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La foi de Gaston Berger

Publié le par Régis Vétillard

Le chrétien Gaston Berger reconnaît : «  (…) j'aborde la phénoménologie d’Husserl, en chercheur, j’allais dire en usager » et ajoute qu'il avait bien aperçu dans la phénoménologie « la clé des demeures secrètes de l’âme »

La réduction phénoménologique, nous dit-il est « à comprendre comme ce convertisseur de l’expérience qui nous donne d’accéder à une autre dimension du réel où la mystique ne s’oppose plus à la philosophie comme l’irrationnel au rationnel »

Hommage à Gaston Berger - colloque 1962

 

Il s'était lié avec le R.P. Marie-Eugène des Carmes et s’intéressait aux grands maîtres du Carmel, sainte Thérèse d'Avila et saint Jean de la Croix.

Gaston Berger se veut lucide :

« La réflexion philosophique rationnelle, en affirmant la réalité de Dieu hors du monde, ne nous met pas en sa présence. Dieu est certain, mais demeure caché. Nous ne savons ni où il est, ni comment l'atteindre, et nous-mêmes, qui sommes assurés d'exister, ne savons pas encore ce que nous sommes. Venus au monde sans raison, ou pour une raison qui nous échappe, promis à une destinée sur laquelle rien ne nous éclaire, ne nous saisissant que par la réflexion, que pour nous projeter devant nos propres yeux en un reflet qui nous trahit, pris entre un monde auquel nous ne pouvons plus nous confier et un Absolu que nous n'atteignons pas, nous sommes plongés, à notre manière de philosophes, dans la nuit obscure dont parlent les mystiques ».

« Nous sommes embarqués pour un voyage qui doit nous conduire là où nous sommes déjà arrivés sans le savoir ». Immanence, puisque le Dieu caché est déjà là : transcendance pourtant, s'il le faut découvrir au-delà de ce que nous nommons la Nature.

 

En réponse, à certaines tendances pessimistes, quant à l'avenir de l'humain, comme cette citation de ce livre de Claude Lévi-Strauss, '' Tristes Tropiques '' paru en 1955 et qui obtint un grand succès :

« La civilisation, prise dans son ensemble, peut être décrite comme un mécanisme prodigieusement complexe, où nous serions tentés de voir la chance qu'a notre univers de survivre, si sa fonction n'était de fabriquer ce que les physiciens appellent de l'entropie, c'est-à-dire de l'inertie. »

Gaston Berger répond, dans sa dernière conférence sur l'idée de l'avenir, en déclarant :

« Loin de vieillir, l'humanité devient progressivement de plus en plus jeune. Qu'est-ce en effet que vieillir ? C'est d'abord avoir chaque jour un peu moins de possibilités. Chacun de nos actes, parce qu'il est un engagement, est aussi une limitation. Tout choix détruit ce que nous aurions pu être en choisissant autrement. Mais notre monde est, au contraire, plus riche chaque jour de possibilités nouvelles. Il est aussi de plus en plus capable de restituer ce que l'on croyait perdu.

Etre vieux, c'est avoir choisi : l'humanité moderne est toujours à la veille de choisir.

Vieillir, c'est aussi se durcir, se scléroser. Or, le Monde moderne accroît sans cesse sa souplesse, sa disponibilité.

Vieillir, c'est se protéger, avoir construit peu à peu son abri, maison ou coquille. Or, il faut avoir le courage de le reconnaître : notre monde est de plus en plus précaire. Tout y est sans cesse remis en question.

Vieillir, c'est aussi s'isoler du monde, diminuer ses échanges, ralentir son activité. Ici, l'évidence du rajeunissement est encore plus manifeste. Nos informations ne cessent de croître, nos échanges de se précipiter, nos contacts de se multiplier... »

Idéaliste : Gaston Berger ? Il répondait :

« Puisque vous reconnaissez que j'ai les pieds sur terre, rien ne m'empêchera d'avoir la tête dans le ciel ! »

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