1943
1943-44 – La vie continue.
D'après la presse, Daladier, Blum et Gamelin, auraient été amenés en Allemagne. Les examens des étudiants pourraient être supprimés, ou réduits... On craint que ce soit pour les recruter en Allemagne. Les uniformes verts sont moins présents dans les rues.
Drieu se prépare pour un voyage en Suisse. Il y verra de Jouvenel. Y restera t-il ?
« Les communistes soutiennent De Gaulle contre les américains. Tout présage le succès du communisme.» annonce t-il.
Sur '' Radio-Paris'' Hérold-Paquis dans sa chronique, décrit l'arrivée, à Alger, du communiste André Marty ( venu de Moscou), comme l'annonce d'une répression sanguinaire.
En Afrique du nord, se joue le destin de la France et Giraud soutenu par les américains, aurait laissé la place à De Gaulle.
''Le Matin'' du 18 septembre 1943, annonce « la condamnation à mort de Pierre Pucheu, ancien ministre de l'Intérieur du défunt Darlan » avec ce titre : '' Rien ne sert de trahir...''. Le bruit avait couru qu'il avait rejoint Giraud.
Durant l'été 1943, un million d'exemplaires du 6ème et dernier tract de la Rose Blanche, ont été dispersé sur le territoire allemand, par l'aviation anglaise. Ainsi, ce n'est pas la ''Pierre'' qui a été lâchée sur l'Allemagne, mais les pétales de la ''Rose''...
Cependant les recherches de la Pierre, sont toujours en cours; et entretiennent dans le public, la crainte du cataclysme nucléaire...
Le 20 juillet 43, l'entière édition de '' L'Histoire sainte – Le peuple de la Bible '' de Daniel-Rops ( Fayard) a été saisie et détruite par la Gestapo ! Trois jours avant, un article de René Gerin (*), dans le journal collaborationniste L'Œuvre de Marcel Déat écrivait : « Dans sa conclusion. M. Daniel-Rops, s'en tenant au seul plan historique, développe trois observations. Il s'étonne, d'abord, qu'Israël ait traversé les siècles sans jamais disparaître : « Jusqu'à nos jours, déracinée de sa terre, dispersée dans le monde, la race héritière et infidèle continue son existence indestructible, comme une écharde dans la, chair vive des nations, qu'elle inquiète et qu'elle oblige à s'interroger. » En second lieu. M. Daniel-Rops marque le caractère progressif du développement de cette histoire, depuis le monothéisme d'Abraham jusqu'au principe de la loi de Moïse, et à la métaphysique et à la morale des prophètes, qui préparent le christianisme. Troisième observation : le témoignage d'Israël, si grand qu'il soit, apparaît Inachevé. Pour lui trouver sa conséquence logique, M. Dandel-Rops répète avec saint Paul : « Finis enim Legis, Christus » ( Christ est la fin de la loi) et, avec Pascal : « Jésus-Christ, que les deux Testaments regardent, l'Ancien comme son attente, le Nouveau comme son modèle, tous deux comme leur centre. ».
(*) René Gerin, est membre, comme Robert Denoël, de ' La Ligue de pensée française ', une organisation de gauche plutôt favorable à la collaboration avec l'Allemagne.
Paru en mars 1943, chez Denoël, « ''Ravage'' de M. René Barjavel porte en sous-titre : roman extraordinaire. En effet, et Dieu merci, l’action n’en est pas ordinaire. Elle se passe en l’an 2052. La civilisation matérielle est arrivée à un stade que chacun peut imaginer comme il lui plaît et que M. René Barjavel Imagine, lui, avec un humour féroce, d’autant plus féroce qu’il ne sera peut-être pas toujours perçu. Par exemple, quand il glisse une phrase de ce genre : « La technique du plastec (un nouveau matériau) avait permis de pousser très loin l'imitation de la nature, objet suprême de l'art. » Suit la description d’une statue des temps futurs qui imite la nature... à fond, si j’ose dire! Je recommande aussi la page où il est question des biftecks aux pommes, débités en série : viande et légumes artificiels, bien entendu, les biftecks sont taillés élans une « mère » qui se reconstitue au fur et à mesure. Bref! c’est le triomphe de la rationalisation. Et brusquement la catastrophe. » La Croix du 15 mai 1943. Ce journal regrette le traitement que l'auteur fait du christianisme, et de l'image du Christ dans un asile d'aliénés.
Dans ''Je suis Partout '' du 24 septembre 1943, commence la parution en feuilleton du nouveau roman '' extraordinaire '' de Barjavel : le Voyageur Imprudent.
Le 11 octobre 1943, Lancelot et sa mère assistent à la première de ''Sodome et Gomorrhe'', pièce de Giraudoux, au théâtre Hébertot, avec Edwige Feuillère et Gérard Philipe . Beaucoup de monde. Ils croisent Valéry, accompagnée de sa femme Jeannie, qui se plaint de la longueur des tirades.
Dans le thème repris de la Genèse - Sodome serait sauvé par la présence d'un couple uni, à défaut de dix justes - Lancelot y voit la description d'une fin du monde, représentée par un divorce entre l'humain et la nature, et ici, entre l'homme et la femme. C'est vrai, cette pièce est difficile, sombre.
Anne-Laure a rencontré Giraudoux à plusieurs reprises, en particulier avec le Dr Karl Epting de l'Institut allemand, qui obtenait pour divers écrivains ( comme François Mauriac) des titres de libre circulation entre les deux zones.
Giraudoux fuyant le foyer morose d'avec son épouse Suzanne, habite à l'hôtel. Il a rompu avec sa maîtresse de 1936, qui n'est autre que Jeanne L.
Quelle surprise de de voir publier chez Denoël un ouvrage de Lanza del Vasto, Le Pèlerinage aux sources ; un récit de son voyage aux Indes et de son expérience auprès de Gandhi et de maîtres indous.
Le peintre Maurice Denis - catholique, proche de l’Action Française - a été tué par une automobile boulevard St-Michel. Il avait démissionné du ''Comité d'organisation professionnelle des arts graphiques...'' en évoquant qu'il préférait travailler dans un « régime de la liberté ». Il avait même rejoint avec des communistes le Front national des arts. Anne-Laure de Sallembier, se rend à ses obsèques à l'église paroissiale de Saint-Germain ( 19 nov 43). M. Denis, très attaché à Bergson, était dans son esthétique symboliste très proche des intuitions du philosophe. A partir de ces deux personnalités, nous pourrions évoquer, le temps, la durée, l'image mentale, l'intériorité, le signe et la figure du féminin...
Le dimanche 9 janvier 1944, Anne-Laure et Geneviève emmènent Lancelot au Cinéma pour marquer son anniversaire ( le 10 janv.). Elles ont porté leur choix sur '' le Colonel Chabert'' avec Raimu et Marie Bell, au Cinéma Marivaux. Lancelot et sa mère sont des passionnés de Balzac. Plusieurs adaptations ont servi ce romancier, dont la Duchesse de Langeais en 42. Le décalage historique, la romance permettent d'échapper au contexte de l'occupation.
Le spectateur s'attendrit sur le destin de Chabert ( bien servi par Raimu ) ; bien sûr ; mais, dans le film sa femme se retrouve dans l'obligation de défendre ses enfants et sa famille ( influence sans-doute de la politique familiale de Pétain). Nous entendons Raimu glorifier sa patrie ; et nous l'entendons conclure bizarrement : « Pour famille, la France. Pour père, l’empereur ! Ah !... s’il était là, celui-là ! Il n’aurait pas permis ! Notre soleil s’est couché ! Nous avons tous froid maintenant ! » . Cependant, n’apparaît pas à l'écran, le bellicisme de Napoléon, ni lui-même.
Si ce n'est le plaisir de voir les acteurs, d'apprécier la reconstitution de l'époque Restauration, d'être au cinéma face à la charge d'Eylau ; l'adaptation littéraire semble bien pauvre en comparaison du roman.
Jacques Bergier restait discret sur ses activités ; mais Lancelot sut qu'il fit passer certaines informations reçues à Londres, qui concernaient la base de Peenemünde - dans l’île d’Usedom au nord de l’Allemagne, sur la mer Baltique - où s’effectuaient les études et les expérimentations de fusées V2 ( V pour Vergeltungswaffe – arme de représailles) et d’après les rumeurs qui circulaient, devait effectuer une destruction totale dans un rayon de vingt kilomètres lors de son impact.
Un raid aérien britannique sur Peenemünde est organisé la nuit du 17 au 18 août 1943.
Jacques Bergier a été arrêté le 23 novembre 1943, à Lyon, par la Gestapo, et déporté à Mathausen.
Dans le journal ( La Croix du 6-janvier-44), Lancelot apprend la disgrâce du général de La Porte du Theil : il avait participé à la création des ''Chantiers de la jeunesse'' en souhaitant y insuffler les ''valeurs militaires''. Quelques jours plus tard, des personnes bien informées annoncent qu'il a été arrêté par la Gestapo. Dans le même journal, en deux lignes, le lecteur apprend que la « G. Q. G. du nouveau commandement suprême « allié » pour l'invasion de l'Europe à l'Ouest, sera établi à Londres. » Chacun, croît à l'offensive alliée; et qu'elle sera victorieuse, mais quel en sera le coût humain ?
1943 - La Pierre et La Rose Blanche
A l'occasion de lectures et de préparations de synthèses scientifiques, l'intimité qui s'est établie entre Lancelot et Geneviève, passent de l'esprit au corps. Cette nouvelle situation pourrait être simple et heureuse, si Geneviève ne pouvait cacher un évènement récent dont elle jure d'en avoir été la victime. Depuis, deux ou trois mois, un officier allemand la poursuit de ses attentions. La semaine dernière, Geneviève a accompagné l'officier; dans une soirée dont elle ignorait le contenu. Dans un appartement cossu et bien chauffé, deux jeunes femmes françaises étaient les compagnes de deux allemands. Finalement, la soirée joyeuse et arrosée, s'est achevée, à deux, dans une chambre. Elle se souvient à peine de cette relation forcée. Elle regrette tant !
Par l'intermédiaire de l'équipe de Gentner, Anne-Laure de Sallembier reçoit une copie d'un manuscrit du physicien allemand, Werner Heisenberg de l’Institut de Physique Kaiser-Wilhelm de Berlin. Des scientifiques français souhaiteraient en avoir la traduction.
Werner Heisenberg fait partie avec Louis de Broglie, Schroedinger, Pauli, Dirac, Eisntein... de ces physiciens qui ont fait de la théorie des quanta, ce que l'on a appelé : la mécanique ondulatoire.
Nous savons que les nazis, en 1941, s'en étaient pris grossièrement à Heisenberg, en le traitant d' « Ossietzky de la physique » ( Ossietzky était un pacifiste, opposant nazi et Nobel de la paix 1936) parce qu'il enseignait la relativité. L'Allemagne, ne pouvant se défaire de tous ses savants, il fut réhabilité ; et même utilisé comme éminence culturelle, pour gagner des élites du Danemark, de Pologne, des pays-Bas à la collaboration.
Kurt M. a fait partie de ces militaire de la Wermacht qui ont constitué l'équipe de Gentner au Collège de France. Gentner - jugé trop proche des français - a été rappelé en Allemagne ; mais son équipe est restée et remplacé par Wolfgang Riezler, et Herbert Jensen ( que Gentner a présenté comme un ami) . Ni Anne-Laure, ni Lancelot, n'avait rencontré Kurt M. Un matin, en civil, l'homme se rend à leur domicile. Après qu'il se soit présenté, et donné suffisamment de détails sur les personnes dont il se réfère, il prie la comtesse de l'écouter. La Gestapo est chargée aujourd'hui même de l'arrêter. Il assure avoir pris ses précautions, pour ne pas avoir été suivi; et après s'être exprimé; il disparaîtra ne voulant à aucun prix leur attirer des ennuis.
Après que sa mère ait accepté de le recevoir, Lancelot découvre l'homme et avec stupeur reconnaît celui qu'il avait secouru au château d'Uriage. Il s'était nommé '' Lithargoël '', n'avait laissé de sa présence que deux cartes du tarot ( le Fou et l'Empereur) ; et semblait être à la recherche d'une pierre ; pourquoi ? « Nur die Rose kann... ( Seule la rose peut...) avait-il ajouté. Le matin, il était disparu. ( voir : L'Ecole d'Uriage -3- Lithargoël - Les légendes du Graal (over-blog.net) )
L'homme parle très mal le français, et préfère s'exprimer en allemand.
Kurt Müller a fait une partie de ses études avec Werner Heisenberg à l’Institut de Physique Kaiser-Wilhelm. Avec d'autres jeunes gens, ils ont des contacts avec des étudiants de différentes universités allemandes, dont Munich où ils ont fondé un mouvement de résistance appelé ''Die Weiße Rose'', la Rose Blanche. L'idée était d'organiser les mêmes actions, et distribuer des tracts dénonçant la guerre, le sort des juifs et le régime nazi. L'objectif est de provoquer une prise de conscience.
Heisenberg lui-même est au courant de l'initiative de ces jeunes, et prononce à dessein les mots de « Weiße Rose » quand il peut... Il fait d'ailleurs allusion au mouvement dans le manuscrit qui vous a été remis.
Müller est incorporé en février 1943 dans la Wehrmacht en France dans le cadre du service militaire.
Kurt M. tient à faire savoir que plusieurs scientifiques allemands, dont Gentner, mais aussi Walther Bothe qui construisent à Heidelberg, le premier cyclotron allemand, empêcheront toute utilisation militaire par les nazis. W. Bothe fait partie du projet allemand d’énergie nucléaire, également connu sous le nom d’Uranverein (Club de l’uranium). De plus, Gentner tient informé de l'état de ce programme son collègue physicien suisse Paul Scherrer qui fait passer l'information aux américains.
Lancelot l'interroge sur le physicien Von Weizsäcker, dont on dit que protégé d'Heisenberg, il serait très engagé pour fabriquer l'arme nucléaire ? Kurt assure qu'ils ne travaillent pas pour faire la bombe ; l'équipe d'Heisenberg est engagée sur la voie de la connaissance ; ils tachent de savoir si des réactions en chaîne sont possibles. D'ailleurs, l’économie de guerre allemande serait incapable de mobiliser les ressources nécessaires.
L’équipe de la Rose blanche. De gauche à droite Hans et Sophie Scholl et leur ami Christoph Probst. Juillet 1942 |
Malheureusement - la presse allemande faisait déjà état du “dangereux état d’esprit” de la jeunesse estudiantine – nous avons appris « le procès de trois étudiants. Christoph Probst, Hans Scholl et Sophie Scholl, le 22 février 1943, condamnés à mort et exécutés à Munich pour la diffusion de tracts anti’hitlériens. Deux ouvriers de Freiburg. coupables de ne pas les avoir dénoncés. et une femme de Stuttgart qui leur avait fourni des fonds, ont été condamnés à 10 ans de prison. Ces étudiants étaient les fondateurs de ''la Rose Blanche ».
Thomas Mann vient de saluer à la BBC ces « courageux et magnifiques jeunes gens ». « Vous ne serez pas morts en vain, vous ne serez pas oubliés ».
A présent, nous avons le projet de faire disperser par l'aviation anglaise, sur le territoire allemand, des exemplaires du 6ème et dernier tract de la Rose Blanche. En voici la copie, nous savons que vous avez la possibilité de le faire passer en Angleterre.
Anne-Laure de Sallembier fait la transposition des paroles de Kurt M. avec ce qu'elle sait et peut, elle, en dire :
La pierre représente la bombe, et la rose la connaissance. Heisenberg expliquait que la motivation de ses recherches, n'étaient pas la pierre, mais la rose blanche. Le pierre sert à construire, mais aussi peut être utilisée comme une arme.
Les pierres ne sont pas des masses inertes ; elles peuvent être liées au ciel, d'où elles tombent. La pierre du Graal est tombée du front de Lucifer.
De la pierre peut naître la vie, Les évangiles parle de la transformation de pierre, en pain.
La rose peut être l'image de l'âme, de la connaissance pure ( blanc), de l'amour de la connaissance.
La rose blanche, pour un alchimiste renvoie au ''petit œuvre'', le premier pas vers la pierre philosophale ( l’œuvre au rouge)
La machine idéale : la chaleur, une énergie disponible.
Geneviève se passionne pour les sciences physiques ; elle est assez étonnante à persévérer, au-delà du raisonnement expérimental, dans sa traduction mathématique. Elle remplit d'une écriture soignée, des pages de calculs, assimilant le calcul différentiel et intégral. Elle a plaisir à côtoyer les infiniment petits et leurs variations. Geneviève est aussi de plus en plus présente auprès de Lancelot, elle l'accompagne dans ses laborieuses et fatigantes sorties dans Paris. Il est reconnaissant, à sa mère, mais aussi à Geneviève, de lui faire oublier, non pas la guerre, mais la défaite. Il sent poindre à présent, les beaux jours.
Lancelot interroge sa mère, sur cet officier allemand, qui pressait de près Geneviève. Anne-Laure, ennuyée d'avoir été la cause de cette rencontre, a abordé ce sujet avec elle ; et, la sent très gênée d'en parler. Elle croit comprendre qu'il se dit très amoureux d'elle; il est très attentionné, mais elle n'éprouve aucun sentiment pour lui. Elle espère pouvoir terminer cette relation très vite.
La mère de Lancelot, pense, que vis à vis d'elle, il serait juste que Lancelot se décide à clarifier ses propres sentiments.
La défaite de l'Allemagne devant Stalingrad ( 2 février 1943) - Les américains en Afrique du Nord ... - Roosevelt, Churchill et Staline – se rencontrent à Téhéran en novembre 1943 .
Chacun attend la nouvelle d'un débarquement massif des anglo-américains ; c'est ce que, les bombardements sur Rouen, Rennes, Le Mans, signifieraient.
Si nous prenions beaucoup de hauteur dans le temps, pourrions penser que la guerre est une loi de la nature ? Allons encore plus loin et interrogeons-nous ( plus tard...) sur l'hypothèse que le conflit pourrait être '' une réaction à la croissance de l’entropie irréversible que subit toute structure en non-équilibre thermodynamique. ''
Revenons à Pierre de Launay, et à sa présentation toute personnelle et passionnée, des fondamentaux de la thermodynamique.
Il fait très froid. Économiser l'énergie devient un objectif primordial lorsque les ressources en bois et en charbon s'épuisent, comme en ce temps de guerre.
'' La chaleur est une énergie qui est à notre disposition...'' En 1943, il est difficile d'entendre pareille chose, alors que tous les parisiens souffrent, l'hiver, de froid !
Dans tout corps, les molécules bougent et créent une énergie sous forme de chaleur. Cette énergie pourrait être canalisée, à l'aide d'une machine...
Pour réfléchir à cela, il nous faut revenir à Sadi Carnot (1796-1832). A l'époque, les ingénieurs sont sollicités pour déterminer quelles sont les conditions dans lesquelles une machine thermique produit ''le plus'' en consommant ''le moins''.
Sans entrer dans le détail de fonctionnement d'une telle machine, tentons de comprendre quelques principes.
Les principes de la thermodynamique ne sont pas encore posés. Mais, déjà, pour Carnot, la chaleur est un fluide et non un combustible ; « La puissance motrice est due, dans les machines à vapeur, non à une consommation réelle de calorique, mais à son transport d'un corps chaud à un corps froid (…) Il ne suffit pas, pour donner naissance à la puissance motrice de produire de la chaleur : il faut encore se procurer du froid, sans lui, la chaleur serait inutile. » ( Réflexions... 1824)
C'est cette circulation d'énergie thermique depuis la source chaude vers la source froide qui va être converti en travail.
Sa machine ''idéale'' comprend
- Un cylindre fermé ( parfaitement isolé), avec dedans : une ''substance agissante'' : un gaz.
- Un piston mobile ( sans frottement) son déplacement nous permet de récupérer un travail.
- Un corps chaud ( un foyer...),
- un corps froid ( un condenseur).
Le gaz va être chauffé par une source chaude et refroidi par une source froide. Les changements de température sont causés également par l'expansion et la compression du gaz.
De Launay, grâce à une petite animation en papiers de couleurs, énonce à la petite assemblée la litanie de la magie du ''cycle de Carnot'' : « Le gaz est compressé fortement, sa pression et sa température augmentent : la pression du gaz est alors supérieure à la pression atmosphérique, le piston veut revenir en arrière pour équilibrer, la température du gaz aura tendance à diminuer puisque le volume augmente ; mais si j'apporte une source chaude le gaz légèrement plus froid va récupérer de l'énergie, la température du gaz ne varie pas, sa pression diminue peu, le piston continue de reculer. A ce moment, je supprime la source chaude, le gaz a un gros volume, à haute pression, pour équilibrer la pression le piston continue de reculer mais n'ayant plus d'apport d'énergie de la source chaude, la température et la pression diminuent fortement. Nous arrivons au point où le gaz a un gros volume à faible température et à faible pression, et le piston repart dans l'autre sens pour équilibrer la pression avec la pression atmosphérique. A présent, j'ajoute la source froide, le gaz se comprime mais sa température ne change pas car il refroidit par la source froide, la pression augmente très peu, le piston continue de reculer. Arrive le moment où je coupe la source froide, le gaz a un petit volume à faible température et à faible pression ; à ce moment-là le gaz va être comprimé par le piston pour revenir au point de départ; c’est à dire à un petit volume à haute température. » Le ''bidouilleur'' de génie regarde chacun. C'est magique ! Le physicien nous prévient : cette machine idéale n'existe pas. Cette façon cyclique de convertir de la chaleur en travail mécanique, a ses limites et ses pertes d'énergie...
- Une machine thermique peut-être un moteur, ou un système à produire de la chaleur.
- Si une machine peut nous chauffer, pourrait-on inventer une machine à faire du froid ?
- A priori oui... Imaginons notre fluide qui conduit la chaleur... S'il est plus froid que l'intérieur de la machine, la chaleur va passer du chaud au froid, le fluide se réchauffe, et l'intérieur de la machine se refroidit... Le sens des transferts thermique n'est alors pas naturel, et il est possible que si l'on fournit de l'énergie au système.
Ce fluide pourrait être un gaz ; et nous savons qu'un gaz fortement comprimé, qui ensuite se détend a pour conséquence de le refroidir... Seulement comprimer très fortement ce gaz ( pour ensuite le détendre) , libère de la chaleur qu'il faut évacuer...
- Donc inversement ; si on confine dans un espace, cette évacuation de chaleur, on refroidirait l'extérieur... ? Ne serait-ce pas une piste pour nous faire une machine à faire du chaud. Resterait à voir, si ce serait économique... ?
De Launay, en est persuadé, la Thermodynamique est la science du futur : science de la chaleur, et science des grands systèmes en équilibre.
Nous aurions deux certitudes à effet négatif : l'augmentation de l'Entropie, et les limites de notre planète. A effet positif, nous bénéficions de la chaleur, de l'énergie du soleil ( infinie, à notre échelle) et un univers en expansion ( assez vaste pour y rejeter ce que la vie ''dissipe''.)
Notre planète est une machine thermique ; elle mériterait pour sa sauvegarde d'être pilotée par un gouvernement mondial, pour une gestion optimale des crises... De Launay, parle de dissiper de l'énergie avec efficacité ; et imagine un même vocabulaire pour les sciences dures et les sciences humaines...
A ce moment de ce parcours scientifique ; il me paraît essentiel de parler d'Albert Einstein ( 1879-1955)
C'est devant l'entrée du Grand hôtel Curhaus de Davos, que Lancelot avec Elaine, rencontrèrent le grand physicien et prix Nobel, Albert Einstein ; c'était à l'occasion des Cours universitaires de Davos, de 1928. Il se souvient en particulier de ces échanges entre Albert Einstein et Paul Tillich.
C'est ici : 1928 Davos - 2 - Albert Einstein et Paul Tillich - Les légendes du Graal (over-blog.net)
et 1928 Davos - 3 - Albert Einstein et Paul Tillich
Rappelons-nous : « Il n’y a plus rien à découvrir en physique aujourd’hui. » ( Lord Kelvin, 1900), éventuellement quelques précisions à faire... Sur la composition de l'éther, par exemple...
Les communications, les transports, l'énergie avec l'électricité … Tout était à portée.
Pourtant, tout ceci, ne concernait que le monde macroscopique, et à échelle humaine. La structure de la matière, demeurait inconnue.
Jusqu'à ce que Einstein révolutionne la physique... !
1943 – Drieu – Colette - La vie continue
Drieu la Rochelle a le génie de se rendre insupportable. Centré sur lui-même, il tient à vous convaincre qu'il tient à vous. Il se plaint des femmes et badine avec Geneviève. Très agressif, il cible continuellement les juifs; et ne dort plus depuis que « sa femme N°1 » est retenue à Drancy.
Anne-Laure l'interroge sur Colette Jéramec, qui vient d'être internée avec ses deux enfants ( avril-mai 1943). Devenue médecin pédiatre, elle travaille comme chercheur à l'Institut Pasteur avec le professeur Legroux, bactériologiste. Son troisième époux, père de ses deux garçons, est Paul Tcherniakovsky qui travaille à la faculté des sciences. Elle refuse de porter l'étoile jaune.
Drieu, ami d'Otto Abetz, est aussitôt prévenu. Abetz est absent, pour le remplacer Rudolf Schleier, très impliqué dans la déportation des juifs, que Drieu méprise... Cependant, il va tout faire, mobiliser chacun pour intervenir; et finalement la faire libérer, le 25 mai, la veille de son transfert vers Auschwitz.
Drieu est allé la voir au camp d'internement établi dans un grand ensemble de logements en construction, à Drancy, une banlieue ouvrière. Il décrit les barres d'immeubles, la cour fermée de barbelés, le parloir, la misérable apparence de Colette... Mais c'est lui que l'on doit plaindre: d'avoir été forcé à voir ça !
Il ne peut s'empêcher d'ajouter qu'il la trouve insupportable, « aux manières petites-bourgeoises, terriblement scientiste, et surtout, surtout pas artiste pour deux sous, sans humour. »
En décembre 1943, Eugène Wollman ( bactériologiste) et sa femme Elisabeth ( biologiste) sont tous deux transférés à Drancy, puis déportés à Auschwitz par le convoi 63, ils seront assassinés à leur arrivée.
Appuyé par Paul Langevin, en résidence surveillée à Troyes, Frédéric Joliot est élu à l'académie des sciences, en juin 1943. La question se pose pour certains : s'agit-il d'une compromission avec Vichy, ou de la victoire d'un camp opposé à Vichy ? Est-il vrai que Joliot est en négociation avec des industriels et envisage la réalisation d'une usine centrale produisant jour et nuit une puissance électrique de 300.000 kW avec consommation annuelle d'une tonne d'uranium ? A moins qu'il ne s'agisse que d'un projet pour les '' jours d'après'' ?
Joliot précise que son travail, en relation avec l'occupant « concerne principalement la technique du cyclotron et la radioactivité artificielle. » et n'a aucun rapport direct ou indirect avec la guerre ; refusant toute participation à l'effort de guerre allemand.
Irène Joliot-Curie part en Suisse, pour soigner sa tuberculose. Elle obtient avec l'aide de Gentner les autorisations de Vichy.
La comtesse de Sallembier rejoint Duhamel, pour intervenir auprès de Brinon, et obtenir la libération de Béatrice de Camondo et de son mari, le compositeur Léon Reinach, arrêté parce que trahi par son passeur alors qu'il tentait de rejoindre l'Espagne. Anne-Laure avait suivi la conversion de Béatrice au catholicisme, ne s'étant jamais sentie de confession juive... Ils feront partie du convoi 62, avec 1200 personnes conduites vers la mort à Auschwitz.
Il fallait s'en douter ! Anne-Laure partage à Lancelot le souci que lui a confié Geneviève T. Un officier allemand se montre très empressé auprès d'elle pour l'inviter, et la voir seule...
Les ''légionnaires '' de la Révolution Nationale sont devenus '' La Milice '' ( janvier 1943) et se mettent au service de la Waffen SS ; Laval en est le chef, avec Joseph Darnand pour adjoint.
Un professeur de philosophie au lycée Condorcet, Jean-Paul Sartre, publie un essai philosophique "L'Etre et le Néant", et Marcel Aymé, un roman ''Le Passe-Muraille", puis le conte "La Patte du chat" dans l'hebdomadaire "Je suis partout".
Jacques Bergier qui passe à Paris régulièrement sous une fausse identité ( Jacques Verne) , informe de l'arrestation du chimiste André Helbronner chez lequel il avait travaillé , le 7 juin 1943 à Lyon, sur dénonciation d'un milicien (français) dénommé Plouvier travaillant pour la gestapo de Klaus Barbie. Il mourra en mars 1944 au KZ Buchenwald.
Un ami, raconte avec entrain sa soirée en petit comité de la représentation d'une pièce de Sartre '' Les Mouches '' au Théâtre de la Cité : une pièce, bien-sûr à visée philosophique. Sartre nous disait qu'il voulait s'opposer à la religion du repentir qui avait cours, suite à ''la défaite'' , Jupiter est ''le roi des mouches''. Comme Oreste, nous ne devons pas nous demander si nous sommes libres, nous devons prendre conscience que nous le sommes, nos actes sont de notre responsabilité. Le cadre mythique de la pièce, nous indique l'absolu de la liberté. Oreste tue sa mère, la reine Clytemnestre et son amant ( assassin de son père) ; et se déclarant responsable de son crime, il se libère de son destin. Cet acte engage alors tout le peuple d'Argos, à qui, Oreste révèle, qu'il est libre. Cette pièce n'aura sans-doute aucun succès, dans notre contexte d'occupation ; pourtant... ! Le jeune Albert Camus était présent, il l'a félicité et sans-doute remercié pour l'article de Sartre sur L'Etranger.