L'amour courtois, le mots et l'érotique médiévale – 1/ -
Ici, on va parler des mots de l'amour, de l'amour courtois ( amor cortes) . Ce mot est un mot occitan et Amor est un mot féminin.
Les troubadours en chantant cet amour courtois, ont contribué largement au raffinement d'une société féodale, avant tout misogyne ...
Raimon de Miraval (1165-1229) a résumé la profession de foi des troubadours :
« D'Amor es tot mos cossiriers
Perq'ieu no cossir mas d'Amor.
De l'Amour proviennent tous mes soucis, Car je ne me soucie que de l'Amour. »
Raimon de Miraval, avait répudié sa femme , Gaudairenca, parce qu'elle composait aussi, et que c'était trop de deux poètes à la maison... Raimon de Miraval a chanté huit dames avec passion : à chacune il s'offre tout entier, lui et son château, en gage d'amitié et d'amour... Mais, il n'en obtient pas souvent la reconnaissance espérée : "totas l'enganeren, (toutes le trompèrent" !)...
La "Mais d'Amic, ( Plus qu'Amie) " : est la plus exigeante, elle lui impose un service amoureux de trois ans au terme desquels Raimon obtient tout ce qu'il veut. Cette dame, belle, renommée et courtisée par tous, c'est Na Loba, Dame Louve ( nous en reparlerons...)
Bernart de Ventadorn ( 1125-1200) écrit :
« Per la bocha'm feretz al cor
D'un doutz baizar de fin'amor coral. »
Frappez moi au cœur en me donnant sur la bouche un doux baiser d'amour parfait venu du cœur.
Bernart de Ventadour ( enfant illégitime de?) , compose ses premiers chants pour l’épouse du fils d’Elbes II - la Vicomtesse de Ventadour, Marguerite de Turenne - qu’il parvient à connaître charnellement avant d’être chassé de Ventadour. Il suit alors la Cour d’Aliénor d’Aquitaine – dont il devient amoureux - jusqu’en Angleterre, puis passe au service de Raymond V de Toulouse avant de finir sa vie à l’abbaye de Dalon.
Anecdote :
Ce fin'amor, pouvait aller jusqu'à se faire prendre par l'amor de lonh, cet amour lointain, représenté par Jaufré Rudel (v. 1113 à Blaye - v. 1170), prince de Blaye, qui s'éprit de la comtesse de Tripoli sans la voir... Au cours de la deuxième croisade, il serait mort dans ses bras :
« Il fit à son sujet de nombreux "vers", avec de bonnes mélodies, [mais] de pauvres mots. Et par volonté de la voir, il se croisa et se mit en mer. Il tomba malade dans la nef et fut conduit à Tripoli, en une auberge, comme mort. On le fit savoir à la comtesse ; et elle vint à lui, jusqu'à son lit, et le prit entre ses bras. Il sut que c'était la comtesse et sur-le-champ il recouvra l'ouïe et l'odorat ; et il loua Dieu de lui avoir maintenu la vie jusqu'à ce qu'il l'eût vue. Et c'est ainsi qu'il mourut entre ses bras. Elle le fit ensevelir dans la maison du Temple, à grand honneur. Puis elle se fit nonne ce jour même, pour la douleur qu'elle eut de sa mort. »
Sources : En particulier le dictionnaire de l'érotique occitane, des troubadours à nos jours de Didier Alibeu.