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Un film: Excalibur

Publié le par Perceval

Excalibur : la chevauchée vers l’affrontement final

Film de john Boorman sorti en 1981, avec Nigel Terry.

Uter Pendragon reçoit de Merlin l’Enchanteur l’épée mythique Excalibur. A la mort d’Uter, l’épée reste figée dans une stèle de granit. Seul le jeune Arthur, fils illégitime d’Uter parvient à brandir l’épée Excalibur et devient par ce geste le roi d’Angleterre. Quelques années plus tard, il épouse Guenièvre et réunit les Chevaliers de la Table Ronde. Mais sa demi-soeur, la méchante Morgane, parvient à avoir un fils d’Arthur qui va le pousser à sa perte…

La scène suivante évoque la fin de la quête du Graal par Perceval, et la remise sur pied du roi Arthur, qui rassemble ce qui lui reste de troupe et de chevaliers afin d’aller combattre Mordred, son fils, lors de la bataille finale de Salesbières pour le trône d’Albion. Mise en musique par Carl Orff ( « O Fortuna » de Carmina Burana ) , la scène est là encore, magique !

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Qu'est devenu le roi Arthur ?

Publié le par Perceval

parzival-romance-middle-ages-wolfram-von-eschenbach-paperback-cover-artOn peut remarquer, que à l'image de Parzival de Wolfram von Eschenbach (1170 en Bavière - 1220), de très nombreux récits « arthuriens » du Moyen-âge se désintéressent rapidement de la figure d'Arthur.

En dehors de ceux qui racontent les circonstances de son accession au trône, et avant, sa conception magique, son enfance cachée, son avènement miraculeux ; ou de sa disparition, la trahison de Mordred, la bataille finale, sa mort ou son départ vers Avalon ; la plupart des romans arthuriens font de lui un personnage secondaire, ou plus exactement un « élément de décor ».

Ses victoires sur les saxons, sa conquête de la gaule … passent presque inaperçus – dans la matière de Bretagne à partir de XIIe s. En fait, Arthur fournit un contexte suffisamment vague et glorieux pour narrer les aventures d'autres personnages, ses « chevaliers ». La « table ronde », et son roi, Arthur, fournissent un point d'ancrage à ces récits, un cadre narratif, un « indice d'historicité ». Lancelot ou le chevalier à la charrette est le troisième roman de Chrétien de Tr

Typiquement, un roman arthurien postérieur à 1160 commence à la cour d'Arthur, la plupart du temps pendant une fête. Un défi est lancé, auquel un ou plusieurs chevaliers répondent, dans des circonstances qui varient énormément d'un récit à l'autre, avec cependant des épisodes récurrents. Le récit suit alors les étapes d'une Quête, c'est à dire d'une suite d'aventures et leurs progression vers le but fixé par le défi à travers un certain nombre d'obstacles et de rencontres. La cour d'Arthur, est le lieu d'où se lance et se relance l'action, puis le lieu où elle est racontée et reconnue... Yvain-dragon

La littérature arthurienne a souvent été vue comme l'expression la plus idéale et la plus parfaite de l'éthique chevaleresque. L'aventure - de même pour la Quête - est propre aux chevaliers, elle n'a rien en commun avec le monde du vilain, qui n'en a jamais entendu parler, et se contente du sort que le ciel lui a imposé. le chevalier, au cours de tournois ou de batailles, peut exhiber  sa valeur, son courage, son honneur, sa capacité à agir: en un mot: la "prouesse" révèle  combien le chevalier est preux, et "prud'homme".Perceval ou le conte du graal Enluminure_3 
Une autre valeur propre au monde arthurien est l'égalité entre les chevaliers, la Table Ronde, en est le symbole le plus éloquent.
Toutefois, malgré cette égalité proclamée, chaque roman arthurien met en avant un chevalier ( parfois deux) et en fait le modèle du comportement chevaleresque: Lancelot dans le Chevalier de la Charette, Yvain Le chevalier au lion, Perceval et Gauvain dans le Conte du Graal. A la différence des des héros de l'épopée ( La chanson de Roland ) dont les exploits sont collectifs, le héros arthurien est la plupart du temps solitaire. C'est l'émergence du destin individuel ...
Sources: Arthur de Alban Gautier ( Ellipses)

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Thomas Malory

Publié le par Perceval

 

Pour le monde anglo-saxon, la saga arthurienne est ce qu'elle est grâce à Thomas Malory (1405-1471).

C'est encore aujourd'hui la référence incontournable...

Alfred Tennyson (1809-1892), T.H. White (1906-1964) qui reprend la légende pour en faire un texte plaisant, chevaleresque, iconoclaste et foisonnant qui inspirera Walt Disney, John Boorman ( le film Excalibur ), se sont tous inspirés prioritairement de sa version de la matière de Bretagne. Sa grande fresque arthurienne est achevée en 1470 : la neuvième année du règne d'Edouard IV( 1442-1483) ( en France Louis XI (1423-1483)).

 

 

Morte d'Arthur - Illustrator Aubrey Beardsley Sir Lancelot et la sorcière Hellawes - Aubrey Beardsley

On ne connait pas bien la biographie de Thomas Malory. Il a été soldat ( chevalier) et a combattu avec Richard Beauchamp, comte de Warwick, à Calais. Il aurait été 'lancastrien' pendant la Guerre des Deux-Roses... Il se pourrait aussi qu'il ait été prêtre... Il aurait été anobli en 1142 et élu au Parlement. Dans les années 1450, il aurait été accusé de viol, meurtre, vol et braconnage mais il est possible que ces faits ne soient que des calomnies. Evadé à plusieurs reprises... Il aurait écrit son roman pendant qu’il était emprisonné à Londres ( 1470), mais son œuvre n’a pu être publiée qu’après sa mort, en 1485, sous le titre :  The Morte D'Arthur .

 

 

Arthur-and-the-strange-mantle - 

Aubrey Beardsley
The Lady of the Lake Telleth Arthur of the Sword Excalibur - Aubrey Beardsley

"Le Morte Darthur" a été écrit en anglais et se compose de huit contes en 507 chapitres de 21 livres. Son texte comprend beaucoup de mots français, dont le titre... L'auteur s'est inspire des récits réunis dans « La Vulgate » datant des années 1230-1240... A la différence de ses prédécesseurs, au lieu de développer, Malory résume, élague... Sa version est cohérente et très aboutie.

 Voir ici: LA LÉGENDE DU ROI ARTHUR SELON THOMAS MALORY, MANUSCRIT DE 1469

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"Le Roi Arthur et des Chevaliers de la Table Ronde " illustré par G Tenggren -2/2-

Publié le par Perceval

27Gustaf Tenggren King Arthur 25 Gustaf Tenggren King Arthur 24 Gustaf Tenggren King Arthur 23 Gustaf Tenggren King Arthur 22 Gustaf Tenggren King Arthur 21 Gustaf Tenggren King Arthur 20 Gustaf Tenggren King Arthur 19 Gustaf Tenggren King Arthur 18 Gustaf Tenggren King Arthur 16 Gustaf Tenggren King Arthur 15 Gustaf Tenggren King Arthur 14 Gustaf Tenggren King Arthur 11 Gustaf Tenggren King Arthur 10 Gustaf Tenggren King Arthur 9 Gustaf Tenggren King Arthur 8 Gustaf Tenggren King Arthur 7 Gustaf Tenggren King Arthur 6 Gustaf Tenggren

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"Le Roi Arthur et des Chevaliers de la Table Ronde " illustré par G Tenggren -1/2-

Publié le par Perceval

Gustaf tenggren King Arthur and the Knights of the round Table - Couv Gustaf tenggren King Arthur and the Knights of the round Table - 1 Gustaf tenggren King Arthur and the Knights of the round Table - 2 Gustaf tenggren King Arthur and the Knights of the round Table - 3 Gustaf tenggren King Arthur - 5

Gustaf tenggren King Arthur and the Knights of the round Table - 5

 

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Gustaf Adolf Tenggren ( 1896 - 1970) était un illustrateur américano-suédois. Influencé par le style d'Arthur Rackham et dès 1917, il publie ses premières illustrations de contes de fées.

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En 1920, il rejoint Cleveland aux États-Unis et en 1936, Tenggren déménage en Californie et est engagé par Walt Disney comme directeur artistique. Il quitte le studio en 1939, et poursuit sa carrière d'illustrateur avec 28 ouvrages publiés entre 1942 et 1962 par Golden Books, dont "Le Roi Arthur et des Chevaliers de la Table Ronde " avec un texte écrit par Emma Gelders Sterne.

Il n'est jamais revenu en Suède, Gustaf Tenggren mort en 1970 à Dogfish Head dans Southport, Maine.

 

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Les fées, ça n'existe plus ! -3/3-

Publié le par Perceval

Aux XIIe et XIIIe siècles, alors que s'écrit la légende arthurienne ; le merveilleux païen fait irruption dans la la culture savante sans grande opposition de l’Église, car elle ne représente plus un véritable danger. f3be4dd10048

Cependant, l'opposition entre l'interprétation des chevaliers et une interprétation des clercs, s'exprime clairement.

Les clercs veulent intégrer au surnaturel chrétien une mythologie assez irréductiblement étrangère, et les chevaliers et troubadours exploitent cette mythologie parce qu'elle est précisément étrangère à l’Église… L'Eglise va jouer la rationalisation, et assimiler les fées aux sorcières. Ce phénomène de rationalisation et de diabolisation va dénaturer – radicalement - la fonction des fées. La nature fantastique de la fée du lai de Lanval n'est jamais mise en doute par Marie de France. Mais dans les romans en prose à partir du du XIIIe s., les fées vont devenir des mortelles douées de pouvoirs surnaturels.

lancelot-et-vivianeVers 1220, le Lancelot en prose donne une définition des fées dans la littérature profane, à propos de la Dame du Lac qui enlève l'enfant Lancelot à sa mère pour l’élever dans son royaume aquatique :

« Le conte dit que la demoiselle qui emporta Lancelot dans le lac était une fée. En ce temps-là, on appelait fées toutes celles qui se connaissaient en enchantements et en sorts; et il y en avait beaucoup à cette époque, en Grande Bretagne plus qu'en tout autre pays. Elles savaient, dit le Conte des Histoires bretonne, la force des paroles, des pierres et des herbes, par quoi elles se maintenaient en jeunesse, en beauté et en richesse, autant qu'elles le désiraient. Et tout cela fut institué à l'époque de Merlin, le prophète des Anglais, qui savait toute la science qui des diables peut descendre. C'est pourquoi il était tant redouté des Bretons et tant honoré que tous l'appelaient leur saint prophète, et les petites gens leur Dieu. Cette demoiselle, dont le conte parle, tenait de Merlin tout ce qu'elle savait de science occulte; et elle l'apprit par une très subtile ruse. »

Si la dame du lac, est réduite à l'état de magicienne, elle n'habite plus qu'un fantôme de lac :

« La dame qui l'élevait ne résidait jamais ailleurs que dans des forêts grandes et profondes ; et le lac, dans lequel elle avait sauté avec lui, lorsqu'elle l'avait emporté, n'était que d'enchantement. Et cette habitation était si bien cachée que personne ne pouvait la trouver ; car l'apparence du lac la protégeait de telle manière qu'on ne pouvait pas la voir. »

Chevalier dame sans merciLes fées ont acquis la science des clercs et se posent en rivales de ceux-ci, possédant une autre forme de maîtrise du surnaturel. Cette opposition en recouvre deux autres : clercs/laïcs et masculin/féminin.

« Ainsi les thèmes féeriques peuvent être compris comme une manière, pour la littérature aristocratique, de conférer dans l'imaginaire aux chevaliers des pouvoirs surnaturels indépendants de ceux qui, dans le fonctionnement réel de la société, en constituent le pôle central et dominant : le sacré défini par les théologiens et dont la mise en œuvre est contrôlée par l’Église. » cwaxkbfn

Deux textes, deux discours parallèles qui exaltent l'idéal chevaleresque, sont révélateurs à cet égard ; tous deux, étonnamment, sont placés dans la bouche d'une fée, prêtés à la dame du lac et à Mélusine.

La Dame du lac tient le premier jour au jeune Lancelot avant de la conduire à la cour d'Arthur où il recevra l'adoubement. Ce discours est très orthodoxe : il définit les devoirs du chevalier, qui doit défendre les faibles et les opprimés et servir fidèlement la sainte Église.

Le discours de Mélusine à ses deux fils Urien et Guy, est plus pragmatique, et concerne le bon gouvernement... Il faut être un bon seigneur, attentif aux besoins de son peuple ….

Le plus remarquable est que ces discours soient placés dans la bouche et d'une femme et d'une fée. C'est que le savoir des fées rivalise une fois de plus avec celui des clercs. Les forces féeriques sont mises au service de la chevalerie pour lui donner un caractère héroïque et sacré. ]Briton Riviere (British, 1840-1920), Una and the Lion, from Spenser's Faerie Queene (1880) Briton Riviere (British, 1840-1920), Una and the Lion, from Spenser's Faerie Queene (1880)

Chrétien de Troyes, joue avec subtilité sur les incertitudes : Laudine est-elle une fée ou non ? Les pucelles ponctuant le parcours de Lancelot en sont elles ?

Espace de l’interrogation qui permet plusieurs lectures, mais qui montre aussi que la fée, en dépit de son originelle ambivalence, peut avoir une place véritable dans l’imaginaire médiéval et chrétien. Morgane a perduré sous le nom de fée Margot et l’on trouve un peu partout en France des « Caves à Margot », des « chambres de la fée Margot », des « fuseaux de Margot », des « Roche Margot ».

]St. Margaret of Antioch (France, 1490-1500) St. Margaret of Antioch (France, 1490-1500)[

Si la christianisation a diabolisé Morgane, tout comme elle l’a fait de Gargantua et de Mélusine. Elle l’a christianisée en sainte Marguerite, représentée « issourt » du dragon, ou avec le dragon à ses pieds, le dragon-vouivre symbolisant alors les énergies telluriques.

Après les déesses, les fées, on observe le triomphe d'une autre femme : Marie (Notre-Dame, la Vierge Marie) au début du XII° siècle, qui change terriblement le regard porté sur les fées et les dames.

Notre-Dame donne son nom aux 3/4 des grands édifices gothiques qui s’érigent dans un monde nouveau qui explose. L’évangélisation souvent brutale des populations n’avait jamais aboli l’héritage des fées maîtresses de la pierre, des eaux et du vent.

On conserve des témoignages de la fin du XVII° siècle selon lesquels les druidesses de l’île de Sein seront alors et seulement, converties au christianisme.  

Sources : Un livre important sur le sujet des fées, si on souhaite comprendre la place qu'elles avaient au Moyen-âge : - Laurence Harf-Lancner, Le Monde des fées dans l’Occident médiéval, Paris, Hachette (« Littératures »), 2003

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Les fées, ça n'existe pas ! -2/3-

Publié le par Perceval

Qui ne s'imagine pas, posséder la lumière qui fera reculer les ténèbres... ?
En ce Moyen-âge, la religion catholique voulait posséder la raison, et faire reculer les ténèbres païennes.
Vers 1023, Burchard, évêque de la ville de Worms, rédige un pénitentiel – à l'usage des prêtres – le Decretum dans lequel il énumère les principaux délits commis dans son diocèse et les pénitences adéquates.
 
Jaloux battant sa femmeRappelons que, Grégoire VII ( pape en 1073, à 1085) continue l’œuvre de réforme et donne son nom au mouvement. Dans ce contexte, le statut des femmes change et se durcit. On théorise leur place selon un ordre précis : la virginité, le mariage, le veuvage. Seules ces catégories sont reconnues dans une hiérarchie définie : vierge, sainte, moniale, veuve, femme mariée puis, tout en bas, la femme célibataire qui équivaut au diable en chair et en os. tenue d'une femmeLes réformateurs sont particulièrement misogyne : Hildebrand (clunisien), Pierre Damien, Burchard de Worms (dont le livre 19 de son Decretum n’est pas flatteur et développe les idées de sorcellerie inhérente à la femme).
Pour l'évêque de Worms, l’enfer c’est les femmes. Elles sont impies par nature et peuvent même aller jusqu’à remettre en cause la trinité, se tiennent mal à l’église (bavardent, marchent sur les sépultures…).. Il faut ranger les femmes dans les parties froides de l’église pour calmer leurs ardeurs…
 
Mais, revenons aux croyances en ces fées.... :
bruxa001Quelques exemples de l'examen de conscience prôné par l'évêque de Worms:
 
«  As-tu cru à ce que certains ont l’habitude de croire, que celles que le peuple appelle les Parques existeraient réellement et auraient le pouvoir, lorsqu’un homme naît, de le marquer comme elles veulent, de sorte qu’à tout moment cet homme pourrait se transformer en loup, qu’en langue teutonique on appelle loup-garou, ou en n’importe qu’elle autre figure? Si tu as cru que cela s’est fait un jour et que c’est possible que l’image divine puisse être transformée en une autre forme ou espèce par quelqu’un, excepté par Dieu tout-puissant, tu feras pénitence dix jours au pain et à l’eau.
 
As-tu cru à ce que certains ont l’habitude de croire, qu’il existe des femmes habitant les champs, appelées sylphes, ayant, disent-ils, un corps matériel, et lorsqu’elles veulent elles se montrent à leurs amants et prennent plaisir avec eux, et de même lorsqu’elles veulent elles se cachent et disparaissent? Si oui, tu feras pénitence dix jours au pain et à l’eau.
 
As-tu fait ce que certaines femmes ont l’habitude de faire à certaines époques de l’année: quand tu prépares la table dans ta maison, tu déposes la nourriture et la boisson ensemble avec trois couteaux sur la table, pour que si viennent les trois sœurs, que l’héritage et la stupidité antique appellent les Parques, elles puissent se restaurer là; ainsi tu as pris à la piété divine son pouvoir et son nom pour les transmettre au diable, croyant que celles que tu appelles sœurs peuvent t’être utiles maintenant ou dans le futur? Si oui, tu feras pénitence un an au pain et à l’eau. » Burchard évêque de Worms

Walter Jenks Morgan (British, 1847-1924), Where Rural Fays and Fairies Dwell

Les Parques, déesses de la mythologie romaine, font bon ménage avec une autre mythologie plus locale …John Melhuish Strudwick ~ Acrasia
Ce texte évoque parfois des scénarios que nous connaissons dans nos contes de fées … Les « femmes de la forêt » qui recherchent l'amour des mortels, nourrissent un type de conte universel, qui s'épanouira dans la littérature du Moyen-âge.
 
Les fées apparaissent en littérature, avec la naissance de la littérature. C'est au XIIe s. que naît le roman, qui désigne, au sens propre, tout texte écrit en langue romane ( par opposition au latin).
La « matière » de cette littérature est triple : bretonne, romaine et française... En 1170, Chrétien de Troyes écrit le premier de ces romans, Erec et Enide, à partir d'un conte d'aventures. Marie de France – dans le prologue de ses Lais – écrit son projet de sauver les contes des anciens bretons, pour les sauver de l'oubli.
 
Midsummer Eve Edward Robert HughesDans le discours d’autorité de l’Église, les fées sont intégrées au surnaturel chrétien par le biais de la satanisation... ou de la sanctification … !

Les textes profanes, défendent les valeurs de l'aristocratie chevaleresque et interprètent la culture populaire selon une autre idéologie, celle de la société féodale, et les fées y bénéficient d'un traitement beaucoup plus favorable. Il peut être glorieux pour un lignage aristocratique de se doter d'une ancêtre surnaturelle...

Les seigneurs poitevins de Lusignan se proclameront les descendants de la fée Mélusine.

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Les fées, ça n'existe pas ! -1/3-

Publié le par Perceval

Comment « croire » aux fées dans un monde dont le système de référence, rationaliste, ne leur permet pas d'exister ?
] Le chevalier Lanval[
 
« Croire », c'est s’écarter de critères qui relèvent de la raison, des sens : voir, toucher, raisonner, expérimenter... tout ce qui appartient à des activités humaines dans un système qui ne tient compte que de ce qui est matériel, humain et dans le cadre de ses connaissances actuelles ...etc.
Dans ce système, beaucoup de choses sont à écarter, en particulier la transcendance, la relation au sacré … et sans doute, la compréhension des mythes, et des contes traditionnels...
 
Au Moyen-âge, les enfants ne sont pas les seuls à « croire » aux fées. « Croire », c'est alors : prendre au sérieux, reconnaître l'influence, la prégnance, d'un ensemble de faits, d'êtres, sur lesquels il n'est pas aisé de mettre des mots pour en partager l'expérience.
La convention partagée, est d'en parler au travers d'histoires ( contes, légendes, mythes …).
Dans un univers mental, aujourd'hui entièrement étranger au nôtre, la question posée par ces figures « fantastiques et ambiguës », est moins celle de leur « existence » que celle de leur signification....
Si elles signifient quelque chose, n'est-il pas absurde de nier leur « existence »... ?
 
Il est d'ailleurs intéressant de constater la place qu'attribue la religion chrétienne, à ces figures païennes … !
Elle ne leur dénie pas une réalité surnaturelle, mais elle modifie leur interprétation. A côté d'un surnaturel orthodoxe ( les miracles, les pièges du démon, …), il existe un surnaturel problématique dont font partie les fées ….
 
Exemple :

A la fin du XIIe s., Marie de France dit recueillir dans ses lais des contes bretons qu'elle fait remonter à un passé mythique.
 
Dans le lai d'Yonec, une jeune femme a été mariée contre son gré à un vieillard jaloux qui la tient en prison. Un jour de printemps, elle évoque d'antiques croyances selon lesquelles, autrefois, «  les chevaliers trouvaient les femmes de leurs rêves, nobles et belles, et les dames trouvaient des amants, preux et vaillants, sans encourir le moindre blâme, car elles étaient les seules à les voir ». Elle supplie Dieu de lui envoyer un de ces amants merveilleux, et Dieu, compatissant, exauce son vœu. Un grand oiseau vole jusqu'à sa fenêtre et, dans sa chambre, se transforme en un beau chevalier qui sollicite son amour. La dame, d'abord terrorisée, consent à l'aimer, s'il est bon chrétien. Aussitôt dit, aussitôt fait : le chevalier-oiseau se métamorphose pour revêtir l’apparence de la dame et recevoir la communion à sa place : celle-ci, rassurée se donne à lui. On reconnaît ici une version du conte de l'Oiseau bleu. Mais l'originalité du récit de Marie de France réside dans cette réaction de la dame, qui n'est nullement rebutée par la nature animale de son soupirant mais craint par-dessus tout de tomber dans un piège du démon : il suffit au chevalier-oiseau de prouver qu'il est bon chrétien pour vaincre sa réticence.
 
La fée Viviane et Merlin par G Doré
Au Moyen-âge, le surnaturel apparaît :
- Avec Dieu, et son intervention : le miracle...
- Avec la magie, le surnaturel satanique et la sorcellerie...
- Avec ce qui regroupe toutes les « merveilles » : le merveilleux ( de miror = s'étonner ) et ses êtres fantastiques ( fées, lutins, ogres, monstres…) . Cela suscite d'ailleurs une certaine incompréhension, et donc une inquiétude …
L'interrogation porte sur l'interprétation de la merveille …. L'interrogation ne porte pas sur la réalité de la merveille, que nul ne met en doute, mais sur son sens : à quel registre de la transcendance relier le phénomène ?
Où situer les fées qui n’appartiennent ni à Dieu ni au diable ?
 
ps: L'Oiseau bleu est un conte de fées français en prose de Marie-Catherine d'Aulnoy, publié en 1697 et racontant l'histoire d'amour de la princesse Florine et du roi Charmant, transformé en oiseau bleu. Ce conte est contemporain des contes de Perrault.
 
Sources : Laurence Harf-Lancner, Le Monde des fées dans l’Occident médiéval, Paris, Hachette (« Littératures »), 2003

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Le chevalier Lanval, aimé d'une fée

Publié le par Perceval

Depuis les romans médiévaux jusqu'au récent naufrage du Costa Concordia , les hommes sont censés risquer leur vie pour sauver les femmes en détresse. Les hommes devraient également fournir de l'argent et des biens pour les femmes …Launfal-Tryamour-[Kinuko-Y.-Craft]

Dans ce lai (court poème narratif) : “ Lanval ”, Marie de France raconte l'histoire d'une femme, d'une héroïne, qui sauve un chevalier de l'isolement social et de la persécution injuste . Cette femme, ose exprimer un désir érotique, elle est également riche, et fournit au chevalier ce qui est nécessaire pour tenir son rang. Une autre femme, tente de séduire le même homme, et devant son refus, se venge.

A moins que l'on préfère annoncer ce lai ainsi: c'est l'histoire d'un chevalier d'Arthur, qui rencontre une fée d'une incomparable beauté et en tombe éperdument amoureux. Celle-ci exige, comme toutes les fées amantes du folklore, le respect d'un interdit. …

The Fairytales of George MacDonald

Sans doute, il est préférable, que vous vous fassiez votre propre idée. Je ne peux que vous engager à lire ce court récit, ou l'entendre raconter …

Si vous ne l'avez pas encore fait, ou ne le ferez pas … Bon, sachez que:

Le roi Arthur distribue à ses chevaliers des terres, de l’argent et des femmes. Mais il oublie Lanval. … Il n’est donc aimé ni du roi, ni d’une femme et par conséquent il est aussi 'oublié' par ses anciens compagnons, les chevaliers de la Table Ronde. Le chevalier désespéré quitte la ville. Au bord de la rivière, il se livre tout seul à sa mélancolie , et c'est le passage de la réalité et la merveille...

launfal et Guenièvre

Guenièvre et Lanval

Deux demoiselles d’une grande beauté, le conduisent auprès de leur dame, couchée dans une tente, et la plus gracieuse créature que le chevalier n’ait jamais vu. La mystérieuse jeune femme lui offre son coeur et ses richesses en échange d’une promesse : Lanval ne doit jamais dévoiler à quiconque qui est la gente dame qui a ravi son coeur, sous peine de la perdre à jamais.

De retour au château, le noble homme reçoit les avances de la Reine, mais celui-ci les rejette, n’ayant en tête que l’amour que lui porte sa tendre amie. Furieuse et déçue, la souveraine sous-entend que le chevalier préfère la compagnie des beaux jeunes gens, mais face à cette accusation Lanval s’emporte, avouant qu’il aime la plus belle femme du monde, modèle de courtoisie et de bonté. Lanval regrette aussitôt ses paroles, car par ces mots il vient de briser le serment fait à la demoiselle de la forêt. De plus, la Reine, se sentant humiliée par ces paroles, demande justice au Roi, qui ordonne à Lanval de prouver ses dires sous peine d’être brûlé ou pendu …

 

circlet (by N.C. Wyeth)


Lancelot, et Chrétien de Troyes sont bien plus connus, que Lanval et Marie de France. Les deux auteurs vivent à la même époque, mais leur vision semble s'opposer.

Marie de France, présente au travers de ses histoires, des versions plutôt critiques et opposées aux aventures traditionnelment racontées sur la cour du Roi Arthur. Là, les femmes apparaissent comme des biens, que le roi s'autorisent à donner aux meilleurs de ses chevaliers... Là des chevaliers sont “oubliés” alors que leur richesse s'épuise... Là, c'est une parodie de justice...Lady Love (Minne) shoots an arrow on the Lover. Detail of a painting found on the inside a boxlid, Germany, c.1320.

Marie de France, confronte les défauts du monde arthurien ( et celui dans lequel elle vit) au fonctionnement idéal de l'Autre Monde féérique.

Dans le Lai de Marie, Merveilles et amour dominent, comme le pouvoir des femmes. Guenièvre ne craint pas l'adultère, et l'organise; puis quand Lanval rejette ses avances, elle se venge, en toute malhonnetété. Elle parvient à manipuler Arthur, et ses codes juridiques.

Cette fois-ci, c'est une femme ( aussi fée, soit-elle ) qui arrive sur son palefroi blanc, alors que le jugement semble défavorable, presque comme un champion chevaleresque dans un combat.

Lanval disparaît dans un monde intemporel, celui du désir assouvi et de la richesse illimitée, de la plus ancienne tradition celtique...  

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Les Fées

Publié le par Perceval

BnF - La légende du roi Arthur Les nombreuses demoiselles qui surgissent près des fontaines ou au détour des chemins sont une version courtoise des anciennes fées du folklore celtique.

BnF - La légende du roi Arthur 

Les nombreuses demoiselles qui surgissent près des fontaines 
ou au détour des chemins sont une version courtoise 
des anciennes fées du folklore celtique.
" À cette époque, on appelait fées les femmes qui s'y connaissaient en charmes et en enchantement ; et en ce temps-là, il y en avait beaucoup plus en Grande-Bretagne que dans les autres pays.
Le livre des histoires dit qu'elles connaissaient la valeur efficace des paroles, et les propriétés des pierres et des herbes, grâce à quoi elles conservaient jeunesse et beauté et disposaient d'autant de richesses qu'elles le décidaient. Et cela commença au temps de Merlin, le prophète des Bretons, qui possédaient toute la science qui peut venir des diables, et une partie de celle qui vient de Dieu.
De ce fait, il était grandement redouté des Bretons, et si honoré que tous l'appelaient le saint prophète. Cette demoiselle dont parle le conte devait toute sa science en matière de magie à Merlin, et elle l'avait acquise par ruse. "
Lancelot du Lac, roman du XIIIe siècle

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Ces femmes-fées aux pouvoirs étranges, les chevaliers en quête d'aventures les rencontrent dans les forêts obscures et profondes, mais aussi au cour des châteaux qui se dressent sur leurs routes. Bénéfiques ou malicieuses, elles dissimulent souvent leur nature sous les traits d'une vierge en détresse afin d'éprouver la bravoure et la vertu des chevaliers.

Les fées dans la légende arthurienne, apparaissent nommément avec les demi-soeurs ( ou les soeurs ) d'Arthur... Leur nombre varie, on trouve Morgane, la plus connue, mais aussi Anna, Elaine et Morcades. Parfois l'une d'elle commet l'inceste avec Arthur et donne naissance à Mordred, mais l'identité de la mère de Mordred varie d'une version à l'autre : c'est Anna chez Geoffroy, et son père est le roi Loth ( donc pas d'inceste..), Morcades dans la Vulgate, et chez Malory ; et Morgane dans de nombreuses réécritures modernes.... Brickdale, Eleanor Fortescue Enid, Guinevere, et Viviane

Ces sœurs sont des fées : elles appartiennent au monde du merveilleux, et non à celui de la cour. Morgane, la fée est à rapprocher de la Morrigan ( la reine noire )...

Le nom de beaucoup de fées arthuriennes finit par la syllabe – ane.. ( anas : canard …) .. A rapprocher du culte des déesses « oiselles » connu en occident, ainsi l'Ana celtique ( Sainte-Anne )...

Cette fée est donc démultipliée en plusieurs personnages, elle est une fée-oiseau, tantôt grue sous le nom d'Ygerne, tantôt canne ( Morgane, Viviane, ), tantôt corbeau ( Morrigan ), tantôt cygne … Pavel Tatarnikov Morgane, Fées et Lancelot (1)

La rencontre avec les fées, dans la légende arthurienne, se réalise dans un antagonisme entre l’ancienne tradition matriarcale païenne, et la nouvelle tradition patriarcale chrétienne. Le pays des fées est fondamentalement d’essence matriarcale.

Ainsi, en témoigne la Dames du Lac, qui donne l’Épée au roi Arthur. Le plus souvent non mariées, elles séduisent et maintiennent leur souveraineté sur les mortels valeureux, qu'elles choisissent.

Les fées deviennent, avec la christianisation, des sorcières, des guérisseuses...

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