemin dans une œuvre, comme dans une vie, trouble bien sûr...

« Vous vous croyez innocent ?» demanderait Mauriac... « Osez donc faire l'appel des êtres qui ont traversé profondément votre vie, évoquez les morts et les vivants ; cherchez votre trace dans chacune de ces destinées. N'avez-vous volé le bonheur de personne ? La foi, l'espérance, la pureté de personne ? » ( Journal I). Quel exercice difficile, se demande Lancelot ; alors qu'il ne peut plus rien ajouter à la destinée de sa rencontre avec Elaine..

 

Voir les commentaires

1936 - Le Front Populaire

Publié le par Régis Vétillard

Paul-Iribe et Coco-Chanel

Gabrielle Chasnel, après s'être fait construire sa maison ( La Pausa) à Roquebrune, décide de vivre dans une suite de l’hôtel Le Ritz, à Paris, proche de son atelier. Paul Iribe, décorateur ''art déco'' cinéaste, illustrateur, relance sa revue nationaliste et xénophobe ''Le Témoin'' ; il dessine régulièrement une ''Marianne'' sous les traits de Chanel, dont il est l'amant et qu'elle soutient financièrement. Selon Iribe, la France est livrée à ses ennemis intérieurs : les juifs étrangers, la mafia maçonnique, Thorez, Blum ...etc

En août 1935, Iribe décède brutalement chez elle à La Pausa.

 

Chanel, dans les années trente fréquente des milieux de la vie mondaine, parmi lesquels une élite pro-allemande, que Lancelot connaît comme telle : Marie-Louise Bousquet, la duchesse Antoinette d'Harcourt et Marie-Laure de Noailles en font partie, et connaissent bien le baron Dincklage, et Otto Abetz qui leur confie des anecdotes sur Hitler, et leur assure que si les juifs français poussent à la guerre, la France ne doit craindre aucune agression de l’Allemagne.

L'opinion qui se partage dans ces salons, est que l'Angleterre et l'Allemagne devraient s'entendre ; et attaquer l'Union Soviétique qui menace l'Occident.

 

Le 1er Mai 1936, Gabrielle Chanel a peur ; des milliers d'ouvriers défilent et chantent l'Internationale. Les grèves qui suivent obligent des usines à fermer, les vendeuses de sa boutique rue Cambon, ses couturières, suivent le mouvement; serait-ce l'avènement du bolchévisme ? « Vous ne me direz pas que ces gens-là n'étaient pas des malades. Je vous le dis: 1936, c'est le tournis.»

 

Dimanche soir 3 mai 1936, devant les locaux du quotidien '' Le Matin'' , les résultats des élections sont projetés sur des tableaux lumineux. Lancelot croise Jean Cavaillès, enthousiaste avec la foule, de la victoire du Front Populaire. Cavaillès connaît Simone Weil, et surtout son frère par les mathématiques.

Enfin, c'est avec Elaine, à l'écoute de '' Radio-Cité'' qu'ils suivent cette soirée électorale dans toute la France...

Dans le gouvernement du Front populaire de 1936 à 1937 ; au ministère de la Guerre, Lancelot retrouve Edouard Daladier, radical, il appelait à l'union avec la SFIO. Il plaide pour un large plan de réarmement, face à Hitler.

 

Emmanuel Mounier, reste sceptique, ce qu'il nomme « la mystique du 6 février » et ses remous, n'a rien donné; « Un grotesque carnaval de trois semaines vient de ouvrir sous le prétexte officiel d'un acte de souveraineté respectable : comment passer sans rougir le long de ces panneaux où étale une frénésie ridicule de bacchanale. » ( dans Esprit N°44, de mai 36). Cependant, Mounier adresse « un salut fraternel. aux vainqueurs dans toute la mesure où ils serviront sans asservir » ( Rassemblement populaire - Esprit N°45 juin 1936)

Mounier considère le Matérialisme comme le Mal absolu : il craint la place prépondérante du marxisme dans la coalition de gauche : « Les causes sociales et humaines dont le Front populaire se fait avocat sont les nôtres, à les prendre dans leur aspect le plus immédiat. Mais l'élément offensif de ce rassemblement, c'est aujourd'hui encore, demain si nous mettons ordre, le marxisme, c'est-à-dire une conception totale de l'homme et de l'Etat à laquelle nous ne pouvons adhérer, bien plus, que nous ne saurions que combattre en ses positions dernières, après avoir défriché tant qu'on voudra les malentendus intermédiaires comme nous avons déjà fait plusieurs reprises » ( Rassemblement populaire - Esprit N°45 juin 1936)

Denis de Rougemont, rejoint Mounier et craint que le Front Populaire soit l'affaire du parti Communiste, qui sous le nom de ''Liberté'', ne veut que « la dictature, l’étatisme et la guerre. »

Gaston Bergery, élu député du Front Populaire, avec son parti frontiste, apporte un soutien critique au Front Populaire. Bertrand de Jouvenel, se dit opposé à cette politique et rejoint cette même année , avec Drieu la Rochelle, le  Parti populaire français (PPF) créé en juin par l'ancien membre du Parti communiste Jacques Doriot, qui déclare : « Je ne veux copier ni Mussolini, ni Hitler. Je veux faire du PPF un parti de style nouveau, un parti comme aucun autre en France. Un parti au-dessus des classes (…) ».

 

Aimée Loste tenait salon, ce jour de janvier 1935, où se croisent Christiane Renault, l'épouse de l'industriel, et Drieu la Rochelle. Ils deviennent amants, et « l'ignorante » se laisse conduire : elle lit Stendhal, Giraudoux, et les romans de Drieu. En 37, initiée à la mythologie grecque, elle part en Grèce avec ''Une femme à sa Fenêtre'' ; elle assiste avec son amant à une conférence de Jacques Doriot, ils mangent tous ensemble un mois plus tard.... Mais, elle le fait réfléchir et lui se préfère au-dessus des partis. Drieu présente à Christiane, Otto Abetz.

Louis Renault, que l'on présente comme riche, puissant, brillant et brutal fait rapidement des affaires avec Hitler présent à l'Exposition internationale de l'automobile de Berlin.

Il présentera en 1939 – la Juvaquatre, voiture populaire pour s'extraire de la ville qui met en danger l'intégrité et la vitalité du peuple...

Voir les commentaires

1935 - Le nazisme, et les fascismes. 2

Publié le par Régis Vétillard

Cette réunion fait ensuite le point sur la politique étrangère, et soumet des axes de réflexion pour de futurs articles sur l'année 1935-1936... Ensuite la réunion est, semble t-il, devenue plus informelle et les notes relevées par Lancelot reflètent l'intensité des échanges.

 

- Le fascisme, dit Drieu, ne présente pas de dialectique au contraire du communisme, comme lui il est pragmatique. On juge la société qu'il prône à ses résultats . Il n'y a pas de fascisme universel, il n'y a que des fascismes, chacun étant lié à un espace national, culturel...

- Pragmatique, je le suis aussi, quand je prend acte de l'existence du nazisme et de ce qu'il apporte à la communauté allemande. Il a mis fin à une période de désordre ; pour une Allemagne dynamique qui s'est relevée des pires difficultés économique.. !

Sans-doute est-ce le témoignage vibrant de Drieu sur ce qu'il a vu à Nuremberg qui a délier les langues sur nos craintes pour les uns, nos aspirations pour les autres...

- Cent mille personnes qui regardent défiler et danser cinquante mille jeunes gens. Des chœurs et des chants admirables : une tragédie antique. C'était écrasant de beauté !

Bien qu’essentiellement pragmatique, il y a une dimension spirituelle dans le fascisme : il s'agit d'une mystique nationale, liée au paganisme, aux forces du milieu présentes dans la tradition...

 

- Remarquez ceci, dit Alfred Fabre-Luce – L'Europe a voulu lutter contre la Révolution Française. Et, qu'ont fait nos voisins ? ils ont fait des concessions à la démocratie... Et bien, il nous faut aujourd’hui faire des concessions au fascisme pour lutter contre le nazisme ( un fascisme étranger). D’un certain point de vue, défense de la liberté, limitation de la liberté sont devenues synonymes. 

Je ne veux pas rester tourné vers le passé. Observons notre temps, avec la volonté d'en saisir les mécanismes, d'en démonter les rouages, pour aller hardiment au cœur des choses, à l'essentiel.

 

Drieu la Rochelle reprend :

- Je refuserais volontiers que la politique ne soit que fonctionnelle, je souhaiterais qu'elle soit éruptive, une révolution permanente et non statique Le communisme en URSS est devenu une forme dénuée de mouvement..

- Les événements de février 1934, ne sont redevables ni à la droite, ni à la gauche … ! C'est l'expression d'un rejet de la politique ; et j'ai reconnu là, le miracle de la vie...

L'agent de cette force, c'est la jeunesse ; elle est force de destruction et ne peut s'opposer aux partis de gauche et de droite...

Pour aller de l'avant, il faut un tiers parti, fasciste c'est à dire social et national. Fasciste parce qu'en rupture... Fasciste parce qu'en fidélité exclusive à un chef.

Doriot - PPF - 1936

Qui, en France, serait le chef ?

- Il n'existe pas encore... Peut-être, sûrement ... Doriot.

« La grande pensée, c’est celle-ci: l’homme s’est aperçu qu’il était en train de mourir et il a voulu se sauver. L’homme s’est aperçu qu’il était en train de mourir dans son corps et qu’il ne pouvait se sauver qu’en sauvant son corps. » «Le PPF, est le parti du corps vivant» (1937), dans Chroniques politiques de Drieu.

- Le corps sportif, jeune est une bonne image ; parce que le corps biologique, comme le corps politique, sont condamnés à se restaurer sans cesse dans le mouvement.

 

Une argumentation opposée s'exprime, en particulier avec Pierre Brossolette.

P.Brossolette 1903-1944

Il reconnaît avoir pensé qu'Hitler ne préparait que le retour des Hohenzollern, et un retour du conservatisme passé. Aujourd'hui, on assiste au déchaînement de la plus violente et la plus décourageante des frénésies nationalistes ; et dont on ne peut attendre que la guerre.

Le fascisme allemand, mais également tout fascisme, déshumanise l'homme.

L'humaniste, le républicain aussi, a foi en l'homme, mais il parie sur la personne. Le fascisme a foi dans le sang de la race au mépris de l'individu. L'individu y abdique sa liberté. Le fascisme excite la haine du peuple contre l'étranger..

 

Lancelot reprend quelques arguments de Jean Cavaillès. - Premier point : le nazisme consiste dans la haine et le refus de l'universel. - Un deuxième point caractéristique du fascisme: l'uniformité et la disparition de l'homme derrière le parti. - Un troisième point : le germain aurait recours au cœur, à l'intuition de la race, contre le rationnel, l'intellectualisme, qui ne serait qu'un jeu des juifs et des étrangers... Simpliste et absurde!

Enfin en Allemagne, la propagande massive n'est possible qu'avec une puissante aide financière, et le soutien des petits bourgeois ( fonctionnaires, commerçants, industriels..) exaspérés qui aspirent à l'ordre.

 

De la discussion animée qui suit, Lancelot a noté que le fascisme parlerait plus de fraternité que de liberté, et d'égalité;  parce que le fasciste abandonne une partie de sa liberté au profit de la collectivité ; et l'égalité au profit de la hiérarchie.

Cependant : tous considèrent que, on peut craindre une Allemagne nazie qui militarise et affirme la supériorité de la race aryenne ; même si certains minimisent le danger et doutent qu'elle puisse signifier la disparition physique de la race juive, ils ajoutent : on peut déplorer la cruauté, mais cela ne peut faire oublier le problème de la ''question juive''...

Hitler en parade à Nuremberg, novembre 1935

Drieu, continue :

- Il y a une ''joie fasciste '' manifestée par ses adhérents ; on peut la critiquer, mais elle est là.

On est frappé en Allemagne de ressentir l'enthousiasme du peuple pour fêter sa poésie, son romantisme wagnérien...

- L'impérialisme allemand ne doit pas être oublié ! C'est à nous de nous présenter aussi forts ! Nous pourrions faire aussi bien, mais notre démocratie est décadente, passive avec une morale de midinette … Il nous faut retrouver le sens d'un ordre nouveau, le goût de l'héroïsme, l'exigence de la grandeur.

Drieu maintient que l'esprit fasciste est anti-conformiste, donc anti-bourgeois...

Voir les commentaires

1 2 > >>